Skip to main content

Le mariage précoce, le travail domestique et la situation des enfants des rues attirent l’attention des membres du Comité des droits de l’enfant

Compte rendu de séance

 

Le Comité des droits de l’enfant a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport périodique soumis par le Togo au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant.

Pendant cet examen, des experts membres du Comité se sont félicités des progrès réalisés par le Togo en termes de législation pour protéger les droits de l’enfant, et plus particulièrement les enfants en situation vulnérable ou en contact avec la loi. Les experts ont aussi noté avec satisfaction les efforts du Gouvernement pour harmoniser les politiques en place en matière de protection de l’enfance.

Toutefois, des préoccupations ont été exprimées au sujet du mariage précoce, en particulier s’agissant des dispenses accordées par le juge autorisant le mariage d’enfants dès l’âge de 16 ans. En 2017, au Togo, 25% des jeunes filles étaient mariées avant l’âge de 18 ans, a-t-il été relevé : chaque dispense doit donc être « l’exception de l’exception de l’exception », a insisté une experte à ce propos. Constatant d’autre part que le Code de l’enfant était en révision depuis trois ans, une experte a souhaité savoir quelles étaient les raisons de ce blocage.

L’attention des membres du Comité a également porté sur la situation relative au travail des enfants au Togo, notamment le travail domestique, « assimilable à de l’esclavage », a dit une experte. La situation des enfants des rues a elle aussi été jugée préoccupante. 

D’autres interrogations ou préoccupations ont été exprimées concernant des difficultés en matière d’enregistrement des naissances, malgré les mesures prises par le Gouvernement pour y remédier ; la persistance de violences envers les enfants ; ou encore des discriminations à l’égard des enfants dits sorciers, des jeunes filles, des enfants handicapés et des enfants LBGT. De plus, a-t-il été relevé, l’absence de données à jour, ventilées par âge, sexe et type de handicap, ne permet pas d’élaborer des politiques et des législations adéquates.

Plusieurs questions des experts ont porté sur l’application par le Togo du Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.

Présentant le rapport, Mme Adjovi Lolonyo Apedo-Anakoma, Ministre de l’action sociale, de la promotion de la femme et de l’alphabétisation du Togo, a indiqué que son pays avait accueilli avec la plus grande attention les observations finales formulées par le Comité lors du précédent examen et que ces recommandations avaient conduit à de nombreuses évolutions législatives, institutionnelles et réglementaires.

Après avoir évoqué les mesures au Togo prises en faveur de l’enregistrement des naissances, Mme Apedo-Anakoma a détaillé les démarches du Gouvernement en faveur de la santé et de l’éducation, précisant notamment que les investissements dans le secteur de l’éducation représentaient près de 25% du budget total de l’État. Elle a ajouté que le Togo avait multiplié ses efforts pour lutter contre les violences faites aux enfants, en renforçant son arsenal juridique avec l’adoption du nouveau Code pénal.

D’autre part, a précisé la Ministre, si le Togo n’a pas connu de conflits armés, des préoccupations demeurent toutefois concernant la situation qui prévaut dans la partie septentrionale du pays, frontalière du Burkina Faso, où les forces de défense et de sécurité font face, depuis 2021, aux attaques terroristes.

Outre Mme Apedo-Anakoma et plusieurs de ses collaborateurs au Ministère de l’action sociale, de la promotion de la femme et de l’alphabétisation, la délégation togolaise était composée – entre autres – de M. Yackoley Kokou Johnson, Représentant permanent auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de représentants des Ministères des affaires étrangères ; des droits de l’homme, de la formation à la citoyenneté et des relations avec les institutions de la République ; de la sécurité et de la protection civile ; de l’enseignement primaire, secondaire, technique et de l’artisanat ; et de la santé. La Cour suprême du Togo était également représentée.

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Togo et les publiera à l’issue de sa session, le 22 septembre.

 

À sa prochaine séance publique, lundi 18 septembre à 11h30, le Comité présentera son observation générale n° 26, consacrée aux droits de l’enfant et à l’environnement, avec un accent sur les changements climatiques.

