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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION À L'ÉGARD DES FEMMES A CLOS LES TRAVAUX DE SA CINQUANTIÈME SESSION

Communiqué de presse
Il a adopté des observations sur huit pays ainsi qu'une déclaration générale sur les femmes rurales et un appel lancé aux États sur les femmes réfugiées et apatrides

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a achevé, vendredi 21 octobre à Genève, les travaux de sa cinquantième session, qui s'est ouverte le 3 octobre dernier et au cours de laquelle il a examiné les rapports périodiques d'Oman, du Paraguay, du Monténégro, de Maurice, du Lesotho, du Tchad, du Koweït et de la Côte d'Ivoire sur la mise en œuvre de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Outre les observations finales sur les huit rapports examinés - dont nous publions un résumé dans le présent communiqué -, le Comité a adopté, au cours de cette session, une déclaration générale au sujet des femmes rurales, ainsi qu'un appel aux États parties à améliorer encore la protection des femmes et des filles réfugiées et apatrides à l'occasion de la célébration, cette année, des soixantième et cinquantième anniversaires, respectivement, de la Convention relative au statut des réfugiés (1951) et de la Convention sur la réduction des cas d'apatridie (1961).

Le Comité a également procédé en première lecture à l'examen d'un projet de recommandation générale relative aux conséquences économiques de la dissolution du mariage, et pris des décisions relatives à des plaintes individuelles qui lui étaient soumises dans le cadre d'une procédure confidentielle.

Lors de la séance de clôture de la session, Mme Silvia Pimentel, Présidente du Comité, a dressé le bilan de la session écoulée, se félicitant de la qualité des dialogues que le Comité a tenus avec les États parties, dont certains étaient représentés à très haut niveau. Elle s'est félicitée également de l'engagement manifesté par les organisations non gouvernementales nationales et internationales, et de leur contribution importante aux travaux du Comité.


Lors de sa prochaine session, qui se tiendra à Genève du 13 février au 2 mars 2012, le Comité doit examiner les rapports des pays suivants: Algérie, Brésil, Grenade, Jordanie, Norvège, République du Congo et Zimbabwe.


Observations finales

Le texte intégral des observations finales adoptées par le Comité au cours de la session sont disponibles sur la page web du Comité, à l'adresse suivante: http://www2.ohchr.org/english/bodies/cedaw/cedaws50.htm. Elles figurent dans les documents portant la cote CEDAW/C/OMN/CO/1 pour Oman; CEDAW/C/PAR/CO/6 pour le Paraguay; CEDAW/C/MNE/CO/1 pour le Monténégro; CEDAW/C/MUS/CO/6-7 pour Maurice; CEDAW/C/LSO/CO/1-4 pour le Lesotho; CEDAW/C/TCD/CO/1-4 pour le Tchad; CEDAW/C/KWT/CO/3-4 pour le Koweït; et CEDAW/C/CIV/CO/1-3 pour la Côte d'Ivoire.

Le Comité relève le bilan positif d'Oman en matière d'accession aux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, ainsi que sa volonté de réformer la législation nationale en conformité avec ses obligations au titre du droit international. Dans ce contexte, le Comité se félicite de la Loi sur la traite des êtres humains, promulguée en 2008, qui définit l'infraction de traite des êtres humains et prévoit des peines conformes aux dispositions du Protocole de Palerme. Le Comité note également l'examen, par Oman, d'une éventuelle adhésion au Protocole facultatif se rapportant à la Convention. Le Comité note également l'amélioration rapide des indicateurs de santé et d'éducation à Oman, notamment la baisse de la mortalité infantile et des taux de mortalité maternelle de même que l'amélioration des soins prénataux et des conditions d'accouchement. Le Comité félicite Oman de son engagement et la volonté politique exprimée pour l'autonomisation et la participation des femmes dans tous les domaines de la vie. À cet égard, il se félicite particulièrement de la promulgation du décret royal de 2010 qui confirme les droits des femmes dans la sphère privée et familiale en empêchant leurs tuteurs d'interdire aux femmes de se marier ou de choisir leur mari.

