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Volker Türk alarmé par l’ampleur considérable des abus dans l’Est de la RDC

Les populations continuent de fuir les combats dans l’est de la RDC.
© MONUSCO/Aubin Mukoni
Les populations continuent de fuir les combats dans l’est de la RDC.
Alors que les affrontements continuent sans répit dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, la situation dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) est « grave et alarmante », a alerté lundi le chef des droits de l’homme de l’ONU.
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Présentant devant le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, à Genève, la mise à jour orale de la Mission d’établissement des faits sur la RDC, Volker Türk a décrit des violations et atteintes aux droits humains « d’une ampleur et étendue effroyables ».

« Toutes les parties au conflit dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu ont commis des violations ou atteintes aux droits humains, ainsi que des violations du droit international humanitaire », a déclaré le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme.

Les conclusions préliminaires de la Mission d’établissement des faits montrent une apparente absence totale de considération pour la protection des civils pendant et après les opérations militaires.

Arrestations arbitraires

Lors des combats, en début d'année, ayant conduit à la conquête de Goma par le M23, le groupe rebelle soutenu par le Rwanda, il y a eu un effondrement total de la chaine de commandement quand les forces armées de la RDC (FARDC) se sont repliées. « Des soldats congolais, et des membres des milices Wazalendo soutenues par la RDC, ont tué, violé et pillé ».

La Mission a aussi reçu des informations indiquant que des milices Wazalendo auraient arrêté arbitrairement et enlevé des personnes pour extorquer de l’argent, et qu’elles auraient imposé des punitions sommaires dans les zones qu’elles contrôlent. La Mission enquête aussi sur des exécutions sommaires présumées commises par des membres des FARDC et des milices Wazalendo.

« Mon Bureau est en train d’enquêter sur d’autres violations présumées du droit international humanitaire, et beaucoup d’entre elles pourraient constituer des crimes de guerre », a précisé le chef des droits de l’homme de l’ONU.

Une mère et ses enfants quittent un camp de personnes déplacées à Goma, en RDC.
© UNICEF/Jospin Benekire
Une mère et ses enfants quittent un camp de personnes déplacées à Goma, en RDC.

Exécutions sommaires et extrajudiciaires

De son côté, le M23 a arrêté arbitrairement des policiers et de nombreux civils, y compris des enfants, après avoir pris le contrôle de villes et villages. Des combattants du M23 ont aussi capturé des soldats des FARDC et forcé certains d’entre eux à rejoindre leurs rangs.

« Des témoins ont raconté à mon équipe que les personnes capturées étaient - et restent encore - détenues dans des conditions inhumaines dans des camps militaires comme celui de Rumangabo, ou dans des lieux de détention informels. Beaucoup d’entre elles ont été recrutées de force par le M23 », a détaillé M. Türk.

Le M23 a également procédé à des « exécutions sommaires et extrajudiciaires », qui pourraient être qualifiées de « crimes de guerre ». Le groupe rebelle a utilisé la torture et d’autres formes de mauvais traitements pour imposer de l’ordre, forcer des personnes à travailler, réprimer toute opposition, et extraire des informations.

Violences sexuelles

Par ailleurs, les équipes du Haut-Commissaire Türk indiquent avoir reçu des informations sur l’usage « choquant de la violence sexuelle » par toutes les parties au conflit dans le Nord-Kivu et le Sud-Kivu. Ces violences auraient été utilisées comme une forme de représailles contre certaines communautés, contre les proches des opposants présumés, et contre des membres d’autres groupes ethniques.

Près de 40 % des survivants des violences sexuelles et basées sur le genre sont des enfants. D’après le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), au plus fort du conflit, un enfant était violé toutes les 30 minutes.

Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU (HCDH) enquête aussi sur des allégations de recrutement d’enfants, notamment d’adolescents, par le M23 et plusieurs milices Wazalendo en vue de les utiliser dans le conflit armé.

Incertitudes budgétaires

M. Türk appelle toutes les parties au conflit à s’engager immédiatement en faveur d’un cessez-le-feu et à reprendre les négociations, et de respecter le droit international humanitaire et les droits humains. Il a réitéré son appel au Rwanda de retirer ses troupes du territoire de la RDC et à cesser tout soutien au M23. « J’appelle aussi tous les États qui ont une influence sur les parties au conflit à encourager le respect du droit international », a-t-il insisté.

La Mission d’établissement des faits indique avoir recueilli une grande quantité de preuves, auprès de victimes et de témoins en RDC, au Rwanda, au Burundi, dans d’autres pays, ainsi qu’auprès de partenaires des Nations Unies et de la société civile. Ces éléments pourront servir à appuyer les mécanismes de justice.

Aujourd’hui, à cause de la situation financière, la Mission a pu fonctionner uniquement grâce aux fonds de réserve du Bureau des droits de l’homme de l’ONU.

En l’état actuel, Il est peu probable que la Commission d’enquête mandatée par ce Conseil bénéficie d’un financement issu du budget ordinaire cette année.

Il demande donc à la communauté internationale de maintenir le soutien politique et financier au travail mené par le HCDH en RDC.