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RDC : à Saké, le difficile retour des déplacés

More than 71,000 people who have fled conflict have been living in the Lushagala site in the eastern DR Congo.  © UNOCHA/Wassy Kambale
© UNOCHA/Wassy Kambale


Alors que les combats se poursuivent dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), les déplacés de Saké de retour chez eux ont tout perdu. Ils tentent de reconstruire leur vie, entre ruines, aide humanitaire insuffisante et système de santé à bout de souffle. 

Suite à la recrudescence du conflit en 2021, plus de deux millions de personnes ont été déplacées par les combats entre les forces gouvernementales et les rebelles du M23 dans l’est de la République démocratique du Congo. À Saké, ville de la province du Nord-Kivu, certaines familles reviennent aujourd’hui sur les lieux qu’elles ont dû fuir. Selon Damien Mama, représentant du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) en RDC, à leur retour celles-ci ne retrouvent ni maison, ni terres, ni tissu social.

Parmi elles, Vumilia, mère de douze enfants, est rentrée chez elle après le démantèlement du camp de Goma où elle s’était réfugiée pour fuir le conflit. À son retour, celle-ci n’avait plus accès à sa terre dont elle a besoin pour nourrir ses enfants. Elle demande de l'aide pour reconstruire sa maison, des outils et des semences pour retourner au champ.

Annuarite, quant à elle, a perdu non seulement sa maison mais également sa machine à coudre. Couturière, elle tente de relancer une activité dans un quartier où plus rien n’est comme avant. Leur situation est symptomatique d’un retour marqué par le vide : « Ces personnes sont rentrées chez elles pour ne rien retrouver », résume Damien Mama. Pour lui, cette population a besoin « de moyens de reconstruire durablement leur vie ».

La priorité pour ces déplacés n’est plus l’aide d’urgence alimentaire, mais la relance de leurs moyens de subsistance. À Saké, les stigmates du conflit sont omniprésents et le tissu économique local, fondé sur les petites activités telles que la couture, la soudure ou le commerce informel, s’est effondré.

A woman tends to her cabbage crops in a small garden adjacent to her shelter within the Bulengo displacement site, DRC.jpg
Une femme s'occupe de ses cultures de choux dans un petit jardin adjacent à son abri dans le site de déplacement de Bulengo, en RDC. © UNOCHA/Francis Mweze. 

Une crise humanitaire multidimensionnelle

Les défis pour le pays sont nombreux. Lors de l’ouverture de la 59 e session du Conseil des droits de l’homme ce lundi 15 juillet, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Volker Türk, a dénoncé la gravité des violences perpétrées dans la région en évoquant les « violations et atteintes aux droits humains d’une ampleur et d’une étendue effroyables ». La Mission d’établissement des faits mandatée par le Conseil des droits de l’homme parle d’une « absence totale de considération pour la protection des civils pendant et après les opérations militaires » dans le Nord-Kivu et le Sud-Kivu.

Cette violence a un coût humain direct : « En l'espace de trois mois, nous avons connu autant de blessés que dans toute l'année 2024. 60 % des victimes sont des victimes civiles, et ce chiffre a pu monter à certains moments à 90 % », explique François Moreillon, chef de délégation du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) en RDC.

Cette guerre a non seulement « un effet dramatique sur ces populations », mais représente aussi un risque important d’effondrement de certains services de base. Une étude menée par le CICR dans le domaine de la santé à l'est de la RDC « révèle un système de santé à bout de souffle où les structures peinent à traiter les pathologies les plus courantes », souligne François Moreillon.

En conférence de presse à l’ONU Genève, celui-ci alerte sur le manque de médicaments de base et la baisse drastique des consultations médicales : sur les 109 structures médicales visitées pour l’étude, 70 % se trouvent en rupture de stock et 40 % ont été pillées.

Un appel à un engagement durable alors que les financements chutent 

Les financements internationaux s’amenuisent, alors qu’avec « 1 500 dollars, on peut offrir à une famille un toit en matériaux locaux pour les 20 prochaines années », souligne Damien Mama. Ainsi, en plus du plan conjoint d'appui au retour des Nations Unies, le PNUD a déployé un plan de relèvement rapide, cofinancé par la Corée du Sud, le Canada, la Suède et le Royaume-Uni, et une réponse en coordination avec le Fonds mondial et l’OMS. Les objectifs : aider les populations à un retour durable et répondre aux besoins sanitaires.

Le CICR rappelle que le budget humanitaire en RDC pourrait être réduit de plus de 60 % en 2025, passant de 1,4 milliard de dollars à 400–500 millions. François Moreillon alerte sur le fait que les acteurs humanitaires ne peuvent plus répondre seuls à l’ampleur des besoins. Il appelle les autorités congolaises et ses partenaires du développement à renforcer leur engagement dans les zones les plus fragiles pour pallier le manque de moyens des acteurs de la réponse humanitaire. 

MONUC Peacekeepers en route to Sake in DRC. © UN Photo/Marie Frechon
         MONUC Peacekeepers en route to Sake in DRC. © UN Photo/Marie Frechon