Le Comité prend également note des mesures prises par Oman pour protéger les femmes contre la violence, y compris la violence domestique, et apprécie à ce titre la création de refuges temporaires ouverts aux femmes victimes de la violence sous toutes ses formes. Le Comité regrette cependant l'absence d'une loi spécifique sur la violence contre les femmes, y compris la violence domestique; l'absence de statistiques et de documentation au sujet de l'incidence de la violence contre les femmes; ainsi que le fait qu'aucun mécanisme spécifique n'existe pour aider les femmes à porter plainte, à obtenir réparation et à poursuivre les auteurs de violences commises contre elles.

Le Comité est également préoccupé par le manque de protection accordé à Oman aux travailleuses migrantes, en particulier domestiques, et par la violence exercée contre elles par les employeurs dans l'intimité du foyer. Aussi le Comité invite-t-il Oman à créer des mécanismes de recours appropriés accessibles à toutes les femmes victimes de violence, notamment les travailleuses domestiques, et à poursuivre et punir les auteurs de ces actes. Il invite aussi Oman à renforcer ses mesures de soutien telles qu'abris, conseils et services de réadaptation; et à former le personnel judiciaire et policier aux problèmes de genre et de violence. Il l'invite à ratifier la Convention n° 156 de l'Organisation internationale du travail sur les travailleurs ayant des responsabilités familiales et la Convention sur les travailleurs migrants. Oman devrait en outre se doter d'un mécanisme de protection et de surveillance du respect de droits des travailleurs migrants domestiques. Le Comité invite enfin Oman à modifier sa législation en vue d'accorder aux femmes omanaises des droits égaux à ceux des hommes en ce qui concerne la transmission de leur nationalité à leurs enfants.

Le Comité note avec satisfaction l'adoption par le Paraguay d'une «Politique publique pour le développement social 2010-2020», qui complète le «Plan économique et social stratégique 2008-2013» et fait du droit à mener une vie sans violence une condition du développement. Cette politique comprend, parmi ses objectifs, «l'éradication de toutes formes de violence contre les femmes» et fait des droits de la femme un axe transversal des politiques sociales. Le Comité note également avec satisfaction l'adoption du «Plan national pour l'égalité des chances 2008-2017» et l'adoption de mesures stratégiques de prévention, de sanction et d'élimination de la violence contre les femmes, notamment l'aménagement de cinq postes de police pour l'enregistrement des plaintes et la mise sur pied d'un groupe technique interinstitutionnel pour l'élaboration d'un registre unifié des services publics offerts aux victimes de la violence sexiste, domestique et intrafamiliale. Le Comité se félicite également de l'augmentation du budget alloué au Secrétariat pour les femmes et salue la création de services chargés de l'égalité entre les sexes et des droits des femmes au sein des Ministère des affaires étrangères et de la défense, du Tribunal supérieur de justice électorale et de la Cour suprême.

Le Comité est toutefois préoccupé que la législation paraguayenne ne donne pas une définition de la discrimination conforme à l'article 1er de la Convention. Il réitère sa recommandation de prendre des mesures efficaces pour interdire la discrimination contre les femmes par l'adoption des lois nationales appropriées, telles que le projet de loi générale sur la discrimination, qui attend l'approbation du Parlement. Le Comité est préoccupé par le manque de conscience, au Paraguay, de l'importance des mesures temporaires spéciales susceptibles d'accélérer la réalisation de l'égalité des sexes dans tous les domaines régis par la Convention. Le Comité prend toutefois note de l'adoption de mesures spéciales en vue d'une meilleure participation des femmes dans la vie politique, notamment l'introduction d'un quota minimum de 20 % de femmes dans les listes de candidats aux élections locales et l'application de la loi agraire qui accorde un traitement préférentiel aux femmes chefs de ménages. Le Comité est toutefois préoccupé que ces mesures n'aient pas permis d'améliorer sensiblement l'égalité des femmes dans la participation à la vie politique, ni d'atteindre une égalité réelle pour toutes les femmes conformément à l'article 4 de la Convention.

