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Conseil des droits de l’homme :  les États sont appelés à s'abstenir d'utiliser les lois « anti-désinformation » pour poursuivre et détenir des individus et à protéger les défenseurs des droits de l'homme œuvrant dans le domaine de l'environnement

Compte rendu de séance

 

Le Conseil se penche en outre sur le lien entre sans-abrisme et formes contemporaines d’esclavage

 

Ce matin, le Conseil des droits de l’homme a achevé, en entendant plusieurs intervenants*, son dialogue entamé vendredi dernier autour du rapport du Haut-Commissaire aux droits de l’homme sur les mesures que le Haut-Commissariat entend adopter pour protéger plus activement les droits économiques, sociaux et culturels et lutter contre les inégalités dans le contexte du relèvement après la pandémie de COVID-19.  Le Conseil a ensuite tenu un dialogue avec la Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail sur la détention arbitraire, Mme Priya Gopalan, avant d’engager son dialogue avec le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines d’esclavage, y compris leurs causes et leurs conséquences, M. Tomoya Obokata.

Présentant le rapport du Groupe de travail sur la détention arbitraire, Mme Gopalan a indiqué qu’en 2022, le Groupe avait adopté 88 avis dans le cadre de sa procédure ordinaire, concernant la détention de 160 personnes dans 50 pays. Il a transmis 43 appels urgents à 22 gouvernements et, dans un cas, à d'autres acteurs, ainsi que 111 lettres d'allégations et autres lettres à 61 gouvernements et, dans trois cas, à d'autres acteurs, concernant au moins 356 personnes identifiées. Les États ont informé le Groupe de travail des mesures prises pour remédier à la situation des détenus et, dans plusieurs cas, des détenus ont été libérés, a précisé la Présidente-Rapporteuse. Depuis la présentation de l'année dernière, 23 personnes ayant fait l'objet d'avis ont été libérées, a-t-elle indiqué.

Mme Gopalan a ajouté qu’en 2022, les États concernés ont répondu en temps utile aux communications et demandes d'information dans environ 48% des cas où le Groupe a adopté un avis. Ce taux était de 53% en 2021, a-t-elle noté. Elle a appelé les États à s'abstenir de tout acte d'intimidation ou de représailles à l'encontre des personnes ayant coopéré avec le Groupe de travail.

La Présidente-Rapporteuse a ensuite souligné que le Groupe appelle les États à trouver un équilibre entre l'impératif de répondre aux urgences de santé publique, telles que celle liée à la pandémie de COVID-19, et leur obligation de défendre les droits de l'homme et les libertés fondamentales pour tous, sans distinction. Le Groupe de travail appelle en outre les États à s'abstenir d'utiliser les lois « anti-désinformation » pour poursuivre des individus pour la diffusion d'informations dans le cadre de leur travail et à abolir les interdictions de diffusion d'informations fondées sur des idées vagues et ambiguës, y compris les « fausses nouvelles » (ou « fake news »). Enfin, le Groupe de travail appelle les États à prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les défenseurs des droits de l'homme dans le domaine de l'environnement, a précisé Mme Gopalan.

Mme Gopalan a par ailleurs rendu compte des visites que le Groupe de travail a effectuées au Botswana et en Mongolie, après quoi ces deux pays directement concernés, ainsi que l’institution nationale des droits de l’homme de Mongolie, ont fait des déclarations, avant que de nombreuses délégations** ne prennent part au dialogue avec la Présidente-Rapporteuse du Groupe.  De nombreux intervenants se sont inquiétés du recours croissant à des lois anti-désinformation pour poursuivre et détenir des journalistes, des opposants politiques et des militants.  A également été particulièrement condamnée la criminalisation du travail des défenseurs des droits de l'homme œuvrant dans le domaine de l'environnement.

Présentant son rapport, le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines d’esclavage, y compris leurs causes et leurs conséquences a pour sa part relevé que selon les estimations mondiales les plus récentes, 50 millions de personnes ont été soumises à ces pratiques chaque jour en 2021, soit 10 millions de plus depuis les dernières estimations de 2016. Il faut agir sans tarder pour faire en sorte que les gens soient libres d’accepter ou de refuser un emploi, que les enfants et les travailleurs soient à l’abri de l’exploitation et que chacun soit libre d’épouser la personne qu’il aime, a insisté M. Obokata.

Évoquant le sans-abrisme en tant que cause et conséquence des formes contemporaines d’esclavage, le Rapporteur spécial s’est ensuite inquiété des risques affrontés tout particulièrement par les enfants et les jeunes des rues. Il a demandé aux Etats de considérer les personnes sans abri comme des détenteurs de droits et de les traiter sans stigmatisation ni discrimination.

