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Le Conseil se penche sur les situations des droits de l’homme au Cambodge, en Somalie et en République centrafricaine

Compte rendu de séance

 

Après avoir achevé, en entendant plusieurs délégations*, son dialogue entamé hier avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Cambodge, le Conseil des droits de l’homme a tenu ce matin un dialogue avec l’Experte indépendante chargée d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie, Mme Isha Dyfan.  Il a en outre tenu un dialogue avec l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine, M. Yao Agbetse.

Présentant son rapport, qui couvre la période allant du 1er juillet 2022 au 30 juin 2023, Mme Dyfan a indiqué que la discrimination à l'égard des femmes, des filles, des jeunes, des minorités et des personnes handicapées demeure omniprésente dans tous les aspects de la société somalienne.  Elle s’est néanmoins dite encouragée par les efforts de réconciliation déployés par le Gouvernement.

Au cours de la période considérée, le Gouvernement a fait de la sécurité sa priorité absolue et a lancé une opération militaire offensive avec les milices claniques, les troupes de la Mission de transition de l'Union africaine en Somalie et le Commandement des États-Unis pour l'Afrique contre le groupe militant Al-Shabaab, a rappelé Mme Dyfan. Toutes ces forces doivent continuer à respecter les principes des droits de l'homme et du droit international humanitaire, a-t-elle souligné.  Cependant, l'offensive militaire a entraîné une recrudescence marquée des attaques d'Al-Shabaab visant des civils et des membres des forces de sécurité, a poursuivi l’Experte indépendante, se disant gravement préoccupée par la poursuite du conflit à Laascaanood, qui a fait payer un lourd tribut aux civils.  La situation humanitaire reste désastreuse en Somalie, a souligné Mme Dyfan, appelant la communauté internationale à accroître son aide.

L’Experte indépendante a en outre évoqué des tendances inquiétantes d'intimidation, de harcèlement, d'arrestation et de détention de journalistes et des restrictions injustifiées de la liberté d'expression et des médias qui ont conduit à l'autocensure ou à la fuite de plusieurs journalistes du pays.

Dans le contexte du conflit en cours, ce sont les enfants et les jeunes Somaliens qui continuent de souffrir le plus et leur avenir reste sombre, a déploré Mme Dyfan, dénonçant le recrutement et l'utilisation d'enfants soldats par les forces combattantes.

Suite à cette présentation, la Somalie a fait une déclaration en tant que pays concerné, avant que de nombreuses délégations** ne prennent part au dialogue avec l’Experte indépendante.

Présentant son rapport, l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine a déclaré que plus d’une décennie de mobilisation des Nations Unies au chevet de la République centrafricaine a permis d’éviter le pire. Malgré tout, a-t-il souligné, les défis auxquels le pays reste confronté demeurent énormes, notamment dans les domaines de la justice et de la sécurité, de la réconciliation et de la paix, de la gouvernance, de la santé, de l’éducation et de la lutte contre les changements climatiques.

Après avoir évoqué un certain nombre de développements positifs, M. Agbetse a souligné que depuis octobre 2022, la situation politique reste marquée par des tensions politiques et une crise constitutionnelle résultant de l’annulation par la Cour constitutionnelle des décrets présidentiels visant à créer un comité chargé de la rédaction d’une nouvelle constitution.  Le contexte sécuritaire est resté tendu, a-t-il par ailleurs souligné, en référence, notamment, à la multiplication des attaques par des groupes armés, dont la Coalition des patriotes pour le changement. L’insécurité accroît la dépendance de la population à l’aide humanitaire, a-t-il fait observer.  Sur le plan humanitaire, M. Agbetse a en outre attiré l’attention sur le conflit au Soudan et l’insécurité au Tchad, qui ont généré une vague de réfugiés en République centrafricaine.

De juillet 2022 à mars 2023, 650 atteintes aux droits de l’homme ont été perpétrées par des groupes armés, touchant 1190 victimes, a indiqué M. Agbetse, évoquant en particulier des actes perpétrés par les combattants de l’Unité pour la Paix en Centrafrique (UPC) opérant dans l’est et le centre du pays ainsi que par ceux du Groupe 3R actifs dans l’ouest.  L’Expert a également souligné que « les forces bilatérales russes sont aussi impliquées dans de nombreux cas de violations de droits de l’homme lors d’opérations réalisées seules ou conjointement avec les forces de défense et de sécurité ».

