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Le Conseil se penche sur les droits de l’homme et la solidarité internationale et sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association ; il achève en outre son dialogue sur la traite des êtres humains

Compte rendu de séance

 

Le Conseil des droits de l’homme a examiné, cet après-midi et jusqu’en début de soirée, des rapports présentés par l’Expert indépendant sur les droits de l’homme et la solidarité internationale, M. Obiora Okafor, et par le Rapporteur spécial sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association, M. Clément Nyaletsossi Voule. En début de séance, il a en outre achevé, en entendant plusieurs délégations*, le dialogue entamé ce matin avec la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, Mme Siobhán Mullally.

Dans ses remarques de conclusion, Mme Mullally a notamment recommandé de prendre en compte, dans le traitement des demandes d’asile, le risque de traite de même que les nouveaux facteurs tels que le réchauffement climatique.

Présentant aujourd’hui ce qui est son dernier rapport au Conseil en tant qu’Expert indépendant, M. Okafor a, quant à lui, indiqué que ce document contenait un projet révisé de déclaration sur le droit à la solidarité internationale. Ce projet met en lumière le lien entre la solidarité internationale et la réalisation des objectifs de développement durable des Nations Unies, y compris l’éradication de la pauvreté, la fourniture d’une éducation et de soins de santé de qualité, la promotion de l’égalité des sexes et la protection de l’environnement, a-t-il notamment précisé.

M. Okafor a par ailleurs rendu compte de la visite qu’il a effectuée au Costa Rica en 2022.

Après une déclaration du Costa Rica, en tant que pays concerné, plusieurs délégations** ont dialogué avec M. Okafor, nombre d’entre elles appelant à l’adoption du projet de déclaration sur le droit à la solidarité internationale portée par l’Expert indépendant. Elles ont souligné l’importance d’un engagement en faveur d’une plus grande solidarité internationale pour faire face à l’aggravation des crises et des problèmes mondiaux.

En fin de journée, M. Voule a pour sa part présenté les conclusions et recommandations de son rapport intitulé « Établissement des responsabilités et lutte contre l’impunité pour les violations graves des droits de l’homme en lien avec l’exercice des droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association », qui met en évidence de nombreux obstacles à l'établissement d'une responsabilité effective pour les violations graves commises à l'encontre de personnes exerçant légitimement ces libertés fondamentales.

Ces obstacles, a précisé le Rapporteur spécial, sont notamment l'absence de reconnaissance adéquate, par les États, des droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association ; la négation par les États de l'existence d'une violation, ainsi que le refus d'en assumer la responsabilité ; l’invocation abusive des lois et des mesures de sécurité pour donner un pouvoir excessif aux forces de l'ordre et leur accorder l'immunité ou le pardon en cas d'abus ; l'utilisation d’agents placés en dehors de la structure de commandement des forces de l’ordre pour maintenir l'ordre dans les rassemblements ; et le recours à des tribunaux militaires ou spécialisés pour poursuivre les activistes.

Pour remédier à cette situation d'impunité endémique, le Rapporteur spécial a notamment recommandé de condamner publiquement les abus commis à l'encontre de tous ceux qui exercent ces droits ; et de veiller à ce que les personnes assumant des responsabilités de commandement soient poursuivies pour leurs actes ayant contribué à des violations graves des droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association.

M. Voule a ensuite présenté des additifs à son rapport contenant des recommandations et des mesures supplémentaires à prendre par les États pour garantir la jouissance des droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association par les travailleurs de l'économie informelle ; et des principes généraux destinés à favoriser un engagement et un partenariat renouvelés afin de créer le meilleur environnement possible pour le droit de la société civile d'accéder aux ressources dont elle a besoin pour mener à bien ses missions.

Le Rapporteur spécial a enfin rendu compte de la visite qu’il a effectuée au Brésil en 2022.