M. Obokata a ensuite rendu compte des visites qu’il a effectuées au Costa Rica et en Mauritanie, après quoi ces deux pays directement concernés, ainsi que la Commission nationale des droits de l'homme de Mauritanie, ont fait des déclarations, avant que le Conseil n’engage son dialogue avec le Rapporteur spécial en entendant les déclarations de plusieurs délégations***.

 

Cet après-midi, à 15 heures, le Conseil doit achever son dialogue avec M. Obokata, avant d’engager son dialogue avec l’Expert indépendant sur la promotion d'un ordre international démocratique et équitable.

 

Dialogue autour du rapport du Haut-Commissaire aux droits de l’homme sur les mesures que le Haut-Commissariat entend adopter pour protéger plus activement les droits économiques, sociaux et culturels et lutter contre les inégalités dans le contexte du relèvement après la pandémie de COVID-19

Aperçu du dialogue

Poursuivant le dialogue entamé vendredi dernier autour de ce rapport, de nombreuses délégations ont rappelé que la pandémie avait entraîné des conséquences négatives dans de très nombreux domaines, qu’il s’agisse de l’accès à la santé, aux vaccins, aux médicaments ou à l’éducation. Nombre d’entre-elles ont aussi déploré que des millions de personnes soient tombées dans la pauvreté durant cette période.

La pandémie a accentué les vulnérabilités inhérentes aux petits États insulaires en développement, ont souligné plusieurs intervenants ; leur éloignement des marchés rendait difficile l’accès aux vaccins et aux traitements ainsi que l’approvisionnement en produits essentiels, y compris la nourriture, a-t-il été relevé.

Une organisation a par ailleurs souligné que la pandémie avait entraîné la perte de plus de 10 millions d’emplois dans le secteur culturel, rien qu’en 2020, et réduit les revenus des artistes.

Plus que jamais, il est important d’avoir un débat sur la protection des droits de l’homme dans le cadre de toute pandémie à venir, a indiqué une délégation.

A été souligné le rôle central des droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels, en tant que systèmes de protection essentiels pour faire face à des crises telles que la pandémie de COVID-19 ou d’autres crises sanitaires, les changements climatiques ou les conflits. Tout cela a un impact direct et disproportionné sur les droits des personnes les plus vulnérables dans le monde, avec un impact évident sur les femmes et les filles, a-t-on insisté.

De nombreuses délégations ont salué la vision du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, qui cherche à consolider la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels. Cette vision renforcera également les droits civils et politiques, a-t-il été souligné. La promotion des droits économiques, sociaux et culturels est fondamentale pour la réalisation des objectifs de développement durable, a rappelé une délégation.

En cette année de 75ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, ont été réaffirmées l’universalité et l’indivisibilité des droits de l’homme.

Une approche fondée sur les droits de l'homme et la coopération internationale est essentielle pour construire un monde post-pandémique plus résilient et plus équitable, qui respecte et protège les droits économiques, sociaux et culturels de tous, ont indiqué plusieurs intervenants.

Enfin, plusieurs délégations ont appelé le Fonds monétaire international et la Banque mondiale à revoir leurs politiques liées à la dette.

*Liste des intervenants : Maurice, Espagne, Sierre Leone, Gambie, Ouganda, Inde, Viet Nam, Iran, Kazakhstan, Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), Bahamas, Kenya, Ghana, El Salvador, Arabie saoudite, Mauritanie, Bolivie, Commission of the Churches on International Affairs of the World Council of Churches, Action Canada for Population and Development, International Organization for the Right to Education and Freedom of Education (OIDEL), Make Mothers Matter, Human Rights Watch, iuventum e.V., Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII, Asociacion HazteOir.org, Geledés - Instituto da Mulher Negra, et India Water Foundation.

Réponses et remarques de conclusion de la Haute-Commissaire adjointe

MME NADA AL-NASHIF, Haute-Commissaire adjointe aux droits de l’homme, a souligné que les défis rencontrés par les Petits états insulaires en développement ont un impact sur les droits économiques, sociaux et culturels. Il faut davantage de moyens pour les relever et renforcer la mise en œuvre de l’Agenda 2030 dans ce domaine, a-t-elle fait observer. Il faut notamment mettre fin à la spirale de la dette de ces pays, a plaidé Mme Al-Nashif.

