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Les conflits et la violence sont les principales sources de l'insécurité alimentaire, affirme le Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation devant le Conseil des droits de l’homme

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l’homme a achevé ce matin, en entendant plusieurs délégations*, son dialogue entamé hier après-midi avec le Rapporteur spécial sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant ainsi que sur le droit à la non-discrimination à cet égard, M. Balakrishnan Rajagopal. Il a ensuite tenu un dialogue avec le Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, M. Michael Fakhri.

Présentant son rapport intitulé « Conflit et droit à l’alimentation », ce dernier a indiqué qu’il menait actuellement campagne pour inciter les pays à s'unir afin d'élaborer un plan mondial pour le droit à l'alimentation. En effet, sans coopération internationale pour se remettre de la pandémie et pour faire face à la crise alimentaire, chaque plan national échouera à faire face aux taux croissants de faim, de malnutrition et de famine, a-t-il affirmé.

M. Fakhri a ensuite déclaré que les conflits et la violence étaient les sources principales de l'insécurité alimentaire, et que la faim et la famine ne pouvaient être combattues que par une action politique. La violence systémique bafoue le droit à l'alimentation parce qu'elle limite l'accès à la terre, aux semences, à l'eau et à un travail digne ; elle crée en outre de profondes inégalités et permet à un petit nombre d'individus, d'entreprises transnationales et de pays d'accéder plus facilement aux produits de première nécessité et de les contrôler, a-t-il expliqué. La violence dans les systèmes alimentaires découle d'une économie mondiale de dépendance. Pendant la crise alimentaire, les sociétés transnationales du secteur agroalimentaire profitent de la situation alors que les populations souffrent, a fait remarquer M. Fakhri. Il a appelé à « une approche multilatérale coordonnée et basée sur les droits de l'homme pour mettre fin à toutes les formes de violence dans tous les systèmes alimentaires ».

Si les mesures coercitives unilatérales portent en effet presque toujours atteinte aux personnes et entraînent des violations des droits de l'homme, les pays qui sont frappés par ces mesures ne peuvent en tirer prétexte pour ignorer les autres formes de violence qui existent dans leurs propres systèmes alimentaires et qu'ils pourraient prévenir, a par ailleurs affirmé le Rapporteur spécial.

Suite à cette présentation, de nombreuses délégations** ont pris part au dialogue avec M. Fakhri. À l’issue du débat, ce dernier a affirmé que le système international actuel ne marche pas, comme le montre la guerre en Ukraine où quelques acteurs seulement ont pu créer des tensions sur le marché. Dans ce contexte, a affirmé le Rapporteur spécial, ce qu’il faut c’est un instrument juridiquement contraignant sur les obligations des entreprises privées en matière de droits de l’homme, afin qu’elles ne puissent manipuler les aliments à des fins politiques ou mercantiles.

 

À partir de 15 heures cet après-midi, le Conseil achèvera son dialogue avec M. Fakhri, avant d’examiner des rapports sur l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes d’albinisme et sur les droits de l’homme et l’environnement.

 

Suite et fin du dialogue avec le Rapporteur spécial sur le logement convenable

Aperçu du dialogue

Poursuivant le dialogue entamé hier après-midi avec le Rapporteur spécial sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant ainsi que sur le droit à la non-discrimination à cet égard, les délégations ont notamment souligné les menaces que font peser les changements climatiques sur le droit à un logement convenable partout dans le monde. Nombre d’entre elles ont en outre présenté au Conseil les mesures prises au plan national dans leur pays pour réaliser ce « droit de base » pour tous et pour répondre à la demande de logements, y compris en construisant de nouveaux logements résilients, neutres en carbone et répondant aux exigences imposées par les changements climatiques.

