Fil d'Ariane

Gaza : trois décès liés au syndrome de Guillain-Barré confirmés par des agences de l’ONU

Deux des victimes sont des enfants de moins de 15 ans, décédés « faute d’accès aux traitements vitaux » en raison du blocus imposé par Israël sur l’entrée de l’aide humanitaire dans l’enclave.
« Le ministère de la Santé de Gaza a averti que l’absence de traitement nécessaire risquait d’aggraver la situation », a détaillé dans son dernier rapport le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA).
Le groupe sectoriel des humanitaires chargé de la santé note que les établissements de réadaptation spécialisés, notamment les hôpitaux Hamad, Al Amal et Al Wafaa, sont submergés par les cas de traumatismes (polytraumatismes complexes) et de syndrome de Guillain-Barré.

Nombreux cas signalés dans des zones densément peuplées
L’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui s’alarme « d’une augmentation inquiétante » des cas, note que 30% des patients atteints du syndrome de Guillain-Barré doivent être admis en unité de soins intensifs.
Selon les autorités sanitaires gazaouies, 64 cas, dont 27 chez des enfants de moins de 15 ans, ont été recensés, selon un décompte effectué le 31 juillet 2025, contre seulement cinq cas par an avant l’escalade du conflit en octobre 2023. Parmi ceux-ci, 32 cas ont été recensés dans le gouvernorat de Khan Younis (50 %), 28 dans le gouvernorat de Gaza (44 %) et quatre dans le gouvernorat de Deir al Balah (6 %).
Bien que de nombreux cas aient été signalés dans des zones très densément peuplées, en particulier dans les gouvernorats de Khan Younis et de Gaza, aucun groupe de cas n’a été signalé dans des zones géographiques définies. Selon l’OMS, il n’y a actuellement aucun stock disponible d’immunoglobulines intraveineuses, le principal médicament utilisé pour le traitement du syndrome de Guillain-Barré.
L’effondrement du système hospitalier à Gaza a entraîné la mort de plusieurs milliers de personnes, faute de traitements pour soigner leurs pathologies. Ils ne sont pas comptabilisés dans les bilans quotidiens publiés par les autorités gazaouies, qui font état d’au moins 61.158 Palestiniens directement tués par des tirs ou des bombardements israéliens depuis le début de la guerre.
Qu’est-ce que le syndrome de Guillain-Barré ?
Le syndrome de Guillain-Barré est une maladie neurologique et auto-immune qui affecte le système nerveux et provoque une paralysie progressive des muscles. Ce syndrome n’est pas une maladie contagieuse et est souvent déclenché par une infection antérieure, qu'elle soit virale ou bactérienne, qui perturbe le système immunitaire.
Dans la plupart des cas, les malades peuvent se rétablir sans séquelle en quelques semaines. Mais, « même dans les meilleurs contextes sanitaires, 3 % à 5 % des patients décèdent de complications de la maladie, telles qu’une paralysie des muscles de la respiration, une septicémie, une embolie pulmonaire ou un arrêt cardiaque », résume l’agence sanitaire mondiale de l’ONU.
La malnutrition, les déplacements incessants à la suite des ordres d’évacuation de l’armée israélienne, la surpopulation dans les camps de fortune, l’absence d’assainissement et la rareté de l’eau potable ont déjà provoqué plusieurs épidémies de maladies infectieuses dans l’enclave assiégée telles que la poliomyélite, le choléra, l’hépatite A ou encore la gale depuis le début de l’offensive israélienne en octobre 2023.
420 cas suspects de méningite
Outre l’apparition du syndrome de Guillain-Barré, l’enclave doit faire face à la menace d’une maladie bactérienne. Selon l’OCHA, 420 cas suspects de méningite ont été signalés au cours du mois de juillet. Il s’agit du nombre « le plus élevé enregistré » depuis le début du conflit entre Israël et le Hamas. Parmi ceux-ci, 197 cas ont été recensés dans le gouvernorat de Khan Younis, 150 dans le gouvernorat de Gaza et 73 à Deir al-Balah.
La destruction du principal entrepôt médical de l’OMS à Deir al-Balah a entraîné une pénurie critique d’antibiotiques, essentiels au traitement de la méningite.
Comme pour aggraver les choses, les hôpitaux de Gaza sont aussi submergés par « un afflux de blessés qui dépasse leurs capacités ».
Le taux d’occupation des lits dans les hôpitaux spécialisés dans les traumatismes a considérablement augmenté : 300 % à l’hôpital Al-Ahli Arab, 240 % à l’hôpital Al-Shifa, 210 % à l’hôpital Al Rantisi et 180 % à l’hôpital Nasser. Les hôpitaux sont ainsi contraints d’installer des patients à même le sol et dans les couloirs faute de lits disponibles.

Malnutrition aiguë
Par ailleurs, l’aggravation de la famine observée ces dernières semaines dans l’enclave palestinienne a fait grimper le nombre total de Palestiniens décédés pour cause de malnutrition à 193 personnes, dont 96 enfants, selon un décompte effectué mercredi 6 août 2025.
Ce chiffre comprend cinq personnes décédées dans des hôpitaux avant-hier mardi.
Près de 12.000 enfants de moins de cinq ans à Gaza souffraient de malnutrition aiguë en juillet, le chiffre mensuel le plus élevé jamais enregistré, selon le groupe sectoriel Nutrition.
Parmi ces enfants, plus de 2.500 d’entre eux souffrent de malnutrition aiguë sévère, dont 40 ont été hospitalisés dans des centres de stabilisation.
Et dans l’enclave assiégée, même les travailleurs humanitaires ne sont pas épargnés par la souffrance.
« Je sais qu’un seul repas ne suffit pas, mais peut-être que cela suffit pour nous maintenir en vie », a ainsi témoigné sur le réseau social X, un employé de l’Agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA). « C’est la réalité de nos collègues de l’UNRWA à Gaza : épuisés, étourdis et affamés, ils continuent néanmoins à servir la communauté ».
Largages aériens insuffisants
Dans ce contexte, le Programme alimentaire mondial (PAM) a réclamé une nouvelle fois un afflux massif d'aide à Gaza.
« Nous ne pouvons pas nous sortir d'une famine qui se se répand avec des largages aériens. Pas à Gaza », a insisté la Directrice exécutive du PAM, Cindy McCain, dans un message sur les réseaux sociaux mercredi soir.
Elle a souligné que « 500.000 personnes souffrent de la faim aujourd'hui » et que la seule façon de les aider est de leur acheminer de la nourriture à grande échelle et par voie terrestre. « Nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre ; Gaza est à court de nourriture et manque de temps ».
Terres agricoles endommagées
Par ailleurs, des données de l'ONU publiées mercredi soulignent la faible quantité de terres cultivables restantes dans la bande de Gaza, ce qui contribue aux conditions de famine que subissent actuellement plus de deux millions de personnes.
Un rapport de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et du Centre satellitaire des Nations Unies (UNOSAT) révèle qu'au 28 juillet, seulement 8,6 % des terres cultivées à Gaza sont encore accessibles, tandis que seulement 1,5 % sont à la fois accessibles et intactes.
Plus de 86 % des terres cultivées sont endommagées, tandis que 12,4 % sont intactes mais hors d'atteinte, alors que les combats entre les forces israéliennes et les militants du Hamas et d'autres groupes armés se poursuivent.