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Le Conseil se penche sur l’application des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, et sur les avancées et défis en matière de droit à l’éducation

Compte rendu de séance

 

 

Ce matin, le Conseil des droits de l’homme a dialogué avec la Présidente du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, Mme Pichamon Yeophantong, et avec la Rapporteuse spéciale sur le droit à l’éducation, Mme Farida Shaheed.

Mme Yeophantong a présenté un rapport du Groupe de travail traitant de la nécessité urgente de renforcer les capacités de mise en œuvre des Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme. Le rapport propose des recommandations sur la manière dont les États peuvent collaborer pour renforcer les capacités des principales parties prenantes aux niveaux mondial, régional et local. Les États doivent allouer des ressources adéquates pour relever ce défi de manière efficace, a souligné Mme Yeophantong.

La Présidente a présenté autre un rapport dans lequel le Groupe de travail souligne que les institutions financières pour le développement doivent faire preuve de diligence pour identifier les effets négatifs sur les droits de l'homme de leurs activités et de leurs relations d'affaires, les prévenir et y remédier. Non seulement l'absence de prise en compte des risques liés aux droits de l'homme compromet la faisabilité des projets de développement, mais elle porte également préjudice aux communautés que ces projets doivent aider, a souligné Mme Yeophantong.

Mme Yeophantong a également évoqué le septième Forum régional sur les entreprises et les droits de l'homme pour l'Amérique latine et les Caraïbes, qui s'est tenu en juillet 2022 à Bogotá, ainsi que le Forum 2022 sur les entreprises et les droits de l'homme, qui s’était tenu en novembre 2022 et dont le rapport sera examiné par le Conseil le 6 juillet prochain. 

La Rapporteuse spéciale a enfin rendu compte des visites qu’elle a effectuées en Argentine, au Libéria et au Luxembourg.

Après des déclarations de l’Argentine et du Luxembourg, en tant que pays concernés, ainsi que de la Commission consultative des droits de l’homme du Grand-Duché de Luxembourg, de nombreuses délégations* ont pris part au dialogue avec Mme Yeophantong.

Présentant pour sa part, en cette année qui marque les vingt-cinq ans du mandat, un rapport intitulé « Garantir le droit à l'éducation : avancées et défis cruciaux », la Rapporteuse spéciale sur le droit à l’éducation a relevé que l’exclusion, la mauvaise qualité, les mauvais traitements et le manque de sécurité entravaient toujours l’exercice du droit à l’éducation pour beaucoup. Elle a déploré en particulier le déni de jure du droit fondamental à l’éducation des filles et des femmes en Afghanistan – qu’il faut considérer comme un crime contre l’humanité, a-t-elle affirmé.

Mme Shaheed a aussi jugé préoccupant l’impact, sur les systèmes éducatifs, de la polarisation sociétale autour de la diversité culturelle, de l’enseignement de l’histoire, de la décolonisation des programmes, des théories critiques sur la race et le genre, ainsi que de l’éducation sexuelle complète. Toutes ces questions, de même que la commercialisation et la numérisation de l’éducation, ainsi que l’intelligence artificielle, nécessitent de trouver des réponses basées sur le droit international des droits de l’homme, a recommandé l’experte.

Mme Shaheed a aussi évoqué sa visite de travail à l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) en janvier dernier. À ce propos, l’experte a dit craindre que, sans garanties adéquates, les partenariats noués par l’UNESCO avec le secteur privé ne comportent un risque d’influence indue sur l’agenda de l’éducation.

Après une déclaration de l’UNESCO, en tant que partie concernée, plusieurs délégations** ont engagé le dialogue avec Mme Shaheed.

 

Cet après-midi à 15 heures, le Conseil achèvera son dialogue avec Mme Shaheed avant de tenir un dialogue avec le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme dans le contexte des changements climatiques.

