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COMMITTEE ON RIGHTS OF CHILD EXAMINES REPORT OF TUNISIA (French only)

Meeting Summaries

Le Comité des droits de l'enfant a examiné aujourd'hui le troisième rapport périodique présenté par la Tunisie sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Présentant le rapport de son pays, M. Ridha Khemakhem, Coordonnateur général pour les droits de l'homme au Ministère de la justice et des droits de l'homme de la Tunisie, a notamment attiré l'attention sur le retrait des déclarations et réserves que le pays avait émises à l'égard de certaines dispositions de la Convention. Il a par ailleurs fait valoir la consolidation du Comité supérieur des droits de l'homme et des libertés fondamentales en application des Principes de Paris; la suppression de l'écart entre l'âge minimum du mariage des garçons et celui des filles; l'élaboration d'un programme de lutte contre la violence infligée aux enfants et la diffusion de la culture de non violence. M. Khemakhem a en outre fait part de nouveaux textes législatifs actuellement à l'examen, notamment le projet de loi portant création d'un régime pénal spécifique pour les jeunes âgés de 18 à 21 ans et le projet de loi visant à supprimer les châtiments corporels comme méthode d'éducation. Il a en outre mis l'accent sur les progrès réalisés par son pays en matière d'espérance de vie à la naissance; de taux de couverture sociale; de taux de scolarisation des enfants; de recul de l'abandon scolaire; ou encore de réduction du taux de pauvreté.

La délégation tunisienne était également composée de représentants du Ministère des affaires étrangères; du Ministère des affaires de la femme, de la famille, de l'enfance et des personnes âgées; du Ministère de l'éducation; du Ministère de la santé publique; du Ministère des affaires sociales, de la solidarité et des Tunisiens à l'étranger. Elle a répondu aux questions soulevées par les membres du Comité s'agissant, entre autres, du plan national pour l'enfance; de la violence en milieu scolaire; des ressources allouées au domaine de l'éducation; des questions de santé; de la participation de l'enfant; de la situation des mères célibataires et des enfants nés hors mariage; de la situation des enfants berbères et de l'enseignement de la langue; de la pauvreté des enfants; ou encore des questions relatives à la traite de personnes.

La rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Tunisie, Mme Kamla Devi Warmah, a pris note des progrès réalisés par la Tunisie, mais a souligné que le défi pour le pays va désormais consister à faire en sorte que les engagements qu'il a pris se traduisent à tous les niveaux. Elle a fait observer que le Code sur le statut personnel autorise toujours la discrimination à l'égard des femmes et des filles, en particulier en matière d'héritage. D'autre part, la discrimination envers les mères célibataires existe toujours. La rapporteuse s'est en outre inquiétée des discriminations dont ferait l'objet la population berbère. À l'instar de la rapporteuse, un expert s'est inquiété des allégations de violations des droits de l'homme, y compris de mauvais traitements, à l'encontre d'enfants et imputables à la police, qui ont été portées à la connaissance du Comité, notamment pour ce qui est d'enfants de défenseurs des droits de l'homme et d'opposants politiques.


Le Comité présentera à sa prochaine séance, qui marquera la fin de la session, le vendredi 11 juin prochain, ses observations finales sur la Tunisie ainsi que sur les autres pays dont les rapports ont été examinés au cours de la cette session.


