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Annual award ceremony of the Global Studies Institute

Michael Møller
Speech

3 décembre 2015
Cérémonie annuelle de remise des diplômes du Global Studies Institute, Université de Genève

Remarks by Mr. Michael Møller
United Nations Under-Secretary-General
Director-General of the United Nations Office at Geneva

Cérémonie annuelle de remise des diplômes,
Global Studies Institute, Université de Genève
Thursday, 3 December 2015 at 18.30
Uni-Mail, Geneva


Monsieur le Vice-Recteur
Monsieur Le Directeur [du Global Studies Institute]
Mesdames et Messieurs les Professeurs,
Chers parents,
Et surtout, chers diplômés:

Félicitations à vous tous. Cette cérémonie appartient avant tout aux diplômés. Je vous félicite d’avoir persisté, évolué et grandi face aux défis qu’un diplôme universitaire – et la vie d’étudiant – représentent. Vous pouvez vous réjouir des nouvelles amitiés que vous avez nouées pendant vos études, et qui vont vous accompagner tout au long de votre vie.

Les études universitaires, ce n’est pas seulement l’apprentissage de faits. Dans un domaine tel que les relations internationales, elles provoquent aussi une autoréflexion sur soi-même et sur sa place dans la société, à la fois locale et globale.

Même en plein milieu de vos examens et sans même que vous vous en rendiez compte, les études sont un exercice d’équipe, surtout dans le cadre complexe des études des affaires internationales, où il n’y a pas toujours une seule réponse correcte. On vit dans un monde dans lequel les défis globaux, nationaux et locaux sont liés et ne peuvent pas toujours être clairement séparés. Les incertitudes quant à la bonne approche à ces tâches sont nombreuses. Néanmoins, l’orientation donnée par les professeurs est primordiale. L’oreille attentive de la famille ou des amis et leurs points de vue sont essentiels face à nos doutes quant à la conclusion appropriée.

Je ne connais personne ayant poursuivi des études universitaires, sans ces moments d’incertitude. Mais vous avez tous surmonté ces défis ensemble. Vous vous êtes encouragés mutuellement et vous avez partagé la joie dans les moments de succès. C’est pour cela que la cérémonie de ce soir vous appartient, et je suis honoré d’y participer.

L’acquisition des connaissances se poursuit tout au long de la vie. La formation universitaire n’est qu’une étape de ce long parcours, mais c’est une étape importante. A l’université, on nous apprend à utiliser les outils nécessaires pour transformer la curiosité humaine en progrès humain. Et j’espère que beaucoup d’entre vous choisiront d’appliquer ces outils dans la promotion des droits, de la paix et du bien-être global, qui sont au cœur du travail effectué par les organisations internationales telle que la mienne, l’ONU.

Nous vivons dans un monde de plus en plus interdépendant. Un évènement dans un coin du monde peut avoir un impact direct sur les gens de l’autre côté de notre planète. Pensons par exemple à la jeune Malala Yousafzei. Son activisme au Pakistan et sa détermination face à la répression ont permis de mettre en place et d’accéléré un mouvement global pour l’éducation des filles. Ce mouvement a donné un coup de pouce aux régions en voie de développement dans leurs efforts d’éliminer la disparité entre les sexes dans l’enseignement primaire, secondaire et supérieur.

Cette interdépendance globale, facilitées par les nouvelles technologies de communication, permet aux individus de prendre part à la gouvernance internationale. Et je vous encourage vivement à en profiter. Mais elles peuvent aussi être utilisées pour déstabiliser le système international. Dans un monde plus fragmenté que jamais, où on observe un manque de confiance dans les normes, règles et institutions de la gouvernance à tous les niveaux, une telle déstabilisation est un danger réel. Notre réponse à ces dangers doit entre-outre être basée sur des valeurs. J’espère les connaissances et le savoir-faire, que vous avez accumulés pendant vos études, ont été complétés par des valeurs chères à l’humanité.

La charte des Nations Unies contient des valeurs qui ont inspiré ma carrière dans cette organisation que j’ai rejoint il y a 36 ans. Alors que nous fêtons le septantième anniversaire de la charte et qu’en même temps nous nous trouvons confrontés à la plus grande crise de réfugiés en Europe depuis la seconde guerre mondiale, les principes de tolérance et d’unité sont plus actuels que jamais. Comme l’est aussi la proclamation de « notre foi dans les droits fondamentaux de l'homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l'égalité de droits des hommes et des femmes, ainsi que des nations, grandes et petites », telle que soulignée dans la préambule de la charte.

Ces principes et valeurs donnent un sens aux efforts de tous les acteurs de la Genève internationale et du monde entier pour un meilleur avenir. Le travail des organisations basées à Genève a un impact positif sur chaque individu partout dans le monde, par exemple, la vaccination des millions d’enfants contre toutes sortes de maladies, la protection des droits de l’homme, la standardisation des panneaux de signalisation routière au niveau global, la prise en charge de millions de personnes dans des camps de réfugiés, ou encore l’utilisation de téléphones mobiles.

Souvent, ces efforts et le travail des employés des organisations internationales consistent en des tâches moins glorieuses, comme la rédaction de rapports ou l’organisation de réunions. A certaines occasions, notre travail peut aussi être dangereux. J’ai perdu plusieurs collègues et amis dans des missions politiques et de maintien de la paix. Mais les valeurs et principes des Nations Unies m’ont aidé à continuer à avancer. Et, comme beaucoup d’entre vous peuvent le ressentir aujourd’hui lors de votre remise de diplôme, la réussite est d’autant plus appréciée quand on lui donne un sens.