 

Dialogue avec le Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises

Le Conseil est saisi du rapport du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises (A/HRC/53/24), dont plusieurs additifs traitent de visites effectuées par le Groupe de travail au Libéria, au Luxembourg et en Argentine (respectivement A/HRC/53/24/Add.1, A/HRC/53/24/Add.2 et A/HRC/53/24/Add.3), ainsi que de la question des « institutions financières pour le développement et droits de l’homme » (A/HRC/53/24/Add.4).

Présentation du rapport

Présentant ce rapport, MME PICHAMON YEOPHANTONG, Présidente du Groupe de travail sur la question des droits de l'homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, a d’abord précisé que le rapport thématique [intitulé « Renforcement des capacités d’application des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme »] soulignait la nécessité urgente de renforcer les capacités de mise en œuvre des Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme. Au sein de la communauté des affaires, des difficultés persistent en effet pour, notamment, impliquer le personnel de tous les départements d'une entreprise, au-delà de l'équipe chargée des droits de l'homme.

Pour combler les lacunes, le rapport examine ce qui constitue un « renforcement efficace des capacités » et propose des recommandations sur la manière dont les États peuvent collaborer pour renforcer les capacités des principales parties prenantes aux niveaux mondial, régional et local. Les États doivent allouer des ressources adéquates pour relever ce défi de manière efficace, a souligné Mme Yeophantong.

La Présidente du Groupe de travail a ensuite rendu compte de trois visites de pays effectuées par ce dernier. 

S’agissant de sa visite au Libéria, effectuée du 31 octobre au 11 novembre 2022, le Groupe de travail a salué les initiatives du Gouvernement visant à promouvoir un comportement responsable des entreprises, en particulier dans les secteurs de l'exploitation minière et de l'agro-industrie. Il a noté l'existence d'une bonne législation protégeant les droits de l'homme et l'environnement dans le cadre des activités commerciales. Toutefois, des préoccupations subsistent quant à la mise en œuvre des réglementations, notamment en ce qui concerne les abus subis par les travailleurs et les communautés dans les grandes zones de concession et les difficultés qu'ils rencontrent pour demander des comptes aux entreprises.

Concernant sa visite menée au Luxembourg en décembre 2022, a poursuivi Mme Yeophantong, le Groupe de travail a été encouragé par les efforts en cours pour faire progresser la conduite responsable des entreprises et a pris note de bonnes pratiques en la matière, notamment en matière de financement du développement et d'égalité des sexes. Toutefois, a ajouté la Présidente du Groupe, il convient d’obtenir une participation réelle de la société civile à l'élaboration des politiques et de garantir l'accès à des recours par les victimes de violations des droits de l'homme commises dans d'autres États par des entreprises domiciliées au Luxembourg. Le Groupe de travail soutient fermement l'inclusion complète du secteur financier, y compris celle des fonds d'investissement, dans la proposition de directive de l'Union européenne et dans la législation luxembourgeoise sur le devoir de diligence en matière de droits de l'homme.

Concernant enfin sa visite en Argentine, effectuée en février 2023, le Groupe de travail a pris acte des engagements pris par le Gouvernement ainsi que de la législation solide dont dispose le pays en matière de droits de l'homme et de protection de l'environnement. Parmi les défis à relever pour le pays figurent la nécessité d'une plus grande cohérence politique dans les normes et les politiques publiques, et l'application effective des réglementations, a indiqué Mme Yeophantong.

Quant au rapport sur les institutions financière pour le développement, Mme Yeophantong a souligné que ces institutions ont à la fois l'obligation de protéger incombant à l'État et la responsabilité de respecter les droits de l'homme incombant à l'entreprise. Par conséquent, ces institutions doivent faire preuve de diligence pour identifier les effets négatifs sur les droits de l'homme de leurs activités et de leurs relations d'affaires, les prévenir et y remédier. Non seulement l'absence de prise en compte des risques liés aux droits de l'homme compromet la faisabilité des projets [de développement], mais elle porte également préjudice aux communautés que ces projets doivent aider, a souligné Mme Yeophantong. Dans ce contexte, la Présidente du Groupe de travail a souligné l’importance pour ces institutions de respecter les Principes directeurs sur les entreprises et les droits de l’homme.