Présentation du rapport de la Tunisie

M. RIDHA KHEMAKHEM, Coordonnateur général pour les droits de l'homme au Ministère de la justice et des droits de l'homme de la Tunisie, a réitéré l'engagement irréversible de la Tunisie à soutenir tous les efforts du Comité et à continuer avec lui le dialogue dans le sens d'une meilleure protection et d'une plus forte promotion des droits de l'enfant à l'échelle du pays. Il a souligné que ce troisième rapport périodique a été pour la Tunisie l'occasion d'aller de l'avant dans l'application de la Convention et de mettre en œuvre les recommandations du Comité. Soulignant les principales réalisations accomplies par son pays dans ce domaine au cours de ces toutes dernières années, M. Khemakhem a notamment attiré l'attention sur le retrait, en vertu de la loi du 3 juin 2008, des déclarations et réserves faites au moment de la ratification de la Convention; la consolidation du Comité supérieur des droits de l'homme et des libertés fondamentales en application des Principes de Paris; la suppression de l'écart entre l'âge minimum du mariage des garçons et celui des filles (ce dernier ayant été relevé de 17 à 18 ans); l'élaboration, en 2008, d'un programme pour la lutte contre la violence infligée aux enfants et la diffusion de la culture de non violence; la promulgation, en 2008, d'une loi relative à l'amélioration de la situation de la mère détenue enceinte et allaitante; et la création, le mois dernier, du parlement des jeunes qui vient s'ajouter au parlement des enfants. S'agissant de ce dernier point, M. Khemakhem a précisé que selon les termes de la loi, les membres du parlement des jeunes doivent être âgés entre 16 ans révolus et 23 ans. Le programme national pour la lutte contre la violence infligée aux enfants, qui est piloté par l'observatoire national des droits de l'enfant, a démarré en 2009 et prendra fin en 2012, a indiqué M. Khemakhem. Ce programme comporte trois volets: prévention, protection et réhabilitation et réinsertion. Par ailleurs, a poursuivi M. Khemakhem, en vue de mettre le système éducatif au diapason des nouvelles mutations scientifiques et technologiques, le chef de l'État a décidé, le 13 juillet 2009, la création d'un centre spécialisé des technologies de l'information.

M. Khemakhem a d'autre part attiré l'attention sur l'élaboration de plusieurs projets de loi visant à mettre en œuvre les réformes législatives déjà annoncées. Il a ainsi fait part du projet de loi portant création de l'institution du «conciliateur familial» pour les litiges relatifs au statut personnel; du projet de loi facilitant aux Tunisiens résidant à l'étranger le recours devant les tribunaux tunisiens pour régler les litiges familiaux qui les concernent; du projet de loi uniformisant l'âge de la majorité civile sans porter atteinte au droit de protection des bénéficiaires de la pension alimentaire; du projet de loi portant création des instruments juridiques appropriés pour protéger l'enfant victime et prendre en compte sa situation particulière au cours de l'enquête, de l'instruction et du procès dans les affaires ayant trait à la violence physique ou sexuelle; et du projet de loi portant création d'un régime pénal spécifique pour les jeunes âgés de 18 à 21 ans permettant de passer progressivement du statut de l'enfant à celui de l'adulte. Le but de ce dernier projet, a insisté M. Khemakhem, est d'éviter le passage brusque du régime souple et protecteur garanti à l'enfant délinquant au régime de droit commun appliqué aux adultes à partir de l'âge de 18 ans. Le Conseil des Ministres, le 19 mai dernier, a examiné ce dernier projet de loi et a décidé de le déférer devant les instances concernées, a indiqué le Coordonnateur général pour les droits de l'homme.

Le représentant tunisien a enfin indiqué qu'un Conseil des Ministres, présidé par le chef de l'État le 19 mai dernier, a examiné un projet de loi portant amendement de l'article 319 du Code pénal en vue de supprimer les châtiments corporels comme méthode d'éducation. Cette interdiction des châtiments corporels dans la famille, à l'école et dans le système pénal pour enfants illustre clairement la volonté du Gouvernement tunisien de s'aligner sur la jurisprudence du Comité des droits de l'enfant, a-t-il fait valoir.

Dans un contexte de crise économique et financière mondiale, la Tunisie a pris la décision de développer encore plus avant les politiques sociales en faveur de l'enfance, a poursuivi M. Khemakem. Il a fait part des progrès réalisés par son pays en matière, notamment, d'espérance de vie à la naissance; de taux de couverture sociale; de taux de scolarisation des enfants; de recul des abandons scolaires; de modernisation du système scolaire du point de vue, en particulier, des équipements technologiques; ou encore de réduction du taux de pauvreté – qui atteignait 3,8% en 2009. Ainsi, la Tunisie accorde-t-elle la priorité absolue à l'amélioration de la situation des enfants, à qui l'avenir appartient.

