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Examen de la France au Comité des droits économiques, sociaux et culturels : des experts évoquent notamment des inégalités régionales et dans les territoires d’outre-mer, une hausse de la pauvreté, et la situation des mineurs non accompagnés

Compte rendu de séance

 

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné, hier matin et ce matin, le rapport périodique présenté par la France au titre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

Au cours de cet examen, un expert membre du Comité a salué les efforts déployés par le Gouvernement pour réduire le taux de chômage à 7,3%, soit, a-t-il souligné, le niveau le plus bas depuis 1982. Toutefois, l’expert a ajouté que si le taux de chômage diminuait, le taux de pauvreté augmentait depuis 2005 : en 2019, il atteignait ainsi 14,5% en France métropolitaine, avec 9,1 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté. L’extrême pauvreté, a-t-il été déploré, touche directement des banlieues, zones rurales et départements de l’outre-mer, ainsi qu'une certaine catégorie de la population française.

Une experte a insisté sur certaines disparités importantes entre les Départements et régions d’outre-mer et collectivités d’outre-mer et le reste de la France, relevant en particulier que dans ces DROM-COM, le taux de chômage était de 2,5 à 5 fois plus élevé, et le taux de pauvreté extrême de 5 à 15 fois plus élevé, qu’en France métropolitaine. Des inégalités persistantes ont également été signalées dans les secteurs de l’éducation, du logement et de la santé, y compris l'accès à l’eau potable.

Un expert s’est dit préoccupé par l’extrême précarité des enfants migrants isolés ou non accompagnés en France. A aussi été évoqué un problème de décrochage scolaire touchant de nombreux enfants roms, ainsi que des enfants vivant dans des territoires tels que la Guyane et Mayotte. Selon des informations reçues par le Comité, a mis en garde un expert, cent mille enfants n'auraient pas accès à l’école aujourd’hui en France.

Un autre expert a fait état d’une aggravation, depuis deux ans, des inégalités régionales au sein même de l'Hexagone. Des inquiétudes ont ainsi été exprimées au sujet de l’apparition en France de bidonvilles et de « déserts médicaux ». Enfin, la précarité de l’emploi a elle aussi été jugée préoccupante.

Présentant le rapport, Mme Delphine Borione, Ambassadrice pour les droits de l’homme au Ministère de l’Europe et des affaires étrangères de la France, a souligné que la France était une République sociale, 55% du produit intérieur brut français – l’un des pourcentages les plus élevés au monde, a insisté Mme Borione – étant redistribué dans des politiques publiques à composantes essentiellement sociales.

Mme Borione a mentionné l’adoption, en 2018, d’une Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, ainsi que d’autres mesures prises en faveur de l’accès effectif au logement ainsi qu’à l’éducation et à la culture, ou encore pour la reconnaissance politique du droit à un environnement propre, sain et durable. L’Ambassadrice a évoqué, d’autre part, une transformation profonde de l’action publique engagée en 2018 pour mieux prendre en compte la situation des populations dites Roms, qui vivent en France dans des campements dans des conditions de grande précarité.

Par ailleurs, a fait savoir Mme Borione, le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial, qui s’est tenu à Paris en juin dernier, a posé les bases d’un système renouvelé, pour qu’aucun pays n’ait à choisir entre la réduction de la pauvreté, la lutte contre le dérèglement climatique et la préservation de la biodiversité.

Outre Mme Borione, la délégation française était composée de M. Jérôme Bonnafont, Représentant permanent auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de nombreux représentants des Ministères de l’Europe et des affaires étrangères, de l’intérieur et des outre-mer, de l’éducation nationale et de la jeunesse, de la culture, et des affaires sociales. La Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT et la Délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement étaient aussi représentées.

Pendant le dialogue avec le Comité, la délégation a indiqué que les départements ultramarins constituaient une priorité pour l'actuel Gouvernement. Une concertation a été engagée entre le Gouvernement et les collectivités concernées afin d’établir des politiques publiques adaptées au besoin de ces territoires, 72 mesures à cette fin ayant été présentées en juillet 2023.

