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Le Conseil tient un dialogue avec la Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la prévention du génocide et engage son dialogue sur la situation au Bélarus – où la situation reste catastrophique et ne cesse de s'aggraver, affirme Mme Marin

Compte rendu de séance

 

Les nouvelles technologies entraînent une propagation exponentielle des discours de haine en ligne, souvent instrumentalisés à des fins politiques, qui attisent les divisions, la violence et, dans les cas les plus graves, les crimes d'atrocité.  C’est ce qu’a souligné Mme Alice Wairimu Nderitu, Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la prévention du génocide, alors qu’elle engageait cet après-midi avec le Conseil des droits de l’homme un dialogue autour duquel était présenté un rapport du Secrétaire général concernant l’« impact des progrès technologiques sur les efforts de prévention du génocide et sur les risques de perpétration d'un génocide ».

Mme Nderitu a appelé les États à agir rapidement aux niveaux communautaire, national, régional et international face aux signes d'alerte et aux indicateurs de risque, en particulier la violence et la discrimination fondées sur l'identité, les discours de haine et les violations systématiques des droits fondamentaux à l'encontre des populations civiles. C’est en effet « l'absence de réaction rapide à ces signes d'alerte qui permet au génocide de se produire », a rappelé Mme Nderitu.

Suite à cette présentation, de nombreuses délégations* sont intervenues dans le cadre du dialogue avec la Conseillère spéciale.

Mme Peggy Hicks, Directrice de la Division de l’engagement thématique, des procédures spéciales et du droit au développement au Haut-Commissariat aux droits de l’homme, a pour sa part présenté durant cette séance six rapports établis par le Secrétaire général des Nations Unies, par le Haut-Commissariat et par le Haut-Commissaire aux droits de l’homme.

Ces rapports concernent la mise en œuvre de la Stratégie des Nations Unies pour l’inclusion des personnes handicapées dans l’ensemble de ses programmes et opérations ; l’impact des progrès technologiques sur la prévention des efforts de génocide et sur les risques de perpétration d’un génocide ; la mise en place et le renforcement de la coopération internationale dans le domaine des droits de l’homme ; les incidences de l’acquisition, de la possession et de l’utilisation d’armes à feu par les civils ; la relation entre les droits de l'homme et les processus de normalisation technique pour les technologies numériques nouvelles et émergentes et l’application pratique des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme ; et les bonnes pratiques sur l’accès aux médicaments, aux vaccins et autres produits de santé dans le contexte du droit de toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible.

En fin de séance, le Conseil a entamé un dialogue interactif avec Mme Anaïs Marin, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus. Cette dernière a d’abord dit avoir constaté, depuis sa prise de fonction il y a cinq ans, une détérioration constante de la situation des droits de l'homme dans le pays. La répression a atteint des niveaux sans précédent en 2020 et, alors que la Rapporteuse spéciale présente son rapport annuel aujourd'hui, la situation reste catastrophique et ne cesse de s'aggraver. En effet, a dit Mme Marin, le Gouvernement bélarussien a modifié une législation déjà restrictive visant à démanteler les libertés civiques, ce qui a entraîné une augmentation des poursuites et des condamnations pour des motifs politiques. Le risque de représailles à l'encontre de celles et ceux qui s'adressent aux mécanismes de défense des droits de l'homme des Nations Unies restant élevé, la Rapporteuse spéciale a dit avoir choisi de ne pas divulguer les noms de la plupart des victimes.

S’agissant du rapport qu’elle présente cette année, Mme Marin a indiqué qu’il traitait de la liberté d'expression et mettait en lumière la répression contre les médias indépendants et les syndicats, ainsi que les restrictions à la liberté académique au Bélarus.

Plusieurs délégations** ont ensuite engagé le dialogue avec la Rapporteuse spéciale.

Durant cette séance, les pays suivants ont exercé leur droit de réponse : Thaïlande, Azerbaïdjan, Indonésie, Arménie, Japon, Chine, République de Moldova.

 

Demain matin, à 10 heures, le Conseil achèvera son dialogue avec Mme Marin, avant d’engager son dialogue avec la Mission d’établissement des faits pour enquêter sur les violations alléguées des droits de l’homme en Iran.