Le Comité recommande au Paraguay de favoriser l'acceptation des mesures temporaires spéciales et leur application généralisée, dans le cadre d'une stratégie de réalisation de l'égalité réelle des femmes dans tous les domaines, santé, éducation et emploi notamment. Le Comité recommande également au Paraguay d'adopter rapidement une loi générale visant la prévention, la répression et l'éradication de la violence contre les femmes, en conformité avec la Convention et la Recommandation générale n °19 (1992) du Comité sur la violence contre les femmes; d'adopter les mesures nécessaires pour enquêter sur l'étendue et les causes de la traite interne des enfants et des femmes, en vue de mettre en œuvre une stratégie globale pour prévenir et punir la traite des êtres humains; et d'agir sans délai pour faire chuter le taux élevé de mortalité maternelle, prévenir les avortements dangereux et abroger les sanctions infligées aux femmes qui subissent un avortement.

Le Comité se félicite de l'adoption, depuis l'entrée en vigueur de la Convention au Monténégro, de plusieurs mesures législatives visant à éliminer la discrimination contre les femmes, notamment la loi sur l'égalité des sexes qui interdit la discrimination fondée sur le sexe et prévoit des mesures visant à promouvoir l'égalité des chances pour les femmes et les hommes dans toutes les sphères de la vie publique; la loi sur l'interdiction de la discrimination qui définit et interdit la discrimination directe et indirecte fondée sur le sexe, l'orientation sexuelle, l'identité de genre et d'autres motifs, prévoit des recours et renforce le rôle, en matière de lutte contre la discrimination, du Protecteur des droits de l'homme et des libertés. Le Comité note aussi avec satisfaction l'adoption de diverses mesures institutionnelles et politiques visant à faire avancer les droits des femmes, notamment la création de structures locales pour l'égalité des sexes dans 10 des 21 municipalités, y compris cinq «conseils pour l'égalité des sexes», et l'adoption de plans d'action locaux pour la réalisation de l'égalité des sexes dans six de ces municipalités; la Stratégie nationale de lutte contre la traite des êtres humains et le Plan d'action pour la mise en œuvre de la Stratégie pour la période 2010-2011; et enfin la nomination, au sein de la direction de la police, d'un coordonnateur de la lutte contre le trafic des êtres humains habilité à coopérer directement avec le Bureau gouvernemental de lutte contre la traite.

Tout en se félicitant de la nouvelle loi monténégrine sur l'interdiction de la discrimination, le Comité note le faible nombre de plaintes pour discrimination fondée sur le sexe déposées par des femmes au Protecteur des droits de l'homme et des libertés. Le Comité recommande que le Monténégro renforce le mandat et les ressources du Protecteur, afin qu'il puisse connaître de plaintes concernant la discrimination fondée sur le sexe, et qu'il désigne un Médiateur adjoint pour l'égalité des sexes. Le Comité est également préoccupé par la persistance des stéréotypes concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société, qui insistent trop sur le rôle traditionnel des femmes comme mères et épouses, et des hommes comme chefs de famille. Le Comité invite le Monténégro à intensifier sa coopération avec la société civile et les organisations de femmes, les parlementaires, les professionnels de l'éducation, le secteur privé et les médias afin de diffuser des informations ciblées auprès du grand public, des décideurs, des journalistes, des femmes et des jeunes; d'élaborer une stratégie globale pour l'élimination des stéréotypes sexistes; et de promouvoir des images de femmes actives dans la vie économique et sociale et l'égalité des responsabilités des femmes et des hommes dans les sphères privée et publique.

D'autre part, tout en notant que le Monténégro accorde une haute priorité à la lutte contre la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, le Comité est préoccupé par le faible nombre de poursuites et les peines légères infligées aux trafiquants. Il recommande une révision des peines pour trafic d'êtres humains et la formation obligatoire des juges, des procureurs et des officiers de police à l'application correcte de l'article 444 du Code pénal. Il recommande également que le Monténégro intensifie la formation à l'identification rapide des victimes potentielles de la traite, en mettant l'accent sur les femmes et les filles très vulnérables, telles que les Roms, les Ashkalis et les «égyptiennes», les femmes déplacées et les jeunes filles non accompagnées.