 

Examen du rapport du Togo

Le Comité est saisi du rapport valant cinquième et sixième rapports périodiques du Togo (CRC/C/TGO/5-6), ainsi que des réponses du pays à une liste de points à traiter qui avait été soumise par le Comité. 

Présentation du rapport

La cheffe de la délégation, Mme ADJOVI LOLONYO APEDO-ANAKOMA, Ministre de l’action sociale, de la promotion de la femme et de l’alphabétisation du Togo, a indiqué que son pays avait accueilli avec la plus grande attention les observations finales formulées par le Comité lors du précédent examen. Ces recommandations ont conduit à de nombreuses évolutions législatives, institutionnelles et réglementaires. Mme Apedo-Anakoma a ajouté que, dans son pays, la société civile était systématiquement impliquée dans toutes les questions relatives à la protection de l’enfant et qu’elle était représentée au sein du Comité national des droits de l’enfant (CNE) et du cadre de concertation nationale des acteurs de protection des enfants.

S'agissant de l’enregistrement universel des naissances, Mme Apedo-Anakoma a précisé que le Togo comptait 1139 centres d’état civil principalement installés dans les cantons et les villages, ainsi que des centres de santé afin de rapprocher les services d’état civil des usagers. Le taux d’enregistrement des naissances est aujourd’hui de 87%. Ces mesures, auxquelles s’ajoute la révision en cours du code de nationalité togolais, vont contribuer à lutter contre l’apatridie, a précisé Mme Apedo-Anakoma.

Par ailleurs, la politique nationale de santé de 2012 et ses plans de développement sanitaires ont permis la réduction de la mortalité néonatale, infantile et juvénile. Parmi les mesures prises, Mme Apedo-Anakoma a cité le programme élargi de vaccination offrant des vaccins gratuits aux enfants, la subvention de la césarienne depuis 2012 ou encore la prise en charge gratuite du paludisme grave au profit des enfants de moins de cinq ans.

Le Togo a aussi intensifié ses investissements dans le secteur de l’éducation, qui représente aujourd’hui près de 25% du budget total de l’État. De même, d’importantes actions ont été menées pour assurer la qualité des enseignements. Ces actions ont permis d'accroître le taux brut de scolarisation au primaire, qui est passé de 122,4% en 2018 à 132,5% en 2022, avec un taux d’achèvement de 88,7%.

Mme Apedo-Anakoma a par ailleurs indiqué que le cadre normatif des droits de l’enfant en milieu scolaire avait également été renforcé. Outre les dispositions contenues dans le Code de l’enfant, une note circulaire interdit toutes les formes de punitions corporelles et châtiments dégradants en milieu scolaire. Le Togo a également multiplié ses efforts pour lutter contre les violences faites aux enfants, en renforçant son arsenal juridique avec l’adoption du nouveau Code pénal et le Code des personnes et de la famille, modifié en 2014.

Au Togo, aucun réfugié ou demandeur d’asile ne peut faire l’objet d’un refoulement, a précisé Mme Apedo-Anakoma. Ainsi, tous les enfants demandeurs d’asile originaires du Burkina-Faso sont enregistrés comme tels dans la base de données de la Coordination nationale d’assistance aux réfugiés (CNAR) et bénéficient du statut de réfugié.

S’agissant de la justice pour mineurs, la brigade pour mineurs de Lomé a été transformée en « Centre d’accès au droit et à la justice pour mineurs ». De plus, des juges pour enfants ont été nommés dans les cinq tribunaux de grande instance, les neuf tribunaux d’instance à compétence correctionnelle et civile, outre la nomination de juges de tutelle dans les seize tribunaux d’instance à compétence civile.

S’agissant de l’application du Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, l’âge minimum pour l’enrôlement dans les forces de défense et de sécurité est de 18 ans. Toutefois, deux écoles militaires sont autorisées à recevoir des enfants de moins de 18 ans, a précisé la Ministre. 

Si le Togo n’a pas connu de conflits armés, a souligné Mme Apedo-Anakoma, des préoccupations demeurent concernant la situation qui prévaut dans cette partie septentrionale du pays, frontalière du Burkina Faso, où les forces de défense et de sécurité font face, depuis 2021, aux attaques terroristes. Des groupes armés basés sur le territoire Burkinabé font des incursions sur le territoire togolais et s’attaquent aux populations civiles.