 

Dialogue avec la Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la prévention du génocide

Le Conseil tient un dialogue avec la Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la prévention du génocide au sujet des progrès accomplis dans l’exercice de ses fonctions. Il est saisi, dans ce cadre, d’un rapport du Secrétaire général concernant l’« impact des progrès technologiques sur les efforts de prévention du génocide et sur les risques de perpétration d'un génocide » (A/HRC/53/45 à paraître).

Présentation

MME ALICE WAIRIMU NDERITU, Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la prévention du génocide, a rappelé que la Convention pour la prévention et la répression du crime du génocide avait été adoptée le 9 décembre 1948, soit un jour avant la Déclaration universelle des droits de l’homme, réaffirmant ainsi la gravité de ce crime et l'engagement d'en assurer la prévention et la répression.

Mme Nderitu a fait observer que les nouvelles technologies entraînent une propagation exponentielle des discours de haine en ligne, souvent instrumentalisés à des fins politiques, qui attisent les divisions, la violence et, dans les cas les plus graves, les crimes d'atrocité. La Conseillère spéciale a dit organiser chaque année, depuis sa nomination en 2020, des tables rondes avec des entreprises de technologie et de médias sociaux et avoir élaboré des orientations politiques basées sur les résultats de ces tables rondes.

Les violations et les abus documentés, en particulier en Libye, à l'encontre des réfugiés, des migrants et des demandeurs d'asile, peuvent constituer des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre, a indiqué Mme Nderitu, qui a plaidé pour des voies de migrations sûres et légales.

Mme Nderitu a ensuite mentionné les conflits émergents et prolongés qui entraînent un impact dévastateur sur la vie humaine, notamment en Syrie, au Yémen, en Ukraine, au Mozambique et au Burkina Faso, « et dans bien d'autres pays ».

Mme Nderitu s’est aussi dite préoccupée par les tensions identitaires qui se manifestent en Bosnie-Herzégovine par une aggravation de la méfiance et par le déni des crimes passés, en particulier du génocide de Srebrenica.

En République démocratique du Congo, les attaques contre les civils selon des critères ethniques, ainsi que les massacres, les violences sexuelles, les enlèvements, la destruction de biens et les attaques contre les camps de personnes déplacées, sont perpétrés par les nombreux groupes armés et se poursuivent sans relâche, a poursuivi la Conseillère spéciale. Elle a averti que ses services ont identifié des facteurs de risque de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité en République démocratique du Congo.

Mme Nderitu a par ailleurs fait part de préoccupations s’agissant de la situation au Soudan, avec des attaques qui pourraient constituer des facteurs de risque de crimes d'atrocité - génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité. De même, au Myanmar, la crise présente un risque élevé pour les populations civiles, les Rohingya demeurant l'une des minorités les plus marginalisées et les plus vulnérables du pays et de la région.

L'Éthiopie doit être félicitée pour l'accord de paix, a ensuite indiqué Mme Nderitu, qui a cependant appelé les autorités éthiopiennes à renforcer les mécanismes nationaux de responsabilisation.

En Haïti, a poursuivi la Conseillère spéciale, les habitants sont confrontés à des problèmes de gouvernance, à la pauvreté et à des catastrophes fréquentes telles que les tremblements de terre et les ouragans. Les personnes d'origine haïtienne et les migrants haïtiens sont aussi confrontés, dans certains des lieux où ils cherchent refuge, à des discours de haine, à des violations des droits de l'homme telles que le racisme, la discrimination, la déshumanisation et la désignation comme boucs émissaires pour les problèmes économiques, en particulier dans le discours politique, a-t-elle ajouté.

Mme Nderitu a d’autre part appelé l’Arménie et l’Azerbaïdjan au dialogue et à la paix, et à éviter toute escalade des tensions.