Pour atteindre cet objectif, les États doivent adopter des politiques idoines et la coopération internationale doit s’intensifier, a-t-il été souligné. Cela peut se manifester par des financements et un transfert de technologies. Il faudrait également, tenant compte du principe de responsabilités communes mais différenciées, envisager la création d’un mécanisme international de dédommagement et de compensation, pour aider les pays en développement affectés par les changements climatiques à financer les mesures d’atténuation, ont plaidé plusieurs délégations. L’une d’elles a demandé aux pays riches de respecter leur engagement de verser chaque année cent milliards de dollars afin de répondre aux besoins urgents d’atténuation et d’adaptation des pays en développement.

L’attention a par ailleurs été attirée sur des situations de discrimination en matière de droit au logement convenable touchant des populations particulières comme les personnes LGBTIQ+, les migrants, les familles défavorisées ou encore les populations autochtones.

Il a notamment été demandé au Rapporteur spécial de donner son point de vue sur la création d’un mécanisme de compensation et sur la manière de construire des logements ayant une bonne efficacité énergétique et écologique, en fournissant des exemples de bonnes pratiques qu’il a observées.

*Liste des intervenants : Bangladesh, Maurice, Géorgie, Algérie, Chili, Tunisie, Malawi, Mexique, Mauritanie, Namibie, Azerbaïdjan, Bénin, Panama, Bolivie, Cuba, République islamique d’Iran, Vanuatu, Brésil, Ukraine, Cambodge, Indonésie, Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat), Niger, Burundi, Commission nationale des droits de l’homme de l’Inde, COC Nederland, Vivat International, Centre pour le droit environnemental international, Franciscan International, Iuventum,World Barua Organization, MAAT for Peace, Development and Human Rights, Al-Haq, Association pour le développement durable du Burundi et Palestinian Return Centre.

Réponses et remarques de conclusion du Rapporteur spécial

M. BALAKRISHNAN RAJAGOPAL, Rapporteur spécial sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant ainsi que sur le droit à la non-discrimination à cet égard , a indiqué que son rapport contient, au paragraphe 75, des recommandations à même de permettre une amélioration de la coopération internationale. Mais la première étape est de reconnaître le lien entre logement et changements climatiques, a-t-il souligné. Une fois cela fait, on doit investir dans des systèmes d’alerte précoce pour aider les pays à mieux se préparer, a-t-il poursuivi. Le Rapporteur spécial a également estimé, s’agissant de la manière d’impliquer le secteur privé, qu’il fallait lui « appliquer la politique de la carotte et du bâton ». Il faut des incitations et des sanctions afin que les entreprises comprennent leurs responsabilités en matière de logement convenable, a-t-il insisté.

Dialogue avec le Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation

Le Conseil est saisi du rapport du Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation (A/HRC/52/40), intitulé « Conflit et droit à l’alimentation ».

Présentation du rapport

M. MICHAEL FAKHRI, Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation, a d’abord regretté que, tout au long de la pandémie de COVID-19, les États n'aient apporté aucune réponse multilatérale à la crise alimentaire et que, malheureusement, il ait fallu attendre la guerre en Ukraine pour que la sécurité alimentaire internationale soit inscrite à l'ordre du jour international. Le Rapporteur spécial s’est cependant dit heureux de constater que le droit à l'alimentation avait enfin été reconnu comme un élément déterminant pour comprendre la pandémie et la crise alimentaire et s'en remettre – ce dont témoigne, entre autres, la reconnaissance de ce droit par quelque soixante-dix ministres de l'agriculture dans leur déclaration au terme du Forum mondial pour l'alimentation et l’agriculture tenu à Berlin en janvier dernier.

M. Fakhri a indiqué qu’il menait actuellement campagne pour inciter les pays à s'unir afin d'élaborer un plan mondial pour le droit à l'alimentation. En effet, sans coopération internationale pour se remettre de la pandémie et pour faire face à la crise alimentaire, chaque plan national échouera à faire face aux taux croissants de faim, de malnutrition et de famine, a affirmé le Rapporteur spécial.