Questions et observations des membres du Comité

Mme RATOU JEAN ZARA, coordonnatrice du groupe de travail du Comité chargé de l’examen du rapport du Togo, a félicité le Togo pour toutes les informations fournies dans le rapport et pour les efforts déployés en vue d’assurer le respect des clauses contenues dans la Convention relative aux droits de l’enfant. Néanmoins, a dit l'experte, ces réalisations ne permettent pas de conclure que tout se passe bien et que tout est reluisant. 

Le Comité se félicite des progrès réalisés en termes de législation pour protéger le droit des enfants, et plus particulièrement les enfants en situation vulnérable ou en contact avec la loi, a précisé Mme Zara. Elle a demandé à la délégation de fournir davantage de précisions sur les modifications en cours du Code civil et du Code pénal en vue de permettre aux enfants d’être entendus dans les procédures judiciaires et administratives. 

Abordant le point relatif à la collecte de données, l’experte a noté que d’énormes efforts ont été entrepris au cours des dix dernières années, avec la mise en place d’une base de données en ligne. Elle s’est toutefois enquis des mesures prises pour garantir l’assurance-qualité, la gouvernance publique, la transparence ainsi que la collaboration intersectorielle dans la gestion des données.

Des experts ont noté avec satisfaction les efforts du Gouvernement pour harmoniser les politiques en place en matière de protection de l’enfance et ont salué le renforcement des structures locales et la présence de soutien psychologique.

Toutefois, les violences persistent, notamment à l’encontre des jeunes filles. Par ailleurs, 49 enfants ont été victimes d’infanticide en 2012 : il s’agissait surtout de jumeaux, d’enfants aux cheveux roux et d’enfants albinos. Ces enfants sont considérés comme des êtres surnaturels relevant de forces occultes et l’on considère qu’ils doivent mourir pour préserver l’honneur de la famille et la sécurité de la communauté. Une experte a demandé quelles mesures sont prises par le Gouvernement pour lutter contre ces infanticides, inciter la dénonciation de cette pratique et appliquer le droit pénal aux pratiques qui portent à la vie et la survie des enfants. Les enfants sont également victimes de mesures disciplinaires et de châtiments corporels. 

D’autres préoccupations, ont relevé des expertes, demeurent concernant la discrimination à l’égard des enfants dits sorciers, des jeunes filles, des enfants handicapés et des enfants LBGT. La délégation a aussi été invitée à parler des « couvents pour sorcières ».

Une experte a noté que président du tribunal de première instance pouvait autoriser le mariage d’enfants avant l’âge de 18 ans. En 2017, au Togo, 25% des jeunes filles se sont mariées avant l’âge de 18 ans, a-t-il été relevé. Une experte, constatant que le Code de l’enfant était en révision depuis trois ans, a souhaité savoir si le blocage était lié à un manque de volonté politique ou d’intérêt du Gouvernement.

D’autres préoccupations ont été exprimées face à des difficultés en matière d’enregistrement des naissances, en dépit des mesures prises par le Gouvernement pour cette démarche, a dit une experte ; et quant aux enfants réfugiés ghanéens, qui courent un risque d’apatridie, n’ont pas toujours accès à la nationalité togolaise et ne peuvent bénéficier de soins ou d’un accès à l’éducation. 

Le Comité, a dit une experte, a reçu des informations selon lesquelles le Togo restreindrait les droits à la liberté d’expression, de réunion et d’association. Elle a demandé quelles dispositions étaient prises pour créer un environnement sûr et propice à la confiance et à la coopération avec la société civile, notamment dans le contexte de l’adoption du projet de loi sur les organisations non gouvernementales.

Des préoccupations ont été soulevées par certaines expertes concernant les dispenses accordées par la justice pour permettre le mariage dès 16 ans pour des motifs sérieux. Chaque dispense doit être « l’exception de l’exception de l’exception », a insisté une experte, qui s’est enquise des mesures envisagées par le Gouvernement pour rendre effective la législation sur l’âge du mariage fixé à 18 ans. 