Mme Yeophantong a aussi rendu compte des activités du septième Forum régional sur les entreprises et les droits de l'homme pour l'Amérique latine et les Caraïbes, qui s'est tenu en juillet 2022 à Bogotá, sur le thème de la conduite responsable des et dont le thème était « La responsabilité pour une conduite responsable des entreprises ». Les discussions ont porté sur les défis, les opportunités et les priorités en matière de responsabilisation des États, des entreprises et d'autres acteurs en cas d'impact négatif sur les droits de l'homme. Le huitième Forum se tiendra à Santiago du Chili en octobre prochain, sur le thème « Construire des ponts entre les entreprises, les droits de l'homme et le droit à un environnement sain », a indiqué la Présidente du Groupe de travail.

Enfin, Mme Yeophantong a rappelé que le Forum 2022 sur les entreprises et les droits de l'homme, intitulé « Les détenteurs de droits au centre : renforcer la responsabilité pour faire progresser le respect envers les personnes et la planète par les entreprises au cours de la prochaine décennie », s’était tenu en novembre 2022. Le rapport sur ce Forum sera présenté au Conseil le 6 juillet, a-t-elle indiqué

Pays concernés

L'Argentine a rappelé avoir été l'un des promoteurs de la résolution 17/4 par laquelle le Conseil des droits de l'homme avait approuvé les Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme. La visite du Groupe de travail a coïncidé avec le processus d'élaboration du Plan d'action national sur les entreprises et les droits de l'homme, a par ailleurs souligné la délégation argentine. Le rapport du Groupe de travail a servi de contribution précieuse au dialogue sur ce Plan qui sera présenté dès que possible, a-t-elle fait savoir.  La délégation s’est félicitée de la visite fructueuse du Groupe de travail, dont elle assuré que son pays appuyait l’action.

Le Luxembourg a indiqué qu’il attachait une grande importance à la question du devoir de diligence des entreprises et de leur responsabilité en matière de respect des droits humains, notamment à travers la mise en œuvre des Principes directeurs. Des progrès importants ont pu être réalisés à cet égard, avec, en particulier, l’adoption de deux plans d’actions nationaux pour la mise en œuvre des Principes directeurs ou encore le lancement en 2021 du Pacte national « Entreprises et droits de l’homme ».

La délégation luxembourgeoise a d’autre part relevé que le rapport du Groupe de travail mettait l’accent sur la directive européenne et sur les positions que le Luxembourg devrait prendre dans le cadre des négociations de ce texte : elle a souligné à cet égard que le Luxembourg s’était engagé de longue date pour que ce texte européen puisse voir le jour. Le Luxembourg insiste dans ces négociations pour que les droits des plus vulnérables – des femmes et des enfants, des peuples autochtones et des défenseurs des droits humains -  soient pleinement respectés.

Pour sa part, la Commission consultative des droits de l’homme du Grand-Duché de Luxembourg (institution nationale de droits de l’homme) a regretté que, s’agissant de la proposition de directive de l’Union européenne, la position du Gouvernement luxembourgeois ne soit pas transparente, qu’il ne se soit pas engagé davantage en faveur d’un alignement plus étroit [de ce projet de directive] sur les Principes directeurs et qu’il plaide pour une exclusion des fonds d’investissement.  De plus, en ce qui concerne la mise en œuvre du Pacte [ou Plan d’action] national « Entreprises et droits de l’homme », l’institution nationale de droits de l’homme constate que certains éléments essentiels n’y sont pas abordés de manière adéquate et que la majorité des actions [prévues par ce Pacte] n’ont pas été réalisées.