Le Comité note avec satisfaction l'adoption par Maurice de plusieurs nouvelles lois visant à combattre la discrimination et la violence contre les femmes, notamment la loi contre la traite des êtres humains, adoptée par le Parlement en 2009 et qui prévoit, entre autres, le rapatriement, le retour à l'île Maurice et l'indemnisation des victimes de la traite; ainsi que la Loi sur l'emploi qui prévoit notamment le paiement systématique d'indemnités de maternité ainsi qu'un congé paternité. Le Comité note avec satisfaction les différentes politiques et plans adoptés par Maurice dans le but de promouvoir l'égalité des sexes et d'éliminer rapidement la discrimination contre les femmes, en particulier la violence domestique sous toutes ses formes: Cadre de politique nationale du genre et Plan d'action national contre la violence domestique élaboré par l'Unité de protection de la famille. Le Comité prend note également de la légère augmentation du nombre de femmes au Parlement aux élections générales de 2010, ainsi que de l'augmentation de la représentation des femmes dans le système judiciaire, où 56% des juges et des magistrats sont des femmes.

Toutefois, le Comité exprime à nouveau son profond regret de l'échec de Maurice à criminaliser la violence domestique, notamment le viol conjugal, malgré ses précédentes observations finales. Le Comité appelle Maurice à prendre les mesures législatives nécessaires pour criminaliser la violence domestique et le viol conjugal et pour s'assurer que des enquêtes et des poursuites soient engagées d'office en cas de violence domestiques, pour signaler à la communauté que la violence domestique est un crime grave et qu'il sera traité comme tel. Le Comité est également préoccupé par le fait que Maurice demeure un pays d'origine, de destination et de transit pour la traite des personnes, et par la prolifération du tourisme sexuel dans le pays. Il recommande que Maurice adopte un plan d'action national complet ainsi qu'un mécanisme de coordination pour mieux lutter contre l'exploitation sexuelle et la traite. Il recommande aussi que Maurice accorde suffisamment de ressources humaines et financières pour la mise en œuvre effective du plan d'action, et qu'il remédie aux causes profondes de la traite et de l'exploitation des femmes en renforçant ses efforts pour améliorer la situation économique des femmes et des filles, en particulier les femmes travailleuses migrantes, et ainsi éliminer leur vulnérabilité face à l'exploitation et aux trafiquants.

Le Comité note également avec préoccupation que des obstacles systématiques entravent toujours la participation égale des mauriciennes à la vie politique, notamment les attitudes culturelles négatives, les doutes sur les capacités de leadership des femmes et l'absence de mesures temporaires spéciales (quotas). Le Comité recommande que Maurice assure la participation des femmes dans le processus électoral et qu'elle fournisse aux femmes parlementaires et fonctionnaires l'aide nécessaire – notamment l'ouverture de crèches – pour permettre leur participation pleine et effective à la vie publique.

S'agissant du Lesotho, le Comité se félicite des progrès accomplis par le pays depuis sa ratification de la Convention en 1995, notamment les réformes et l'adoption plusieurs lois: loi sur les infractions sexuelles reconnaissant le viol conjugal comme un délit; loi sur la capacité juridique des personnes mariées; loi sur l'éducation qui prévoit un enseignement gratuit et obligatoire; loi contre la traite des personnes qui criminalise toutes les formes d'esclavage et prévoit des peines sévères pour leurs auteurs; loi sur la protection de l'enfance adoptée cette année. Le Comité note avec satisfaction les initiatives prises par le Lesotho en vue de promouvoir l'égalité entre les sexes et de protéger les droits des femmes, telles que la création d'une Commission de la réforme du droit, avec mandat de réviser les lois discriminatoires. Le Comité félicite également le Lesotho d'avoir ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, le 24 septembre 2004.