La délégation a aussi précisé qu’après la crise des gilets jaunes, le Président de la République avait lancé un grand débat national qui a recueilli près de deux millions de contributions. Sur cette base, des mesures ont été prises par le Gouvernement en faveur des périphéries et des zones rurales, avec entre autres la création d’un fonds de soutien pour les commerces ou encore des bus médicaux pour remédier aux déserts médicaux.

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de la France et les rendra publiques à l’issue de sa session, le 13 octobre.

 

Cet après-midi, à partir de 15 heures, le Comité achèvera l’examen du Qatar. 

 

Examen du rapport de la France

Le Comité est saisi du cinquième rapport périodique de la France (E/C.12/FRA/5), rapport établi sur la base d’une liste de points à traiter qui avait été soumise par le Comité.

Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays, Mme DELPHINE BORIONE, Ambassadrice pour les droits de l’homme au Ministère de l’Europe et des affaires étrangères de la France, cheffe de la délégation française, a affirmé notamment que son pays était une République sociale. Un chiffre illustre cet engagement, a dit Mme Borione : 55% du produit intérieur brut français est redistribué dans des politiques publiques à composantes essentiellement sociales – l’un des pourcentages les plus élevés au monde, a-t-elle insisté.

La France s’attache à répondre non seulement aux urgences économiques, sociales ou environnementales, mais aussi aux défis de long terme en adaptant sa politique de solidarité et d’égalité, tout en écoutant les attentes des partenaires de la société civile, des parlementaires et des associations qui œuvrent au plus près des personnes vulnérables, a poursuivi Mme Borione. Les politiques publiques s’adressent à tous, résidents de l’hexagone et de l’outre-mer, et le voyage récent du Président de la République en Nouvelle-Calédonie démontre l’attachement de la République à ce que les statuts de ces collectivités évoluent et soient discutés en concertation étroite avec leurs habitants, a dit Mme Borione.

Revenant sur les progrès réalisés par la France depuis sa précédente audition devant le Comité en 2016, Mme Borione a rappelé l’engagement de son pays à lutter contre toutes les formes de discrimination. L’égalité femmes-hommes a ainsi été déclarée grande cause nationale par le Président de la République dans le cadre de ses deux mandats successifs. Depuis le 8 mars 2023, cette ambition se renforce dans le cadre d’un grand plan interministériel 2023-2027 « Toutes et tous égaux ». Par ailleurs, un troisième Plan national de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations liées à l’origine a été adopté pour la période 2023-2026.

D’autre part, une profonde transformation de l’action publique a été engagée en 2018 pour mieux prendre en compte la situation des populations dites Roms, qui vivent en France dans des campements dans des conditions de grande précarité, a dit l’Ambassadrice. L’objectif est une résorption définitive de ces lieux d’habitat informel par une approche intégrant insertion sociale et professionnelle, protection de l’enfance et solutions de relogement, a précisé Mme Borione.

La cheffe de la délégation a ensuite fait savoir que la France s’était dotée en 2018 d’une Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté. Un bilan d’étape de cette Stratégie effectué en 2021 a montré de nombreuses avancées, même si l’ampleur des besoins reste importante. À partir de 2024, le Pacte des solidarités prendra la suite de la Stratégie nationale, en doublant les ressources allouées à la lutte contre la pauvreté, pour continuer, entre autres, à prévenir et corriger les inégalités structurelles, répondre à l’urgence de la situation sociale et construire une transition écologique solidaire.

Mme Borione a aussi cité des mesures en faveur de l’accès effectif au logement, y compris le plan « Logement d’abord » de 2017 qui a permis, en cinq ans, de reloger plus de 440 000 personnes sans domicile. Un second plan « Logement d'abord » a été lancé en juin 2023, avec de nouvelles mesures pour un coût de 500 millions d’euros en cinq ans.

La cheffe de la délégation a ensuite précisé que le droit à la protection de la santé constituait, en France, un principe à valeur constitutionnelle. La crise de la COVID-19 a mis à l’épreuve le système de santé national. Toutefois, dès le début de la pandémie, la France a régulièrement publié des données actualisées sur la situation sanitaire, en veillant à préserver les données personnelles des citoyens, notamment dans le cadre de la mise en œuvre d’un dispositif provisoire de « passe sanitaire » au plus fort de la crise. Les autorités ont également mis tout en œuvre pour maintenir l’accueil des élèves dans les établissements scolaires. Enfin, des mesures considérables ont été prises pour aider les secteurs économiques touchés par la crise et alléger le poids de la pandémie sur les travailleurs et leurs familles.