Après une déclaration du Brésil, en tant que pays concerné, plusieurs délégations*** ont engagé le dialogue avec le Rapporteur spécial. Nombre d’entre elles ont dit partager les préoccupations de M. Voule face aux violations des droits humains des manifestants et des militants qui exercent leurs droits à la liberté de réunion pacifique et d'association, et face à l’impunité dont bénéficient les responsables de ces violations. Des préoccupations ont aussi été exprimées s’agissant de violences exercées par certains États contre des manifestants appartenant à des minorités ethniques ou autres.

Les pays suivants ont exercé leur droit de réponse en fin de séance : Fédération de Russie, Chine, Israël, Ukraine, Cambodge.

 

Jeudi 29 juin 2023 étant jour férié aux Nations Unies, le Conseil reprendra ses travaux vendredi 30 juin, à 10 heures. Il tiendra à cette occasion la première partie de sa journée annuelle de débat sur les droits des femmes, avant d’achever le débat avec M. Voule et d’engager son dialogue avec le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et l’extrême pauvreté.

 

Fin du dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains

Aperçu du dialogue

De nombreuses délégations ont condamné « sans équivoque » la traite des êtres humains et ont encouragé la poursuite de la coopération et de la collaboration internationales dans la prévention et la lutte contre la traite des êtres humains.

Plusieurs délégations ont indiqué que la traite des êtres humains est l’une des principales menaces de l’époque et ont souligné que la traite des femmes et des filles est devenue un problème grave, nécessitant de nouvelles solutions.  Le monde connaît toujours un taux élevé de traite des femmes et des enfants, en raison, entre autres, de la pauvreté, de l’insécurité alimentaire et du taux de chômage élevé, a-t-il été indiqué.

À cet égard, plusieurs délégations ont partagé les préoccupations de la Rapporteuse spéciale selon lesquelles limiter l’accès à l’asile et à d’autres formes de protection internationale risque d’accroître les risques de traite des personnes.  Il faut au contraire atténuer les risques migratoires des personnes déplacées de force, qui sont des cibles faciles pour les trafiquants, ont affirmé de nombreux intervenants. Certains se sont faits l’écho des vues de la Rapporteuse spéciale quant aux obligations des États de prévenir la traite dans les situations de déplacement international de populations ou de réfugiés, en garantissant un accès effectif à l’asile et le respect du principe de non-refoulement.

A été réaffirmée à plusieurs reprises durant ce dialogue, l’importance de la Convention des Nations Unies de 1951 relative au statut des réfugiés et de son Protocole de 1967, ainsi que de la Convention des Nations Unies de 1954 relative au statut des apatrides et de la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie. Plusieurs intervenants ont incité les Etats à ratifier et à mettre en œuvre ces instruments.

Il faut en outre un engagement international et une coopération plus solides des États dans ce domaine, ont souligné de nombreuses délégations.

Enfin, plusieurs délégations ont présenté au Conseil les mesures prises par leurs pays au niveau national pour lutter contre la traite des êtres humains.

*Liste des intervenants : Lesotho, Azerbaïdjan, Arabie saoudite, Bélarus, Philippines, Panama, Bangladesh, Nigéria, Bulgarie, Cambodge, Iran, Ukraine, République arabe syrienne, Zambie, République dominicaine, Kazakhstan, Commission nationale indépendante des droits de l’homme du Burundi, Global Alliance Against Traffic in Women, Helsinki Foundation for Human Rights, World Evangelical Alliance, Société anti-esclavagiste, International Dalit Solidarity Network, International Lesbian and Gay Association, Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII, Partners For Transparency, Défense des enfants - international, China Society for Human Rights Studies.

Réponses et remarques de conclusion de la Rapporteuse spéciale

S’agissant du lien entre le terrorisme et la traite des êtres humains, MME SIOBHÁN MULLALLY, Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, a indiqué que les victimes de la traite peuvent aussi être victimes de terrorisme. Il faut assurer la reddition de comptes dans ce domaine, a-t-elle plaidé. Il ne faut pas oublier les victimes de la traite qui ont été enrôlées dans des groupes terroristes, a-t-elle ajouté.