Plaidant pour une réorientation de la stratégie d’intervention des agences de l’Équipe de pays des Nations Unies, M. Agbetse a affirmé que l’accent devrait être davantage mis sur une collaboration renforcée avec les mécanismes et services de l’État qui, quoique faibles et en déficit de ressources, n’en sont pas moins engagés à accomplir les missions qui sont les leurs.

Suite à cette présentation, la République centrafricaine a fait une déclaration en tant que pays concerné, avant que plusieurs délégations*** ne prennent part au dialogue avec M. Agbetse.

 

Cet après-midi, à partir de 15 heures, le Conseil doit tenir un dialogue sur la situation des droits de l’homme en Haïti, entendre la présentation de plusieurs rapports de pays du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et du Secrétaire général des Nations Unies, et entamer son débat général au titre de l’assistance technique et du renforcement des capacités.

 

Dialogue avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Cambodge

Aperçu du dialogue

Poursuivant le dialogue entamé hier avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Cambodge, de nombreux participants ont exprimé leur préoccupation face aux restrictions des droits civils et politiques dans le pays. Un intervenant s’est fait l’écho de l’inquiétude du Rapporteur spécial concernant l’environnement dans lequel se sont déroulées les élections nationales, avec la disqualification du principal parti d'opposition et les pressions exercées sur les médias indépendants et la société civile.  Le représentant d’une organisation non gouvernementale (ONG) a fustigé une « campagne systématique de répression » consistant à éliminer la principale opposition politique, à poursuivre au pénal et à emprisonner les dirigeants de l’opposition, à fermer les médias indépendants et à restreindre sévèrement les droits à la liberté d’expression et d’association des principales institutions de la société civile.  Des préoccupations ont également été exprimées concernant la persistance de la répression pénale et du harcèlement des défenseurs des droits de l’homme dans le domaine de l’environnement.

Face à un système judiciaire qui manque d’indépendance, la perspective de procès équitables et les garanties d’une procédure régulière sont pratiquement inexistantes pour ceux qui sont perçus comme critiques ou comme une menace pour les intérêts des élites au pouvoir, a-t-il été affirmé.

Le pays a été appelé à libérer les défenseurs des droits de l’homme, les dirigeants syndicaux et les dissidents politiques détenus, ainsi qu’à abandonner les charges retenues contre eux. La nouvelle génération de dirigeants a été invitée à ouvrir l’espace civique et politique, à engager un dialogue constructif avec les acteurs civils et politiques et à garantir un environnement politique ouvert.

La promotion de la liberté d’expression, d’association et de pensée soutiendra le secteur économique cambodgien en encourageant une plus grande innovation grâce au partage ouvert d’idées et d’informations, a-t-il été souligné.

Au cours du dialogue, plusieurs délégations ont souligné l’importance – pour les travaux du Conseil et des procédures spéciales – du dialogue et de la coopération avec le pays concerné, en évitant toute politisation. Il a en outre été souligné que les rapports des titulaires de mandats doivent être fondés sur des sources d'information fiables et crédibles, en tenant compte des caractéristiques nationales de chaque pays.

Les progrès du Cambodge en matière de droits économiques, sociaux et culturels ont été salués par plusieurs délégations, l’une d’elles saluant tout particulièrement la réponse du Cambodge face à la COVID-19, ainsi que son engagement en faveur du climat, de l’éducation et des soins de santé.

Ont également été salués le renforcement des droits économiques des populations autochtones ; l’accès des personnes handicapées aux programmes de protection sociale ; l’éducation gratuite pour les jeunes issus de familles pauvres et vulnérables ; les mesures visant à maintenir l’harmonie religieuse dans la société ; ainsi que les progrès dans la lutte contre la traite des êtres humains et la criminalité sur Internet.

*Liste des intervenants : Australie, Royaume-Uni, Arabie saoudite, République démocratique populaire lao, Yémen, Venezuela, République populaire démocratique de Corée, Bélarus, Viet Nam, Japon, Sri Lanka, Brésil, Qatar, Kirghizistan, Philippines, Cuba, Timor-Leste, Liban, Türkiye, Inde, ainsi que Save Cambodia, Human Rights Now, Earthjustice, Human Rights Watch, Lawyers' Rights Watch Canada, Commission internationale de juristes, CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens, et Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement.