Mme Borione a ensuite détaillé les mesures prises en faveur de la jeunesse et de l’accès à l’éducation et à la culture, de même que pour lutter contre le chômage des jeunes. S’agissant des plus jeunes, un effort important a également été engagé en matière d’éducation à travers la loi de 2019 pour une « école de la confiance », afin de remédier à l’impact des inégalités sociales et économiques.

Enfin, la cheffe de la délégation a rappelé que la France soutenait, dans les enceintes internationales, la reconnaissance politique du droit à un environnement propre, sain et durable. Sous l’égide de la Première Ministre, le pays a ainsi élaboré, pour la première fois de son histoire, une planification écologique d’ensemble, secteur par secteur, en étroite collaboration avec l’ensemble des acteurs concernés, tout en déployant un effort historique de dix milliards d’euros supplémentaires pour réaliser cet objectif.

De plus, le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial, qui s’est tenu à Paris en juin dernier, a posé les bases d’un système renouvelé, pour qu’aucun pays n’ait à choisir entre la réduction de la pauvreté, la lutte contre le dérèglement climatique et la préservation de la biodiversité, a conclu la cheffe de la délégation.

Questions et observations des membres du Comité

MME LAURA-MARIA CRACIUNEAN-TATU, Présidente du Comité et membre du groupe de travail chargé de l’examen du rapport de la France, a jugé positif que la France ait ratifié, en 2015, le Protocole facultatif au Pacte instituant une procédure de plainte devant le Comité, estimant que c’était là une étape importante dans la justiciabilité des droits couverts par le Pacte. Pourtant, a regretté l’experte, le Comité n'a reçu à ce jour que quelques rares communications individuelles de la France. Mme Craciunean-Tatu a voulu savoir ce qui était entrepris pour faire connaître les dispositions du Protocole facultatif auprès des professionnels du droit et de la société civile en France.

L’experte a ensuite évoqué des inégalités dans l’accès aux droits économiques, sociaux et culturels dans les Départements et régions d’outre-mer et collectivités d’outre-mer (DROM-COM). En 2023, a-t-elle regretté, la loi de 2017 pour l'égalité réelle dans l'Outre-mer, ainsi que d'autres dispositions en matière sociale et économique, n'ont toujours pas trouvé d'application effective. De fortes inégalités demeurent dans les DROM-COM : le taux de chômage y est de 2,5 à 5 fois plus élevé, et la pauvreté extrême de 5 à 15 fois plus fréquente, qu’en France métropolitaine. Il y a également des inégalités dans les secteurs de l’éducation, du logement et de la santé, y compris l'accès à l’eau potable. De plus, en cinquante ans, a poursuivi Mme Craciunean-Tatu, les DROM-COM et la Nouvelle-Calédonie n’ont quasiment jamais été couverts par les rapports périodiques de la France. L’experte a demandé quelles mesures étaient prises pour remédier à ces écarts.

Mme Craciunean-Tatu a encore noté qu’en 2018, le Président de la République avait présenté une stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté qui comprend une trentaine de mesures regroupées autour de la petite enfance, de l’éducation, de la santé, ou encore du logement et des droits sociaux. Toutefois, dans son dernier rapport de 2022, le comité d’évaluation de la stratégie a constaté l’absence d’amélioration des indicateurs relatifs à la petite enfance et à la réussite scolaire, et a fait part sa difficulté à accomplir sa mission, notamment en raison d’un manque de données permettant le suivi de la situation.

L’experte a aussi relayé des inquiétudes quant à la situation à Calais, en particulier des restrictions juridiques et pratiques à la fourniture et à l’accès à l’aide humanitaire aux migrants ; de même que s’agissant de la nouvelle loi sur l’immigration en cours d’adoption. Elle a demandé ce qui était fait pour assurer une prise en charge adaptée des mineurs non accompagnés présents dans les territoires d’outre-mer.