Abordant le point relatif aux enfants handicapés, une experte a souhaité savoir si le Togo appliquait l’approche du handicap basée sur les droits de l’homme, ce qui impliquerait l’élaboration de nouvelles directives. Par ailleurs, une remarque a porté sur l’absence de données à jour, ventilées par âge, sexe et type de handicap – absence qui, selon une experte, ne permet pas d’élaborer des politiques et législations adéquates.

Il a été demandé si des ressources suffisantes étaient allouées au secteur de la santé, en particulier pour la prévention et les soins primaires. Une experte a constaté un taux très élevé de grossesse parmi les adolescentes au Togo. Une question a porté sur l’accès au dépistage et au traitement du VIH/sida chez les enfants et les adolescents. 

Une experte a jugé très préoccupante la situation relative au travail des enfants au Togo, avec en particulier des formes de travail domestique « assimilable à de l’esclavage », et certaines allégations faisant état d’enfants âgés d’à peine neuf ans employés comme domestiques. La situation des enfants de rue est également préoccupante, a relevé une autre experte : le rapport indique ainsi qu’entre 2012 et 2017, 3127 enfants des rues ont été identifiés et accompagnés, dont 1850 réintégrés dans leur famille. L’experte a souhaité savoir ce que le Gouvernement faisait pour les enfants non réintégrés. Elle a demandé des chiffres ventilés sur le nombre d’enfants ayant fui le pays, qui dorment dans les rues ou encore qui mendient, et, a insisté l’experte, qui ont besoin de toute l’attention des autorités.

Un expert a ensuite constaté que le rapport du Togo sur le Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés devait être présenté en 2007 et n’a été reçu qu’en 2020. Le rapport indique qu’en 2015, des formations au Protocole facultatif ont été dispensées à quelque 10 000 fonctionnaires de police. L’expert a souhaité savoir si cette formation était appropriée et si des formations étaient aussi dispensées dans les écoles militaires.

D’autres questions ont porté sur le recrutement d’enfants par des groupes armés dans des pays tiers, notamment au Sahel. Une experte a constaté à ce propos que les enfants arrivant du Burkina Faso sont enregistrés comme tels dans la base de données de la Coordination nationale d’assistance aux réfugiés (CNAR) ; l’experte a voulu savoir ce qu’il en était des enfants arrivés au Togo depuis d’autres pays voisins, où ils auraient pu avoir été recrutés par des groupes armés. Le Togo doit prêter assistance à ces enfants et favoriser leur réintégration, a dit l’experte.

Une experte a noté que l’âge de la responsabilité pénale était de 14 ans au Togo, mais que le Comité disposait d’informations selon lesquelles des enfants plus jeunes auraient été détenus.

Une experte a fait remarquer que les enfants handicapés ont des besoins particuliers et que, pour élaborer des politiques concrètes, le Gouvernement doit être en mesure de disposer de données ventilées plus précises que celles contenues dans le recensement général de la population.

D’autres questions des experts du Comité ont porté sur l’accès des enfants à l’aide juridictionnelle ; sur l’éventuelle ratification, par le Togo, du troisième Protocole facultatif à la Convention, instituant une procédure de plainte devant le Comité ; et sur la possibilité pour l’État d’ouvrir des centres de réhabilitation pour mineurs en conflit avec la loi. 

Réponses de la délégation

La délégation a indiqué que l’enfant était défini comme étant toute personne âgée de moins de 18 ans et que le code de la famille fixait l'âge du mariage à 18 ans révolus. Toutefois, le juge peut autoriser un mariage dès l’âge de 16 ans pour raisons médicales, financières ou autres ; les réflexions se poursuivent sur cette question car le Code de l’enfant est en cours de révision.

Le Togo compte 1139 centres d’état civil afin de doter tous les Togolais de documents d'identité qui, depuis le 1er janvier 2022, sont gratuits. Le code de la nationalité, qui date de 1978, attribue la nationalité togolaise à tout enfant né de père togolais ou de mère togolaise. Mais ce code, qui est ancien, est en train d’être révisé. L’un des objectifs du Gouvernement est de créer un mécanisme permettant de doter chaque Togolais d’un acte de naissance, et donc d’enregistrer toutes les naissances. Le code togolais reconnaît la nationalité par le droit du sol, à la seule condition que, jusqu’à l’âge de 16 ans, l’enfant réside dans le pays.