La Rapporteuse spéciale a aussi recommandé d’inclure le risque de traite dans tous les traitements de demandes d’asile et de prendre en compte les nouveaux facteurs tels que le réchauffement climatique, afin de lutter efficacement contre la traite.

Mme Mullally a en outre recommandé aux États de soutenir davantage les services de protection, de prendre des mesures positives de réinstallation et d’assouplir les règles du regroupement familial.  Il faut par ailleurs davantage mettre en œuvre la protection temporaire et lutter contre l’apatridie des enfants, a-t-elle poursuivi. Il ne faut pas incriminer les requérants d’asile, a insisté Mme Mullally.

La prévention de la traite et la protection des victimes est indispensable pour la paix et la sécurité universelles, a conclu la Rapporteuse spéciale.

Dialogue avec l’Expert indépendant sur les droits de l’homme et la solidarité internationale

Le Conseil est saisi du rapport de l’Expert indépendant sur les droits de l’homme et la solidarité internationale, intitulé : « Projet révisé de déclaration sur les droits de l’homme et la solidarité internationale » (A/HRC/53/32) ainsi que de son rapport de visite au Costa Rica (A/HRC/53/32/Add.1 et Add.2 à paraître en français).

Présentation des rapports

Présentant son rapport, l’Expert indépendant sur les droits de l’homme et la solidarité internationale, M. Obiora Okafor, a déclaré qu’il présentait un projet révisé de déclaration sur le droit à la solidarité internationale. Le rapport souligne l’importance de la solidarité internationale en tant que principe fondamental de la promotion et de la protection des droits de l’homme à l’échelle mondiale.  La principale raison de la révision du projet de déclaration préexistant est de mettre à jour le projet existant pour tenir compte des faits nouveaux importants survenus dans le domaine des droits de l’homme depuis son élaboration, a-t-il expliqué.

Ce projet met en lumière le lien entre la solidarité internationale et la réalisation des objectifs de développement durable des Nations Unies, y compris l’éradication de la pauvreté, la fourniture d’une éducation et de soins de santé de qualité, la promotion de l’égalité des sexes et la protection de l’environnement, a précisé l’Expert indépendant. Le projet de déclaration révisé souligne aussi l’interdépendance des droits de l’homme et le rôle crucial que joue la solidarité dans leur réalisation.

M. Okafor a ensuite rendu compte de sa visite effectuée au Costa Rica du 21 février au 2 mars 2022 en indiquant que son objectif principal était d’en apprendre davantage sur les questions relatives à l’expérience et à la pratique de la solidarité internationale au Costa Rica, y compris les efforts positifs qui avaient été faits dans ce sens et les défis qui subsistent, et d’acquérir une compréhension directe de ces questions.

Le Rapporteur spécial a dans ce contexte félicité le Gouvernement costaricien, les organismes internationaux présents dans le pays et la société civile d’avoir démontré un très grand attachement au fil des ans au concept et à la pratique de la solidarité internationale fondée sur les droits de l’homme, conformément à leur longue tradition en matière de droits de l’homme et d’état de droit.

M. Okafor a en outre dit avoir apprécié la politique de longue date du Costa Rica consistant à accueillir un grand nombre de réfugiés et de migrants.  Il a souligné que ces efforts déployés pour exprimer une solidarité fondée sur les droits de l’homme devraient également s’étendre encore plus à toutes les régions du pays, en particulier aux régions rurales, et aux divers groupes qui constituent la riche multiethnicité de la société costaricienne, notamment les peuples autochtones, les personnes d’ascendance africaine, les femmes, les lesbiennes, les gays, les bisexuels, les transgenres et les intersexués, les migrants et les réfugiés.

Pays concerné

Le Costa Rica a dit apprécier l’analyse et la reconnaissance des efforts nationaux qui se dégagent du rapport de M. Okafor quant à la façon dont le pays a réussi à intégrer le cadre international des droits de l’homme dans son système juridique et à avoir un système démocratique, en privilégiant la protection sociale, l’état de droit, la tradition de paix et la protection de l’environnement.

