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LE COMITÉ DES DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES EXAMINE LE RAPPORT DU CHILI

Communiqué de presse

Le Comité des droits des personnes handicapées a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport initial présenté par le Chili sur les mesures prises par ce pays pour mettre en œuvre la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Présentant ce rapport, Mme Heidi Berner Herrera, Sous-Secrétaire à l'évaluation sociale du Ministère du développement social du Chili, a affirmé que depuis le rétablissement de la démocratie, l'État chilien a déployé un effort systématique en faveur de la promotion et de la protection des droits des personnes handicapées. Cela s'est fait par l'établissement d'un cadre juridique et la création d'institutions dont le but est de développer des politiques publiques en matière de handicap, ainsi que par l'élaboration d'un Plan national d'inclusion sociale. En 1994, a été promulguée la loi établissant les normes d'intégration sociale des personnes handicapées. En 2004, a été réalisée la première étude nationale sur le handicap et celle-ci avait fait ressortir que le nombre de personnes handicapées approchait les 13% de la population, dont 58% de femmes, a précisé la Sous-Secrétaire.

Le Chili a adopté en 2010 une loi établissant des normes d'égalité des chances et d'inclusion sociale pour les personnes handicapées, a poursuivi Mme Berner Herrera. Ce texte a été à l'origine de la création du Service national du handicap (SENADIS), dont la mission est de promouvoir le droit à l'égalité des chances des personnes handicapées, a-t-elle précisé. Afin d'améliorer l'évaluation de la situation des personnes handicapées, a été réalisée l'an dernier la deuxième étude nationale sur le handicap au sein de la population adulte, dont les résultats ont été rendus publics en janvier dernier. Il en ressort qu'un adulte sur cinq (20%) souffre d'un handicap, dont 8% d'un handicap sévère. Il en ressort aussi que l'existence d'un handicap est étroitement lié au vieillissement et au niveau de revenus, a précisé Mme Berner Herrera.

Un représentant de l'Institut national des droits de l'homme du Chili est intervenu suite à cette présentation. Il a notamment constaté que le handicap continuait d'être considéré au Chili comme facteur d'incapacité juridique; cela est dû au fait que le Code civil date de 1855. Il a également constaté que subsistaient un certain nombre d'obstacles de taille en matière de protection sociale des personnes handicapées.

La délégation chilienne était également composée, entre autres, de Mme Marta Maurás, Représentante permanente du Chili auprès des Nations Unies à Genève, et de M. Daniel Concha Gamboa, Directeur du du SENADIS. Elle comprenait également des représentants des Ministères de la santé, de l'éducation, du travail et de la sécurité sociale, du logement et de l'urbanisme, ainsi que des relations extérieures et une avocate de la Corporation de l'assistance juridictionnelle de la région métropolitaine de Santiago du Chili.

La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, de la suppression des termes figurant dans la législation qui sont susceptibles d'être considérés comme péjoratifs (à l'égard des personnes handicapées); de l'arsenal législatif antidiscriminatoire en vigueur au Chili; des questions d'accessibilité et d'aménagements raisonnables; de l'éducation inclusive; de la langue des signes; de la prise en compte des personne handicapée dans la gestion des situations d'urgence; de l'accès à la justice; de la désinstitutionnalisation; du droit de vote; ou encore des stérilisations forcées.

Mme Silvia Judith Quan-Chang, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Chili, a estimé que le caractère désuet du Code civil chilien était problématique, si l'on entendait faire des personnes handicapées des sujets de droit. En matière législative, le Chili a adopté une loi sur le handicap en 2010 suite à la ratification de la Convention en 2008. Or, certains des décrets d'application de ce texte n'ont toujours pas été publiés, a-t-elle constaté. Elle a estimé que l'un des problèmes les plus concrets touchait à l'accessibilité. Elle a aussi attiré l'attention sur des bavures policières envers des personnes malades mentales. La rapporteuse a par ailleurs cité le cas d'une femme handicapée enceinte qui est menacée de se voir retirer son enfant à naître. Enfin, la rapporteuse a déploré que l'internement forcé subsiste au Chili et a rappelé que cette prétendue mesure de sécurité était contraire à la Convention.