M. MICHAEL WINDFUHR, membre du groupe de travail chargé de l’examen du rapport de la France, a salué les efforts déployés par le Gouvernement pour réduire le taux de chômage à 7,3%, soit le niveau le plus bas depuis 1982. Toutefois, il a attiré l’attention de la délégation sur le fait que « si le taux de chômage diminue, le taux de pauvreté augmente depuis 2005. En 2019, il atteignait 14,5% en France métropolitaine, avec 9,1 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté ». De plus, le Comité reste préoccupé par la précarité persistante de l’emploi, les emplois mal payés et les conditions de travail précaires, notamment en ce qui concerne les contrats temporaires.

M. Windfuhr a également fait part de ses préoccupations relatives à l’accompagnement apporté aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) en vue de trouver un emploi, accompagnement qui, selon l’expert, demeure globalement faible et infructueux. Par ailleurs, le marché du travail est encore loin d’être inclusif, a-t-il indiqué, rappelant les recommandations urgentes du Comité des droits des personnes handicapées sur cette question. 

Enfin, l’expert a pris note des mesures budgétaires et politiques prises par le Gouvernement pour garantir que les jeunes et les travailleurs âgés puissent exercer leur droit à l'emploi. Il a interrogé la délégation sur les dispositions prises pour réduire le chômage dans les départements et régions d’outre-mer.

M. MOHAMMED AMARTI, membre du groupe de travail chargé de l’examen du rapport de la France, a attiré l’attention de la délégation sur le problème de l’intoxication par le mercure en Guyane. Il a aussi mis l’accent sur l’extrême précarité des enfants migrants dits isolés ou non accompagnés : le Comité, a dit M. Amarti, dispose d’informations selon lesquelles les conditions de vie de ces mineurs se dégradent sans cesse.

Autres sujets de préoccupation soulevés par l’expert, le « scandale Orpea », soit des « défaillances graves » dans la gestion des établissements d’hébergement des personnes âgées (EPHAD), un problème médiatisé en 2022 ; et l’extrême pauvreté touchant directement certaines banlieues, zones rurales, départements de l’outre-mer, mais aussi une certaine catégorie de la population française.

M. MIKEL MANCISIDOR, membre du groupe de travail chargé de l’examen du rapport de la France, a interrogé la délégation sur les mesures prises pour mettre fin à l’abandon scolaire et lutter contre le harcèlement à l’école. Il a aussi voulu savoir si les enfants roms bénéficiaient des mêmes garanties d'accès à l’éducation que les autres enfants résidant sur le territoire. Certaines informations indiquent que cent mille enfants n’auraient pas accès à l’école, a mis en garde l’expert. Le décrochage scolaire touche de nombreux enfants, notamment ceux vivant dans des bidonvilles ou dans certains territoires d’outre-mer, comme la Guyane et Mayotte.

Enfin, l’expert a noté que selon le principe d’indivisibilité de la République, la France ne reconnaît « aucun droit collectif à aucun groupe », les droits étant inhérents à l’individu, et que, dans ce contexte, « aucun indicateur de suivi mentionnant l’origine ne peut être renseigné ». À ce propos, M. Mancisidor a fait remarquer que, pour le Comité, une personne peut exercer ses droits culturels individuellement, en association avec d'autres ou au sein d'une communauté ou d'un groupe (Observation générale n° 21 sur le droit de chacun à participer à la vie culturelle).

Un autre expert a demandé quelles mesures la France avaient prises pour adapter la définition pénale du viol et son traitement judiciaire conformément au Protocole d’Istanbul et pour s’assurer que les victimes de violences sexuelles puissent obtenir justice. Il a aussi demandé si la France disposait d’un mécanisme de suivi des recommandations formulées pendant l’Examen périodique universel (EPU).

Un autre expert a fait état d’une aggravation, depuis deux ans, des inégalités régionales au sein même de l'Hexagone.

D’autres préoccupations ont été exprimées face à l’apparition en France de bidonvilles et de squats, de même que face à des « problèmes croissants » rencontrés depuis plusieurs années en matière d’accès aux soins, de conditions de travail du personnel soignant et de la multiplication des « déserts médicaux ».