Au Brésil, Mme Nderitu a dit avoir vu de ses propres yeux l'impact de l'exploitation minière et de l'usage excessif de la force contre les Yanomami dans l'État de Roraima et les Guarani-Kaiowa dans l'État du Mato Grosso Do Sul. Les meurtres de leurs dirigeants et des défenseurs des droits de l'homme et de l'environnement, ainsi que les viols de femmes et de jeunes filles, les arrestations arbitraires et les détentions sont bien documentés, a affirmé la Conseillère spéciale. Le profilage racial et le ciblage, par la police, des personnes d'origine africaine doivent être combattus, a-t-elle ajouté.

En Indonésie, la situation des droits de l'homme en Papouasie reste très préoccupante, a d’autre part déclaré Mme Nderitu, qui a fait état d’allégations de harcèlement, d'arrestations arbitraires et de détention de Papous, ainsi que de la non-reconnaissance des droits des Papous autochtones.

Mme Nderitu a appelé les États à agir rapidement aux niveaux communautaire, national, régional et international face aux signes d'alerte et aux indicateurs de risque, en particulier la violence et la discrimination fondées sur l'identité, les discours de haine et les violations systématiques des droits fondamentaux à l'encontre des populations civiles. C’est en effet « l'absence de réaction rapide à ces signes d'alerte qui permet au génocide de se produire », a rappelé la Conseillère spéciale.

Aperçu du dialogue

Il a été déploré que soixante-quinze ans après l'adoption de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, les risques de nouveaux génocides existent toujours. Un génocide, a-t-il été souligné, ne se produit jamais soudainement et est généralement précédé de pratiques discriminatoires à l'encontre d'un groupe national, ethnique, racial ou religieux, et d'un ensemble de violations des droits de l'homme. L’importance d’identifier les signes avant-coureurs d’un génocide a donc été mise en avant, tout comme a été soulignée l’importance d’une réaction rapide sur la base du cadre d'analyse des atrocités criminelles du Secrétaire général. Pour leur part, le Conseil des droits de l’homme et le Conseil de sécurité doivent agir de manière préventive, notamment pour passer de l’alerte rapide à l’action rapide, a-t-il été demandé.

La prévention des génocides devrait être l'objectif principal des pratiques actuelles de la responsabilité de protéger, a recommandé une délégation.

Il faut veiller à protéger les populations vulnérables et faire en sorte, si un génocide se produit, que les responsables répondent de leurs actes et qu’il ne se reproduise plus jamais, a-t-il été souligné.

Comme l'illustre le rapport du Secrétaire général, dans certains cas, les progrès technologiques peuvent aggraver le risque de génocide, par exemple par la diffusion de désinformation et de discours de haine par le biais des plates-formes de médias sociaux, a-t-il été observé. Mais les progrès technologiques peuvent aussi être utiles pour l'établissement des faits, pour la documentation et les enquêtes, contribuant ainsi à la prévention des crimes d'atrocité et à l'obligation de rendre des comptes pour ces crimes, a-t-il été ajouté. L’intelligence artificielle et l'analyse des données peuvent contribuer à identifier les signes avant-coureurs d'atrocités, ce qui permet d'agir rapidement, a-t-on insisté.

Quarante-trois États n’ont pas encore ratifié la Convention pour la prévention et la répression du crime du génocide, a-t-il été relevé. L’adoption, en mai 2023, de la Convention pour la coopération internationale en matière d’enquête et de poursuite du crime de génocide, des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et autres crimes internationaux a été saluée.

Des délégations ont dénoncé ce qu’elles ont qualifié d’incitation au génocide, voire d’actes à caractère génocidaire, de manifestations et discours néonazis, ainsi que d’atrocités commises contre des peuples autochtones dans plusieurs pays et régions du monde. D’aucuns ont pour leur part déploré que « certains pays hégémoniques » lancent des accusations infondées contre les pays du Sud au sujet de la commission présumée de tels crimes.

* Liste des intervenants : Union européenne, Danemark (au nom d’un groupe de pays), Royaume-Uni (au nom d’un groupe de pays), Costa Rica, Arménie (au nom d’un groupe de pays), Ukraine (au nom d’un groupe de pays), Liechtenstein, Allemagne, Israël, Italie, Costa Rica, Luxembourg, Arménie, États-Unis, Australie, Indonésie, France, Iraq, Venezuela, Afrique du Sud, Malawi, Chine, Suisse, Cuba, Fédération de Russie, Monténégro, Cameroun, Azerbaïdjan, Rwanda, Panama, Cambodge, Grèce, Türkiye, Argentine, Royaume-Uni et Indonésie.

