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Comité contre la torture : l’approche systématique de l’Islande pour prévenir et combattre la torture est saluée, mais des préoccupations demeurent quant à la définition de la torture et à l’isolement cellulaire

Compte rendu de séance

 

De nombreux progrès ont été réalisés par l’Islande depuis l’examen de son précédent rapport par le Comité contre la torture, notamment la ratification en 2019 du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, suivie de la création du mécanisme national de prévention au sein du bureau du Médiateur du Parlement. C’est ce qu’a relevé un expert du Comité à l’occasion de l’examen, hier matin et cet après-midi, du rapport présenté par l’Islande au titre de la Convention. L’expert a également salué l’approche systématique qui est appliquée pour prévenir et combattre la torture en Islande.

Ce même expert, qui faisait office de corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de l’Islande, a cependant fait observer que la loi pénale islandaise ne contenait aucune disposition spécifique concernant la torture et a rappelé qu’il est toujours utile d'avoir une définition spécifique de la torture dans la loi, en particulier dans le droit pénal, car cela permet de marquer la gravité du crime de torture et d'utiliser la loi pour analyser et combattre ce crime. L’expert a en outre relevé que le recours à l'isolement cellulaire en Islande était loin d'être une mesure exceptionnelle, le cadre juridique islandais autorisant en effet jusqu'à quatre semaines d'isolement continu en détention provisoire et une période illimitée pour les personnes accusées d'une infraction passible d'une peine d'emprisonnement de dix ans ou plus. Un isolement cellulaire prolongé peut constituer une forme de torture ou de mauvais traitement, a mis en garde l’expert.

Il a en outre été souligné que la pratique consistant à faire participer des policiers à la gestion des patients agités dans les établissements psychiatriques suscitait des inquiétudes en Islande. Un autre problème est le lien automatique entre l'hospitalisation d’office d’une personne et la privation de cette personne de sa capacité juridique, a-t-il été ajouté.

Présentant le rapport de son pays, M. Harald Aspelund, Représentant permanent de l’Islande auprès des Nations Unies à Genève, a notamment indiqué que plusieurs mesures ont été prises ces dernières années en vue de créer une institution nationale des droits de l'homme forte, indépendante et efficace, en pleine conformité avec les Principes de Paris. Il est prévu de présenter un projet de loi sur cette question en 2023, a-t-il précisé.

Les recommandations du mécanisme national de prévention (le Médiateur parlementaire) sont prises au sérieux, a d’autre part souligné M. Aspelund. Des travaux sont ainsi en cours pour établir un cadre juridique solide relatif aux mesures de placement dans le cadre des soins de santé, a-t-il indiqué : le cadre proposé réaffirmerait que les mesures involontaires sont un dernier recours qui nécessite des motifs juridiques clairs et une procédure transparente, dans l'intérêt supérieur du patient, a précisé le Représentant permanent. En outre, un projet de loi a été présenté au Parlement pour amender la loi sur les ressortissants étrangers afin de préciser les règles de détention dans le cadre des contrôles frontaliers.

D’autres mesures ont été prises s’agissant des garanties juridiques et procédurales, a poursuivi M. Aspelund. D’abord, une nouvelle loi sur l'exécution des peines a été adoptée en 2016, donnant à un plus grand nombre de personnes condamnées le droit d'exécuter leur peine sous la forme de travaux d'intérêt général non rémunérés. Ensuite, la loi sur la police a été modifiée en 2020 afin de renforcer et d'accroître l'efficacité du Comité de surveillance de la police, créé en 2017 pour traiter les plaintes contre la police. Enfin, le Gouvernement, conscient des critiques concernant le recours à l'isolement cellulaire en détention provisoire, a décidé de revoir la législation et les procédures en vue de renforcer les garanties et de veiller à ce que la pratique reflète pleinement le fait qu'il s'agit de mesures exceptionnelles.

Pendant le dialogue avec le Comité, la délégation a précisé que la Constitution islandaise interdisait explicitement la torture et tout autre traitement cruel, inhumain ou dégradant, dans une formulation quasiment identique à celle de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme.