Aperçu du dialogue

Le rapport du Groupe de travail vient rappeler opportunément la nécessité de renforcer les capacités pour la mise en œuvre des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, ont relevé plusieurs délégations ce matin. Elles se sont dites intéressées par les recommandations très concrètes formulées par le Groupe de travail. La priorité, a-t-il été suggéré, devrait être d'assurer la cohérence des politiques, de renforcer la coordination entre les différents acteurs et de répondre aux besoins en capacités des détenteurs de droits vulnérables et marginalisés. Les États ont été encouragés à échanger leurs « bonnes pratiques » dans tous ces domaines.

Comme le suggère le Groupe de travail dans son rapport, un autre moyen d’améliorer les compétences en matière d’application des Principes directeurs pourrait être la création d'un service, ou pôle de connaissances, chargé des entreprises et des droits de l’homme au sein du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, a-t-il été indiqué, le Groupe de travail ayant été prié de préciser les ressources humaines et financières nécessaires pour gérer un tel service d'assistance destiné aux acteurs économiques locaux et aux détenteurs de droits. Il a été recommandé, d’autre part, de créer un fonds mondial dédié au renforcement des capacités sur les entreprises et les droits de l’homme.

Des délégations ont indiqué que leurs pays avaient adopté, ou envisageaient d’adopter, des plans d'action nationaux sur les entreprises et les droits de l'homme, soit de manière autonome, soit dans le cadre d'un plan d'action national plus large sur les droits de l'homme. Plusieurs délégations ont décrit des initiatives déjà lancées au niveau national pour favoriser l’application des Principes directeurs par les parties concernées, notamment au travers de l’organisation de séminaires de formation ou de l’élaboration de « boîtes à outils » pour les petites et moyennes entreprises, y compris des formulaires d’autoévaluation de l’impact de leurs activités sur les droits humains.

Il est certes important d'améliorer la cohérence des politiques dans le domaine des entreprises et des droits de l'homme par le renforcement des capacités ; mais cette démarche doit s'accompagner d'actions concrètes qui imposent des limites aux actions des entreprises qui violent les droits humains, a-t-il été souligné. De même, a-t-il affirmé, les pays développés devraient montrer la voie s’agissant du respect, par leurs entreprises transnationales – en particulier celles opérant dans les pays en voie de développement –, de leurs obligations en matière de droits de l’homme.

Dans ce contexte, d’aucuns ont estimé que l’adoption de normes internationales contraignantes – par le biais d’un traité qui assurerait la protection et la réparation effective des victimes de violations des droits de l’homme par les entreprises transnationales – serait potentiellement bénéfique tant pour les citoyens que pour les entreprises elles-mêmes.

Des préoccupations ont été exprimées s’agissant des répercussions de l’industrie du tabac sur les droits de l’homme, notamment face aux informations faisant état de personnes qui risquent d'être victimes de la traite à des fins de travail forcé, de travail des enfants, d'exploitation et d'exposition à des conditions dangereuses lorsqu'elles travaillent dans les champs de tabac.  Les États ont été appelés à ratifier la Convention-cadre de l’OMS sur la lutte antitabac. Il a été regretté, d’autre part, que les entreprises n’accordent pas toujours l’attention nécessaire aux répercussions de leurs activités sur les droits de l'enfant.

L’importance d’aider les entreprises à veiller au respect des droits de l’homme dans leurs chaînes d’approvisionnement a été soulignée.

Ont en outre été dénoncés les problèmes économiques engendrés par les mesures coercitives unilatérales ainsi que les activités d’entreprises qui soutiennent des guerres d’agression.

* Liste des intervenants : Union européenne, Panama (au nom d’un groupe de pays), Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), Portugal, Égypte, Japon, Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Arménie, Allemagne, Burkina Faso, Belgique, Indonésie, Mexique, États-Unis, Colombie, Malaisie, Royaume-Uni, Venezuela, Cameroun, Irlande, Afrique du Sud, Pakistan, Togo, Inde, Malawi, Chine, Suisse, Chili, Bénin, Cuba, Fédération de Russie, Brésil, Thaïlande, Tunisie, Azerbaïdjan, Équateur, Honduras, Ukraine, Iran et Cambodge.