La Commission nationale indépendante des droits de l’homme du Burundi et les organisations non gouvernementales suivantes ont aussi pris part au débat : Jubilee Campaign, Service international pour les droits de l'homme, Conselho Indigenista Missionário (CIMI), British Humanist Association, Center for Global Nonkilling, China Ethnic Minorities’ Association for External Exchanges, Every Casualty Worldwide, Congrès juif mondial, Sikh Human Rights Group et International Council of Russian Compatriots.

Réponses et remarques de conclusion de la Conseillère spéciale

MME NDERITU a précisé que son mandat comprenait la collaboration étroite entre son Bureau et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme ainsi que les organes conventionnels.

La Conseillère spéciale a indiqué qu’elle présenterait demain des lignes directrices à l’intention des entreprises du secteur technologique ; ces lignes directrices feront l’objet d’un débat au Conseil en septembre prochain, a-t-elle précisé.

Les États doivent appuyer le principe de la « responsabilité de protéger » les populations contre le risque de génocide, a demandé Mme Nderitu. 

Présentation de rapports thématiques du Haut-Commissaire, du Haut-Commissariat et du Secrétaire général au titre de la promotion et de la protection de tous les droits de l’homme

MME PEGGY HICKS, Directrice de la Division de l’engagement thématique, des procédures spéciales et du droit au développement du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, a présenté six rapports du Secrétaire général, du Haut-Commissariat et du Haut-Commissaire aux droits de l'homme au titre du point 3 de l’ordre du jour du Conseil [Promotion et de la protection de tous les droits de l’homme].

S’agissant du rapport oral du Haut-Commissariat sur la mise en œuvre de la Stratégie des Nations Unies pour l’inclusion des personnes handicapées dans l’ensemble de ses programmes et opérations, Mme Hicks a indiqué que le Haut-Commissariat a maintenu ses résultats à ce jour et les a améliorés dans certains domaines, notamment celui des programmes et des projets. Mme Hicks a en outre relevé que le Haut-Commissariat dépassait les résultats définis dans quatre domaines, à savoir le leadership, les politiques propres aux handicaps, les aménagements raisonnables et les initiatives conjointes.

S’agissant du rapport du Secrétaire général sur l’impact des progrès technologiques sur la prévention des efforts de génocide et sur les risques de perpétration d’un génocide (A/HRC/53/45, à paraître), Mme Hicks a relevé que ce document se concentre sur la façon dont les progrès technologiques peuvent aider à prévenir le génocide. Il fait également le point sur les risques que les technologies numériques peuvent faire peser sur le droit à la liberté d’expression et d’autres droits de l’homme.

Les technologies numériques ont élargi et remodelé l’espace civique et la participation du public et renforcé les efforts de prévention, a d’autre part fait observer Mme Hicks. La disponibilité généralisée et peu coûteuse d’outils de surveillance, souvent en temps réel, des violations des droits de l’homme susceptibles de conduire à un génocide a amélioré la collecte de preuves et le partage d’informations, et a permis une alerte rapide plus efficace, a-t-elle souligné.

Cependant, les technologies numériques peuvent également ouvrir la voie à de nouvelles formes de violations des droits de l’homme, qui présentent des risques pour la prévention du génocide, a ajouté Mme Hicks. Le droit à la liberté d’expression et d’autres droits de l’homme peuvent être restreints par des coupures d’Internet ou en imposant des limitations injustifiées sur des questions qui peuvent être discutées en ligne.

Des garanties technologiques sont nécessaires pour assurer la prévention du génocide et la protection des droits de l’homme dans l’espace numérique, a indiqué Mme Hicks. Les États Membres devraient respecter les obligations qui leur incombent en vertu des Principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, a-t-elle plaidé.