D’autre part, le placement à l’isolement en détention préventive est possible si le police a besoin de quelques jours ou heures supplémentaires pour récolter des preuves, a expliqué la délégation. Mais les exigences légales en la matière sont strictes : la police doit pouvoir prouver, devant un juge, qu’elle n’a pas d’autres moyens de récolter des preuves au début de son enquête ou qu’il y a des raisons de croire que le prévenu entraverait cette enquête.

Outre M. Aspelund et plusieurs de ses collègues du Ministère des affaires étrangères, la délégation islandaise était notamment composée de représentants des services du Premier Ministre ainsi que des Ministères de la justice, de la santé, et des affaires sociales et du travail.

 

Lundi 25 avril, à partir de 10h30, le Comité dialoguera avec le Sous-Comité pour la prévention de la torture (SPT).

 

Examen du rapport de l’Islande

Le Comité est saisi du quatrième rapport périodique de l’Islande (CAT/C/ISL/4), établi sur la base d’une liste de points à traiter soumise par le Comité.

Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays en tant que chef de la délégation islandaise, M. HARALD ASPELUND, Représentant permanent de l’Islande auprès des Nations Unies à Genève, a d’abord insisté sur la haute priorité accordée par son Gouvernement aux droits de l'homme, ce dont témoigne le fait que ce secteur a été transféré du Ministère de la justice au Bureau du Premier Ministre : les droits de l'homme et l'égalité des sexes sont ainsi placés au cœur de l’action du Gouvernement, l’objectif étant de faciliter l'intégration des droits de l'homme et de l'égalité dans toute l'administration.

En outre, plusieurs mesures ont été prises ces dernières années en vue de la création d'une institution nationale des droits de l'homme forte, indépendante et efficace, en pleine conformité avec les Principes de Paris. Il est prévu de présenter un projet de loi sur cette question en 2023, a indiqué M. Aspelund.

Depuis l’examen de son précédent rapport, l’Islande a ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées, ainsi que la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique [Convention d’Istanbul]. De même, le Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants a été ratifié en 2019 ; et le Médiateur parlementaire, chargé d'être le mécanisme national de prévention [de la torture] (MNP), a déjà effectué des visites et formulé des recommandations.

Les recommandations du MNP sont prises au sérieux : des travaux sont ainsi en cours pour établir un cadre juridique solide relatif aux mesures de placement dans le cadre des soins de santé – le cadre proposé réaffirmerait que les mesures involontaires sont un dernier recours qui nécessite des motifs juridiques clairs et une procédure transparente, dans l'intérêt supérieur du patient, a précisé le Représentant permanent. En outre, un projet de loi a été présenté au Parlement pour amender la loi sur les ressortissants étrangers afin de préciser les règles de détention dans le cadre des contrôles frontaliers.

D’autres mesures ont été prises s’agissant des garanties juridiques et procédurales, a poursuivi M. Aspelund. D’abord, une nouvelle loi sur l'exécution des peines a été adoptée en 2016, donnant à un plus grand nombre de personnes condamnées le droit d'exécuter leur peine sous la forme de travaux d'intérêt général non rémunérés. Ensuite, la loi sur la police a été modifiée en 2020 afin de renforcer et d'accroître l'efficacité du Comité de surveillance de la police, créé en 2017 pour traiter les plaintes contre la police. Enfin, le Gouvernement, conscient des critiques concernant le recours à l'isolement cellulaire en détention provisoire, a décidé de revoir la législation et les procédures en vue de renforcer les garanties et de veiller à ce que la pratique reflète pleinement le fait qu'il s'agit de mesures exceptionnelles.

M. Aspelund a par ailleurs rappelé que le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) avait effectué sa cinquième visite périodique en Islande en 2019. Plusieurs mesures ont été prises en réponse aux recommandations du CPT, notamment des améliorations complètes de la prison de Litla-Hraun, ou encore l’élaboration d’un plan d'action visant à renforcer les services de soins de santé pour les détenus, l'accent étant mis sur la santé mentale.

Le Gouvernement islandais s’engage à combattre toutes les formes de violence sexiste et sexuelle, a ensuite souligné le Représentant permanent. C’est pourquoi, en 2018, des modifications ont été apportées à la définition du viol afin de renforcer la protection juridique des victimes : le viol est désormais défini comme un rapport sexuel ou toute autre relation sexuelle sans consentement, a précisé M. Aspelund.