Le troisième rapport périodique de la Tunisie (CRC/C/TUN/3) indique qu'une loi a été adoptée par la chambre des députés le 3 juin 2008 relative au retrait de déclarations et réserves formulées par la Tunisie, en particulier la réserve relative à l'article 2. La Tunisie a adopté la loi du 14 mai 2007 portant révision de certaines dispositions du Code du statut personnel, laquelle a unifié l'âge minimum de mariage des filles et des garçons et l'a fixé à 18 ans pour les deux sexes, indique en outre le rapport. Par ailleurs, fait-il valoir, la Tunisie a adhéré, en vertu d'une loi datant du 7 mai 2002, aux deux Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention. D'autre part, la loi du 23 juillet 2002 relative à l'orientation, à l'éducation et à l'enseignement scolaire a été promulguée en vue d'améliorer la loi du 29 juillet 1991, relative au système éducatif. Elle confirme le principe fondamental du droit à l'éducation pour tous les Tunisiens sans discrimination, reconnaît son caractère prioritaire et rappelle le principe d'équité et de droit à la réussite, la gratuité de l'enseignement et son caractère obligatoire de 6 à 16 ans.

Le cadre juridique concernant les personnes handicapées a été revu et amélioré par suite à la promulgation de la loi d'orientation du 15 août 2005 relative à la promotion et à la protection des personnes handicapées. Cette loi vise à garantir l'égalité des chances pour les personnes handicapées, notamment en matière d'accès à l'éducation, à la formation professionnelle et à l'emploi, ainsi qu'à tous les autres aspects de la vie sociale et publique ainsi que leur promotion et leur protection contre toutes formes de discriminations. La Tunisie a également ratifié la Convention des Nations Unies relative aux droits des handicapés et son Protocole facultatif en vertu d'une loi datant du 11 février 2008. Dans le souci de lever les obstacles et les discriminations pesant sur les enfants abandonnés ou de filiation inconnue, le législateur a adopté la loi du 25 juin 2003 complétant la loi de 998 relative à l'octroi d'un nom patronymique aux enfants abandonnés ou de filiation inconnue. Cette loi vise à faciliter à cette catégorie d'enfants l'établissement de la filiation par recours au test d'empreintes génétiques (ADN). La loi réaffirme, en même temps, le droit de tout enfant abandonné ou de filiation inconnue à un nom patronymique de façon à lui permettre de bénéficier de toutes sortes de pièces et de documents officiels et d'éviter ainsi les embarras et autres facteurs de discrimination liés à l'inexistence d'un nom. En outre, en vue de mieux organiser la situation des employées de maison, la loi du 4 avril 2005 portant modification de la loi du 1er juillet 1965 fixe l'âge d'admission des enfants au travail domestique à 16 ans au lieu de 14 ans (et à 18 ans pour certains travaux), fait valoir le rapport.

Le Programme national d'aide aux familles nécessiteuses est destiné à aider les familles et à améliorer leur pouvoir d'achat. Ce programme touche annuellement 114 000 familles en moyenne, soit environ 350 000 enfants, avec un budget passant de 47 MD en 1999 à 58 MD en 2003 et à 60,1 MD en 2007, indique par ailleurs le rapport.


Examen du rapport

Observations et questions des membres du Comité

MME KAMLA DEVI VARMAH, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Tunisie, a pris note des progrès réalisés par la Tunisie et des projets de lois en cours. Le Comité se félicite du retrait par la Tunisie des déclarations et réserves qu'elle avait émises à l'égard de certaines dispositions de la Convention, a-t-elle notamment souligné. Néanmoins, aucun pays au monde ne peut prétendre avoir réglé tous les problèmes relatifs à l'enfant et la Tunisie ne fait pas exception de ce point de vue, a ajouté Mme Varmah. Le défi pour la Tunisie va désormais consister à veiller à ce que les engagements qu'elle a pris se traduisent à tous les niveaux, a-t-elle indiqué.

Le Code sur le statut personnel autorise toujours la discrimination à l'égard des femmes et des filles en matière d'héritage; en effet, en vertu de la loi de la charia, la fille n'hérite que de la moitié de la part de ses frères, a fait observer Mme Varmah. L'experte s'est par ailleurs demandée s'il ne serait pas judicieux, pour la Tunisie, de créer une entité spéciale indépendante pour la protection des droits de l'enfant tel qu'un médiateur pour les enfants.