M. Fakhri a ensuite déclaré que les conflits et la violence étaient les sources principales de l'insécurité alimentaire, et que la faim et la famine ne pouvaient être combattues que par une action politique. La violence frappe certaines communautés qui sont souvent pourvoyeuses de nourriture : paysans, travailleurs, pêcheurs, éleveurs, femmes, a-t-il souligné. Endémique, cette violence prend quatre formes interconnectées : la discrimination ; les dommages corporels ou les agressions contre l'intégrité physique et mentale des personnes ; la violence écologique ; et l'effacement.

La violence systémique bafoue le droit à l'alimentation parce qu'elle limite l'accès à la terre, aux semences, à l'eau et à un travail digne, a poursuivi le Rapporteur spécial. Elle crée en outre de profondes inégalités et permet à un petit nombre d'individus, d'entreprises transnationales et de pays d'accéder plus facilement aux produits de première nécessité et de les contrôler. La violence dans les systèmes alimentaires découle d'une économie mondiale de dépendance. Pendant la crise alimentaire, les sociétés transnationales du secteur agroalimentaire profitent de la situation alors que les populations souffrent, a fait remarquer M. Fakhri. Il a appelé à « une approche multilatérale coordonnée et basée sur les droits de l'homme pour mettre fin à toutes les formes de violence dans tous les systèmes alimentaires ».

Aujourd'hui, a ajouté le Rapporteur spécial, certains pays dénoncent les mesures coercitives unilatérales. Ces mesures portent en effet presque toujours atteinte aux personnes et entraînent des violations des droits de l'homme, a-t-il confirmé. Mais les pays qui sont frappés par ces mesures ne peuvent en tirer prétexte pour ignorer les autres formes de violence qui existent dans leurs propres systèmes alimentaires et qu'ils pourraient prévenir. De même, certains pays pourraient accuser la guerre en Ukraine d'être à l'origine de la crise alimentaire actuelle : or, la guerre a effectivement aggravé la crise, mais cette crise était déjà très profonde avant l’invasion russe, a souligné M. Fakhri, avant de plaider pour le renouvellement de l'accord sur les céréales de la mer Noire. Même en temps de guerre, a-t-il insisté, les ennemis doivent se concerter pour que leurs propres populations ne souffrent pas de la famine, a-t-il affirmé. Il a espéré que le Conseil des droits de l'homme pourrait être un espace de discussion pragmatique sur ces questions, en dépit de la géopolitique et des conflits.

Aperçu du dialogue

Les conflits figurent parmi les principaux facteurs d'insécurité alimentaire et de malnutrition, au même titre que les extrêmes climatiques et les ralentissements économiques, aggravés par la pauvreté et l'inégalité, a-t-il été souligné. Les sept pays où l'on prévoit des conditions proches de la famine cette année connaissent tous des niveaux élevés de violence armée, a-t-il été relevé.

De nombreux intervenants ont souligné que l’agression russe contre l’Ukraine avait bouleversé les chaînes d’approvisionnement alimentaire mondiales, perturbé les marchés alimentaires mondiaux et aggravé l'insécurité alimentaire et la faim dans toutes les régions du monde. Le Rapporteur spécial a été prié de dire quelles initiatives pourraient être lancées pour remédier à l’insécurité alimentaire actuelle, au-delà de l’Initiative céréalière de la mer Noire ou encore des « corridors de solidarité » de l’Union européenne.

Même en temps de paix, les femmes sont davantage susceptibles de souffrir d'insécurité alimentaire que les hommes ; et en période de conflit et de crise, les inégalités de genre profondément ancrées impliquent que les femmes et les filles mangent souvent moins et en dernier, a-t-il en outre été indiqué. Il a été ajouté que l'égalité des sexes et l'autonomisation de toutes les femmes et filles pouvaient se traduire par une plus grande sécurité alimentaire et par des systèmes alimentaires plus résilients et durables pour tous. Des mises en garde ont été lancées face à la progression de la dénutrition et de l’émaciation parmi les enfants dans les pays touchés par des conflits et des catastrophes naturelles.