Un autre membre du Comité a déploré le maintien d'une terminologie péjorative (concernant les personnes handicapées) dans la législation chilienne. Une experte a demandé quand le Chili en finirait avec l'internement forcé ainsi qu'avec la possibilité légale de pratiquer des stérilisations forcées, notamment de jeunes filles handicapées. Cette experte a rappelé que le recours aux électrochocs ou à l'isolement pouvait être considéré comme un traitement cruel, inhumain ou dégradant. Il a été déploré qu'un nombre non négligeable de mères handicapées aient perdu la garde de leurs enfants parce que l'on a tendance au Chili à considérer qu'elles ne sont pas aptes à être mère. Le cas particulier mentionné par la rapporteuse est loin d'être un cas exceptionnel, a-t-il été souligné.

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Chili et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le jeudi 21 avril prochain.


Lors de sa prochaine réunion publique, lundi à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport initial présenté par la Slovaquie (CRPD/C/SVK/1), qu'il achèvera mardi matin.


Présentation du rapport du Chili

Le Comité est saisi du rapport périodique du Chili (CRPD/C/CHL/1), ainsi que des réponses du pays (CRPD/C/CHL/Q/1/Add.1) à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité (CRPD/C/CHL/Q/1).

MME HEIDI BERNER HERRERA, Sous-Secrétaire à l'évaluation sociale du Ministère du développement social du Chili, a affirmé que depuis le rétablissement de la démocratie, l'État chilien a déployé un effort systématique en faveur de la promotion et de la protection des droits des personnes handicapées. Cela s'est fait par l'établissement d'un cadre juridique et la création d'institutions dont le but est de développer des politiques publiques en matière de handicap, ainsi que par l'élaboration d'un Plan national d'inclusion sociale. En 1994, a été promulguée la loi établissant les normes d'intégration sociale des personnes handicapées. En 2004, a été réalisée la première étude nationale sur le handicap et celle-ci avait fait ressortir que le nombre de personnes handicapées approchait les 13% de la population, dont 58% de femmes, a précisé la Sous-Secrétaire.

Le Chili a adopté en 2010 une loi établissant des normes d'égalité des chances et d'inclusion sociale pour les personnes handicapées, a poursuivi Mme Berner Herrera. Ce texte a été à l'origine de la création du Service national du handicap (SENADIS), dont la mission est de promouvoir le droit à l'égalité des chances des personnes handicapées, a-t-elle précisé, avant d'énumérer cinq textes de loi adoptés dans la foulée. La plus récente, il y a deux jours, a créé un Plan de formation citoyenne et des droits humains dans tous les établissements éducatifs du pays. La plus notable des institutions publiques est constituée par le Sous-Secrétariat au handicap, qui dépend du Ministère du développement social, a indiqué Mme Berner Herrera.

Afin d'améliorer l'évaluation de la situation des personnes handicapées, a été réalisée l'an dernier la deuxième étude nationale sur le handicap au sein de la population adulte, dont les résultats ont été rendus publics en janvier dernier. Il en ressort qu'un adulte sur cinq (20%) souffre d'un handicap, dont 8% d'un handicap sévère. Il en ressort aussi que l'existence d'un handicap est étroitement lié au vieillissement et au niveau de revenus, a souligné Mme Berner Herrera.

La question du genre constitue un défi important, a poursuivi la Sous-Secrétaire à l'évaluation sociale. Ainsi, près de 74% des personnes en charge d'une personne handicapée sont des femmes, la grande majorité (93%) ne recevant aucune rémunération pour cette tâche, a-t-elle indiqué. La même étude établit aussi que parmi les personnes souffrant d'un handicap léger à modéré, près de 52% ont un travail, le pourcentage approchant 22% pour les personnes gravement handicapées. Face à ce «défi stratégique», le Gouvernement a lancé des programmes visant à inciter les sociétés et entités publiques à employer des personnes handicapées.