La rapporteuse a souhaité connaître les mesures mises en œuvre par la Tunisie pour assurer la disponibilité des services pour les enfants dans diverses régions, et notamment dans certaines zones rurales. D'autre part, a-t-elle poursuivi, la discrimination envers les mères célibataires existe toujours; ces mères célibataires sont stigmatisées, avec notamment pour résultat des cas d'infanticides d'enfants nés hors mariage. À cet égard, a relevé Mme Varmah, le nombre d'enfants placés en accueil stagne, voire augmente, ces dernières années.

Mme Varmah s'est en outre inquiétée des discriminations dont ferait l'objet la population berbère, qui ne semble pas en mesure d'exprimer son identité culturelle et linguistique. Elle a demandé quelles mesures sont prises par les autorités tunisiennes pour assurer que les Amazighs puissent jouir de tous leurs droits. Des allégations de violations des droits des enfants ont été portées à la connaissance du Comité, notamment pour ce qui est d'enfants de défenseurs des droits de l'homme et d'opposants politiques, s'est inquiétée la rapporteuse, ajoutant que la police semble refuser d'enregistrer les plaintes pour torture et mauvais traitements.

Mme Varmah a demandé si le projet de loi portant interdiction des châtiments corporels mentionné par la délégation dans sa présentation couvrait les châtiments corporels à la maison.

Une autre experte s'est enquise des effets de la crise économique et financière mondiale actuelle sur la situation en Tunisie, où le niveau de chômage était déjà élevé.

Un expert s'est enquis de l'impact de la croissance économique sur les familles rurales et leurs enfants et s'il y avait toujours exode rural à destination des grandes villes, en particulier de Tunis.

Un membre du Comité a demandé quelles mesures sont prises pour renforcer les capacités de la société civile à prévenir la violence dans son ensemble. Qu'est-il fait pour prévenir la violence des élèves sur leurs propres enseignants – un phénomène qui semble s'étendre dans le monde ?

Un autre expert a demandé si la Tunisie reconnaît le droit de l'enfant d'être entendu devant les tribunaux. Il a aussi voulu savoir si la Tunisie veille à l'application systématique du principe de l'intérêt supérieur de l'enfant dans les décisions qui sont prises concernant l'enfant. Il aussi demandé si la Tunisie connaît toujours les mariages coutumiers, contractés en vertu des règles de la charia. L'expert a souhaité connaître les dispositions relatives à l'arrestation de mineurs de moins de 18 ans lorsqu'ils ont des problèmes qui ne sont pas toujours des conflits avec la loi mais peuvent être associés à des comportements asociaux; il a précisé à cet égard que le Comité avait reçu des allégations au sujet de traitements inhumains et dégradants.

Une experte s'est enquise des mesures prises ou envisagées pour criminaliser la traite des enfants. Quelles formes de traite des enfants existent en Tunisie, a-t-elle demandé?

Un membre du Comité a reconnu que les taux d'abandon scolaire ont baissé pour les premières années de la scolarisation, mais a souligné qu'ils restent préoccupants pour les années suivantes et a souhaité connaître les raisons de l'abandon scolaire en Tunisie.

Un expert a souhaité être renseigné au sujet des cas d'enlèvements d'enfants et de trafic d'organes, des informations faisant état ici ou là de l'existence de tels cas.

Un autre membre du Comité s'est enquis des mesures prises par la Tunisie en matière de lutte contre la toxicomanie et le tabagisme. Il a par ailleurs déploré le manque de données concernant le travail des enfants.

Un expert a souhaité en savoir davantage au sujet de l'administration de la justice pour mineurs. Quel système de contrôle des lieux de détention pour mineurs existe-t-il en Tunisie, a notamment demandé cet expert? Il semble que les taux de récidive (pour les mineurs délinquants) soient relativement élevés, ce qui laisserait supposer que le système de justice juvénile appliqué depuis maintenant une quinzaine d'années dans le pays n'est peut-être pas adapté.

