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Famine : 16 « points chauds » de la planète au bord de l’effondrement alimentaire

Du pain fraîchement cuit est distribué à des habitants de Deir al-Balah, à Gaza.
© WFP/Maxime Le Lijour
Du pain fraîchement cuit est distribué à des habitants de Deir al-Balah, à Gaza.
Des millions de personnes supplémentaires risquent de sombrer dans la famine au cours des prochains mois, alertent les Nations Unies. Conflits, chocs économiques, conditions climatiques extrêmes et effondrement des financements humanitaires se conjuguent pour précipiter 16 régions du monde au bord de la catastrophe alimentaire.

Selon un rapport publié mercredi, la situation se dégrade à un rythme alarmant dans plusieurs zones déjà fragilisées en raison du désengagement de la communauté internationale. 

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« Nous sommes au bord d’une catastrophe alimentaire tout à fait évitable », alerte Cindy McCain, la directrice exécutive du Programme alimentaire mondial (PAM), l’une des deux agences onusiennes à l’origine de l’étude. « Les mères sautent des repas pour que leurs enfants puissent manger, et les familles épuisent le peu qui leur reste pour survivre ».

Du Soudan à Gaza, les « points chauds » de la faim

De la Corne de l’Afrique à la Méditerranée, en passant par les Caraïbes, la carte mondiale de la faim dessine une même ligne de fracture : celle des guerres, du dérèglement climatique et des économies effondrées.

Le rapport, co-publié par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), identifie 16 « points chauds de la faim », dont six crises majeures – Haïti, le Mali, la Palestine, le Soudan du Sud, le Soudan et le Yémen – où la famine menace directement des millions d’êtres humains.

Au Soudan, la guerre civile opposant l'armée aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) qui ravagent depuis plus d’un an les États du Kordofan, dans le centre, et du Darfour du Nord, dans l'ouest, ont déjà provoqué la famine dans cinq régions. La malnutrition atteint des niveaux record dans le pays, et « des milliers de personnes risquent de mourir » si l’aide n’arrive pas immédiatement.

Dans la bande de Gaza, une famine a été confirmée cet été au nord de l'enclave palestinienne, victime cette année d'un blocus humanitaire et commercial plus ou moins complet de la part des autorités israéliennes. Si l'aide entre désormais sur le territoire à la faveur du cessez-le-feu conclu le mois dernier entre Israël et le Hamas, l'acheminement de nourriture demeure insuffisant et toujours partiellement entravé. 

En Haïti, la spirale de la violence des gangs aggrave encore la faim dont souffrait déjà le pays, victime depuis de nombreuses années de l'instabilité politique, des catastrophes naturelles et de la criminalité organisée : 5,9 millions de personnes sautent quotidiennement des repas pour tenter de subsister.

Six autres pays – l'Afghanistan, la République démocratique du Congo, le Myanmar, le Nigéria, la Somalie et la Syrie — sont jugés « très préoccupants » par la FAO et le PAM. Le Burkina Faso, le Tchad, le Kenya et les camps rohingyas au Bangladesh complètent cette liste de points chauds, où la faim progresse inexorablement.

Une femme prépare un repas pour sa famille à El Fasher, dans le Darfour du Nord, à l'ouest du Soudan, où des dizaines de milliers de civils sont pris au piège par les combats.
© UNICEF
Une femme prépare un repas pour sa famille à El Fasher, dans le Darfour du Nord, à l'ouest du Soudan, où des dizaines de milliers de civils sont pris au piège par les combats.

Des financements en chute libre

Alors que les signaux d’alarme se multiplient, les ressources manquent cruellement. Fin octobre, à peine 10,5 milliards de dollars ont été mobilisés sur les 29 milliards nécessaires pour nourrir les populations les plus exposées. 

 

Les conséquences sont immédiates : des rations sont coupées, des programmes d’alimentation scolaire suspendus, des traitements contre la malnutrition interrompus.

Dans 11 des 16 zones critiques, les cibles d’aide ont dû être réduites de plus d’un tiers, faute de moyens. « Les opérations en faveur des réfugiés sont au point de rupture », avertissent les agences. Derrière ces chiffres, ce sont des millions de vies qui basculent dans le silence des camps et des villages isolés.

Pour la FAO et le PAM, la famine n’est ni une fatalité ni une surprise : elle est le résultat prévisible d’un désengagement collectif. Les deux institutions appellent à un sursaut mondial, rappelant que chaque dollar investi dans la prévention épargne des vies et des décennies d’instabilité.

« La prévention de la famine n’est pas seulement un devoir moral, c’est un investissement intelligent dans la paix et la stabilité à long terme », plaide le directeur général de la FAO, Qu Dongyu. « La paix est une condition préalable à la sécurité alimentaire et le droit à l’alimentation est un droit humain fondamental ».