L’institution nationale de droits de l’homme de l’Inde et les organisations non gouvernementales suivantes ont aussi participé au débat : China Foundation for Human Rights Development, INHR, Action Canada pour la population et le développement, Justiça Global, China NGO Network for International Exchanges, Sikh Human Rights Group, Peace Brigades International, Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII, Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement et Commission colombienne des juristes. 

Réponses et remarques de conclusion de la Présidente du Groupe de travail

MME YEOPHANTONG a remercié les délégations qui ont soutenu l’action du Groupe de travail. Elle a souligné qu’une expertise locale devait être développée pour aider les petites et moyennes entreprise à respecter les Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme. Le Groupe de travail a compilé, avec le Haut-Commissariat, une bibliographie relative à l’application des Principes directeurs, qui pourra être utilisée par les acteurs concernés moyennant la prise en compte des réalités locales, a-t-elle indiqué. De même, a-t-elle ajouté, le pôle international de connaissances préconisé par le Groupe de travail devra collaborer avec les acteurs locaux.  Le Groupe de travail apportera une assistance technique en matière de diffusion des connaissances relatives à l’application des Principes directeurs dans la gestion des chaînes d’approvisionnement, a fait savoir le Présidente du Groupe. Elle a insisté sur l’importance d’accompagner les petites et moyennes entreprises dans leurs démarches. Toutes les entreprise sont tenues de respecter les droits de l’homme, indépendamment de leur taille, a-t-elle insisté.

Mme Yeophantong a aussi indiqué que le Groupe de travail dialoguerait avec les parties prenantes concernées par l’intégration de l’intelligence artificielle aux activités des entreprises.

Dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur le droit à l’éducation

Le Conseil est saisi du rapport de la Rapporteuse spéciale sur le droit à l’éducation, intitulé « Garantir le droit à l'éducation : avancées et défis cruciaux » (A/HRC/53/27, à paraitre en français), ainsi que de son rapport de visite à l’Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (A/HRC/53/27/Add.1, à paraitre en français).

Présentation du rapport

Présentant son rapport, MME FARIDA SHAHEED, Rapporteuse spéciale sur le droit à l’éducation, a souligné que cette année marque le 25ème anniversaire de ce mandat, dont elle passe en revue, dans ce rapport, les impressionnantes réalisations.

Le droit à l’éducation est un droit à l’apprentissage tout au long de la vie et à une éducation gratuite de qualité, quels que soient les circonstances, le lieu ou les identités, a rappelé la Rapporteuse spéciale. Elle a fait observer qu’au fil des ans, l’on est passé d’un droit égal à l’éducation au droit à une éducation équitable et inclusive, ce qui signifie que les apprenants devraient recevoir le soutien dont ils ont besoin pour réussir et apprendre dans un environnement favorable et centré sur l’apprenant. Ce n’est pas une tâche simple pour les gouvernements, a reconnu la Rapporteuse spéciale.

Aujourd’hui, de nombreux défis hérités du passé persistent, a poursuivi Mme Shaheed. L’exclusion, l’assimilation, la ségrégation, la discrimination, la mauvaise qualité, les mauvais traitements et le manque de sécurité demeurent des problèmes frappants qui entravent l’exercice du droit à l’éducation pour beaucoup, a-t-elle précisé. Elle a indiqué qu’elle déplorait en particulier l’apartheid et la persécution de genre des femmes, ainsi que le déni de jure du droit fondamental à l’éducation des filles et des femmes en Afghanistan – qu’il faut considérer comme un crime contre l’humanité, a-t-elle affirmé.

Alors que l’on assiste à une augmentation des attaques contre l’espace civique dans de nombreuses régions du monde, Mme Shaheed s’est dite particulièrement préoccupée par les restrictions et tous les autres types de violations visant l’éducation, les universitaires et les scientifiques.