Tout en notant que la Constitution du Lesotho interdit toute forme de discrimination et de traitement injuste, le Comité recommande que les autorités abrogent de toute urgence les autres articles de la Constitution qui autorisent la discrimination fondée sur le sexe dans les contextes de l'adoption, du mariage, du divorce, des questions de propriété, de l'inhumation, du décès ou d'autres objets relevant des dispositions de la loi sur le statut personnel, et qu'elles introduisent dans la Constitution une interdiction de toute forme de discrimination contre les femmes dans tous les domaines, y compris dans l'application du droit coutumier. Le Comité reconnaît aussi la riche culture et les traditions du Lesotho et leur importance dans la vie quotidienne des habitants de ce pays; il appelle cependant le Gouvernement à mettre en place rapidement une stratégie globale visant à modifier ou à éliminer les attitudes patriarcales et les stéréotypes discriminatoires contre les femmes, en conformité avec les dispositions de la Convention. Ces mesures devraient comprendre des efforts, en collaboration avec la société civile et les chefs communautaires et religieux, pour éduquer et sensibiliser à ce sujet les femmes et les hommes à tous les niveaux de la société. Le Comité exprime encore sa préoccupation face à la forte prévalence de la violence contre les femmes du Lesotho, en particulier la violence domestique et sexuelle, ainsi qu'au sujet de l'absence d'une volonté politique clairement exprimée de donner la priorité à l'élimination de la violence contre les femmes.

Le Comité recommande que le Lesotho assure une formation obligatoire aux juges, procureurs et forces de police en vue d'une application stricte des dispositions légales réprimant la violence contre les femmes et encourage les femmes à dénoncer les incidents de violence domestique et sexuelle dont elles sont victimes. Enfin, préoccupé par le manque d'informations sur l'autorité et les ressources humaines et financières dont dispose le Ministère de la femme, de la jeunesse, des sports et des loisirs pour s'assurer que les politiques d'égalité sont pleinement mises en œuvre par les ministères et agences du gouvernement, le Comité encourage le Lesotho à renforcer ce mécanisme en lui fournissant tous les moyens nécessaires.

S'agissant du Tchad, le Comité note avec satisfaction que la promotion des droits des femmes et de l'égalité entre les sexes compte, depuis août 2011, dans les priorités du Gouvernement, comme il a été indiqué par la délégation pendant le dialogue. Le Comité se félicite de l'adoption par le Tchad de la loi de 2002 sur la santé reproductive, qui interdit la violence domestique et sexuelle et les pratiques néfastes, telles que les mutilations génitales féminines et les mariages précoces; et du décret du 17 mai 2007, qui porte création de la Direction de la promotion de l'éducation des filles au sein du Ministère de l'éducation. Le Comité salue aussi les mesures prises contre la violence sexuelle et contre les incidents sexistes dans l'Est du pays, en particulier l'organisation d'une formation sur la violence sexuelle et sexiste, sa prévention et sa répression, formation destinée aux agents du Détachement intégré de sécurité (DIS) et de la Police nationale; le recrutement de femmes officiers de police; et l'ouverture de services chargés des questions de genre aux sein des camps de réfugiés. Le Comité se félicite aussi de la ratification par le Tchad des plusieurs traités internationaux relatifs aux droits de l'homme depuis l'entrée en vigueur de la Convention, notamment les deux Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant, en 2002; le Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants en 2009; et la Convention de l'Union africaine pour la protection et l'assistance aux personnes déplacées en Afrique (Convention de Kampala), en 2011.

Cependant, le Comité est préoccupé par le manque de clarté s'agissant de la place du droit coutumier et religieux vis-à-vis de la législation tchadienne et de son impact sur l'application effectives des dispositions de la Convention dans la législation nationale, compte tenu de la forte tendance patriarcale de la société tchadienne. C'est pourquoi le Comité invite le Tchad à mieux informer tant les fonctionnaires du système judiciaire que les chefs traditionnels de la primauté du droit national sur le droit coutumier, et de la Convention sur le droit national. Il l'invite en outre à lancer un processus de révision complète de sa législation, pour abroger les dispositions discriminatoires envers les femmes dans les lois coutumières, religieuses et modernes; et à prendre des mesures pour sensibiliser le public à l'importance d'abandonner le recours à des pratiques discriminatoires telles que le mariage d'une victime de viol avec son agresseur.