Concernant le rapport du Haut-Commissaire intitulé « Mise en place et renforcement de la coopération internationale dans le domaine des droits de l’homme » (A/HRC/53/46), Mme Hicks a indiqué qu’à l’aube du 75ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme et du 30ème anniversaire de la Déclaration et du Programme d’action de Vienne, et dans le contexte de « Notre programme commun » et de l’ « Appel à l’action » du Secrétaire général pour les droits de l’homme, ce rapport souligne la nécessité de raviver l’esprit de ces instruments pour renforcer la coopération internationale vers un changement transformateur. Il souligne également que les droits doivent être au cœur d’un nouveau contrat social et d’un multilatéralisme plus inclusif et efficace, a-t-elle ajouté.

Le rapport recommande aussi que l’ONU intensifie d’urgence son ambition et son opérationnalisation de l’intégration des droits de l’homme dans les analyses communes par pays et les cadres de coopération, a poursuivi Mme Hicks.  Elle a en outre indiqué que le rapport appelle les États Membres à travailler ensemble pour adopter un instrument juridiquement contraignant sur le droit au développement et rendre ce droit opérationnel.

S’agissant du rapport du Haut-Commissaire concernant les incidences de l’acquisition, de la possession et de l’utilisation d’armes à feu par les civils (A/HRC/53/49), Mme Hicks a précisé que ce document met l’accent sur la manière dont les entreprises, en particulier l’industrie des armes à feu, contribuent à la disponibilité des armes à feu en stimulant l’offre et la demande.  Les fabricants d’armes à feu établissent souvent pleinement ou partiellement leurs activités dans des juridictions où les conditions de fabrication et de vente d’armes à feu sont permises, a-t-elle notamment relevé.  Mme Hicks a par ailleurs souligné que le rapport constate que l’industrie des armes à feu – y compris les associations, les fabricants et les marchands d’armes à feu – n’a pas pris de mesures adéquates pour se conformer aux Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme. Le rapport se termine par des recommandations aux États et aux entreprises : il incite notamment les États à redoubler d’efforts pour remédier aux incidences négatives sur les droits de l’homme résultant des contributions des entreprises pour stimuler l’offre et la demande d’armes à feu par les civils.

Concernant le rapport du Haut-Commissariat intitulé « Relation entre les droits de l'homme et les processus de normalisation technique pour les technologies numériques nouvelles et émergentes et application pratique des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme » (A/HRC/53/42, à paraître en français), Mme Hicks a relevé qu’il constitue la première analyse approfondie par l’Organisation des Nations Unies de l’aspect droits de l’homme de l’élaboration de normes techniques.  Le rapport illustre l’ampleur des incidences positives et négatives des normes techniques sur la jouissance de l’ensemble des droits de l’homme et identifie les défis et les solutions possibles pour mieux intégrer les considérations relatives aux droits de l’homme dans l’élaboration de normes techniques, a-t-elle indiqué.

Le rapport identifie un manque généralisé d’expertise et de capacités en matière de droits de l’homme dans les processus normatifs, ainsi que des lacunes persistantes en matière de transparence, a d’autre part souligné Mme Hicks.  Pour relever ces défis, il faut des efforts multidimensionnels soutenus de la part des États, des organismes de normalisation et de toutes les parties prenantes, a-t-elle indiqué. Les droits de l’homme doivent être placés au premier plan de ces efforts, a-t-elle insisté.

Concernant le rapport du Haut-Commissariat consistant en un recueil de bonnes pratiques sur l’accès aux médicaments, aux vaccins et autres produits de santé dans le contexte du droit de toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible (A/HRC/53/50), Mme Hicks a indiqué que, malgré l’importance d’un tel accès pour la réalisation des droits de l’homme, des inégalités massives demeurent dans l’accès aux médicaments, aux vaccins et aux autres produits de santé. Les besoins des personnes vivant dans la pauvreté, des personnes âgées, des personnes handicapées, des femmes et des enfants sont souvent sous-estimés voire ignorés et ces personnes sont mal desservies, a-t-elle regretté.