La Haute-Commissaire ajdointe a souligné que la pandémie avait montré les conséquences du sous-investissement dans le domaine de la promotion et de la protection des droits économiques, sociaux et culturels. Elle a rappelé que ces droits étaient des obligations juridiques qui doivent guider les États. L’absence de mise en œuvre de ces droits entraîne des troubles et des conflits, a-t-elle insisté. Il faut renouveler l’engagement de la communauté internationale dans ce domaine, a-t-elle conclu.

Dialogue avec le Groupe de travail sur la détention arbitraire

Le Conseil est saisi du rapport du Groupe de travail sur la détention arbitraire (A/HRC/54/51), ainsi que les annexes au rapport concernant les visites du Groupe au Botswana (A/HRC/54/51/Add.1) et en Mongolie (A/HRC/54/51/Add.2).

Présentation

MME PRIYA GOPALAN, Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail sur la détention arbitraire, a indiqué qu’en 2022 le Groupe avait adopté 88 avis dans le cadre de sa procédure ordinaire, concernant la détention de 160 personnes dans 50 pays. Il a transmis 43 appels urgents à 22 gouvernements et, dans un cas, à d'autres acteurs, ainsi que 111 lettres d'allégations et autres lettres à 61 gouvernements et, dans trois cas, à d'autres acteurs, concernant au moins 356 personnes identifiées. Les États ont informé le Groupe de travail des mesures prises pour remédier à la situation des détenus et, dans plusieurs cas, des détenus ont été libérés, a précisé la Présidente-Rapporteuse. Depuis la présentation de l'année dernière, 23 personnes ayant fait l'objet d'avis ont été libérées, a-t-elle indiqué, exprimant sa gratitude aux gouvernements qui ont répondu aux appels du Groupe et pris des mesures pour fournir les informations demandées concernant la situation des détenus.

Mme Gopalan a ajouté qu’en 2022, les États concernés ont répondu en temps utile aux communications et demandes d'information dans environ 48% des cas où le Groupe a adopté un avis. Ce taux était de 53% en 2021, a-t-elle noté. Elle a appelé les États à s'abstenir de tout acte d'intimidation ou de représailles à l'encontre des personnes ayant coopéré avec le Groupe de travail.

Au cours de l’année, le Groupe de travail a par ailleurs continué d'explorer diverses questions thématiques afin d'aider les parties prenantes à prévenir la détention arbitraire, a poursuivi la Présidente-Rapporteuse.  Le Groupe appelle les États à trouver un équilibre entre l'impératif de répondre aux urgences de santé publique, telles que celle liée à la pandémie de COVID-19, et leur obligation de défendre les droits de l'homme et les libertés fondamentales pour tous, sans distinction, a-t-elle souligné. Le Groupe de travail appelle en outre les États à s'abstenir d'utiliser les lois « anti-désinformation » pour poursuivre des individus pour la diffusion d'informations dans le cadre de leur travail et à abolir les interdictions de diffusion d'informations fondées sur des idées vagues et ambiguës, y compris les « fausses nouvelles » (ou « fake news »). Enfin, le Groupe de travail appelle les États à prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les défenseurs des droits de l'homme dans le domaine de l'environnement, a précisé Mme Gopalan.

Mme Gopalan a ensuite rendu compte de la visite du Groupe de travail au Botswana. Elle s’est réjouie que le Groupe ait bénéficié d'un accès total et sans entrave dans ce pays, où il a visité 19 lieux de privation de liberté et a pu s'entretenir confidentiellement avec plus de 100 personnes privées de liberté. Le Groupe de travail se félicite des progrès accomplis par le Botswana et relève plusieurs évolutions positives, telles que la ratification des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme ; l'élargissement du mandat du bureau du Médiateur pour y inclure un mandat en matière de droits de l'homme et des fonctions d'enquête ; la dépénalisation des relations consensuelles entre personnes du même sexe ; ou encore l’application constante des remises de peine.

Toutefois, le Groupe de travail a identifié un certain nombre de défis, a poursuivi Mme Gopalan, s’agissant notamment de la durée excessive de la détention préventive ; de la sévérité des peines que les Dikgosi - ou chefs - peuvent imposer ; le manque d'assistance juridique dans les affaires pénales autres que celles impliquant la peine capitale ; les retards injustifiés dans les procédures pénales ; et le recours à des peines obligatoires et disproportionnées. Le Groupe de travail a également noté l'absence d'un système efficace de déjudiciarisation pour les enfants en conflit avec la loi, les mauvaises conditions de détention dans la plupart des lieux de privation de liberté et le contournement des procédures légales par la Direction du renseignement et de la sécurité.