Une attention particulière a également été accordée à l'amélioration du système judiciaire, afin de garantir des procédures de qualité, efficaces et équitables et d'accroître la confiance dans le système judiciaire. Des efforts ont été faits pour améliorer l'expérience des victimes dans le système judiciaire, notamment en leur donnant un meilleur accès à l'information, a ajouté M. Aspelund.

Enfin, l’Islande a considérablement accru ses efforts dans la lutte contre la traite des êtres humains avec notamment, en 2021, des modifications apportées au Code pénal général afin de renforcer encore la protection judiciaire des victimes de ce problème.

Questions et observations des membres du Comité

M. LIU HUAWEN, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de l’Islande, a constaté que de nombreux progrès avaient été réalisés par l’Islande depuis l’examen de son précédent rapport ; il a notamment cité la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention en février 2019, suivie de la création du mécanisme national de prévention (MNP) au sein du bureau du Médiateur du Parlement, avec un budget distinct. M. Liu a aussi salué l’approche systématique qui est appliquée pour prévenir et combattre la torture en Islande.

M. Liu a cependant fait observer que la loi pénale islandaise ne contenait aucune disposition spécifique concernant la torture. Il est toujours utile d'avoir une définition spécifique de la torture dans la loi, en particulier dans le droit pénal : cela permet de marquer la gravité du crime de torture et d'utiliser la loi pour analyser et combattre ce crime, a insisté le corapporteur.

S’agissant des conditions de détention, M. Liu a relevé que, selon des organisations non gouvernementales, le recours à l'isolement cellulaire en Islande était loin d'être une mesure exceptionnelle comme l'exigent les Règles Nelson Mandela (Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus). Le cadre juridique islandais autorise en effet jusqu'à quatre semaines d'isolement continu en détention provisoire et une période illimitée pour les personnes accusées d'une infraction passible d'une peine d'emprisonnement de dix ans ou plus. Un isolement cellulaire prolongé peut constituer une forme de torture ou de mauvais traitement, a mis en garde M. Liu.

M. Liu a aussi relevé que le CPT, après sa visite en 2019, avait signalé que les nouveaux détenus ne bénéficiaient toujours pas d’un examen médical systématique et rapide, et que les personnes détenues en Islande avaient un accès très limité aux soins psychiatriques et à l'assistance psychologique.

M. Liu a aussi fait remarquer que la pratique consistant à faire participer des policiers à la gestion des patients agités dans les établissements psychiatriques avait suscité des inquiétudes en Islande. Un autre problème est le lien automatique entre l'hospitalisation involontaire d’une personne et la privation de cette personne de sa compétence juridique, a regretté M. Liu.

Le corapporteur a cité, par ailleurs, une enquête menée par l'Université d'Islande en 2018, révélant qu'une femme sur quatre dans le pays avait été violée ou agressée sexuellement dans sa vie. Or, seulement 12% de ces victimes portent effectivement plainte : beaucoup n'ont aucune confiance dans le système judiciaire, et celles qui portent plainte voient leur affaire rejetée dans près de 75% des cas. Est aussi préoccupant le fait que la proportion de femmes migrantes cherchant de l'aide auprès du refuge pour femmes de Reykjavík continue d'être disproportionnée. Enfin, le passage à une définition du viol fondée sur le consentement ne semble pas se refléter dans les jugements rendus, les anciens critères étant toujours appliqués, a constaté le corapporteur.

M. Liu a par ailleurs fait part de préoccupations s’agissant du respect de la garantie de non-refoulement d’une personne vers un pays où elle risquerait de subir la torture. En effet, le projet de loi modifiant la Loi sur les étrangers risque d'exposer inutilement les demandeurs d'asile au refoulement, notamment en supprimant l'effet suspensif des appels interjetés par des personnes ayant déjà bénéficié d'une protection internationale dans un « premier pays d'asile ». En outre, il a été signalé au Comité que l'Islande avait tenté d'expulser un groupe de demandeurs d'asile vers un pays tiers pendant la pandémie de COVID-19. De plus, les conditions de vie dans plusieurs camps pour réfugiés ont été jugées, par des organisations internationales, comme pouvant constituer un traitement inhumain.