Le Costa Rica travaille pour que son cadre réglementaire accueille toutes les personnes vivant sur le territoire national, y compris les peuples autochtones, les personnes d’ascendance africaine, les migrants et les réfugiés et la communauté LGTBIQ +, a souligné la délégation costaricienne.  Elle n’en a pas moins reconnu l’existence du racisme, de la discrimination structurelle et de la violence à l’égard de populations spécifiques – autant de défis qui doivent être surmontés pour assurer une véritable inclusion de tous, a-t-elle affirmé.

S’agissant de la situation des migrants et des réfugiés, conformément au principe de non-refoulement et afin de permettre des filières de régularisation efficaces qui leur permettent d’obtenir un permis de travail, des mesures ont été récemment adoptées par le Costa Rica afin de prévoir une catégorie spéciale temporaire pour les personnes appartenant à une liste de pays et dont la demande d’asile est en attente de règlement ou a été rejetée, a indiqué la délégation. Dans cet esprit, la délégation a tenu à souligner l’intérêt du pays à promouvoir l’intégration de tous les migrants et réfugiés dans le secteur formel de l’économie et à faciliter des mouvements migratoires réguliers, sûrs et ordonnés.

Aperçu du dialogue

La solidarité internationale en matière de droits de l’homme est un outil fondamental pour la promotion et la protection de tous les droits fondamentaux, y compris le droit au développement, ont indiqué de nombreux intervenants.  Cette solidarité doit être fondée sur les principes et les valeurs de justice sociale et d’équité, en tant que facteur de développement centré sur l’humain, garantissant l’intégrité de la communauté des nations, ainsi que la souveraineté et l’égalité entre les États, a-t-il été affirmé.

De nombreux intervenants ont appelé à un engagement envers une plus grande solidarité internationale prenant en compte la responsabilité commune selon les capacités des États pour faire face à l’aggravation des crises et des problèmes mondiaux, en vue de répondre collectivement aux défis actuels qui ont des conséquences néfastes, notamment sur les populations les plus vulnérables.

De nombreuses délégations ont apporté leur soutien au projet révisé de la déclaration sur les droits de l’homme et la solidarité internationale proposé par l’Expert indépendant et ont appelé à son adoption rapide.  Ont par ailleurs été salués le processus participatif et inclusif ainsi que les larges consultations menées tout au long de l’année écoulée afin de prendre en compte, dans ce projet révisé, des nouvelles réalités comme les changements climatiques, la pauvreté, la migration ou encore le populisme d’extrême droite. A également été saluée l’approche visant à élaborer une définition plus structurée et consensuelle du droit de l’homme à la solidarité internationale.

Plusieurs délégations ont par ailleurs souligné que l’imposition de mesures coercitives unilatérales est une menace illégale qui annule la solidarité internationale, qui constitue une grave violation de tous les droits de l’homme, y compris le droit au développement, et qui aggrave la pauvreté, la discrimination et l’inégalité. Dans ce contexte, une délégation a dénoncé ce qu’elle a affirmé être la volonté d’un certain nombre de pays de saper les principes fondamentaux du droit international des droits de l’homme et de le remodeler en fonction de leurs intérêts géopolitiques.

**Liste des intervenants : Venezuela (au nom d’un groupe de pays), Liban (au nom d’un groupe de pays), Côte d’Ivoire (au nom d’un groupe de pays), Venezuela (au nom d’un groupe de pays), Égypte, Iraq, Maldives, Malaisie, Syrie, Venezuela, Cameroun, Afrique du Sud, Togo, Pakistan, Inde, Bangladesh, Malawi, Chine, Djibouti, Sénégal, Mauritanie, Cuba, Fédération de Russie, Algérie, Bolivie, Tunisie, Rwanda, Cambodge, Liban, Iran, Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII, Rahbord Peimayesh Research & Educational Services Cooperative, Mouvement international de la jeunesse et des étudiants pour les Nations Unies, United Nations Association of China, Organisation internationale pour les pays les moins avancés, Medical Support Association for Underprivileged Iranian Patients, Mouvement international de la jeunesse et des étudiants pour les Nations Unies, China NGO Network for International Exchanges, Center for International Environmental Law, Stichting Global Human Rights Defence, et Independent Expert on human rights and international solidarity.