Réponses de la délégation

La délégation tunisienne a indiqué que le deuxième Plan national pour l'enfance, qui couvre les années 2002-2011, est le second de ce type et que le troisième plan décennal, qui couvrira les années 2012-2021, est en cours de préparation. Une évaluation à mi-parcours du deuxième Plan national pour l'enfance a été réalisée en 2007 et l'évaluation globale à proprement parler commencera en 2010, a-t-elle précisé.

En ce qui concerne les questions d'éducation, la délégation a affirmé partager l'inquiétude exprimée par un membre du Comité s'agissant du fléau de la violence en milieu scolaire. La loi tunisienne stipule que l'élève doit respecter l'enseignant et que l'enseignant doit respecter l'élève, a souligné la délégation. Elle a indiqué que le Ministère de l'éducation tunisien avait créé un observatoire national pour le suivi des cas de violences, qui recense l'ensemble des cas existants. Même si ce problème reste très marginal, l'État tunisien en est très soucieux, a assuré la délégation.

En Tunisie, à l'opposé de ce qui se passe ailleurs dans le monde, le budget de l'éducation a connu une hausse de 7,74% pour 2010, a fait valoir la délégation. Au mois de mai dernier, a-t-elle ajouté, un décret a augmenté de 50% la prime accordée aux enseignants pour correction des épreuves du baccalauréat.

Pour ce qui est des enfants handicapés, la délégation a indiqué que la Tunisie avait mis en place des classes intégrantes pour accueillir ceux d'entre eux qui souffrent d'un handicap léger. Au total, 1496 élèves souffrant de handicap léger sont ainsi intégrés dans ce type de classes, auxquels il faut ajouter les quelque 6000 enfants souffrant de handicap léger qui sont intégrés aux classes normales.

Le taux de «déperdition scolaire» reste inquiétant pour les autorités tunisiennes qui s'efforcent donc d'y remédier selon une action articulée autour de la prévention, a déclaré la délégation en réponse aux préoccupations du Comité s'agissant de l'abandon scolaire.

La Tunisie est sensible au problème des disparités régionales et œuvre à les réduire au maximum, a souligné la délégation. Des fonds publics sont alloués aux conseils régionaux de régions cibles afin de pallier les insuffisances et améliorer les indicateurs sectoriels les plus faibles, a-t-elle indiqué.

S'agissant de la participation des enfants, environ un quart des enfants membres du parlement des enfants sont issus de familles défavorisées et même (pour une demi-dizaine) de certains centres intégrés de la jeunesse et de l'enfance, a fait valoir la délégation. Elle a précisé que les membres de ce parlement des enfants sont, pour moitié, choisis en fonction de leurs résultats solaires et, pour moitié également, élus par les conseils municipaux et les conseils ruraux. Leur mandat est de deux ans et les anciens enfants parlementaires créent souvent des clubs d'enfants afin d'assurer la promotion des droits de l'enfant.

En réponse aux questions sur la situation des mères célibataires, la délégation a indiqué que depuis la loi de 1998 sur la famille, amendée en 2003, l'accent a été mis sur l'action de comités régionaux pour suivre la situation des enfants nés hors mariage. Une protection sociale est assurée dans ce contexte dès la naissance de l'enfant dans les hôpitaux publics, a souligné la délégation. Les comités régionaux susmentionnés entrent en contact avec la mère pour chercher à connaître l'identité du père et, le cas échéant, aident la mère en l'accueillant dans un foyer social, a-t-elle précisé. La délégation a fait part des nombres d'enfants ainsi placés en adoption, en kafalah, en famille élargie et en institutions en 2009. Un membre du Comité ayant souligné qu'on ne doit pas partir du principe qu'une mère célibataire est incapable d'élever son enfant, la délégation a précisé qu'en 2009, il y a eu 110 cas où des mères célibataires ont pu garder leurs enfants avec elles. La mère célibataire jouit d'une protection sociale très avancée; il y a à Tunis deux centres sociaux accueillant ces femmes lorsqu'elles en ont besoin, a souligné la délégation. En 2009, les services compétents sont parvenus à réconcilier 354 de ces femmes avec leurs familles, a indiqué la délégation. L'intérêt supérieur de l'enfant commande qu'il reste prioritairement avec sa mère ou auprès de sa famille élargie, a-t-elle souligné.