M. Liu a aussi constaté que la traite des êtres humains au niveau local faisait rarement l'objet d'un débat public en Islande, en grande partie en raison d'idées fausses sur ce à quoi ressemble ce crime dans les communautés islandaises. La sensibilisation du public devrait donc faire partie du plan d'action national de lutte contre la traite des personnes, a recommandé le corapporteur.

L'Islande reconnaît désormais pleinement l'autodétermination dans l'enregistrement du genre, même sans intervention médicale ou psychiatrique, a relevé M. Liu. Dans le même temps, a-t-il ajouté, il a été signalé que les personnes intersexuées en Islande sont régulièrement confrontées à des violations de leurs droits fondamentaux sous la forme de mutilations génitales, de stérilisations forcées et d'autres traitements pratiqués dans le système de santé islandais. Ces interventions sur le corps des enfants intersexués seraient courantes, a insisté M. Liu.

M. Liu a par la suite recommandé que l’Islande tienne compte de la définition de la traite des êtres humains donnée par le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (Protocole de Palerme), et qu’elle prévoie des sanctions adaptées à ce crime.

M. BAKHTIYAR TUZMUKHAMEDOV, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de l’Islande, a lui aussi regretté que la loi islandaise ne contienne pas de définition concise et uniforme de la torture, qui soit conforme à la Convention. L’expert a voulu savoir quelle définition de la torture s’appliquait dès lors qu’une personne détenue portait plainte contre un gardien de prison pour « torture » ; et si une telle plainte pouvait être déposée auprès du « comité de contrôle indépendant » mentionné au paragraphe 6 du rapport.

M. Tuzmukhamedov a demandé comment se faisait l’intégration des dispositions de la Convention dans le droit islandais et a souhaité savoir si les tribunaux faisaient référence à la Convention dans leurs jugements.

Concernant les garanties procédurales, M. Tuzmukhamedov a voulu savoir à quel délai une personne arrêtée pouvait contacter un avocat et les membres de sa famille proche, et comment se faisait l'enregistrement des interrogatoires. Il a prié la délégation de dire combien de plaintes pour usage excessif de la force par la police étaient déposées, et quels étaient les résultats de ces plaintes. L’expert s’est aussi interrogé sur le statut juridique de la « commission indépendante des recours des immigrants et des demandeurs d’asile » (paragraphe 79 du rapport) chargée de statuer sur les demandes d'asile rejetées.

L'interdiction de la torture étant absolue, le Comité, en 2020, avait demandé aux États de fournir des informations sur les mesures qu'ils ont prises pendant la pandémie de COVID-19 pour s'assurer que leurs politiques et leurs actions sont conformes aux obligations découlant de la Convention, a rappelé M. Tuzmukhamedov. Aussi, le corapporteur a-t-il voulu savoir comment le Gouvernement islandais avait tenu compte des circonstances imposées par la pandémie dans les prisons et autres lieux de détention, et comment les institutions de soins sociaux avaient fait face à la pandémie.

Le fait de placer un détenu à l’isolement pendant quatre semaines est contraire aux Règles Nelson Mandela, a par ailleurs rappelé M. Tuzmukhamedov.

MME NAOKO MAEDA, rapporteuse-observatrice pour l’examen du rapport de l’Islande, a posé plusieurs questions relatives à l’application par l’Islande du principe de non-refoulement ainsi qu’aux modalités d’expulsion d’étrangers vers des pays dits « sûrs » ou vers des « premiers pays d'asile ». Elle a demandé s’il était possible de renouveler un permis de séjour temporaire accordé dans le cadre de la protection subsidiaire et a souhaité savoir combien de recours avaient été déposés et tranchés par la commission mentionnée par M. Tuzmukhamedov.

Un autre membre du Comité a demandé à la délégation de donner des statistiques concernant les nombres de demandes d’asile, de rejets de ces demandes et d’invocation du principe de non-refoulement en Islande, afin de mieux comprendre la portée des amendements législatifs apportés dans ces domaines. Un autre expert a demandé si et comment la loi islandaise tenait compte de la dimension psychologique de la torture, au-delà de ses manifestations physiques.