Dans le domaine éducatif, l'étude montre que les adultes handicapés légers ou modérés ont effectué une moyenne de 9,5 années de scolarité, ce chiffre tombant à sept années pour les personnes à handicap sévère – la moyenne nationale étant de 11 ans d'études, a également fait observer Mme Berner Herrera. Par ailleurs, 23% des adultes handicapés ont achevé le cycle d'éducation secondaire et 9% ont fait des études supérieures. La loi d'inclusion scolaire de juin dernier vise à assurer l'accès des étudiants handicapés, a fait valoir la Sous-Secrétaire, ajoutant que cette loi s'appuie sur deux plans dont un Plan d'appui pour l'inclusion des étudiants handicapés dans l'enseignement supérieur.

En outre, le Congrès débat actuellement d'un projet de texte créant un système de garanties des droits de l'enfant, alors que le 17 mars a été signé le projet de loi portant création du poste de Défenseur des droits de l'enfant.

Un programme spécifique en faveur de l'accès des personnes handicapées à la justice a été mis en œuvre depuis 2012, a poursuivi Mme Berner Herrera. Un décret du Ministère du logement et l'urbanisme publié au début du mois prévoit l'élimination des obstacles architecturaux limitant l'autonomie des personnes handicapées, a-t-elle ajouté, précisant que ce décret fixe les exigences en matière d'accessibilité dans les habitations en général ainsi que dans celles financées par les pouvoirs publics et destinées aux personnes handicapées.

Un représentant de l'Institut national des droits de l'homme du Chili, a souligné que sur les 11 membres composant cette institution, quatre étaient élus par les organisations de la société civile. Tous les membres sont expérimentés en matière de droits humains et ils n'ont aucun lien avec l'État, a-t-il souligné. L'Institut a décerné son prix des droits de l'homme à Mme Maria Soledad Cisternas Reyes, qui préside actuellement le Comité des droits des personnes handicapées, a-t-il rappelé. Il a noté que le Chili était en train de combler ses lacunes en matière de statistiques par la réalisation d'études portant sur le handicap. Il a aussi constaté que le handicap continuait d'être considéré au Chili comme facteur d'incapacité juridique; cela est dû au fait que le Code civil date de 1855 et qu'il est inspiré du Code Napoléon, a-t-il fait observer, avant de rappeler que les choses ont bien changé depuis et que la personne handicapée doit être considérée comme sujet de de droit. Il a enfin constaté que subsistaient un certain nombre d'obstacles de taille en matière de protection sociale des personnes handicapées. Les personnes de plus de 60 ans, qui représentent 45% des personnes handicapées, sont particulièrement concernées par ces lacunes, a-t-il souligné. Il a également évoqué les difficultés que rencontrent les électeurs handicapés pour exercer leur droit de vote, en dépit de la reconnaissance du braille.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

MME SILVIA JUDITH QUAN-CHANG, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Chili, a estimé que le caractère désuet du Code civil chilien était problématique, si l'on entendait faire des personnes handicapées des sujets de droit. En matière législative, le Chili a adopté une loi sur le handicap en 2010 suite à la ratification de la Convention en 2008. Or, certains des décrets d'application de ce texte n'ont toujours pas été publiés, a-t-elle constaté. Elle a estimé que l'un des problèmes les plus concrets touchait à l'accessibilité. Elle a ainsi fait part de sa préoccupation face au fait que la majorité des émissions de télévision n'étaient pas accessibles aux personnes malentendantes.

Elle a par ailleurs déploré le fait que l'idée la plus répandue dans l'opinion publique était que le handicap se réduisait à des limites physiques. Elle a estimé que l'État avait un rôle de sensibilisation à jouer à cet égard. Elle a aussi attiré l'attention sur des bavures policières envers des personnes malades mentales. La rapporteuse a par ailleurs cité le cas d'une femme handicapée enceinte qui est menacée de se voir retirer son enfant à naître; elle a émis l'espoir que cette femme se verrait reconnaître le droit d'élever son enfant, à l'issue du présent dialogue. Enfin, la rapporteuse a déploré que l'internement forcé subsiste au Chili et a rappelé que cette prétendue mesure de sécurité était contraire à la Convention.