Réponses et remarques de conclusion du Rapporteur spécial

M. VITIT MUNTARBHORN, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Cambodge, s’est réjoui de la libération, cette semaine, de sept militants et opposants politiques. Il a souligné que la tenue, l’an prochain, d’élections offrira l’occasion de favoriser l’ouverture.

S’agissant de la lutte contre la traite, le Rapporteur spécial a fait remarquer qu’il s’agit maintenant de s’accorder sur le statut – immigrants illégaux, victimes ou auteurs – des personnes arrêtées suite aux raids effectués dans le cadre de cette lutte.

Pour protéger les défenseurs des droits de l’homme, a poursuivi M. Muntarbhorn, un ordre très clair doit être donné pour que cessent les attaques à leur encontre ; des investigations transparentes doivent être menées ; justice doit être rendue ; des réparations doivent être prévues pour les victimes et leurs familles ; les lois, politiques et pratiques doivent être réformées pour contrecarrer la violence et les discriminations ; l’espace civique doit être ouvert pour les défenseurs des droits de l'homme et les opposants politiques ; et les « lois draconiennes » mentionnées dans le dernier rapport [du Rapporteur spécial] doivent être réformées.

M. Muntarbhorn a par ailleurs insisté sur la nécessité de mettre fin au harcèlement de l’opposition politique et des défenseurs des droits de l'homme ; de répondre aux vulnérabilités des différents groupes de la société ; d’assurer davantage de protection sociale après la pandémie de COVID-19, en particulier pour les personnes vulnérables ; ainsi que d’adopter des stratégies soucieuses de la parité. Sur ce dernier point, le Rapporteur spécial a regretté qu’il n’y ait aujourd’hui que trois femmes parmi la trentaine de membres du Gouvernement.

Dialogue avec l’Experte indépendante chargée d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie

Le Conseil est saisi du rapport de l’Experte indépendante chargée d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie (A/HRC/54/78).

Présentation du rapport

Mme Isha Dyfan, Experte indépendante chargée d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie, a précisé que son rapport couvrait la période allant du 1er juillet 2022 au 30 juin 2023.

La discrimination à l'égard des femmes, des filles, des jeunes, des minorités et des personnes handicapées demeure omniprésente dans tous les aspects de la société somalienne, a-t-elle indiqué. Elle est enracinée dans des structures traditionnelles telles que le système clanique et les normes et pratiques patriarcales, qui imprègnent tous les aspects de la vie sociale, économique et politique du pays et créent un potentiel de tensions et de conflits récurrents, a-t-elle souligné.

Mme Dyfan s’est en outre dite encouragée par les efforts de réconciliation déployés par le Gouvernement, en particulier la nomination de l'ancien chef du groupe militant Al-Shabaab, Mukhtar Robow, au poste de Ministre des affaires religieuses. Elle a aussi salué l'adoption par le Parlement de onze lois relatives à la sécurité et la conclusion pacifique des élections [sur la base d’]« une personne, une voix » au Puntland en mai 2023, qui augmentent les perspectives de suffrage universel direct en Somalie.

Au cours de la période considérée, le Gouvernement a fait de la sécurité sa priorité absolue et a lancé une opération militaire offensive avec les milices claniques, les troupes de la Mission de transition de l'Union africaine en Somalie et le Commandement des États-Unis pour l'Afrique contre le groupe militant Al-Shabaab, a rappelé Mme Dyfan. Toutes ces forces doivent continuer à respecter les principes des droits de l'homme et du droit international humanitaire, a-t-elle souligné.

Cependant, l'offensive militaire a entraîné une recrudescence marquée des attaques d'Al-Shabaab visant des civils et des membres des forces de sécurité, a poursuivi l’Experte indépendante. Selon le rapport du Secrétaire général couvrant les développements significatifs du 8 février au 7 juin 2023, le premier trimestre de 2023 a connu le plus grand nombre d'incidents liés aux engins explosifs improvisés par rapport à tout autre trimestre depuis 2017, a-t-elle indiqué.  Elle s’est dite gravement préoccupée par la poursuite du conflit à Laascaanood, « qui a fait payer un lourd tribut aux civils et a entraîné la destruction d'infrastructures civiles, notamment d'installations médicales et d'écoles, provoquant d'importants déplacements de personnes déplacées vers les zones environnantes et des flux de réfugiés ». Selon une évaluation interinstitutions du Bureau de la coordination des affaires humanitaires, plus de 185 000 personnes ont été déplacées de Laascaanood, aggravant la situation humanitaire, a souligné l’Experte indépendante, avant de réitérer l'appel lancé précédemment aux parties au conflit pour qu'elles conviennent d'une cessation immédiate des hostilités et règlent leurs différends par le dialogue.