Un expert a relevé qu’il avait fallu six ans à l’Islande pour mettre en place un groupe de travail chargé d’examiner la création d’une institution nationale de droits de l’homme, conformément à une recommandation faite à l’Islande pendant l’Examen périodique universel. L’expert a demandé si un calendrier avait été fixé pour créer cette institution.

Réponses de la délégation

S’agissant de la définition de la torture, la délégation a déclaré que la Constitution islandaise interdisait explicitement la torture et tout autre traitement cruel, inhumain ou dégradant, dans une formulation quasiment identique à celle de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme. La même disposition constitutionnelle est interprétée de manière conforme à la Convention contre la torture des Nations Unies – et si la question de la torture est soulevée devant les tribunaux, elle sera abordée avec la Convention à l’esprit, a ajouté la délégation.

Toute forme de violence physique est sanctionnable au titre du Code pénal, de même que toute violation des libertés personnelles : cela s’applique aussi à maints égards à la torture ainsi qu’à d’autres formes de violence physique et, dans certains cas, psychologique, a ajouté la délégation. Le Code pénal incrimine aussi les délits « commis à titre officiel », y compris des faits de violence psychologique.

Le Gouvernement islandais estime que l’acte de torture est suffisamment couvert par la loi, malgré l’absence de définition spécifique, a déclaré la délégation. Mais cette question sera réexaminée par les autorités à la lumière des observations faites par les membres du Comité, a-t-elle assuré.

Le projet de loi concernant l’ institution nationale de droits de l’homme est élaboré depuis 2018 et un groupe de travail a été créé en 2021 pour mettre en place une telle institution et la doter d’un budget, a par ailleurs indiqué la délégation ; le nouveau Gouvernement a assuré que les fonds nécessaires seraient effectivement dégagés, a-t-elle souligné.

Le Médiateur parlementaire agit en tant que mécanisme national de prévention de la torture depuis 2018, a-t-il été rappelé. Il bénéficie de financements supplémentaires pour accomplir cette nouvelle mission. Le Médiateur a produit des rapports détaillés concernant les visites qu’il a effectuées dans la plupart des lieux de détention du pays et a émis des recommandations concernant l’accès aux soins de santé en détention ou encore l’usage de la force par les gardiens, a précisé la délégation.

Le Gouvernement amendera la loi pour mieux tenir compte de la capacité juridique des personnes placées d’office dans des établissements de soins, en tenant compte des recommandations faites à cet égard par le Médiateur ainsi que des observations des membres du Comité contre la torture, a par la suite indiqué la délégation. Dans ses rapports, le Médiateur n’a pas constaté de traitements inhumains ou dégradants, y compris dans la prise en charge de patients constituant un danger pour eux-mêmes ou pour autrui, a-t-elle souligné.

S’agissant des garanties procédurales, la délégation a notamment indiqué que la police peut détenir une personne soupçonnée de délit pénal pendant 24 heures avant de la présenter à un juge – un délai plus court que celui en vigueur dans un grand nombre d’États parties à la Convention.

Concernant le placement à l’isolement en détention préventive – qui est possible si le police a besoin de quelques jours ou heures supplémentaires pour récolter des preuves – les exigences légales sont strictes : la police doit pouvoir prouver, devant un juge, qu’elle n’a pas d’autres moyens de récolter des preuves au début de son enquête ou qu’il y a des raisons de croire que le prévenu entraverait cette enquête. L’isolement de la personne ne peut se prolonger au-delà de quatre semaines, sauf si le délit dont elle est soupçonnée est passible d’une peine de plus de dix ans d’emprisonnement. Le juge peut décider qu’une personne prévenue soit placée non pas en détention préventive mais dans un hôpital, par exemple, a ajouté la délégation. Les personnes placées à l’isolement bénéficient d’un suivi médical constant, a-t-elle insisté.

Entre 1% et 2% des personnes arrêtées par la police sont placées en détention préventive ; la moitié d’entre elles sont placées à l’isolement pendant des périodes courtes, a-t-il été précisé. Plusieurs mineurs de plus de 15 ans soupçonnés de délits très graves sont eux aussi placés en détention préventive.