Parmi les quelques bonnes pratiques favorisant la disponibilité, l’accessibilité, l’acceptabilité et la qualité des médicaments essentiels, vaccins et autres produits de santé identifiés dans le contexte de ce recueil, figurent des pratiques qui reposent sur une approche fondée sur les droits de l’homme et qui garantissent une participation significative de toutes les parties concernées, y compris les organisations de la société civile et les organisations de patients et de consommateurs, a indiqué Mme Hicks.  Il s’agit notamment de politiques qui favorisent la concurrence dans l’industrie pharmaceutique, d’une gestion des droits de propriété intellectuelle axée sur l’accès, de cadres réglementaires solides et d’une réglementation des prix, a-t-elle précisé.

Dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus

Le Conseil est saisi du rapport de la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus (A/HRC/53/53).

Présentation du rapport

MME ANAÏS MARIN, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Bélarus, a d’abord dit avoir constaté, depuis sa prise de fonction il y a cinq ans, une détérioration constante de la situation des droits de l'homme dans le pays. La répression a atteint des niveaux sans précédent en 2020 et, alors que la Rapporteuse spéciale présente son rapport annuel aujourd'hui, la situation reste catastrophique et ne cesse de s'aggraver. En effet, a dit Mme Marin, le Gouvernement bélarussien a modifié une législation déjà restrictive visant à démanteler les libertés civiques, ce qui a entraîné une augmentation des poursuites et des condamnations pour des motifs politiques. Le risque de représailles à l'encontre de celles et ceux qui s'adressent aux mécanismes de défense des droits de l'homme des Nations Unies restant élevé, la Rapporteuse spéciale a dit avoir choisi de ne pas divulguer les noms de la plupart des victimes.

Plus de 1500 personnes sont toujours détenues pour des motifs politiques, avec en moyenne dix-sept arrestations arbitraires par jour depuis 2020, a poursuivi la Rapporteuse spéciale. Mme Marin a dit avoir de bonnes raisons de croire que les conditions de détention sont délibérément rendues plus dures pour les personnes condamnées pour des motifs politiques. Des personnalités politiques de premier plan, telles que Siarhiej Tsikhanousky, Maria Kalesnikava et Viktar Barbaryka, ont subi des mauvais traitements dans des cellules disciplinaires, où elles sont systématiquement privées de leurs droits fondamentaux à des examens médicaux, à un traitement approprié, à une représentation juridique et à des contacts avec leur famille, a précisé la Rapporteuse spéciale.

Mme Marin a aussi fait état d’une politique délibérée de l'État visant à purger l'espace civique de ses derniers éléments dissidents, dont les poursuites pénales engagées à l'encontre de l’organisation Viasna et de son personnel – y compris le lauréat du prix Nobel de la paix Ales Bialiatski – sont un exemple affligeant. Quant aux femmes défenseuses des droits humains, telles Marfa Rabkova et Nasta Loika, elles sont confrontées à des conditions de détention désastreuses et à des soins médicaux inadéquats qui entraînent des dommages irréversibles pour leur santé, a indiqué Mme Marin. Elle a également mentionné des attaques contre la profession juridique et a souligné que personne n'a rendu de compte, dans le pays, pour la détention arbitraire de dizaines de milliers de manifestants pacifiques en 2020, ni pour les violences ou tortures subies par nombre d'entre eux.

S’agissant du rapport présenté cette année, la Rapporteuse spéciale a précisé qu’il traitait de la liberté d'expression et mettait en lumière la répression contre les médias indépendants et les syndicats, ainsi que les restrictions à la liberté académique. Des dizaines de journalistes et de blogueurs purgent de longues peines de prison, a souligné Mme Marin. Les autorités ont restreint l'espace d'information aux seuls médias contrôlés par l'État, tandis que les sources indépendantes, qualifiées d'extrémistes, sont confrontées à la censure, a-t-elle observé. La liberté académique est systématiquement attaquée au Bélarus, avec des restrictions sur les sujets de recherche et les nominations, a-t-elle ajouté.

De même, l'enseignement primaire et secondaire est soumis à un contrôle idéologique, avec notamment des cours obligatoires sur le patriotisme, a continué la Rapporteuse spéciale. Les enfants sont dissuadés d'exprimer leurs propres opinions, en particulier sur les questions politiques, a-t-elle relevé. Enseignants, enfants et parents subissent des menaces et des conséquences pour le fait d’avoir des opinions divergentes. Le droit à l'éducation des minorités linguistiques est remis en cause, notamment avec la fermeture d'écoles de langue polonaise, a également souligné Mme Marin.