Dans le contexte des migrations, le Groupe de travail s'est en outre montré très préoccupé par l'approche punitive globale actuelle des migrations et par l'absence de planification à long terme pour les réfugiés, a ajouté Mme Gopalan. Enfin, le Groupe a observé des problèmes liés à la détention dans le contexte des soins de santé, notamment le manque de services de proximité appropriés pour les personnes souffrant de handicaps psychosociaux et de toxicomanie.

S’agissant de sa visite en Mongolie, le Groupe de travail a effectué des visites annoncées ou inopinées dans 21 centres de détention à Oulan-Bator et dans plusieurs établissements de la province de Tüv. Il a pu s'entretenir en toute confidentialité avec environ 65 personnes privées de liberté. Le Groupe de travail a eu un accès immédiat et sans entrave à tous les lieux qu'il souhaitait visiter, a précisé Mme Gopalan.

Plusieurs développements positifs ont été noté, dont la révision en 2020 de la loi sur la Commission nationale des droits de l'homme de Mongolie et l'avancement correspondant du mandat de la Commission ; la désignation d'un mécanisme national de prévention ; l'adoption d’une loi sur le statut juridique des défenseurs des droits de l'homme ; l'adoption de plusieurs lois d'amnistie ; l'absence de détention systémique dans le contexte de la migration ; et l'approche de l'admission volontaire dans les institutions de soins gérées par l'État pour les personnes ayant besoin d'assistance (résidence assistée).

Des difficultés ont toutefois été observés dans le système de justice pénale, a précisé Mme Gopalan, en référence, notamment, aux lacunes dans la mise en œuvre du Code de procédure pénale révisé et la détention de personnes en garde à vue. La Présidente-Rapporteuse a en outre relayé la préoccupation du Groupe de travail concernant les garanties procédurales et les droits à un procès équitable, ainsi que le manque de transparence du mécanisme de libération conditionnelle anticipée. Elle a aussi déploré l’absence de tribunaux spécialisés pour les jeunes, d’une part, et le manque de services de proximité pour les personnes souffrant de handicaps psychosociaux, d’autre part.

Concluant sa présentation, Mme Gopalan a souligné que la capacité du Groupe de travail à remplir son mandat a également été affectée par la crise financière des Nations Unies. Rappelant que ce mandat n'est pas viable sans le soutien des États Membres, elle a appelé ces derniers à soutenir le travail du Groupe. Enfin, elle s’est jointe à l’appel du Haut-Commissaire aux droits de l'homme, lancé le 4 janvier 2023, demandant la fin de la détention arbitraire une fois pour toute.

Pays concernés

Le Botswana a précisé que la visite du Groupe de travail a constitué une première pour ce pays. Cette visite s’est faite sans entrave, a souligné la délégation botswanaise. Le Groupe de travail a eu accès à des commissariats, des prisons, des centres de détention, des lieux des services de renseignement et de sécurité, des casernes, des centres pour les migrants et des centres de réhabilitation pour l’enfance. Le Botswana remercie les membres du Groupe de travail pour leur coopération constructive et se félicite que le rapport reconnaisse les évolutions positives du pays concernant la privation de liberté. La délégation a tenu à rappeler que son pays a légiféré sur l’interdiction de la détention illicite, la garantie du principe de présomption d’innocence jusqu’à preuve de culpabilité, le droit à une assistance juridique et la protection contre l’arrestation et la détention arbitraires.  

Pour sa part, la Mongolie a souligné que, depuis la visite du Groupe de travail, le pays a déjà pris un certain nombre de mesures importantes qui font écho à plusieurs recommandations qui lui ont été adressées. Le Gouvernement mongol reconnaît qu'il y a encore des progrès à faire, a indiqué la délégation mongole. Par conséquent, la mise en œuvre des recommandations formulées dans le rapport du Groupe de travail sera dûment examinée dans l'esprit d'un dialogue et d'un engagement fructueux, a-t-elle assuré. Elle a affirmé l’engagement absolu et inébranlable de la Mongolie en faveur de la promotion et de la protection de tous les droits de l'homme et de toutes les libertés. En tant que pays ayant adressé une invitation permanente à toutes les procédures spéciales thématiques, la Mongolie se réjouit toujours de leurs demandes de visite. À cet égard, la délégation a précisé que le pays aura le privilège d'accueillir la Rapporteuse spéciale sur l'indépendance des juges et des avocats, à Oulan-Bator, en novembre prochain.