D'autre part, tout en prenant note du Plan national contre la traite des êtres humains adopté par le Tchad, le Comité est préoccupé par le manque d'information sur l'ampleur du phénomène de la traite des femmes. Il est également préoccupé par les rapports faisant état d'enfants, surtout de filles, vendus par leurs parents à des proches ou des inconnus, ainsi que de filles enlevées et envoyées à N'Djamena ou dans d'autres régions. Le Comité demande au Tchad d'amender son Code pénal en vue de la criminalisation du trafic de personnes, d'envisager d'adopter une loi générale contre la traite des personnes et de veiller à ce que ses auteurs soient poursuivis et punis, et ses victimes correctement protégées et aidées. Enfin, le Comité demande instamment au Tchad d'intensifier ses efforts pour améliorer la sécurité des camps de réfugiés, au profit en particulier des femmes et des filles et, dans ce contexte, de recruter davantage de femmes responsables déployées dans les camps de réfugiés pour faciliter la dénonciation des actes de violence sexuelle et sexiste ainsi que le suivi juridique des victimes.

Le Comité se félicite de la ratification par le Koweït de plusieurs traités internationaux relatifs aux droits de l'homme, depuis l'examen de son rapport en 2004, en particulier des deux Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant. Le Comité se félicite aussi de l'amendement, en 2005, de la loi électorale qui accorde aux femmes koweïtiennes les mêmes droits que les hommes en matière de vote et de candidature aux élections, loi qui a abouti à l'élection de plusieurs femmes au Parlement en 2009. Le Comité se félicite en outre de l'adoption de la loi sur le travail dans le secteur privé de 2010, qui interdit le licenciement de salariés pour des motifs liés au genre. Il salue également le jugement de la Cour suprême contre l'article 15 de la loi n° 11/1962, décision qui facilite l'obtention d'un passeport par les femmes, ce qui améliore leur liberté de mouvement. Le Comité note également avec satisfaction la création par le Gouvernement d'une commission chargée de trouver une solution au problème des «Bidoun» (apatrides), considérés comme des «résidents illégaux», ainsi que la création d'une unité de police féminine qui intervient dans les cas de harcèlement sexuel dans les lieux publics.

Le Comité se dit par contre préoccupé par le fait que de nombreuses dispositions juridiques au Koweït sont contraires aux obligations de ce pays en vertu de la Convention et d'autres instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Le Comité appelle donc le Koweït à procéder à une révision systématique de ses lois et règlements afin d'en modifier ou d'en abroger les dispositions discriminatoires contre les femmes, en s'inspirant de la pratique d'autres pays de la région qui ont réussi à le faire. Le Comité appelle également le Koweït à prendre des mesures pour assurer l'égalité de fait entre hommes et femmes, y compris par l'adoption de mesures temporaires spéciales. Il recommande que le Koweït envisage l'adoption de mesures spéciales au niveau national et international, telles que les quotas ou un traitement préférentiel pour accélérer la participation politique des femmes dans la vie publique et politique.

Le Koweït devrait également adopter une législation spécifique pour criminaliser les actes de violence conjugale et sexuelle, notamment en amendant l'article 186 du Code pénal en vue de la criminalisation du viol conjugal. Le Koweït devrait également revoir les dispositions juridiques existantes en vue de simplifier la procédure de divorce au bénéfice de femmes victimes de violence au foyer. Le Comité appelle, enfin, le Koweït à s'abstenir d'obliger les «Bidoun» à renoncer formellement à toute prétention à la nationalité koweïtienne au moment de l'émission ou du renouvellement de leur carte d'identité.

Dans ses observations sur le rapport de la Côte d'Ivoire, le Comité se félicite de la création par ce pays d'une Commission sur le dialogue, la vérité et la réconciliation et note l'engagement de l'État à mettre en œuvre la Résolution 1325 du Conseil de sécurité sur «les femmes, la paix et la sécurité». Il note avec satisfaction la volonté de la Côte d'Ivoire d'institutionnaliser les politiques de genre, ainsi que la déclaration faite par la délégation selon laquelle le Protocole facultatif à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes a été récemment ratifié. Le Comité note aussi avec satisfaction la ratification du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en 1997, et la ratification récente du Protocole de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, relatif aux droits de la femme en Afrique.