Réponses et remarques de conclusion de l’Expert indépendant

M. OKAFOR a plaidé pour des actions et des mesures tangibles dans le domaine de la solidarité internationale, et notamment pour l’adoption du projet de déclaration. Le monde est interconnecté, ce qui fait que si certains décident de ne pas répondre à leurs obligations, la solidarité internationale ne fonctionnera pas, a-t-il souligné. Maintenant, ce sont les États Membres qui doivent prendre leurs responsabilités et agir, a-t-il insisté. La réponse à la pandémie de Covid-19 a démontré que l’action était possible, a-t-il rappelé.

L’Expert indépendant a expliqué que son rôle était de rassembler les différentes connaissances dans le domaine de la solidarité internationale et de les tourner vers l’action.

Dialogue avec le Rapporteur spécial sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association

Le Conseil est saisi du rapport du Rapporteur spécial sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association (A/HRC/53/38), intitulé « Établissement des responsabilités et lutte contre l’impunité pour les violations graves des droits de l’homme en lien avec l’exercice des droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association », ainsi que des additifs au rapport concernant la visite du titulaire du mandat au Brésil (A/HRC/53/38/Add.1 et Add.2 à paraître en français) ; la défense des droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association des travailleurs de l’économie informelle (A/HRC/53/38/Add.3, à paraître en français) ; et des principes généraux et lignes directrices sur le droit des organisations de la société civile d’accéder aux ressources (A/HRC/53/38/Add.4, à paraître en français).

Présentation des rapports

M. CLÉMENT NYALETSOSSI VOULE, Rapporteur spécial sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association, a d’abord présenté les conclusions et recommandations de son rapport intitulé « Établissement des responsabilités et lutte contre l’impunité pour les violations graves des droits de l’homme en lien avec l’exercice des droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association ». Il a précisé que ce rapport réaffirme en particulier que l'accès à la justice fait partie intégrante de la protection des droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association et, à cet égard, met en évidence de nombreux obstacles à l'établissement d'une responsabilité effective pour les violations graves commises, dans l’impunité, à l'encontre de personnes exerçant légitimement ces libertés fondamentales.

Ces obstacles, a précisé le Rapporteur spécial, sont notamment l'absence de reconnaissance adéquate, par les États, des droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association ; la négation par les États de l'existence d'une violation, ainsi que le refus d'en assumer la responsabilité ; l’invocation abusive des lois et des mesures de sécurité pour donner un pouvoir excessif aux forces de l'ordre et leur accorder l'immunité ou le pardon en cas d'abus ; l'utilisation d’agents placés en dehors de la structure de commandement des forces de l’ordre pour maintenir l'ordre dans les rassemblements ; et le recours à des tribunaux militaires ou spécialisés pour poursuivre les activistes.

Pour remédier à cette situation d'impunité endémique, a poursuivi le Rapporteur spécial, il faut, entre autres, mettre en place un système global de responsabilisation centré sur la victime, et en particulier reconnaître et condamner publiquement les abus commis à l'encontre de tous ceux qui exercent ces droits ; et veiller à ce que des enquêtes efficaces soient menées et que les personnes ayant des responsabilités de commandement soient poursuivies pour leurs actes ou omissions ayant contribué à des violations graves des droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association.

M. Voule a d’autre part relevé que si les droits des travailleurs à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association sont peu respectés dans de nombreux pays du monde, la situation était encore pire pour les travailleurs de l'économie informelle, qui sont souvent confrontés à des limitations supplémentaires de jure et de facto à l'exercice de ces droits. À ce propos, un additif au rapport présenté ce jour contient des recommandations et des mesures supplémentaires à prendre par les États pour garantir la jouissance de ces droits par les travailleurs de l'économie informelle, a rappelé le Rapporteur spécial.