L’Experte indépendante a en outre évoqué des tendances inquiétantes d'intimidation, de harcèlement, d'arrestation et de détention de journalistes et des restrictions injustifiées de la liberté d'expression et des médias qui ont conduit à l'autocensure ou à la fuite de plusieurs journalistes du pays. Mme Dyfan a condamné fermement de tels actes et appelé le Gouvernement à cesser immédiatement d'utiliser la législation de 1964 relative au Code pénal contre les journalistes et les professionnels des médias lorsqu'elle porte atteinte à la liberté d'opinion et d'expression.

L’Experte indépendante a poursuivi en indiquant que la situation humanitaire reste désastreuse en Somalie après cinq saisons consécutives de pluies insuffisantes et inférieures à la moyenne, exacerbées par les changements climatiques. Elle a dès lors appelé la communauté internationale à accroître son aide, à combler le déficit de financement de l'aide humanitaire, afin que les organisations humanitaires puissent disposer des fonds et des ressources dont elles ont besoin pour réagir de manière appropriée dans les situations d'urgence.

Dans le contexte du conflit en cours, ce sont les enfants et les jeunes Somaliens qui continuent de souffrir le plus et leur avenir reste sombre, a déploré Mme Dyfan. Le recrutement et l'utilisation d'enfants soldats par les forces combattantes ont limité la scolarisation des enfants, ce qui a amené certains jeunes à rejoindre le groupe militant Al-Shabaab et d'autres à fuir le pays à la recherche d'un refuge sûr et d'une survie économique, a-t-elle indiqué.

Tout en saluant le lancement de la Charte des femmes pour renforcer la participation des femmes à la vie publique et du Plan d'action national pour les femmes dans le secteur maritime, l’Experte indépendante a souligné que la Somalie a besoin d'un cadre juridique contre la violence sexuelle liée au conflit, contre la violence domestique et contre l'impact des pratiques traditionnelles telles que les mutilations génitales féminines et les mariages d'enfants. Aussi, Mme Dyfan a-t-elle appelé le Gouvernement à adopter le projet de loi sur les infractions sexuelles et à prendre des mesures significatives en vue de la ratification de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. 

Pays concerné

La Somalie a indiqué regretter que le Gouvernement somalien ne puisse pas accorder à Mme Dyfan une visite sur le terrain, en raison des contraintes de sécurité et aussi pour des raisons techniques et organisationnelles, étant donné que les institutions gouvernementales au niveau fédéral et au niveau des États sont engagées dans la lutte contre le terrorisme. Ce contexte de grand défi est la seule raison qui a rendu impossible la visite de l'Experte indépendante en Somalie, a assuré la délégation.  Pour autant, a-t-elle fait savoir, le Gouvernement a adressé une invitation à l'Experte indépendante pour le mois de novembre prochain (2023) et a également décidé de renouveler son mandat pour une période d'un an au cours de la présente session du Conseil, « afin de mettre à jour et de finaliser son rapport qui sera basé sur des sources fiables avec des parties prenantes pertinentes ». 

S’agissant du rapport, la délégation a regretté que l'Experte indépendante ait utilisé la terminologie de « Somalie » et « Somaliland » comme nom du pays, ce qui est indirectement en contradiction avec le nom officiel de la Somalie en tant que « République fédérale de Somalie ». Il s'agit d'une préoccupation importante, car elle concerne directement la souveraineté et la représentation de la nation, a insisté la délégation somalienne.

La délégation a par ailleurs regretté que certaines actions et certains engagements du Gouvernement aient été négligés ou sous-représentés [dans le rapport de l’Experte indépendante], y compris ses efforts proactifs pour mobiliser divers intervenants sur des questions cruciales.

Enfin, la délégation a affirmé que des progrès significatifs ont été réalisés dans les domaines de la liberté des médias. Le Gouvernement reconnaît ainsi le rôle de premier plan que jouent les journalistes dans le processus de réconciliation, de paix et de construction des institutions démocratiques de gouvernement et garantit la liberté d'expression telle qu'elle est inscrite dans la Constitution provisoire, a-t-elle insisté. 