Un autre membre du Comité a déploré le maintien d'une terminologie péjorative (concernant les personnes handicapées) dans la législation chilienne, souhaitant savoir si l'État chilien prévoyait de la rectifier. Un autre expert a demandé de quelle manière les mesures de discrimination positive étaient mises en œuvre dans l'éducation et dans l'emploi. Combien de jeunes handicapés par exemple ont pu en profiter pour accéder à l'enseignement supérieur?

Un membre du Comité a souhaité en savoir davantage quant au registre des bâtiments permettant l'accès de personnes handicapées et a demandé si des mesures étaient prises ou envisagées pour ceux qui demeurent difficilement accessibles, les monuments historiques en particulier. Il a demandé de quels services il pourrait bénéficier en tant que personne handicapée s'il se rendait à Santiago du Chili.

Un autre expert a souhaité savoir ce qu'il en était des subventions accordées aux ONG et s'est ensuite enquis des mesures prises en faveur de la langue des signes, qui ne semble pas être reconnue officiellement.

Un autre membre du Comité a demandé si l'expression «aménagements nécessaires» utilisée dans le rapport du Chili recouvrait une réalité différente de la notion d' «aménagements raisonnables» utilisée dans la Convention.

Une experte a souhaité savoir dans quelle mesure l'État chilien tenait compte des propositions émanant des organisations représentatives des personnes handicapées. Par ailleurs, quelles mesures précises ont-elles été prises pour assurer aux personnes handicapées une égalité véritable dans tous les domaines de la vie, notamment pour ce qui est de la parité hommes-femmes?

Un expert a demandé si le Chili disposait d'une structure officielle permettant la participation des personnes handicapées, notamment en matière d'élaboration des politiques. Il a aussi souhaité savoir si la délégation disposait d'informations sur d'éventuelles plaintes pour discrimination fondée sur le handicap, si de telles plaintes avaient abouti et si elles avaient donné lieu à réparation. Cet expert s'est en outre inquiété de possibilités de déroger à la législation sur le handicap. Un expert s'est enquis du niveau de participation des médias aux campagnes de sensibilisation sur le handicap.

Une autre membre du Comité a demandé si une législation existait contre les discriminations multiples, citant le cas des femmes autochtones handicapées. Dans le secteur de la justice, une priorité est-elle accordée à la lutte contre les préjugés face au handicap ou à l'identité sexuelle, a-t-elle aussi demandé?

Un expert a souhaité avoir des informations sur l'accessibilité des moyens de transport.

Le Chili étant frappé périodiquement par des séismes, un expert a souhaité savoir quelles mesures préventives étaient prises en faveur des personnes handicapées. Un de ses collègues a demandé s'il existait par exemple un service de messagerie instantanée d'alerte sur téléphone mobile dans le cadre du programme de réduction des risques de catastrophes. Un autre membre du Comité a demandé si le Chili avait repris à son compte le Cadre d'action de Sendai 2015-2030 pour la réduction des risques de catastrophes.

Quels sont les politiques, programmes et directives visant à ce que les dispositions constitutionnelles garantissant les droits des personnes handicapées soient effectivement respectées, a demandé un expert?

Des questions ont été posées s'agissant de l'internement ou l'hospitalisation des personnes souffrant de troubles psychosociaux. Une experte a demandé quand le Chili en finirait avec l'internement forcé ainsi qu'avec la possibilité légale de pratiquer des stérilisations forcées, notamment de jeunes filles handicapées. Comment le pays entend-il entreprendre une politique de désinstitutionalisation? Il semble en effet que certaines personnes soient internées pendant plusieurs années, parfois sans aucune justification. Malgré la ratification de la Convention contre la torture par le Chili, il n'existe aucun mécanisme de prévention à cet égard, a-t-il été déploré, une experte décelant là une lacune grave. Cette experte a rappelé que le recours aux électrochocs ou à l'isolement pouvait être considéré comme un traitement cruel, inhumain ou dégradant.