Mesdames et messieurs, chers diplômés,

Nous avons déjà fait beaucoup de progrès. Dans les septante années qui ont suivi la création des Nations Unies, la communauté internationale a réussi à mettre en place des programmes qui nous permettent de vivre en meilleure santé et plus longtemps, ainsi que d’être mieux éduqués. Mais les structures du système international, et des institutions des Nations Unies en particulier, ne reflètent pas toujours les changements significatifs intervenus depuis la création de ce système qui date principalement de la période après la deuxième Guerre Mondiale.

Pour aborder des problèmes complexes de nos jours, il faut des structures horizontales au niveau de la gouvernance globale mais aussi aux niveaux régional, national et local. Pour cela, une éducation interdisciplinaire comme la vôtre ici au Global Studies Institute est indispensable, car elle vous donne les outils nécessaires pour l’analyse des situations complexes. Rappelons-nous de la crise d’Ebola, initialement considérée comme une crise de santé. Assez rapidement, elle est devenue une crise de nourriture, de sécurité et de gouvernance au niveau national aussi bien qu’au niveau international. La situation s’est améliorée seulement après avoir mobilisé des acteurs dans tous ces secteurs – y compris l’Université de Genève qui a collaboré avec d’autres acteurs de la Genève internationale pour le développement de vaccins contre Ebola.

Il est également primordial de pouvoir s’ajuster et de s’adapter aux changements rapides dans ce monde interconnecté. Quelques-uns parmi vous se sont probablement spécialisés dans l’étude de l’Union Européenne. Quand vous avez commencé vos études afin de décrocher le diplôme dont nous célébrons la remise aujourd’hui, l’Europe était en pleine crise économique. La possibilité d’un « Grexit » était vue par beaucoup comme le « test ultime» pour l’Union. En 2015, la crise des réfugiés et de la migration confronte les institutions et les leaders à des nouveaux défis. Et depuis quelques semaines, la coopération dans le secteur de la sécurité en Europe est devenue une priorité.

Avec des défis si sérieux à des intervalles si courts, nos institutions et nos dirigeants font de leur mieux pour gérer les crises multiples qui interviennent à un rythme très rapide. Mais ils ont aussi des limites humaines comme nous tous. S’y ajoute les limites structurelles du système international qui ne répondent plus aux défis d’aujourd’hui.

Les dix-sept objectifs du développement durable, adoptés il y a deux mois par l’Assemblé Générale de l’ONU, proposent une approche inclusive. Ils servent d’opportunité pour réviser la manière du fonctionnement du système international, renforcer l’approche horizontale et des synergies entre les différents acteurs – y inclus le secteur privé, la société civile, les think tanks et le monde académique. Le défi pour la mise en œuvre de ces objectifs est certes gigantesque. Mais c’est réalisable si nous sommes ouverts aux nouvelles idées et opportunités comme les technologies avancés. Par exemple, l’usage des « drones domestiques » [véhicules aériens sans pilote] monte en flèche depuis les dernières années. A côté des débats sur la sécurité et les droits de l’homme, intimement liés à ce développement, l’Union Postale Universelle a commencé à réfléchir sérieusement à la possibilité de livrer les colis postaux en utilisant des drones. Cela montre que les innovations peuvent être appliquées à bien plus de situations qu’était prévues lors de leur développement si on maintient un esprit d’imagination et de créativité pour le bien être de l’humanité.

Chers diplômés,
Face à l’actualité et aux défis internationaux croissants, il est facile de perdre l’espoir. Et la situation dans laquelle vous vous trouvez, à la frontière entre le monde des études et celui du travail, peut engendrer des doutes. Mais vos études à l’Université de Genève – partenaire important de la Genève internationale et centre d’excellence en études internationales – vous a très bien préparé. Il y a une collaboration importante entre l’ONU et l’Université de Genève, qui continue à former des jeunes bien qualifiés pour les besoins du système international. J’ai été moi-même témoin de la qualité de cette excellente formation avant-hier quand j’ai assisté au séminaire sur la Gouvernance Globale enseigné par Madame Calmy-Rey. Dans le cadre de leur enseignement les étudiants ont simulé des négociations dans le domaine du désarmement. En tant que Secrétaire général de la Conférence du désarmement, qui est bloquée depuis presque 20 ans, j’ai quitté le séminaire avec beaucoup d’inspiration et de nouvelles idées. Il reste encore à convaincre les Etats membres de la Conférence du désarmement.

La vie est faite de tentatives et d’erreurs. J’en ai certainement fait au cours de ma carrière. Mais vous avez prouvé que vous aviez le courage d’essayer, notamment lors du premier examen que vous avez dû écrire, ou au moment où vous avez dû choisir la spécialisation de votre diplôme. Si vous vous souvenez de ce que vous avez appris pendant ces années ici à l’université, et si vous vous souvenez des raisons pour lesquelles vous avez choisi d’entreprendre ces études, je suis optimiste quant à vos chances de trouver le bon chemin.
J’espère que ce chemin vous amènera à rejoindre les efforts de mes collègues partout dans le monde, dans le secteur privé, les ONG, les organisations internationales ou dans le secteur académique pour trouver des solutions aux défis auxquels nous faisons face. Un vrai changement positif et durable est possible. Et chaque individu peut et doit y contribuer grâce à son expertise, ses connaissances et sa motivation. Je me joins à vos familles et vos professeurs ici présents pour vous souhaiter bonne chance pour votre futur.

Et encore une fois, félicitations!