Abordant les questions relatives à la protection de l’enfance, la délégation a indiqué que la politique du bien-être de l’enfant a été revisitée et assortie d'un plan d'action 2023-2027. Cette politique se divise en trois axes stratégiques, à savoir la protection des enfants dans les familles ; la promotion de la survie, l’enregistrement des naissances et l’éducation ; et l’amélioration de la gouvernance du secteur de la protection de l’enfant. Un plan d’action a ensuite été élaboré, contenant onze mesures et treize projets qui permettront d’atteindre les objectifs en matière de protection de l’enfant.

La protection de l’enfant dans l’environnement numérique est un nouveau défi rencontré par le Gouvernement. Le Togo a adopté une loi sur la cybersécurité et la lutte contre la cybercriminalité, punissant la pornographie mettant en scène des enfants.

Le Code pénal togolais interdit et punit les violences à l’encontre des enfants et les mauvais traitements, a poursuivi la délégation. Le Code pénal contient des dispositions sanctionnant l’exploitation et la prostitution des enfants. Les abus sexuels sur mineurs sont le viol, la pédophilie, l’inceste et les violences sexuelles. Le Code pénal et le Code de l’enfant sont répressifs et dissuasifs, a estimé la délégation : entre 2016 et 2021, 260 cas d’abus sexuels graves ont été condamnés. Un enfant mineur ne peut être auditionné sans la présence d’un parent – c’est ce que la loi prévoit, mais cela n’est pas toujours assuré, a admis la délégation.

S’agissant du renforcement de la coordination des interventions dans le domaine des droits de l’enfant, cette question est l’une des priorités du Gouvernement et de ses partenaires techniques et financiers. De 2011 à nos jours, plusieurs actions ont été réalisées, qui tiennent compte des préoccupations du Comité. Le Togo s’appuie sur la société civile, y compris lorsqu’il s’agit d’aborder et de collecter des informations sur la traite des personnes. Il existe aussi des lignes budgétaires différenciées qui appuient les organisations de la société civile s’occupant des enfants, des enfants handicapés et des enfants victimes de traite.

S’agissant des préoccupations du Comité relatives aux abus à l’égard d’élèves, la délégation a indiqué que, devant l’impératif de tenir un cadre scolaire sûr et protecteur pour les apprenants, il existe un cadre normatif sécurisant pour les enfants. Les enseignants doivent respecter un code de bonne conduite. La grossesse ne constitue plus une entrave à la scolarité des jeunes filles, a aussi précisé la délégation.

Concernant les enfants privés de protection familiale, la délégation a indiqué que le Togo avait mis en place un projet pilote de familles d’accueil pour une durée de cinq ans. Dans l’intérêt supérieur de l’enfant, le Gouvernement privilégie la famille d’accueil à la structure institutionnelle. En 2015, le Togo a procédé à une analyse des structures d’accueil : il a été décidé que douze d’entre elles devaient être fermées. Il a fallu toutefois prendre des mesures alternatives de remplacement pour protéger les enfants. Quelque 142 enfants ont été pris en charge par 72 familles d'accueil en 2021 et 2022 ; ces prises en charge se font toujours en lien avec la société civile.

S’agissant de la révision du Code de l’enfant, en particulier de l’article 267, en vue de supprimer toutes les dérogations à l’interdiction du mariage des enfants de chaque sexe pour des motifs sérieux, la délégation a indiqué avoir entendu les inquiétudes des membres du Comité. Le Code est en révision ; l’alinéa 2 de l’article en question sera conservé ou non en fonction de l'intérêt supérieur de l’enfant, a-t-elle précisé.

Concernant l'enregistrement des naissances, l’ancienne loi fixait à trente jours le temps pour déclarer une naissance. La nouvelle loi a porté ce délai à 45 jours. Par ailleurs, le Togo est en train de prendre des dispositions pour que l’enregistrement se fasse par d’autres biais que les officiers d’état civil. Le Gouvernement a rendu effectif, par décret, l’enregistrement gratuit et universel des naissances depuis le 1er janvier 2022.