Un expert s'est inquiété du fait qu'il n'y ait que quatre centres d'aide juridictionnelle sur l'ensemble du territoire et a souhaité savoir si l'État chilien entendait développer ce service.

Un expert a demandé si le Chili envisageait de former à la langue des signes les parents des enfants malentendants.

Une experte a demandé comment le Chili prévoyait d'assurer la formation des enseignants en braille et en langue des signes, estimant qu'une reconnaissance officielle de cette langue pourrait s'avérer utile.

Des questions ont également été posées sur le respect du droit du travail, la responsabilité sociale des entreprises et la prise en compte des personnes handicapées.

Une experte a souhaité savoir si le Chili envisageait de planifier la mise en œuvre des dispositions spécifiques aux personnes handicapées prévues par les Objectifs de développement durable.

Dans quelle mesure le Chili agit-il en faveur de l'élimination de la pauvreté des personnes handicapées, a demandé un autre membre du Comité?

Pour ce qui est de la participation des personnes handicapées à la vie publique et politique, des mesures sont-elles prises en faveur des personnes vivant en foyer, celles-ci ne pouvant généralement pas exercer leur droit de vote?

Un membre du Comité a demandé si lors des campagnes électorales, les professions de foi électorales étaient disponibles en braille. Il s'est également enquis de l'accessibilité des sites culturels du pays. Il a voulu connaître les budgets accordés aux institutions scolaires spécialisées et aux écoles inclusives, relevant que le rapport fait apparaître un nombre supérieur d'élèves handicapés dans les premières.

Une experte a rappelé que le droit de la personne handicapée de fonder une famille est reconnu par la Convention et a déploré qu'un nombre non négligeable de mères handicapées aient perdu la garde de leurs enfants parce que l'on a tendance au Chili à considérer qu'elles ne sont pas aptes à être mère, ce problème concernant aussi, bien sûr, les pères handicapés. Le cas particulier mentionné par la rapporteuse lors de son exposé introductif – s'agissant d'une femme handicapée enceinte menacée de ne pas pouvoir avoir la garde de son enfant à naître – est loin d'être un cas exceptionnel, a souligné l'experte. Elle a en outre souhaité savoir si le Fonds national d'invalidité (FONADIS) permettait de couvrir tous les besoins, notamment pour ce qui est de la possibilité pour une personne handicapée de bénéficier d'une assistance personnelle.

Réponses de la délégation

Pour ce qui est des termes figurant dans la législation qui sont susceptibles d'être considérés comme péjoratifs s'agissant des personnes handicapées, la délégation a reconnu que des termes désuets ou péjoratifs figuraient encore dans les textes. Un travail de révision systématique du Code civil va être entrepris, a-t-elle fait valoir. Une étude a été faite à ce sujet en 2014; un chapitre de cette étude traite des termes considérés comme «anachroniques» et a repéré de tels termes dans pas moins de 61 articles du Code civil. Cet examen nécessite un travail systématique et minutieux, a souligné la délégation, avant d'ajouter que les textes de loi les plus récents employaient toutefois, eux, une terminologie appropriée, inspirée de la Convention.

Le Sénat chilien examine actuellement un projet d'amendement à la loi relative à la discrimination sur le lieu de travail afin de prendre en compte le handicap, a indiqué la délégation. Le nouveau texte permettra aussi accessoirement de toiletter la terminologie, en supprimant par exemple l'expression «déficient mental» au profit de celle de «personne souffrant d'un handicap mental».

La délégation a présenté l'arsenal législatif relatif à la lutte contre les discriminations dont s'est doté le Chili. L'égalité des chances pour les personnes handicapées est par ailleurs reconnue par la loi sur le handicap, a-t-elle précisé, ajoutant que la loi sur l'enfance contient elle aussi un article sur le handicap interdisant la discrimination sous ce motif. Aucun soin ou service ne saurait être refusé sur la base du handicap et il ne saurait être porté atteinte à aucun droit sexuel ou autre droit associé à la santé génésique, a insisté la délégation.