Enfin, la liberté d'opinion et d'expression des individus est mise à mal lorsqu'ils tentent de s'exprimer contre l'attaque armée de la Fédération de Russie contre l'Ukraine ou lorsqu'ils remettent en question le rôle du Bélarus dans cette agression. Les actions antiguerre donnent lieu à de nombreuses détentions et arrestations, certaines sous l'inculpation de préparation d'attaques terroristes – un crime qui peut désormais être puni de la peine de mort, a souligné la Rapporteuse spéciale.

Mme Marin a rappelé avoir alerté le Conseil, il y a deux ans, sur le tournant totalitaire pris par les autorités bélarussiennes. La communauté internationale doit continuer à recueillir des preuves des violations des droits de l'homme, en particulier des crimes les plus graves tels que la torture, les exécutions sommaires, les disparitions forcées et les déportations, qui pourraient constituer des crimes contre l'humanité, a demandé la Rapporteuse spéciale.

Aperçu du dialogue

De nombreuses délégations ont déploré la détérioration de la situation des droits de l’homme au Bélarus, dont témoigne le rapport de la Rapporteuse spéciale. « Nous déplorons la dégradation continue de la situation des droits humains au Bélarus, sous l’action d’un gouvernement de plus en plus répressif qui maintient l’espace civique rigoureusement fermé », a déclaré l’une d’elles.

Depuis la présentation du précédent rapport de la Rapporteuse spéciale, rien n'indique que le Bélarus ait pris des mesures pour mettre en œuvre l’une quelconque des recommandations formulées par cette dernière ou par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme dans le cadre de l'examen de la situation des droits de l'homme dans le pays, a regretté une délégation.

Il a également été regretté que le Bélarus se soit retiré, au début de cette année, du premier Protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (qui reconnaît la compétence du Comité des droits de l’homme pour recevoir des plaintes individuelles), ce qui enlève une voie de recours pour la société civile contre les violations des droits de l’homme.

Le recours à la torture et à d’autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants sur des personnes détenues est systématique au Bélarus, ont déploré plusieurs intervenants, appelant à la reddition de comptes pour les responsables de ces actes.

Dans ce contexte, a été dénoncée l'impunité persistante pour l'usage excessif et disproportionné de la force lors des manifestations, ainsi que les attaques délibérées contre la société civile, les mouvements pro-démocratiques, les défenseurs des droits de l'homme, les personnes appartenant à des minorités nationales, les journalistes et autres travailleurs des médias indépendants, les travailleurs indépendants et les membres des syndicats.  Aux 1500 prisonniers politiques détenus par les autorités bélarussiennes, s’ajoute une répression brutale exercée à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes, et des syndicats, a insisté une délégation.

Plusieurs appels ont ainsi été lancés en faveur de la libération immédiate et inconditionnelle de tous les prisonniers politiques.

Il est à présent impossible de défendre légalement les droits humains à cause d’une « campagne d’éradication systématique des organisations indépendantes de défense des droits de l’homme », comme le constate le rapport de la Rapporteuse spéciale, a relevé une délégation.

Plusieurs délégations ont dénoncé la complicité du « régime de Loukachenko » dans l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine. Cette « vassalisation du Bélarus » s’accompagne de graves mesures répressives, dirigées contre tous les opposants à l’agression russe contre l’Ukraine, a-t-il été affirmé.

Plusieurs appels ont été lancés à l’ensemble des États afin qu’ils soutiennent la résolution visant à prolonger le mandat de la Rapporteuse spéciale.

**Liste des intervenants : Estonie (au nom d’un groupe de pays), Union européenne, Lituanie, Pays-Bas, République de Corée, Liechtenstein, Allemagne, Tchéquie, Slovénie, Luxembourg, Espagne, États-Unis, Belgique, France, Malte, Royaume-Uni, Irlande, Autriche, Grèce, Slovaquie, Suisse, République de Moldova, Albanie, Roumanie, Monténégro, Pologne, Bulgarie et Ukraine.

 

 

Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information ; il ne constitue pas un document officiel.

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