M. Voule a ensuite indiqué qu’un autre additif à son rapport contenait des principes généraux et lignes directrices destinés à favoriser un engagement et un partenariat renouvelés entre les États, les donateurs, les banques, les institutions multilatérales et la société civile en vue de créer le meilleur environnement possible pour le droit de la société civile d'accéder aux ressources dont elle a besoin pour mener à bien ses missions.

M. Voule s’est dit par ailleurs profondément préoccupé par le niveau élevé de violence contre les défenseurs des droits de l'homme, les femmes, les communautés LGBTQI+, les Quilombolas, et les peuples et dirigeants afro-brésiliens et autochtones au Brésil, où il a effectué une visite en mars-avril 2022. Afin de remédier à la violence policière dans le contexte des rassemblements, le Rapporteur spécial a dit avoir appelé les autorités brésiliennes à élaborer un protocole unifié pour les responsables de l'application de la loi, visant à faciliter les manifestations pacifiques, dans le respect des normes internationales.

M. Voule a jugé essentiel que les nouvelles autorités du Brésil rétablissent la confiance avec la société civile en créant un environnement propice et favorable, en particulier en garantissant un accès adéquat à la justice et l'obligation de rendre des comptes pour les violences subies par les activistes et les manifestants.

M. Voule a ajouté que le rapport sur la visite qu’il a effectuée au Pérou en mai dernier serait présenté au Conseil l’année prochaine.

Le Rapporteur spécial a enfin fait savoir qu’il présenterait, en mars 2024, des outils pratiques et techniques pour aider les forces de l'ordre à faciliter les manifestations dans le respect des droits humains, un travail réalisé en collaboration avec le Haut-Commissariat aux droits de l'homme et l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime.

Pays concerné

Le Brésil a indiqué être conscient que bon nombre des problèmes mis en évidence dans le rapport de visite de M. Voule sont structurels et restent des défis majeurs. Toutefois, le contexte politique actuel au Brésil diffère considérablement de celui constaté en 2022, lors de la visite du Rapporteur spécial, a tenu à nuancer la délégation brésilienne. Elle a fait état d’un processus, en cours, de reconstruction profonde des politiques en matière de droits de l'homme – un processus dans le cadre duquel le Gouvernement accorde une attention particulière à la situation vulnérable des personnes historiquement discriminées, y compris les personnes d'ascendance africaine, les femmes, les peuples autochtones, les Quilombolas, les personnes vivant dans la rue et les personnes LGBTQIA+.

En réponse aux recommandations du Rapporteur spécial, a fait valoir la délégation, le Gouvernement brésilien a entièrement révoqué le décret 9759/2019 – qui avait supprimé la plupart des conseils de la société civile – en signe de sa volonté de renforcer la participation populaire à tous les niveaux et de rétablir les espaces de dialogue entre la société civile et les autorités. De même, le Gouvernement a créé un groupe de travail sur la lutte contre le discours de haine et l'extrémisme, chargé de proposer des politiques publiques en matière de droits de l'homme : il s'agit là d'une des mesures prises par le Gouvernement pour éviter que des attaques contre la démocratie comme celles du 8 janvier ne se reproduisent, a indiqué la délégation.

Aperçu du dialogue

Nombre de délégations, remerciant le Rapporteur spécial pour ses rapports et affirmant appuyer son mandat et son travail important, ont dit partager les préoccupations exprimées par M. Voule face aux violations des droits humains des manifestants et des militants qui exercent leurs droits à la liberté de réunion pacifique et d'association, tant en ligne que hors ligne, et face à l’impunité dont bénéficient les responsables de ces violations. Les délégations se sont aussi dites d’accord avec M. Voule pour estimer que l'obligation de rendre des comptes et de mettre fin à cette impunité devait être une priorité pour les États. 