La délégation a précisé que les élèves enceintes ont le choix de poursuivre, d’arrêter puis de reprendre leurs études, ce qui est avancée significative au sein de la société togolaise. Lorsqu’un professeur entretient des relations sexuelles avec des élèves, l’acte doit être traité comme un viol, a-t-il été précisé.

S’agissant des enfants vivant avec un handicap, la délégation a d’abord indiqué que le Gouvernement profiterait du cinquième recensement de la population et de l’habitat pour utiliser les données désagrégées afin de fournir des indicateurs. Le pays a aussi entrepris d’élaborer un registre des personnes et des ménages : il s’agit de se doter d’une base de données qui renseigne sur la base socio-économique de la population, y compris les enfants handicapés. Le Gouvernement entend se baser sur ce registre en attendant de mener des études.

Le Code de l’enfant punit par ailleurs l’abandon d’enfants handicapés. Le plus important pour le Togo est d’attirer l’attention de la population sur les discriminations envers les enfants handicapés et de renforcer les capacités des acteurs concernés. Dans la pratique, le Togo a publié un guide pour permettre aux enfants handicapés d’accéder à la justice.

S’agissant de l’éducation aux valeurs et à la sexualité, il existe au Togo un processus et une démarche intégrée, par l’intermédiaire de modules de formation dispensés aux enseignants et aux élèves. L’objectif est de renforcer les compétences des garçons et des filles en matière de sexualité responsable. Concernant l’inquiétude exprimée par un expert relatives à l’écart qui se creuserait entre les élèves filles et garçons dans le cursus éducatif, la délégation a indiqué qu’en 2022 il y avait plus de filles inscrites au Brevet d’études du premier cycle que de garçons. 

La délégation a rappelé que des juges pour enfants ont été nommés dans les cinq tribunaux de grande instance, les neuf tribunaux d’instance à compétence correctionnelle et civile, outre la nomination de juges de tutelle, protecteurs d’enfants en danger. Aujourd’hui, on compte au moins un juge pour enfants dans toutes les régions du pays alors que, dans le passé, les affaires étaient jugées uniquement à Lomé. L’âge de l’incapacité pénale de l'enfant a été relevé de 13 à 14 ans. Le Code de l’enfant interdit formellement la condamnation au pénal d’un enfant de 16 ans ou moins ; les mineurs ayant commis des infractions criminelles ne peuvent être condamnés à des peines dépassant dix ans d’emprisonnement, a aussi fait savoir la délégation. 


S’agissant du Protocole facultatif sur les enfants dans les conflits armés, la délégation a estimé que les formations mentionnées dans le rapport étaient appropriées. Le cours sur les droits de l’enfant, élaboré avec le Comité international de la Croix-Rouge et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance, prend en compte les domaines couverts par la Convention, en particulier la définition de l’enfant et la notion de minorité, les droits reconnus à l’enfant, la protection des enfants dans les conflits armés et les enfants soldats. Ce cours est aussi dispensé au Collège militaire Eyadéma.

Le recrutement de mineurs dans les forces armées togolaises, de même que dans la police et la gendarmerie, est interdit, a poursuivi la délégation. Les recrues, qui sont toutes volontaires, doivent prouver sans équivoque qu’elles sont majeures.

Tous les acteurs concernés ont besoin de comprendre le risque d'enrôlement d’enfants par les groupes armés à l’étranger, a poursuivi la délégation. Le Gouvernement a mis en place un Comité interministériel de prévention et de lutte contre l’extrémisme violent, ayant pour mission d’éradiquer ou réduire la propagation de l’extrémisme violent, notamment dans les zones à risque. Le Gouvernement attache une grande importance à la prévention de l’extrémisme violent, du terrorisme et du recrutement d’enfants soldats par des groupes armés, car ces enfants constituent une cible vulnérable et facilement récupérable, a dit la délégation.

Il a été précisé que l’enseignement dispensé au Collège militaire portait sur la discipline et le comportement à adopter pour pouvoir intégrer le cursus militaire. À aucun moment, les élèves ne sont exposés aux armes ou à leur maniement. 