La délégation a en outre souhaité attirer l'attention du Conseil sur le fait que le défi actuel auquel le Gouvernement est confronté est l'escalade de la menace sécuritaire posée par Al-Shabaab. C'est pourquoi, elle a réitéré son appel à une plus grande solidarité dans cette bataille contre le groupe terroriste, afin de consolider les progrès réalisés jusqu'à présent et d'assurer la poursuite des progrès dans la promotion et la protection des droits de l'homme en Somalie.

Aperçu du dialogue

Le Gouvernement somalien a été félicité pour les efforts qu'il déploie pour le développement de la population et pour faire face à la détérioration de la situation en matière de sécurité. Ont notamment été saluées les initiatives prises par le Gouvernement pour promouvoir le bien-être des jeunes et des enfants, ainsi que les progrès réalisés afin de stabiliser et d’améliorer la situation des droits de l'homme dans le pays, notamment en renforçant l'état de droit et en promouvant une politique de réconciliation nationale. Plusieurs délégations ont exprimé leur soutien au Gouvernement somalien dans sa lutte contre le terrorisme.

Tout en reconnaissant les défis liés à l'offensive militaire en cours et à la menace terroriste continue posée par Al-Shabaab, d’aucuns ont insisté sur la nécessité pour le Gouvernement d'enquêter sur les allégations de recours excessif à la force par les forces de sécurité.  Il a été demandé à la Somalie d’accorder la priorité à l'obligation de rendre des comptes pour les violations des droits de l'homme et à la protection des civils, y compris pour ce qui est des enfants touchés par le conflit armé pendant cette offensive. La lutte contre l'impunité est l'épine dorsale d'une paix et d'une stabilité durables, a-t-il été souligné.

Plusieurs délégations ont fait part de leurs préoccupations s’agissant des conditions très difficiles dans lesquelles les journalistes exercent leur travail. Il est impératif que l'offensive en cours ne soit pas menée au détriment de la liberté d'expression, a-t-il été affirmé.

A par ailleurs été déplorée la grande vulnérabilité des femmes et des enfants face aux risques de violence, y compris de violence sexuelle et sexiste.

Dans ce contexte, la Somalie a été encouragée à adhérer, entre autres, à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Nombre de délégations se sont dites alarmées par la situation humanitaire « désastreuse » en Somalie. Un intervenant a dit craindre que la situation ne soit encore aggravée par les changements climatiques.  La communauté internationale a été appelée à apporter son assistance à la Somalie pour faire face aux effets néfastes des changements climatiques dans le pays et à poursuivre son soutien pour améliorer la sécurité alimentaire, à travers l’action humanitaire.

Durant ce dialogue, il a par ailleurs été regretté que l'Experte indépendante n'ait pas pu se rendre en Somalie au cours de la période considérée. Le Gouvernement somalien a dès lors été exhorté à collaborer avec l'Experte indépendante et à l'aider à effectuer une visite au cours de la prochaine période.

Plusieurs délégations ont rappelé leur attachement aux principes d’objectivité, de non-sélectivité, de non-politisation et d'universalité en matière de droits de l'homme. À cet égard, l'Experte indépendante a été invitée à s'acquitter de son mandat conformément au code de conduite applicable aux titulaires de mandats et dans le strict respect de la souveraineté de la Somalie.  D’aucuns ont ajouté que l'assistance technique et le renforcement des capacités doivent toujours se faire avec le consentement de l'État concerné.

**Liste des intervenants : Union européenne, Qatar, Égypte, Arabie saoudite, France, États-Unis, Chine, Fédération de Russie, Royaume-Uni, Yémen, Venezuela, Mauritanie, Soudan, Burundi, Botswana, Érythrée, ainsi que National Union of Somali Journalists (NUSOJ) ; Conseil universel des droits de l'homme ; East and Horn of Africa HR Defenders Project ; Minority Rights Group ; Centre du commerce international pour le développement ; Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme ; et Amnesty International.

Réponses et remarques de conclusion de l’Experte indépendante

MME DYFAN a indiqué qu’il fallait augmenter les programmes de renforcement des capacités dans le domaine de l’égalité entre hommes et femmes en Somalie. Il faut aussi fournir des outils de traduction et d’interprétation afin de faire connaître à toute la population les avancées en matière de droits de l’homme, a-t-elle plaidé.