La Commission nationale des droits de l'homme de Mongolie a souligné que le Parlement et le Gouvernement du pays ont œuvré ensemble pour mettre en conformité le Code de procédure pénale avec les instruments internationaux. Des progrès significatifs ont été réalisés, s’agissant notamment de l’arrestation, de la détention et de l’emprisonnement comme mesure de dernier recours. La Commission a toutefois regretté que des violations aux droits à la liberté et à la sécurité des personnes continuent de se produire en raison des difficultés à assurer la conformité des principes adoptés sur tout le territoire du pays. Elle a précisé que ces violations concernent la détention provisoire, la condamnation à perpétuité, l’isolement des détenus et des cas de traitement médicaux involontaires.  Le Gouvernement a été invité à prendre des mesures à cet égard.

Aperçu du dialogue

Des participants au dialogue ont noté avec une vive inquiétude l'augmentation des détentions arbitraires de défenseurs des droits de l'homme, de journalistes, d'opposants politiques ou de militants pour avoir exercé leurs droits à la liberté d'expression, d'association et de réunion.

Une délégation a dans ce contexte condamné avec la plus grande fermeté l’usage de la détention arbitraire et de la détention secrète comme « outil de répression politique » destiné à étouffer les voix dissidentes et à réprimer les défenseurs des droits. Une autre délégation s’est jointe à cette condamnation, constatant que les détentions arbitraires et illégales sans procédure régulière continuent d’être utilisées par les gouvernements comme mesure d'intimidation, de répression et de punition. Un intervenant a fustigé l’usage de la détention arbitraire pour réduire l’espace démocratique.

De nombreuses délégations se sont inquiétées du recours à des lois anti-désinformation pour restreindre la liberté d'opinion et d'expression, l’une d’elles s’inquiétant de la tendance à poursuivre les médias et les journalistes pour avoir prétendument diffusé des informations fausses ou fabriquées, alors qu'ils expriment en réalité des critiques à l'égard du gouvernement. Une intervenante a rappelé que la criminalisation des médias et la confiscation de leurs biens non seulement violent la liberté d'opinion ou d'expression, mais constituent également un affront au système démocratique, qui, a-t-elle rappelé, devrait aspirer au pluralisme.

A aussi été condamnée la criminalisation du travail des défenseurs des droits de l'homme dans le domaine de l'environnement, visant en particulier les peuples autochtones. Un intervenant a dans ce contexte rappelé aux États leur obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les défenseurs des droits de l'homme dans le domaine de l'environnement, ce qui – a souligné un autre orateur – est d’autant plus important face aux changements climatiques actuels.  

Aucune détention secrète ne doit avoir lieu, a-t-on par ailleurs insisté. Une délégation a rappelé que la privation de liberté doit toujours être une mesure exceptionnelle et que toute détention doit se faire selon les normes pertinentes, notamment en respectant les garanties d’une procédure régulière, le droit à l’assistance d’un avocat et le droit de la personne de contester la légalité de sa détention.

Un intervenant a souligné que les personnes en situation de marginalisation et de vulnérabilité font l'objet d'un nombre disproportionné de détentions arbitraires.  Les personnes appartenant à des minorités sont davantage exposées au risque d’être victimes de détention illicite, a-t-il été relevé.

Une délégation a déploré la détention de migrants – qui, a-t-elle relevé, atteint aujourd’hui des « records historiques » - et a insisté sur la nécessité d’assurer pour ces personnes des voies de recours et des réparations.

L’attention a également été attirée sur la question de la détention arbitraire liée aux politiques de lutte contre le problème mondial de la drogue, une délégation remerciant le Groupe de travail pour ses travaux dans ce domaine.

Une intervenante s’est pour sa part inquiétée des graves effets négatifs de la privation de liberté sur la santé physique et psychologique des enfants, appelant la communauté internationale à appliquer les bonnes pratiques en matière d’alternatives aux mesures privatives de liberté et à mettre fin à la privation de liberté des enfants.

Au cours du dialogue, des délégations ont évoqué les mesures mises en place par leur pays au niveau national pour mettre un terme aux privations de liberté arbitraires, évoquant notamment des réformes de leurs codes de procédure pénale concernant les dispositions relatives à l’arrestation, à la garde à vue, à la détention provisoire et à la garantie d’un procès équitable.

Il a été proposé d’attribuer aux institutions nationales de droits de l'homme la compétence de visiter les lieux de détention afin de contrôler les conditions et la régularité des détentions.