L'enfant né hors mariage n'est pas privé d'héritage si l'on peut prouver par test ADN qu'il est l'enfant de telle et telle personne, a ajouté la délégation.

Les enfants abandonnés sont pris en charge jusqu'à l'âge de six ans dans les institutions du Ministère des affaires sociales; pour les enfants de 6 à 18 ans, voire au-delà s'ils sont toujours étudiants, ils sont pris en charge dans les «centres intégrés de la jeunesse et de l'enfance», a indiqué la délégation.

Pour ce qui est des plaintes déposées par des enfants en cas de violation de leurs droits, la délégation a indiqué ne pas disposer de données ventilées permettant de déterminer si elles sont déposées par des enfants ou des adultes au nom de ces derniers.

En ce qui concerne la question des Berbères et de l'usage de leur langue, la délégation a rappelé que cette question avait été débattue il y a peu devant le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale. Selon une étude souvent citée par le Congrès mondial amazigh, les «Berbérisants» n'ont eu qu'un intérêt limité pour l'étude du berbère en Tunisie du fait que les locuteurs de cette langue ne dépassent pas 1% de la population. Il n'y a pas de refus d'enregistrement pour les noms berbères, a par ailleurs assuré la délégation; le refus d'enregistrement d'un nom ne peut être opposé que pour les seuls noms qui choquent l'opinion publique.

Pour ce qui est des questions de santé, la délégation a souligné que le programme de santé maternelle et infantile est l'un des plus importants des programmes de santé du pays. Pour ce qui est du taux d'accouchements assistés, la Tunisie est passée de 72% en 1989 à 96% en 2006 et espère atteindre les 100% d'ici 2012-2013, a ajouté la délégation. Pour lutter contre l'anémie, du fer est délivré gratuitement aux femmes enceintes, a-t-elle poursuivi. En 2003, la Tunisie comptait 100 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes; grâce aux efforts déployés pour lutter contre ce phénomène, ce taux est tombé à 36,4 pour 100 0000 et l'objectif est d'atteindre 20 pour 100 000 en 2015, a précisé la délégation.

Actuellement, a par ailleurs indiqué la délégation, toute femme qui a accouché peut prendre six mois de congés; si la femme décide de revenir au travail avant ces six mois, elle bénéficie de la possibilité d'horaires adaptés pour allaiter.

La Tunisie s'est fixé pour objectif de diminuer de 10% le nombre de fumeurs dans le pays entre 2008 et 2015, a poursuivi la délégation, faisant par ailleurs part du programme «Non à la première cigarette» qui a été mis en place, eu égard à l'abaissement enregistré de l'âge de la première cigarette.

En Tunisie, l'âge minimum d'admission à l'emploi est fixé à 16 ans et, en dessous de cet âge, il n'y a pas de travail des enfants, a indiqué la délégation. Entre 16 et 18 ans, l'enfant bénéficie du statut d'apprenti et de toute la couverture sociale adéquate, qu'il travaille en entreprise ou à domicile. Pour l'année 2009, le nombre de signalements d'exploitation économique d'enfants s'est élevé à 87, a précisé la délégation.

En ce qui concerne l'administration de la justice pour mineurs, la délégation a déclaré que l'enfant délinquant a lui aussi besoin de protection car l'être humain ne naît pas délinquant. Un volet du Code de protection de l'enfance porte sur les relations de l'enfant avec les organes de protection, dans l'optique de trouver des solutions au problème de la délinquance juvénile; la priorité y est accordée à la prévention et à l'éducation. Quel que soit le crime commis, la peine maximale imposée à un enfant ne peut dépasser dix années d'emprisonnement, a poursuivi la délégation. Si l'enfant a moins de 13 ans, il est présumé ne pas pouvoir enfreindre le Code pénal, a-t-elle précisé. Un enfant de moins de 15 ans ne sera pas emprisonné, a-t-elle ajouté.