S’agissant de sa visite sur le terrain, l’Experte indépendante a indiqué qu’elle comptait organiser un atelier et des tables rondes sur la liberté d’expression afin de mieux comprendre les restrictions de ce droit sur le terrain. Elle a aussi indiqué qu’elle allait organiser un forum sur les femmes journalistes afin de mieux comprendre leur travail et les défis qu’elles rencontrent dans le cadre de leur travail.

Le renforcement des capacités doit aussi être assuré pour les juges et les fonctionnaires judiciaires, a ajouté Mme Dyfan.

Dialogue avec l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine

Le Conseil est saisi du rapport de l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine (A/HRC/54/77, à paraître en français).

Présentation du rapport

M. YAO AGBETSE, Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine, a déclaré que plus d’une décennie de mobilisation des Nations Unies au chevet de la République centrafricaine a permis d’éviter le pire. Malgré tout, a-t-il souligné, les défis auxquels le pays reste confronté demeurent énormes, notamment dans les domaines de la justice et de la sécurité, de la réconciliation et de la paix, de la gouvernance, de la santé, de l’éducation et de la lutte contre les changements climatiques.

Parmi les développements positifs, l’Expert indépendant a salué l’adoption de la Politique nationale des droits de l’homme, estimant qu’elle témoigne de la volonté politique des autorités centrafricaines d’inscrire les droits de l’homme au cœur de l’agenda gouvernemental. Il s’est par ailleurs félicité de l’adoption de plusieurs lois, dont celles portant sur la répression de la corruption sous toutes ses formes et la tokenisation des ressources naturelles et foncières. D’autres initiatives sont en gestation en ce qui concerne les droits des femmes, avec notamment la mise en place de l’Observatoire national de la parité, a-t-il ajouté.

M. Agbetse a ensuite partagé certaines de ses préoccupations, s’agissant, notamment de la mise en œuvre des principaux instruments de paix et de réconciliation. En particulier, il a enjoint les autorités centrafricaines à prendre des mesures concrètes de mise en œuvre de la Feuille de route de Luanda de 2021.

Depuis octobre 2022, la situation politique reste marquée par des tensions politiques et une crise constitutionnelle résultant de l’annulation par la Cour constitutionnelle des décrets présidentiels visant à créer un comité chargé de la rédaction d’une nouvelle constitution, a poursuivi l’Expert. Un dialogue politique inclusif et authentique s’impose dans le contexte actuel, a-t-il insisté, estimant qu’il s’agit d’un préalable nécessaire à la reprogrammation des élections locales différées sine die.

Concernant le processus de désarmement, de démobilisation, de réintégration et de rapatriement, l’Expert indépendant a déclaré qu’à la date du 23 mars 2023, 4227 ex-combattants des 14 groupes armés signataires de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation avaient été effectivement désarmés et démobilisés, dont 254 femmes. Le 5 mai 2023, 600 ex-combattants des groupes armés ont rejoint les rangs des Forces armées centrafricaines après avoir bénéficié de trois mois de formation, a-t-il ajouté.

Le contexte sécuritaire est resté tendu, a toutefois nuancé M. Agbetse, en référence, notamment, à la multiplication des attaques par des groupes armés, dont la Coalition des patriotes pour le changement. Les attaques directes des groupes armés sur les populations, a-t-il poursuivi, sont perpétrées dans les villages, les sites miniers, les champs et sur les routes ; elles ont un impact sur l’activité économique des populations et engendrent des violations graves des droits de l’homme. L’arrivée de la saison sèche a exacerbé le climat d’insécurité avec des activités d’extorsions de fonds et de biens, des vols et des intimidations visant les commerçants, a-t-il ajouté.

L’insécurité accroît la dépendance de la population à l’aide humanitaire, a fait observer M. Agbetse. Empêchées de vaquer à leurs activités agricoles, commerciales et d’élevage, les populations ne peuvent pas remplir leurs greniers pour assurer leur sécurité alimentaire, constituer des semences pour les prochaines campagnes agricoles et accéder aux biens de première nécessité, a-t-il expliqué. Il a en outre fait observer que l’insécurité limite également le processus de restauration de l’autorité de l’État. 