Tout en notant que le principe de l'égalité entre les femmes et les hommes est inscrit dans la Constitution ivoirienne de 2000, le Comité recommande à la Côte d'Ivoire d'envisager l'adoption d'amendements constitutionnels et législatifs en vue d'une définition et d'une interdiction claires de toute forme de discrimination contre les femmes, qu'elle soit directe ou indirecte, conformément aux dispositions de la Convention. Le Comité recommande en outre à la Côte d'Ivoire d'adopter, sans délai, une loi globale réprimant la violence contre les femmes et de procéder à un examen complet des dispositions discriminatoires relatives au statut personnel, notamment dans le cadre du mariage, du divorce, de l'héritage, et de modifier, sans délai, le code personnel et familial s'agissant de ces questions.

Le Comité note les efforts consentis par la Côte d'Ivoire pour donner un encadrement humanitaire et judiciaire aux femmes victimes de la violence perpétrée pendant la crise post-électorale. Le Comité est cependant profondément préoccupé par le fait que les civils, particulièrement les femmes et les enfants, ont été les principales victimes des violations des droits de l'homme, y compris les actes de violence sexuelle, commises à cette occasion par les forces de défense et de sécurité et leurs alliés (milices et mercenaires) et, plus tard, par les Forces républicaines de Côte d'Ivoire; et par les informations faisant état de violences sexuelles perpétrées par des acteurs privés et d'allégations d'exploitation et d'abus sexuels impliquant des Casques bleus de l'Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire. Le Comité prie instamment la Côte d'Ivoire de faire en sorte que les responsables des violations des droits fondamentaux des femmes commises durant la crise postélectorale soient traduits en justice et que tous les actes de violence sexuelle sont punis; et de mener une enquête approfondie et complète au sujet des abus sexuels commis par les forces de défense et de sécurité. Il demande aussi aux autorités ivoiriennes d'assurer la sécurité des femmes déplacées de force à l'intérieur du pays et d'allouer davantage de ressources pour répondre à leurs besoins, en particulier l'accès aux moyens de subsistance, à l'eau et à l'éducation par elles-mêmes et par leurs enfants.

Autres textes adoptés

Déclaration générale sur les femmes rurales

Dans une déclaration générale sur les femmes rurales, le Comité souligne que, malgré les efforts entrepris pour encourager leur autonomisation, les femmes rurales sont toujours confrontées à des nombreuses difficultés en tant que femmes, en particulier la discrimination dans toutes les sphères de la vie. Ainsi, au plan scolaire, les deux tiers du milliard d'analphabètes dans le monde sont des femmes et des filles. Les femmes rurales sont aussi particulièrement défavorisées en ce qui concerne l'accès aux services de soins de santé, alors qu'elles sont souvent les premières victimes des conflits armés et des situations d'après conflit. Victimes de stéréotypes négatifs et d'une situation socio-économique défavorable, elles n'ont pas la possibilité de participer effectivement à la vie de la communauté. Cela explique que, dans certains pays, les femmes rurales sont victimes de discrimination dans l'exercice du droit à la propriété foncière et au transfert de propriété. Or, les femmes rurales sont des partenaires clés du développement économique et social. Selon les statistiques, les femmes représentent en moyenne 43 pour-cent de la population agricole active des pays en développement. Dans de nombreux pays, elles constituent de fait l'épine dorsale de la sécurité alimentaire locale et nationale, et jouent un rôle déterminant dans la réduction de la pauvreté, de la malnutrition et de la faim, ainsi que dans le développement. Pourtant, la contribution des femmes à la sécurité alimentaire et la production agricole est généralement invisible, ignorée et sous-payée.