Réponses de la délégation

Tout d’abord, la délégation a rappelé que la France avait ratifié le Protocole facultatif en 2016 et qu’à ce titre, des formations sur le Pacte et le Protocole facultatif étaient dispensées aussi bien aux magistrats qu’aux avocats.

S’agissant des violences à l’encontre des femmes, la délégation a précisé que, les attentes de la société ayant fortement évolué ces dernières années, les pouvoirs publics avaient fait évoluer le cadre normatif et adopté des dispositifs concrets. Par exemple, en 2018, la loi créant un délit d’outrage sexiste a été adoptée pour prévenir le harcèlement de rue : il s’agit aujourd’hui d’un délit pénal et des campagnes d’information sensibilisent le public sur le fait que ces comportements doivent cesser.

Concernant l’accueil des victimes de violences sexuelles et sexistes, le Gouvernement agit sur la coordination entre la police, la gendarmerie, les foyers d'accueil et les hôpitaux. Des mesures sont prises pour faciliter le dépôt de plainte et rendre cette démarche plus respectueuse de la victime, y compris lorsqu’il s’agit de personnes en situation de handicap. L’amélioration de l’accueil par les services de police et de gendarmerie constitue une priorité nationale. Des formations sont dispensées aux agents des commissariats de police et brigades de gendarmerie, et aux gradés. La délégation a précisé qu’un accent portait sur la prise en charge des victimes mineures.

D’autre part, la délégation a mis en évidence l’amélioration relative à l’emploi en France, une situation inédite depuis une quarantaine d’années, a-t-elle précisé. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a plus de difficultés, notamment pour les personnes vulnérables, a nuancé la délégation, mais de nombreux progrès ont été réalisés auprès des groupes les plus vulnérables, à savoir les migrants, les femmes, les jeunes et les personnes âgées. Le taux de chômage, qui n’a jamais été aussi bas depuis la fin des années 1970, s’accompagne d’un certain nombre de modifications structurelles et de politiques publiques prises depuis 2007.

La France consacre 55% de son PIB à la redistribution par les politiques publiques, a souligné la délégation, ce qui permet l’adoption de mesures pour mieux répondre aux besoins sur le marché du travail. Ont été évoquées des mesures prises pour permettre une meilleure insertion des jeunes au marché du travail, la réinsertion des personnes en chômage de longue durée ou le maintien emploi des travailleurs de plus de 55 ans. Pour le Gouvernement, il s’agit là d’une question de justice sociale, a dit la délégation.

S’agissant de l’emploi des jeunes, la délégation a mentionné le plan « Un jeune, une solution », doté de dix milliards d’euros, qui a eu pour objectif d’apporter une réponse adaptée aux besoins de 240 000 jeunes pendant la pandémie, y compris le besoin en formation initiale et en apprentissage. D’autre part, concernant les séniors – un enjeu bien identifié dans le contexte français –, la délégation a précisé que leur taux d’emplois restait certes inférieur à l'ensemble de l’Union européenne, mais qu’il continuait de progresser depuis une vingtaine d’années.

Concernant les personnes pauvres, la réforme du système France Travail est en cours d’élaboration : ce système cible plus précisément les personnes les plus vulnérables et vise à mieux les accompagner dans leur recherche d’emploi. Enfin, la réforme de l’assurance-chômage vise à permettre un meilleur financement de ce mécanisme assurantiel. De nouvelles règles relatives à la réforme des retraites doivent, entre autres, permettre une revalorisation des pensions pour les femmes, a encore fait savoir la délégation.

La délégation a indiqué que les Départements et régions d’outre-mer et collectivités d’outre-mer (DROM-COM) constituaient une priorité pour l'actuel Gouvernement. Un Ministre chargé des outre-mers a été nommé auprès du Ministre de l’intérieur afin de répondre concrètement aux préoccupations des citoyens et de renforcer l'ambition républicaine dans ces territoires.