Des délégations ont indiqué partager la préoccupation du Groupe de travail concernant le faible taux de réponse des États aux communications qui leur sont adressées par le Groupe. Les personnes ayant fait l’objet d’un avis du Groupe de travail doivent absolument être protégées contre toutes représailles, a-t-il été souligné.

Une délégation a invité le Groupe de travail sur la détention arbitraire à travailler de manière « professionnelle, objective et conformément au code de conduite applicable aux titulaires de mandats au titre des procédures spéciales » ; il est essentiel que les avis du Groupe concernant les cas particuliers ne soient pas pris de manière préconçue et que les réponses des États soient dûment prises en compte, a-t-elle souligné.

Enfin, si plusieurs délégations se sont réjouies des libérations obtenues en 2022, l’une d’elles a souligné qu’il ne faut pas oublier les personnes encore détenues arbitrairement et a appelé à leur libération immédiate.

**Liste des intervenants : Honduras, Lituanie (au nom d’un groupe de pays), Lettonie (au nom d’un groupe de pays), Union européenne, Luxembourg, Égypte, Costa Rica, France, Belgique, Paraguay, Chili, Iraq, Irlande, États-Unis, Chine, Arménie, Indonésie, Mexique, Cameroun, Angola, Maldives, Pérou, Pakistan, Royaume-Uni, Tunisie, Maroc, Yémen, Algérie, Cuba, Togo, Venezuela, Éthiopie, Afghanistan, Zambie, Inde, Azerbaïdjan, Iran, Organisation de la coopération islamique, Bahamas, Viet Nam, État de Palestine, Jubilee Campaign, Défense des enfants - international, Article 19 - Centre international contre la censure, Lidskoprávní organizace Práva a svobody obcanučů Turkmenistánu z.s., Freedom Now, Justiça Global, National Human Rights Civic Association “Belarusian Helsinki Committee”, Gulf Centre for Human Rights (GCHR) Limited, British Humanist Association, et BADIL Resource Center for Palestinian Residency and Refugee Rights.

Réponses et remarques de conclusion de la Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail

Revenant sur la préoccupation exprimée par les participants au dialogue face à l’augmentation des textes de loi sur la désinformation, MME GOPALAN a de nouveau souligné que pour le Groupe de travail, la publication d’informations erronées ne doit pas fonder une décision de détention.

Répondant par ailleurs aux inquiétudes concernant le ciblage des défenseurs des droits de l'homme dans le domaine de l'environnement, la Présidente-Rapporteuse a indiqué que le Groupe avait en effet noté dans plusieurs régions du monde un taux élevé de pénalisation des travaux de ces défenseurs.

S’agissant du traitement des informations reçues par le Groupe de travail, Mme Gopalan a réaffirmé que les principes d’indépendance et d’impartialité sont fondamentaux dans l’exercice du mandat du Groupe. Elle a précisé que les cinq membres du Groupe représentent cinq régions du monde ; que les documents reçus ou les allégations concernant des cas [de détention arbitraire] sont présentés aux gouvernements concernés qui ont 60 jours pour y répondre et qu’une prolongation de ce délai peut être demandée si nécessaire ; que si une réponse est donnée par le gouvernement concerné, elle est résumée dans l’avis ; que c’est après cette étape, que le Groupe de travail étudie le dossier avec attention et qu’un avis est ensuite donné concernant le cas. Dans ce contexte, la Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail a invité les États à répondre de façon détaillée et complète aux communications qui leur sont adressées en donnant autant d’informations que possible.

S’agissant de la privation de liberté dans le cadre de la pandémie de COVID-19, Mme Gopalan a rappelé que le Groupe de travail s’est exprimé contre le recours au prétexte des urgences sanitaires pour appliquer des lois visant à restreindre les libertés d’opinion et d’expression. En dépit des difficultés causées par la pandémie, les États doivent trouver un équilibre entre l'impératif de répondre aux urgences de santé publique et leur obligation de respecter les droits de l'homme, a-t-elle insisté.

Dialogue avec le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines d’esclavage, y compris leurs causes et leurs conséquences

Le Conseil est saisi du rapport du Rapporteur spécial sur les formes contemporaines d’esclavage, y compris leurs causes et leurs conséquences intitulé : « Le sans-abrisme en tant que cause et conséquence des formes contemporaines d’esclavage » (A/HRC/54/30), ainsi que des rapports concernant les visites du Rapporteur au Costa Rica (A/HRC/54/30/Add.1) et en Mauritanie (A/HRC/54/30/Add.2).