Plusieurs initiatives nationales en matière de sécurité alimentaire ont été mentionnées, telles que la création de centrales d’approvisionnement en intrants et matériels agricoles ; la production de semences adaptées aux changements climatiques et autres initiatives agroécologiques ; l’octroi de lopins de terre à des familles de paysans ; le renforcement des infrastructures de commercialisation ; ou encore le remplacement d’engrais chimiques par des engrais biologiques, moins coûteux dans le contexte actuel.

À été soulignée l’importance de la coopération internationale et de l'aide internationale en tant que « contribution efficace à l'expansion agricole, au progrès de l'agriculture et aux innovations institutionnelles afin de garantir le droit à l'alimentation et parvenir à une sécurité alimentaire durable ». Plusieurs délégations ont mentionné l’aide alimentaire que leurs pays apportent au niveau international.

Les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur la réalisation du droit à l’alimentation des pays visés ont été dénoncés à plusieurs reprises. Ces mesures ne consistent en rien d’autre qu’une utilisation de la famine comme arme de guerre, a-t-il été affirmé. Les aliments et intrants agricoles devraient être exclus de ces mesures, a demandé un intervenant.

A par ailleurs été dénoncé le système mondial actuel, qui fait que, bien que l’on produise suffisamment pour nourrir la terre entière, la famine frappe des régions tandis que d’autres s’illustrent dans le gaspillage de nourriture. Une délégation a fait observer que les grands industriels du secteur agroalimentaire s’enrichissent dans les pays riches pendant que les agriculteurs du Sud sont exploités.

Le Rapporteur spécial a été prié de dire comment remédier à l’augmentation du prix des denrées alimentaires imputable à la panique des accapareurs et des spéculateurs financiers et comment renforcer la responsabilité sociale des entreprises. Plusieurs délégations lui ont demandé s’il pensait que le deuxième Objectif de développement durable (Éliminer la faim et assurer la sécurité alimentaire) pourrait être atteint en 2030.

** Liste des intervenants : Union européenne, Norvège (au nom d’un groupe de pays), Brésil (au nom d’un groupe de pays), ONU Femmes, France, Équateur, Portugal, Burkina Faso, Suisse, Ordre souverain de Malte, Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Émirats arabes unis, États-Unis, Belgique, Colombie, Chypre, Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Luxembourg, Togo, Chine, Inde, Viet Nam, Fédération de Russie, Zimbabwe, Cameroun, Arménie, République bolivarienne du Venezuela, Iraq, Pologne, Programme alimentaire mondial (PAM), Djibouti, République-Unie de Tanzanie, Malaisie, Afrique du Sud, Soudan, Maldives, Soudan du Sud, Bangladesh, Kazakhstan, Jordanie, Maurice, Lesotho, Sénégal, Algérie, Afghanistan, Mexique, Mauritanie, Malawi, Croatie, Namibie, Yémen, Roumanie, Bénin, République arabe syrienne, Bolivie, Arabie saoudite, Cuba, Timor-Leste, République islamique d’Iran et Pakistan.

Réponses et remarques de conclusion du Rapporteur spécial

M. FAKHRI a indiqué que, selon lui, la solution aux défis en matière d’alimentation repose sur l’agroécologie. Mais recourir aux seuls systèmes locaux de production ne suffira pas à nourrir toutes les populations sans passer par le commerce, a-t-il ajouté. Or, a-t-il affirmé, le système commercial actuel est « désuet », tant il continue de considérer les aliments comme des marchandises, en dépit du fait que les aliments ne sont pas des marchandises comme les autres puisqu’ils sont vitaux.

Le système international actuel ne marche pas, comme le montre la guerre en Ukraine où quelques acteurs seulement ont pu créer des tensions sur le marché, a poursuivi le Rapporteur spécial. Dans ce contexte, ce qu’il faut c’est un instrument juridiquement contraignant sur les obligations des entreprises privées en matière de droits de l’homme, afin qu’elles ne puissent manipuler les aliments à des fins politiques ou mercantiles, a affirmé M. Fakhri.

 

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