Sur le plan humanitaire, M. Agbetse a attiré l’attention sur le conflit au Soudan et l’insécurité au Tchad, qui ont généré une vague de réfugiés en République centrafricaine. Ces deux crises humanitaires, a-t-il insisté, ont des répercussions économiques et sociales sur la vie des populations. Il a fait observer que la rareté des denrées alimentaires a entraîné une forte augmentation des prix de produits de nécessité vitale étant donné que le Soudan et le Tchad n’approvisionnent plus les localités frontalières.

De juillet 2022 à mars 2023, 650 atteintes aux droits de l’homme ont été perpétrées par des groupes armés, touchant 1190 victimes, a ajouté M. Agbetse, énumérant des incursions dans les villages, des attaques sur les sites miniers, des actes de torture, des meurtres, des enlèvements, des viols, des extorsions de biens et de fonds et des mariages forcés, perpétrés par les combattants de l’Unité pour la Paix en Centrafrique (UPC) opérant dans l’est et le centre du pays ainsi que par ceux du Groupe 3R actifs dans l’ouest. 

M. Agbetse a également souligné que « les forces bilatérales russes sont aussi impliquées dans de nombreux cas de violations de droits de l’homme lors d’opérations réalisées seules ou conjointement avec les forces de défense et de sécurité ». Il a également ajouté que 11 soldats du contingent tanzanien de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine ont été impliqués dans des cas d’exploitation et d’abus sexuels sur quatre victimes.

En ce qui concerne la lutte contre l’impunité et la réconciliation nationale, l’Expert indépendant a fait observer que des progrès ont été réalisés sur le front de la justice transitionnelle. Il a indiqué à cet égard que des membres du groupe armé 3R ont été condamnés à des peines d’emprisonnement pour des crimes contre l’humanité et crimes de guerre. Cette décision historique, a-t-il souligné, est une reconnaissance des souffrances des femmes victimes des violences sexuelles liées au conflit.

M. Agbetse a par ailleurs relevé le rôle primordial des institutions nationales chargées de la promotion des droits de l’homme, de l’état de droit, de la bonne gouvernance, et du respect des libertés et droits fondamentaux. Il a souligné que le renforcement des capacités des institutions nationales devrait passer par une réorientation de la stratégie d’intervention des agences de l’Équipe de pays des Nations Unies. L’accent devrait être davantage mis sur une collaboration renforcée avec les mécanismes et services de l’État qui, quoique faibles et en déficit de ressources, n’en sont pas moins engagés à accomplir les missions qui sont les leurs, a conclu l’Expert indépendant. 

Pays concerné

La République centrafricaine - par la voix de son Ministre d’Etat chargé de la justice, la promotion des droits humains et la bonne gouvernance, Garde des Sceaux, M. Arnaud Djoubaye Abazene - a reconnu que la situation des droits de l'homme dans le pays est mise à rude épreuve, en raison des effets pervers de la crise que le pays a traversée et dont il se relève progressivement. Le Ministre a fait observer que les groupes armés continuent de perpétrer des actions nuisibles contre certaines positions des Forces armées centrafricaines ainsi que sur la population civile. Il a affirmé que le Gouvernement demeure convaincu que seuls les mécanismes de l'Accord politique pour la paix et la réconciliation (APPR) et la Feuille de route de Luanda de 2021 permettront le retour à la paix durable. Il a souligné que les juridictions criminelles nationales ainsi que la Cour pénale spéciale poursuivent inexorablement leur travail pour la répression non seulement des actes liés au conflit, mais également des cas de violation des droits de l’homme en général. 

Le Ministre a attiré l’attention sur la rareté des ressources dont dispose l’État pour faire face à ses obligations régaliennes et pour apporter la réponse nécessaire à la fragilité du tissu économique et social qu’a engendrée cette crise imposée à la République centrafricaine. Il a lancé un appel en faveur de l’accroissement de l’appui de la communauté humanitaire et financière internationale. Cet appel se justifie d’autant plus au regard du nouveau défi majeur posé par l’afflux des réfugiés et demandeurs d’asile, a-t-il souligné. En effet, par dizaine de milliers, dont une majorité de femmes et d’enfants, les ressortissants soudanais ont traversé la frontière pour chercher en République centrafricaine la protection internationale, a-t-il indiqué. Il est devenu urgent que le plan de réponse humanitaire approuvé par les Nations Unies puisse être couvert par le financement requis, a-t-il conclu.  