Présentation

Présentant son rapport, M. TOMOYA OBOKATA, Rapporteur spécial sur les formes contemporaines d’esclavage, y compris leurs causes et leurs conséquences, a souhaité citer quelques chiffres clefs liés aux formes contemporaines d’esclavage, indiquant que selon les estimations mondiales les plus récentes, 50 millions de personnes ont été quotidiennement soumises à ces pratiques en 2021. Il s’agit d’une augmentation de 10 millions de personnes depuis les dernières estimations de 2016, a-t-il précisé. Il s’est dès lors posé la question : « Pourquoi ne parvenons-nous pas à éliminer les formes contemporaines d’esclavage, conformément aux engagements pris par tous les États dans le cadre du Programme de développement durable? ».  Nous sommes en droit de nous poser cette question alors que le Sommet sur les ODD (objectifs de développement durable) se déroule aujourd’hui et demain au Siège des Nations Unies à New York, a souligné l’expert. Il a ainsi appelé les États à intensifier l’action individuelle et collective contre ces violations flagrantes des droits de l’homme. « Il n’est pas trop tard, mais nous devons agir sans plus tarder pour faire en sorte que les gens soient libres d’accepter ou de refuser un emploi, que les enfants et les travailleurs soient à l’abri de l’exploitation et que chacun soit libre d’épouser la personne qu’il aime », a-t-il plaidé.

S’agissant de sa visite en Mauritanie, M. Obokata a indiqué que le pays a fait d’importants progrès dans l’élimination des formes contemporaines d’esclavage dans un passé récent. Malgré ces réalisations, l’esclavage fondé sur l’ascendance et d’autres pratiques analogues persiste en Mauritanie, touchant les Haratines ainsi que d’autres groupes ethniques, a-t-il observé. Si les esclaves réfutent leur identité d’esclaves, les personnes appartenant à des groupes dominants les empêchent d’accéder à la terre et aux services tels que l’éducation, l’eau et les marchés. Beaucoup sont en outre confrontés à des menaces et au harcèlement, voire à la violence, et ils sont exclus des processus décisionnels. Aussi, le Rapporteur spécial a-t-il exhorté le Gouvernement mauritanien à prendre toutes les mesures nécessaires pour éliminer les formes traditionnelles et contemporaines d’esclavage dans le pays, notamment en veillant à ce que les lois existantes soient appliquées plus efficacement et en adoptant des mesures plus audacieuses pour mettre fin à l’acceptation profondément enracinée de l’esclavage par la société, ainsi qu’aux préjugés et à la discrimination à l’égard des anciens esclaves.

S’agissant de sa visite au Costa Rica, le Rapporteur spécial a relevé que le pays dispose de divers cadres juridiques applicables aux formes contemporaines d’esclavage et qu’il a fait des progrès significatifs pour remédier aux violations dans ce domaine et renforcer la protection des victimes et des droits des travailleurs. M. Obokata a néanmoins exprimé sa préoccupation face à l’existence de formes contemporaines d’esclavage dans le pays. Il a indiqué avoir reçu des rapports faisant état de cas de travail forcé non seulement dans les plantations de café, d’ananas, de bananes et autres, mais aussi dans la construction, les services et le travail domestique. M. Obokata a ainsi appelé le Costa Rica à assurer la protection de tous les travailleurs, y compris les travailleurs migrants et autochtones et les personnes d’ascendance africaine, contre l’exploitation par le travail et/ou sexuelle.

S’agissant ensuite de son rapport thématique – consacré au sans-abrisme en tant que cause et conséquence des formes contemporaines d’esclavage – le Rapporteur spécial a indiqué que les sans-abri, y compris les enfants et les jeunes en situation de rue, sont recrutés et exploités dans divers secteurs économiques, non seulement par des acteurs criminels, mais aussi par des membres de la famille, des amis et des employeurs. Beaucoup sont également victimes d’exploitation sexuelle. En outre, l’itinérance peut être une conséquence des formes contemporaines d’esclavage, car les victimes qui fuient des employeurs abusifs se retrouvent souvent sans domicile, ce qui peut conduire à leur re-victimisation, a souligné M. Obokata.

L’intégration sociale et économique des sans-abri nécessite l’accès à un logement adéquat et abordable, à l’éducation, à un travail décent et à des services publics, a poursuivi le Rapporteur spécial. Il s’est en outre dit préoccupé par les formes persistantes de discrimination croisée qui ont entraîné des difficultés pratiques, en particulier pour les femmes, les enfants et les jeunes, les minorités, les peuples autochtones, les personnes déplacées, les personnes LGBTQI+ et les personnes handicapées.