La deuxième étude nationale sur le handicap a donné lieu à une importante participation des organisations représentatives des personnes handicapées, a par ailleurs indiqué la délégation. Les autorités considèrent en effet que les «consultations citoyennes» sont essentielles, s'agissant en particulier des questions d'accessibilité. Il s'agit de travailler «pour et avec les personnes handicapées». Le Chili étant un pays vaste qui compte des régions extrêmement isolées, des mesures de financement sont prévues pour financer la consultation des personnes concernées, y compris en défrayant leurs déplacements. Par ailleurs, le Gouvernement a créé un groupe de travail sur le handicap et les droits de l'homme, a fait valoir la délégation.

La loi sur l'accessibilité des édifices et services publics couvre un large éventail de domaines, depuis les édifices publics jusqu'aux moyens de radiodiffusion et de communication, a indiqué la délégation.

La délégation a expliqué que la notion d'«aménagements nécessaires» utilisée au Chili était identique à celle d'«aménagements raisonnables» figurant dans la Convention. Plus de dix mille bâtiments publics ont été inspectés, dont un peu plus de 40% répondaient à des normes minimales qui ne correspondent toutefois plus nécessairement aux exigences modernes en matière d'accessibilité, a déclaré la délégation. S'il est prévu qu'au minimum toutes les entrées et issues des bâtiments publics soient aisément accessibles, il est vrai que les nouvelles normes d'accessibilité doivent également prendre en compte la nécessité de permettre la mobilité autonome des personnes concernées, a fait observer la délégation. Par ailleurs, tout édifice d'habitation doit être adapté, les gérants et propriétaires disposant de trois années pour se conformer aux nouvelles normes. Il en va de même pour les établissements scolaires et les tribunaux. Ainsi, la construction ou la modernisation des palais de justice prennent systématiquement en compte l'accessibilité des personnes handicapées, a fait valoir la délégation.

Il existe aussi des normes d'accessibilité pour les transports publics, principalement dans la région métropolitaine de Santiago du Chili; la flotte d'autobus est équipée à hauteur de 87% de dispositifs pour les personnes handicapées et les arrêts ont également été aménagés, a poursuivi la délégation. En revanche, il reste beaucoup à faire dans ce domaine dans les autres villes du pays, a-t-elle reconnu. Sur le plan des loisirs, des promenades sont organisées dans les parcs nationaux avec des audioguides, a-t-elle ajouté. D'autre part, certaines stations de métro disposent d'«audiodescriptions» pour les personnes handicapées visuelles.

Des mesures ont été prises afin de garantir le droit de vote des personnes handicapées, a par ailleurs indiqué la délégation.

La loi prévoit l'usage de la langue des signes à la télévision, a par ailleurs indiqué la délégation. En cas de catastrophe naturelle, par exemple, il est prévu de doubler la diffusion des bulletins d'information en direct. Les compétences manquent en matière d'interprétation en langue des signes et le Gouvernement prévoit le lancement d'un programme de formation d'interprètes dans cette langue. Les bibliothèques doivent disposer de matériels facilitant l'accessibilité de leur locaux. Quant au système judiciaire, il prévoit de mettre en œuvre un système d'interprétation à distance.

La délégation a ensuite indiqué que le Chili n'était pas opposé à la reconnaissance officielle éventuelle de la langue des signes.

Le processus de ratification du Traité de Marrakech – visant à faciliter l'accès aux œuvres publiée des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d'autres difficultés de lecture des textes imprimés – doit se faire dans un avenir proche, a d'autre part indiqué la délégation.

En 2015, a été lancé un programme d'accès à la justice développant l'aide juridictionnelle. Celle-ci couvre l'ensemble du pays, y compris l'extrême sud, a indiqué la délégation, précisant que la capitale comptait pas moins d'une centaine d'antennes offrant ce service. Ce programme permet notamment à des femmes handicapées de récupérer la garde des enfants dont elles ont été privées. La délégation a reconnu que le Code civil demeurait discriminatoire à cet égard; un grand nombre de juristes se penchent actuellement sur sa réforme afin que les personnes handicapées ne fassent plus l'objet de discrimination dans ce domaine. La délégation s'est engagée à ce que, lors du prochain examen du Chili, le pays soit en mesure de présenter une réponse satisfaisante à cette question au Comité.