Aperçu du dialogue

La situation des droits de l’homme en République centrafricaine reste fragile, ont souligné les participants au dialogue. La population souffre d’une violence persistante et généralisée, ainsi que de graves violations des droits de l’homme et d’un manque d’accès aux services de base, a-t-il été observé. Les autorités centrafricaines ont été invitées à prendre des mesures adéquates pour mettre un terme à l’impunité récurrente des crimes commis dans le pays.

Les délégations ont dénoncé les agissements des forces armées, des groupes armés et des mercenaires comme le groupe Wagner. Sur ce point, une délégation a estimé que le retrait des « mercenaires russes » est une condition indispensable à toute perspective de paix durable et à l’amélioration de la situation humanitaire.

Les efforts déployés par le Gouvernement centrafricain pour soutenir la paix sociale, parvenir à la réconciliation nationale et restaurer la sécurité et la stabilité dans tout le pays ont été salués par plusieurs délégations.

Un appel a été lancé pour que toutes les parties garantissent un accès humanitaire complet, sûr et sans entrave et l’acheminement de l’aide.

La situation des enfants a suscité l’inquiétude de plusieurs délégations. Face au faible taux de scolarisation et au manque de formation professionnelle, plusieurs intervenants ont appelé le Gouvernement et les partenaires internationaux à investir dans le secteur de l’éducation.  L’accès à une éducation de qualité aidera à mettre un terme à la traite de personnes et aux mariages précoces des filles ainsi qu’au recrutement et à l’utilisation d’enfants par les groupes armés, a-t-il été souligné.  Une intervenante a en outre déploré le taux élevé d’enfants incarcérés dans les prisons militaires.

Une délégation a exprimé son inquiétude face à la montée des tensions politiques dans le sillage du projet de référendum constitutionnel en République centrafricaine. Elle a exhorté le Gouvernement centrafricain à organiser des élections libres, transparentes, indépendantes et inclusives.

Il a par ailleurs été rappelé que l’Expert indépendant doit se conformer pleinement aux dispositions du code de conduite applicable à tous les titulaires de mandats et respecter les principes universels de la souveraineté des États et de la non-ingérence dans leurs affaires intérieures.  Une délégation a rappelé être opposée à toute politisation du Conseil et a souligné que les discussions ne devraient ici viser qu’à contribuer à la stabilité en République centrafricaine.

***Liste des intervenants : Norvège (au nom d’un groupe de pays), Union européenne, Égypte, Luxembourg, Irlande, France, États-Unis, Fédération de Russie, Royaume-Uni, Chine, Venezuela, Sénégal, Botswana, Soudan, Érythrée, ainsi que Agence des cités unies pour la coopération Nord-Sud, Défense des enfants - international, Centre du commerce international pour le développement, et Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme.

Réponses et remarques de conclusion de l’Expert indépendant

En ce qui concerne l’éducation, M. AGBETSE a reconnu que des défis demeurent pour ce qui est de la formation professionnelle des jeunes, notamment pour ce qui est de la formation technique agricole. A cet égard, il faut une mobilisation de l’État, mais également de l’Équipe de pays des Nations Unies, a-t-il préconisé.

Il faut que la réponse humanitaire puisse satisfaire les besoins des demandeurs d’asile et des réfugiés, mais aussi des rapatriés du conflit en République centrafricaine qui avaient fui mais sont revenus au pays, a par ailleurs souligné l’Expert indépendant.

Pour lutter contre l’impunité, M. Agbetse a préconisé de soutenir le fonctionnement des tribunaux militaires qui engagent les poursuites contre les forces de défense et de sécurité sur lesquelles pèsent des allégations de violations des droits de l'homme. Un soutien pourrait être apporté au fonds d’indemnisation destiné aux victimes, ainsi qu’à l’unité mixte qui s’occupe de la lutte contre les violences sexuelles liées au conflit, a-t-il ajouté.

M. Agbetse a par ailleurs estimé important de continuer à former les militaires, policiers et gendarmes à la protection des civils et de les déployer sur le terrain.

L’Expert indépendant a répété que des mesures doivent être prises face à l’essoufflement dans la dynamique de mise en œuvre de l’Accord de paix. La Feuille de route de Luanda doit également faire l’objet de mesures concrètes de mise en œuvre, a-t-il conclu. 

 

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