M. Obakata a précisé que dans ses recommandations, il demande aux États de considérer les personnes sans abri, y compris les enfants et les jeunes en situation de rue, comme des détenteurs de droits et de les traiter sans stigmatisation ni discrimination. Il est également nécessaire de mieux comprendre le lien entre le sans-abrisme et les formes contemporaines d’esclavage au niveau national et d’élaborer une politique ou une stratégie claire et cohérente pour y remédier plus efficacement, a-t-il plaidé.

Pays concernés

Le Costa Rica a indiqué s’être engagé fermement dans la lutte contre les formes contemporaines d’esclavage. Un cadre juridique a été mis en place pour ce faire et le pays s’est engagé à prendre des mesures concrètes pour le mettre en œuvre en coopération avec les Nations Unies et de multiples parties prenantes Un travail introspectif de l’État peut se traduire par une meilleure protection des personnes à risque, a poursuivi la délégation costaricienne. Le pays se penche particulièrement sur la situation des personnes vulnérables, mineurs, femmes d’ascendance africaine ou personnes des zones côtières, a précisé la délégation. Le pays reçoit beaucoup de personnes déplacées et a une approche de la politique migratoire axée sur les droits de l’homme, a-t-elle poursuivi. Le Costa Rica veut intégrer toutes les personnes afin qu’elles quittent le secteur informel pour intégrer le secteur formel, ce qui devrait davantage les protéger des formes contemporaines d’esclavage, a-t-elle ajouté. Le Costa Rica va continuer à lutter contre ce phénomène en impliquant toutes les parties concernées, notamment le secteur privé, a-t-elle conclu.

La Mauritanie a indiqué que le pays rejoint le Rapporteur spécial dans la majorité de ses recommandations. Le Rapporteur spécial a pu observer les actions menées par l’État pour lutter contre les formes contemporaines d’esclavage, notamment en visant à changer les mentalités en cours, a poursuivi la délégation mauritanienne.  Elle a tout particulièrement attiré l’attention sur le Plan d’action national visant à lutter contre la traite des personnes, qui s’aligne sur les normes internationales dans ce domaine. Des campagnes sont en outre menées au niveau des autorités judiciaires, sécuritaires et administratives autour de ce phénomène, a fait valoir la délégation. La société civile participe activement à la lutte contre l’impunité dans ce domaine, a-t-elle ajouté. La délégation a ensuite fait le point sur les affaires liées à de l’esclavage moderne qui sont portées devant la justice, en soulignant que de nombreuses personnes ont dans ce contexte été condamnées à des peines de prison.

Un représentant de la Commission nationale des droits de l’homme de Mauritanie a ensuite indiqué qu’il était satisfait des constations du Rapporteur spécial concernant les efforts consentis par la Mauritanie pour lutter contre les formes contemporaines d’esclavage. Il a néanmoins reconnu qu’il reste un long chemin à parcourir pour lutter contre les pratiques d’esclavage qui empêchent des citoyens d’avoir accès, notamment, à l’éducation. Il a salué le fait que les autorités de Mauritanie déploient de nombreux efforts dans ce domaine.

Aperçu du dialogue

Les délégations qui ont engagé le dialogue avec le Rapporteur spécial ont salué le fait que le rapport de cette année, qui analyse le sans-abrisme à la fois comme cause et conséquence des formes contemporaines d’esclavage, mette l’accent sur une question cruciale des droits de l’homme. Le logement est un droit de l’homme et il est au cœur du contrat social entre l’État et ses citoyens, a-t-il été souligné.

Il a par ailleurs été constaté que les personnes sans abri sont touchées par des formes multiples et croisées de discrimination – fondées notamment sur le sexe, l’origine ethnique ou sociale, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou autres, le handicap, l’âge, l’orientation sexuelle et l’identité de genre –, qui affectent leur accès à l’éducation, à un logement abordable, à un travail décent et aux services essentiels. Ces dernières années, les logements sûrs sont devenus hors de portée pour de nombreux jeunes et autres personnes à revenu faible ou instable, a-t-il été déploré.  Aussi, le rôle des gouvernements dans le domaine du logement, en vue de préserver la dignité humaine, de réaliser la justice sociale et d’éradiquer le phénomène des sans-abri, a-t-il été souligné.

Une délégation a également souligné que le manque de données constitue un obstacle important pour le suivi adéquat du sans-abrisme et la lutte contre ce phénomène.

***Liste des intervenants : Honduras, Union européenne, Oman (au nom du Conseil de coopération du Golfe), Équateur (au nom d’un groupe de pays).

 

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