Des délégations ont recommandé que les agents des forces de l’ordre reçoivent des formations sur la manière de gérer les manifestations dans le respect des droits à la liberté de réunion pacifique et d'association.

Les États Membres ont aussi été appelés à veiller à ce que tous les enfants puissent exercer leur droit de réunion pacifique en toute liberté et en toute sécurité, aussi bien en facilitant leur participation qu’en remédiant aux risques auxquels les enfants sont confrontés lors des manifestations. L’avis de M. Voule a en outre été sollicité sur la manière, pour les Nations Unies, d’aider les femmes à exercer leurs droits de manifestation pacifique en toute sécurité.

Dans un contexte où « certains gouvernements autoritaires voient la contestation », même pacifique, « comme une menace existentielle et déploient dès lors » tout un dispositif répressif, le Rapporteur spécial a été prié de dire comment répondre, au cas par cas, aux allégations selon lesquelles les personnes ciblées sont des «terroristes», des «criminels» ou des «traîtres ».

Pour d’autres intervenants, « il n’existe pas de liberté absolue » et le droit de toute personne de se réunir pacifiquement pour exprimer ses opinions doit se faire dans le respect des lois nationales et d'une manière qui ne porte pas atteinte aux droits ni aux libertés fondamentales d'autrui – conformément aux articles 21 et 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques – non plus qu’aux intérêts de l’État ou de la collectivité. D’aucuns ont jugé important dans ce contexte de faire la distinction entre manifestation et émeute.

Des intervenants ont mis en garde contre l’utilisation disproportionnée et discriminatoire des technologies numériques, y compris la reconnaissance faciale et la surveillance biométrique, et ont dénoncé une tendance croissante à imposer des restrictions à l’accès à Internet pour faire obstacle aux droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association.

Enfin, des préoccupations ont été exprimées s’agissant, dans plusieurs pays ou régions, de restrictions imposées à la participation de partis politiques à la vie publique ; de la répression exercée contre des manifestants pacifiques, des militants pour la paix et des opposants à des situations d’occupation ; ou encore des violences exercées par certains États contre des manifestants appartenant à des minorités ethniques ou autres.

*** Liste des intervenants : Lituanie (au nom d’un groupe de pays), République tchèque (au nom d’un groupe de pays), Union européenne, Israël, Égypte, Pérou, Luxembourg, Arménie, Costa Rica, Belgique, Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Pays-Bas, France, Inde, Iraq, Colombie, États-Unis, Maldives, Royaume-Uni, État de Palestine, Irlande, Afrique du Sud, Pakistan, Indonésie, Malawi, Chine, Suisse, Cuba, Fédération de Russie, Algérie, Monténégro, Tunisie, Vanuatu, Bélarus, Cambodge, Iran, Zambie, Botswana et Afghanistan. L’institution nationale de droits de l’homme du Burundi a aussi participé au dialogue.

Réponses du Rapporteur spécial

M. VOULE a appelé les États Membres à prendre toutes les mesures pour mettre fin à l’impunité des auteurs de violations des droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association, qui sont, a-t-il souligné, au cœur de la vie démocratique ainsi que du développement. Pour sa part, la communauté internationale doit rappeler à l’ordre les États qui refusent d’enquêter sur de telles violations ; le Conseil des droits de l’homme lui-même peut créer des commissions d’enquête, voire saisir des tribunaux régionaux pour engager les poursuites nécessaires, a suggéré le Rapporteur spécial.

Il faut aussi que les États cessent de qualifier les manifestants de terroristes, ou d’invoquer des lois vagues sur le terrorisme pour empêcher toute manifestation, et qu’ils suppriment les obstacles qui empêchent les femmes d’exprimer pacifiquement leurs opinions, a ajouté M. Voule.

Le Conseil doit continuer à soutenir ce mandat et à le renforcer afin qu’il puisse aborder les problèmes contemporains, a demandé le Rapporteur spécial.

 

 

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