La délégation a rappelé que la Tunisie avait signé un accord avec le Comité international de la Croix-Rouge afin de permettre à ce dernier d'accéder aux centres de détention - aux établissements pénitentiaires et de détention préventive -, y compris aux centres de détention pour mineurs délinquants. Depuis 2005 que cet accord a été signé, de nombreuses visites ont ainsi été effectuées, a-t-elle indiqué. Les juges pour enfants peuvent se rendre dans ces centres pour y contrôler la situation des enfants, tout comme, d'ailleurs, les membres du Comité supérieur des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le taux de récidive des délinquants juvéniles n'est pas si élevé que cela, a assuré la délégation; il n'en demeure pas moins que les autorités tunisiennes s'efforcent malgré tout d'abaisser encore davantage ce taux. La délégation a par ailleurs indiqué ne pas être en mesure de fournir des éléments de réponse précis à la question, soulevée par un membre du Comité, concernant ce que recouvre la notion d' «infraction de caractère social et familial» mentionnée dans le rapport.

En ce qui concerne la pauvreté, la délégation a indiqué que le taux de 3,8% concernant la pauvreté absolue en Tunisie est celui qui est donné par la Banque mondiale. Si l'on y ajoute la population vulnérable, c'est-à-dire celle qui ne bénéficie pas des bienfaits de la croissance, il se peut que ce taux dépasse les 3,8%, pour se situer autour de 7 ou 8%, a ajouté la délégation; mais même dans ce cas, le taux n'atteint pas les 11% mentionnés par certains.

Il n'y a pas du tout d'enlèvements d'enfants en Tunisie, a assuré la délégation, pas plus que de vente d'organes. Un texte a été adopté dans les années 1990 concernant la transplantation d'organes; ce texte met en garde contre la vente d'organes et criminalise toute transaction portant sur des organes.

La Tunisie n'est pas un pays d'origine ou de destination de la traite de personnes, a par ailleurs assuré la délégation. Néanmoins, a-t-elle poursuivi, de par sa situation géographique, la Tunisie connaît le problème de la migration illégale ou clandestine, par voie maritime, à destination de l'Europe; ce problème peut toucher aussi bien des ressortissants tunisiens que des étrangers et la Tunisie peut donc - uniquement dans ce contexte – être alors considérée comme un pays de transit.

Les autorités tunisiennes ne harcèlent pas, contrairement à ce que prétendent certaines organisations non gouvernementales, les femmes qui portent le hijab en public, a d'autre part assuré la délégation. La jurisprudence tunisienne telle qu'exprimée par le tribunal administratif dans une affaire de janvier 2008 reconnaît la légalité de la circulaire 102 dans laquelle le Ministère de l'éducation nationale exhorte en substance le personnel enseignant à éviter de porter des vêtements à caractère sectaire, voile islamique inclus.

En Tunisie, l'homosexualité est certes criminalisée en vertu d'un texte datant des années 1930, mais en fait, ce texte n'est plus appliqué, a assuré la délégation.

Au niveau du Code sur le statut personnel, le mariage coutumier est prohibé, tout comme la polygamie, a enfin souligné la délégation. On ne trouve plus de mariages coutumiers, lesquels sont en train de disparaître du fait, en particulier, de la tolérance qui se répand à l'égard des relations hors mariage, a-t-elle conclu.


Observations préliminaires

MME KAMLA DEVI VARMAH, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Tunisie, a remercié la délégation pour sa participation à ce dialogue très fructueux avec le Comité. Ce dialogue a été d'un excellent niveau en ce sens que la délégation a répondu aux questions des experts avec beaucoup de franchise et de précision, a-t-elle souligné. Ce dialogue permet de disposer d'un état des lieux de la situation actuelle des droits de l'enfant en Tunisie; aussi, les recommandations que le Comité adoptera ultérieurement permettront-elles au Gouvernement tunisien de prendre des mesures générales aux fins de la mise en œuvre pleine et entière de l'ensemble de la Convention, a déclaré Mme Varmah. Ces recommandations porteront notamment sur les libertés et droits civils, la protection de la vie privée et le droit de ne pas être soumis à la torture, ainsi que sur le droit des filles à l'égalité s'agissant notamment des questions d'héritage, a précisé la rapporteuse.


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CRC10/027F