C'est pourquoi le Comité appelle tous les États membres et les Nations Unies à contribuer à la réalisation de l'égalité des sexes dans les zones rurales, notamment en intégrant des perspectives sexospécifiques dans la conception et la mise en œuvre des stratégies de développement rural, y compris en adoptant des mesures temporaires spéciales en faveur des femmes rurales. Le Comité recommande aussi de renoncer aux mesures qui limiteraient la capacité des femmes rurales de subvenir aux besoins alimentaires de leurs familles et communautés, comme par exemple l'achat des semences brevetées qui produisent des plants stériles. Le Comité recommande également l'implication des femmes rurales dans tous les aspects de la planification, de la mise en œuvre et de l'évaluation des politiques et programmes influant sur leur vie, ainsi qu'une amélioration de la représentation des femmes rurales dans les parlements et les organes exécutifs, dans les instances de gouvernance nationales et locales, et notamment au sein des autorités responsables de la planification, de la négociation, de la vente ou de la location de terres nationales. Le Comité recommande en outre que des mesures soient prises pour garantir l'accès des femmes rurales aux services sociaux essentiels comme le logement, l'éducation, la santé (notamment les services de santé reproductive), les garderies et les moyens de transport; que les femmes rurales des pays en voie de développement confrontées à l'impact de la restructuration économique et à la volatilité des prix alimentaires bénéficient d'une sécurité sociale; et que des dispositions systématiques soient prises pour améliorer la connaissance, par les femmes rurales, de l'étendue de leurs droits.

Appel sur les femmes et filles réfugiées et apatrides

À l'occasion de l'anniversaire de la Convention relative au statut des réfugiés (1951) et de la Convention sur la réduction des cas d'apatridie (1961), le Comité lance un appel à tous les États parties à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes afin qu'ils réaffirment leur engagement au respect de leurs obligations internationales, afin que leurs lois, politiques et pratiques ne contiennent aucune mesure discriminatoire à l'encontre des femmes et filles réfugiées et apatrides. Le Comité rappelle que la Convention promeut l'égalité des sexes sans distinction de nationalité ni de statut, migratoire, marital ou autre. Le Comité observe que le déplacement forcé et l'apatridie sont sources de discrimination entre les sexes et d'inégalité envers les femmes et les filles, lesquelles sont aussi confrontées à la violence sexuelle et sexiste.

Le Comité rappelle que la Convention s'applique à toutes les étapes du cycle du déplacement. Les demandes d'asile déposées par des femmes peuvent être fondées non seulement sur l'un des motifs prévus par la Convention de 1951, mais aussi sur toute persécution liée au fait d'être une femme. Le Comité appelle les États à reconnaître cette forme de persécution de même qu'à interpréter le motif d'«appartenance à un groupe social particulier» comme s'appliquant aux femmes. Le Comité demande également aux États de prendre des mesures de protection des femmes et des filles vivant dans les camps de réfugiés contre les violences sexuelles et liées au genre. Il les appelle en outre à garantir aux femmes l'égalité des droits et l'accès aux services de base: santé, éducation, alimentation, logement, sécurité et liberté de circulation, notamment. Le Comité relève en outre que la Convention est un outil important dans les efforts internationaux pour prévenir et réduire l'apatridie résultant de la discrimination contre les femmes en matière de droit à la nationalité. La Convention demande ainsi aux États de prendre les mesures nécessaires pour que le mariage n'entraîne pas automatiquement de changement de nationalité de la femme, ne la rende pas apatride ni ne la force à adopter la nationalité de son mari. Les États parties sont également tenus d'accorder aux femmes des droits égaux à ceux des hommes s'agissant de la transmission de la nationalité aux conjoints étrangers ainsi qu'aux enfants.

Le Comité relève qu'en dépit des progrès accomplis jusqu'ici, il reste beaucoup à faire pour parvenir à l'égalité des sexes, notamment dans le cadre des déplacements forcés et de l'apatridie. Il estime que la protection des femmes et des filles contre les risques encourus dans ce contexte – notamment la violence sexiste et sexuelle et la traite des êtres humains – reste une préoccupation primordiale. Le Comité appelle donc les États à rester saisis de cette question à titre prioritaire et à améliorer encore la protection des femmes et des filles.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

CEDAW11/025F