S’agissant d’une question portant sur la violence à l’encontre des enfants lors de manifestations publiques, la délégation a indiqué que la manifestation de 2013 avait été d’une ampleur jamais enregistrée. Des élèves se sont attaqués à un commissariat de police : deux enfants ont trouvé la mort et le directeur de la police a été suspendu de ses fonctions. S’agissant des manifestations publiques de 2017 et 2019, un commissaire a été lynché, deux militaires ont été égorgés et un commissariat de police a été attaqué et détruit, des armes et munitions ayant été emportées. L’enquête avance lentement, a dit la délégation.

Dans le cadre de la lutte contre l’exploitation économique des enfants, la délégation a détaillé les mesures prises par le Gouvernement, telles que le programme d’action visant la protection de 500 enfants de rue, en particulier les filles, ayant permis la réinsertion sociale de 225 d’entre elles âgées de moins de 15 ans ; le renforcement des capacités des structures communautaires, ayant permis de protéger 1800 enfants vulnérables contre les travaux agricoles dangereux ; ou encore le programme de protection et scolarisation ayant permis de retirer 200 enfants du travail domestique.

Par ailleurs, la délégation a reconnu que les couvents vaudous étaient une réalité au Togo, s’expliquant par des pratiques culturelles et religieuses. Les autorités mènent des efforts, avec les chefs traditionnels, pour réduire la présence des enfants dans ces couvents, qui est passée de trois ans à 45 jours.


Une experte du Comité ayant estimé que les frais des procédures d’adoption au Togo étaient excessifs, la délégation a indiqué les coûts pour une adoption nationale étaient fixés à un niveau correspondant plus ou moins aux frais engendrés par une grossesse, pour responsabiliser l’adoptant. De même, le coût de l’adoption internationale est estimé en fonction des frais induits dans les pays d’accueil des enfants adoptés. Les adoptions par l’intermédiaire d’orphelinats sont des fraudes, a ajouté la délégation : ces centres sont bien surveillés, car ils bénéficient de subventions, et doivent respecter un certain nombre de règles.

Enfin, le Togo n’a pas encore pris de décision en ce qui concerne la ratification du troisième Protocole relatif, relatif aux plaintes individuelles devant le Comité, a dit la délégation.

Remarques de conclusion

MME ZARA a remercié la délégation pour ce dialogue constructif. Ces discussions ont été fructueuses, le Comité ayant reçu des informations sur les démarches positives et les défis auxquels le Togo est confronté. Le Comité s’efforcera de formuler sur cette base des recommandations qui serviront aux enfants du Togo, a assuré l’experte. 

M. BENYAM MEZMUR, membre du Comité, a relevé que, dans le rapport, le Togo indique, au sujet du Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, que le pays n’emploie pas des enfants dans des hostilités et qu’il n’est pas confronté à une situation de confronté armé, ce dont il faut se féliciter. L’expert a salué les efforts engagés par le Togo pour faire appliquer le Protocole facultatif, en particulier pour réduire l’extrémisme et informer l’armée.

MME APEDO-ANAKOMA a salué l’engagement du système des Nations Unies et l’implication de la société civile qui accompagnent le Togo dans l’application de sa politique de protection des droits de l’enfant. Le dialogue avec le Comité est, pour le Togo, plus qu’un simple examen : il s’agit d’un levier d’auto-évaluation pour mesurer le chemin parcouru et faire davantage et mieux pour la protection des droits des enfants, a dit Mme Apedo-Anakoma.

La Ministre a enfin affirmé qu’à travers son plan stratégique de développement qu’est la Feuille de route gouvernementale 2020-2025, le Togo s’évertuait à mettre la protection des droits des enfants au cœur de son action sociale, notamment dans les secteurs incontournables que sont la santé, l’éducation ou encore l’assainissement de l’environnement et du cadre d’épanouissement social et culturel des enfants.

 

Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information ; il ne constitue pas un document officiel.

Les versions anglaise et française de nos communiqués sont différentes car elles sont le produit de deux équipes de couverture distinctes qui travaillent indépendamment.

 

 

CRC23.026F