Concernant les conditions de détention, la délégation a fait valoir que chaque personne emprisonnée subit un examen médical au début de sa peine et bénéficie ensuite des mêmes services médicaux que le reste de la population.

D’autre part, le Gouvernement islandais, qui a pris au sérieux les préoccupations exprimées par le CPT concernant l’accès des détenus aux soins de santé mentale, a adopté un plan d’action dans ce domaine, poursuivant plusieurs objectifs dont un meilleur dépistage des problèmes de santé mentale et un renforcement des soins prodigués en prison.

La formation des agents de police se fait à l’université depuis 2016, avec des cours complémentaires à l’académie de police, a d’autre part indiqué la délégation. Les droits de l’homme font l’objet d’enseignements. Les futurs agents sont aussi sensibilisés aux violences domestiques ; à la traite et à l’exploitation des personnes ; et à la portée des discours haineux et des préjugés, entre autres.

Créé en 2017, le Comité de surveillance de la police reçoit les plaintes de citoyens qui estiment avoir subi des mauvais traitements de la part de la police. Il détermine si les faits dénoncés ont un caractère pénal : le cas échéant, il dénonce l’affaire au parquet ; à défaut, il transmet le dossier à la direction des services de police, pour traitement interne. Chaque plaignant est informé de manière claire des suites données à sa démarche.

L’utilisation de la force par la police ou par un gardien de prison est encadrée et doit se faire de manière proportionnée, a souligné la délégation, rappelant que les agents reçoivent une formation sur la manière de faire usage de la force.

Les interrogatoires de police sont enregistrés par audio et vidéo, et sont consignés intégralement par écrit, a en outre souligné la délégation.

Les cas de harcèlement de policières sur leur lieu de travail sont traités avec le plus grand sérieux, a assuré la délégation, précisant que le conseil disciplinaire a été saisi de vingt-quatre cas.

La délégation a aussi fait savoir que le Gouvernement appliquait, depuis vingt ans, des plans d’action relatifs à la violence sexiste et à la protection des victimes de ce type de violence. Le plan d’action actuel, qui porte sur la gestion des infractions sexuelles au sein du système de justice, contient des mesures favorables aux victimes et relatives à la prévention. Au début de la pandémie de COVID-19, le Ministère de la justice et le Ministère des affaires sociales ont mobilisé des financements pour renforcer la protection contre la violence domestique. On a constaté une augmentation du nombre des plaintes déposées par les victimes. L’expulsion d’un conjoint violent du domicile conjugal est possible, a précisé la délégation.

Le Gouvernement applique un plan d’action national contre la traite des êtres humains comportant dix mesures relatives à la prévention, à la protection et aux poursuites.

Durant le dialogue, la délégation s’est par ailleurs dite d’accord avec la nécessité, mentionnée par les deux corapporteurs, de revoir les définitions de la torture et de la traite des êtres humains pour tenir compte de l’évolution de l’approche de ces problèmes.

Sur les questions relatives aux migrations, la délégation a précisé qu’un étranger ne peut être refoulé vers un pays où il risquerait la torture, même dans les situations où la sécurité nationale pourrait être invoquée. Les décisions en matière d’asile peuvent faire l’objet d’appels ayant toujours un effet suspensif : le délai pour interjeter appel est de 15 jours, ou cinq jours lorsque l’expulsion se fait vers un pays considéré comme sûr, a précisé la délégation, avant d’indiquer que l’Islande a reçu 871 demandes d’asile en 2021 et 1226, à ce jour, pour 2022.

La Loi sur l’autonomie de genre (2019) interdit tout changement permanent de sexe et de caractéristiques sexuelles sans consentement écrit de la personne concernée et stipule que les personnes intersexes doivent recevoir des informations détaillées sur les risques et les avantages d’un tel traitement.

L’Islande n’ayant pas d’armée, le corps des gardes-côtes remplit certaines fonctions à caractère militaire. À ce titre, il peut être appelé à participer à des missions à l’étranger avec FRONTEX, dont il respecte alors le code de conduite, a indiqué la délégation.

Enfin, la délégation a indiqué que l’Islande n’avait encore reçu aucune demande d'extradition d'une personne soupçonnée d'avoir commis un délit de torture.

 

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CAT22.002F