À l’automne 2022, le Gouvernement a engagé un dialogue pour une meilleure application des mesures dans les territoires ultramarins, après l’appel du président de la collectivité territoriale de Martinique, dit « appel de Fort-de-France ». Une concertation a été engagée et a mis l’accent sur le besoin d’adaptation et de différenciation des politiques publiques dans ces territoires. Une liste de 72 mesures a été présentée en juillet 2023, consacrées à la transformation des économies ultramarines en faveur de l’emploi, à l’amélioration de la vie quotidienne, à un meilleur accompagnement des enfants, des jeunes et des étudiants pour qu’ils enrichissent de leur compétence les territoires ultramarins, ou encore à la construction de l’avenir grâce à des équipements et infrastructures adaptés aux nouveaux défis.

La délégation a aussi indiqué que les politiques publiques en faveur de l’emploi des plus jeunes s’appliquaient également aux outre-mers, l’emploi des moins de 25 ans s’étant beaucoup plus dégradé dans ces territoires que dans l’Hexagone. Ainsi, le « service militaire adapté » a été créé : ce dispositif, qui vise à apporter une réponse ciblée aux jeunes ultramarins sur la base du volontariat, remporte un franc succès, a dit la délégation.

Répondant à une préoccupation relative à l’accès à l’eau dans les Antilles et à Mayotte, il a été précisé que la compétence de l’eau relève des collectivités territoriales et non de l’État. Force est de constater qu’un certain retard a été enregistré, a admis la délégation. En 2016, le « Plan eau dans les territoires d’outre-mer » a été adopté et 200 millions d’euros supplémentaires ont été débloqués pour Mayotte et 100 millions pour la Guadeloupe, notamment pour renforcer les moyens de l’instance chargée de la gestion des eaux.

Concernant la lutte contre l’exclusion, la délégation a indiqué que la France appliquait une Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté 2018-2022, qui fait l’objet d’évaluations annuelles. En 2022, il a été constaté qu’il était difficile de mesurer les effets de cette stratégie, notamment en raison de la pandémie. Le Gouvernement a annoncé une nouvelle « stratégie pour les solidarités » pour la période 2023-2027. La France est très engagée dans les travaux de l’Union européenne sur l’évaluation des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion, a précisé la délégation.

Après la crise des « gilets jaunes », le Président de la République a lancé un grand débat national qui a recueilli près de deux millions de contributions en ligne. Sur cette base, des mesures ont été prises par le Gouvernement en faveur des périphéries et des zones rurales. Le plan « France ruralité » a été adopté qui comprend, entre autres, un fonds de soutien pour les commerces, des bus médicaux pour remédier aux déserts médicaux et un fonds de 90 millions d’euros sur trois ans pour soutenir les mobilités.

S’agissant de la lutte contre la pauvreté, la délégation a indiqué que l’approche des pouvoirs publics français partait du principe que la pauvreté est un phénomène multidimensionnel qui appelle des réponses de même nature. L’accent est mis sur la prévention de la pauvreté. La France applique depuis 2017 un plan très ambitieux en faveur du retour au logement des sans-abris. Cette action a permis l’accès au logement de 440 000 personnes, dont 60% dans des logements sociaux et 40% dans des logements adaptés.

Toujours en matière de logement, la délégation a indiqué qu’une profonde transformation de l’action publique avait été engagée en 2018 pour remédier au problème des bidonvilles, en vue d’une résorption définitive des situations, allant au-delà des seules évacuations. Ainsi, depuis 2018, plus de 3000 personnes ont été relogées sur les 15 000 qui vivent dans des campements. Par ailleurs, des médiateurs scolaires font le lien entre les familles, les enfants et les écoles permettant aujourd’hui à 3000 enfants concernés d’être scolarisés.

La délégation a aussi précisé que les gens du voyage en France sont des citoyens français qui ont un mode de vie nomade et semi-nomade. Ils représentent 350 000 à 400 000 personnes, pour lesquelles la France prévoit depuis les années 2000 des installations temporaires dites “aires d'accueil”. Les gens du voyage ont longtemps fait l’objet d’un statut spécifique avec un carnet de circulation : en 2017, une loi a abrogé ce statut et les gens du voyage sont désormais des citoyens français à part entière. La délégation a toutefois reconnu que des progrès devaient encore être réalisés concernant l’emplacement et la salubrité des aires d’accueil.