En matière de prévention des risques de catastrophes – les raz de marée, éruptions volcaniques et séismes étant courants au Chili –, des fiches de renseignement individuelles permettent de gérer les situations d'urgence et de répondre de manière opportune en apportant une aide efficace. Ces fiches permettent de répertorier en particulier les personnes handicapées à prendre en compte dans l'organisation des secours ainsi que lors des efforts de reconstruction après catastrophe. En outre, des vidéos de prévention ont été tournées: sous-titrées ou doublées en langue des signes, elles présentent notamment les recommandations indispensables à connaître. L'importance de la visibilité des personnes handicapées est essentielle, particulièrement dans un pays à la géographie complexe, a souligné la délégation.

En réponse aux questions soulevées à ce sujet, la délégation a fait valoir que le Chili avait entrepris une désinstitutionalisation des «patients chroniques» internés à vie. Cela permet notamment de régler les internements arbitraires obtenus par des tiers. Cette politique porte ses fruits avec des effectifs en baisse, a fait valoir la délégation.

Le Ministère de l'éducation a organisé récemment une table-ronde technique sur la mise en place d'un système inclusif, qui a fait l'objet d'un rapport, a poursuivi la délégation. Le Ministère réfléchit à la suite à donner aux recommandations formulées et à leur mise en œuvre éventuelle.

La réforme de l'éducation au Chili a constitué une chance unique de faire progresser les droits des enfants handicapés, a ensuite affirmé la délégation. Le nombre d'étudiants handicapés a ainsi doublé dans l'enseignement supérieur ces dernières années, a-t-elle fait valoir. La loi sur l'inclusion scolaire interdit la suspension des étudiants sur la base d'éventuels besoins spécifiques en matière d'éducation spécialisée, a-t-elle rappelé. Des programmes d'intégration scolaire sont mis en place dans le réseau des établissements classiques, a-t-elle par ailleurs souligné. Le taux d'inscription des élèves handicapés dans le réseau classique va croissant, même si une majorité d'entre eux sont encore scolarisés dans des établissements spécialisés, a-t-elle indiqué. La fourniture d'interprètes en langue des signes pour les enfants sourds est prévue dans les écoles, a en outre précisé la délégation. A l'université, un programme d'aide à l'accès aux technologies de l'information et de la communication est mis en œuvre, l'objectif étant à terme d'en faire bénéficier la totalité des étudiants handicapés. Un groupe de réflexion se penche actuellement sur la formation des maîtres à l'enseignement des élèves handicapés, a d'autre part indiqué la délégation.

La stérilisation ne peut se faire sans le consentement éclairé préalable de la personne concernée, a assuré la délégation. Toute patient doit donner son assentiment à tout traitement le concernant; s'il n'est pas en mesure de le faire, tout traitement invasif sur sa personne ne peut se faire sans avoir obtenu au préalable l'aval d'un comité d'éthique, a-t-elle précisé.

S'agissant de l'intégration des peuples autochtones, il est question de créer une institution qui permettra d'aller vers cet objectif et qui reste à élaborer. La proportion de personnes handicapées est de 19% au sein des populations autochtone, soit une proportion proche de la moyenne pour l'ensemble de la population adulte du pays.

En fin de dialogue, la Sous-Secrétaire à l'évaluation sociale du Ministère du développement social du Chili a salué les contributions des organisations de la société civile et de l'Institut national des droits de l'homme qui ont permis de nourrir le débat. Elle a souligné que le Chili, inspiré par la Convention, pouvait se targuer d'un certain nombre de réalisations en faveur des droits des personnes handicapées, même si un certain nombre de défis demeurent, en particulier pour ce qui est de la prise en charge des personnes dépendantes. Un autre défi important est de sensibiliser la population à la question du handicap afin d'en finir avec les préjugés, a par ailleurs reconnu Mme Berner Herrera.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

CRPD16/005F