S’agissant de la situation à Calais, la délégation a indiqué que l'essentiel des migrants qui s’y trouvent voulaient rejoindre le territoire britannique. La France met tout en œuvre pour prendre en charge ces personnes. Plus de 7000 personnes ont été « mises à l’abri » en 2022 et plus de 2250 en 2023 à ce jour.

S’agissant des mineurs non accompagnés, y compris dans les outre-mers, la délégation a précisé que la France accordait une attention particulière aux personnes migrantes les plus vulnérables. Plusieurs dispositifs sont mis en place, y compris l’accès inconditionnel à l'éducation par les mineurs, accompagnés ou non. Cependant, le système d’accueil des mineurs non accompagnés est sous tension, a relevé la délégation, en raison d’une forte augmentation des flux migratoires impliquant, dans certains territoires, une augmentation de 40% du nombre des mineurs. Concernant la situation à Mayotte, il a été indiqué que près de 1900 mineurs non accompagnés sont pris en charge et 4 millions d’euros ont été débloqués pour appuyer le développement de structures d’accueil dans l’île. Une mission d’évaluation est en cours.

La France est très engagée sur la question des changements climatiques, a poursuivi la délégation. Une conférence s’est tenue en juin à Paris pour traiter de la façon dont la communauté internationale peut combiner la lutte contre le changement climatique et le maintien des politiques de développement humain et de réduction de la pauvreté. Pour la France, cela passe par un certain nombre de mesures structurelles au niveau international, notamment des interventions sur les banques de développement, sur le financement concessionnel et sur la réduction de la dette.

Par ailleurs, la délégation a rappelé que les outre-mers rassemblaient l’essentiel de la richesse écologique de la France, avec 80% de la biodiversité pour seulement 22% du territoire. Les outre-mers sont les « sentinelles du changement climatique », dont ils subissent de plein fouet les manifestations.

Avec une superficie de 638 000 km2, la France est le plus grand pays de l’Union européenne, et il s’y trouve des inégalités territoriales, a poursuivi la délégation. Compte tenu de l’histoire de la France et de sa tradition en matière de politique sociale, les pouvoirs publics répondent aux inégalités en combinant d’une part des cadres nationaux, qui ne dépendant pas de l’endroit où les personnes vivent ; et, d’autre part, une mise en œuvre différenciée en fonction des écarts de situation et de l’évolution des besoins. Les politiques sociales, partagées entre l’État et les collectivités territoriales, font l’objet d’une coordination et d’une territorialisation renforcée.

Une question ayant porté sur les discriminations homophobes et transphobes à l’école, la délégation a précisé que le but de la France était d'offrir à tous les élèves une scolarité épanouie. Une attention particulière est portée au bien-être des élèves, à tous les niveaux de la scolarité et dans toutes les structures éducatives. Le Ministère de l’éducation nationale, pleinement mobilisé, accorde une attention particulière aux discriminations sexuelles ou liées à l'identité de genre des élèves.

S’agissant du taux d’emploi des personnes handicapées, la délégation a reconnu qu’il n’était actuellement que de 3%. Le Gouvernement espère atteindre 6%. L’opérateur France Travail accompagne désormais tous les demandeurs d'emplois en situation de handicap dans leur démarche professionnelle.

Concernant enfin le scandale Orpéa, la délégation a assuré que la réponse du Gouvernement avait été rapide et rigoureuse. Une mission d’inspection a été diligentée et a rendu ses conclusions en mars 2022. Le parquet de Nanterre est saisi de l’enquête, qui est en cours.

Remarques de conclusion

Mme CRACIUNEAN-TATU a estimé que les échanges avaient été fructueux. Elle a indiqué que les observations finales formulées par les membres du Comité seraient concrètes et faciles à mettre en œuvre.

Mme BORIONE a réitéré l’engagement de son pays, une France progressiste, féministe et humaniste dans la mise en œuvre des dispositions contenues dans le Pacte, engagement qui s’accompagne d’engagements financiers et de politiques publiques. La France ne transigera jamais sur les questions relatives à la dignité et à l'égalité humaine. L’Ambassadrice a conclu son propos en indiquant que son pays était candidat à sa réélection au Conseil des droits de l’homme pour la période 2024-2026.

 

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CESCR23.015F