La Rapporteuse spéciale s’est également dite préoccupée par le fait que la notion de mise en œuvre progressive [du droit à l’éducation] dans toute la mesure des ressources disponibles ait mené à une non-application de facto du droit à l’éducation et ait été utilisée comme une excuse facile pour ne pas agir.

L’impact sur les systèmes éducatifs de la polarisation sociétale accrue autour de la diversité culturelle, de l’enseignement de l’histoire, de la décolonisation des programmes, des théories critiques sur la race et le genre et de l’éducation sexuelle complète est également très préoccupant, tout comme l’est la commercialisation et la numérisation rapides de l’éducation, a d’autre part déclaré Mme Shaheed. Ces questions, y compris l’intelligence artificielle dans l’éducation, nécessitent plus d’examen et de réponse que jamais auparavant, sur la base du droit international des droits de l’homme, a souligné la Rapporteuse spéciale.  Elle a exhorté la communauté internationale à ne pas oublier le droit à l’éducation – un droit humain autonomisant qui est crucial pour le développement des individus, des communautés et des sociétés.

S’agissant de sa visite à l’UNESCO, effectuée en janvier 2023, Mme Shaheed, a indiqué que l’objectif était de recueillir des informations et de discuter des questions liées à la réalisation du droit humain à l’éducation, y compris les progrès réalisés et les défis futurs.  La Rapporteuse spéciale a dit apprécier grandement l’alignement de la réflexion entre son mandat et l’UNESCO concernant le droit à l’éducation en tant que droit à l’apprentissage tout au long de la vie.

La Rapporteuse spéciale a indiqué avoir eu, au cours de sa visite, de nombreuses discussions sur les mécanismes de suivi de l’UNESCO - lesquels, a-t-elle affirmé, restent « trop faibles ».  Mme Shaheed a également indiqué avoir eu de nombreuses discussions concernant l’engagement de l’UNESCO avec les entités du secteur commercial, car – a-t-elle observé – le sous-financement ouvre la porte à davantage de partenariats avec des acteurs privés.  La Rapporteuse spéciale a indiqué craindre que, sans garanties adéquates, les partenariats avec le secteur privé ne comportent un risque d’influence indue sur l’agenda de l’éducation, aux niveaux tant international que national ; un risque qui n’est parfois pas immédiatement évident, a-t-elle souligné.

Partie concernée

L’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) a déclaré que bien que des progrès considérables aient été réalisés au fil des ans, les groupes défavorisés et vulnérables continuent d’être les plus touchés par les obstacles persistants à l’éducation. En outre, de nouveaux défis sont apparus. Les changements climatiques ont amplifié les déplacements humains, menaçant le droit à l’éducation. La numérisation a créé des opportunités, mais elle a également exacerbé les inégalités et brouillé les frontières de la vie privée et de la protection des données. Et il reste encore beaucoup à faire pour renforcer l’accès aux possibilités d’apprentissage tout au long de la vie, a souligné le représentant de l’UNESCO.

L’UNESCO s’est lancée dans l’initiative sur l’évolution du droit à l’éducation, en étudiant comment les droits et obligations peuvent être encore renforcés pour favoriser la mise en œuvre du droit à l’éducation et garantir ce droit pour tous tout au long de la vie. Comme l’a souligné la Rapporteuse spéciale, l’éducation ne doit pas être réduite à la scolarisation, a souligné le représentant de l’UNESCO. Le droit à l’éducation s’étend à tous les âges et à tous les temps et espaces.

Enfin, l’UNESCO exprime sa chaleureuse gratitude à la Rapporteuse spéciale pour sa visite en janvier dernier, pour sa contribution perspicace et pour son rapport de visite. Les conclusions et recommandations contenues dans ce rapport sont extrêmement utiles et aideront à explorer les synergies pour renforcer encore la collaboration entre l’Organisation et le mandat de la Rapporteuse spéciale, a assuré le représentant de l’UNESCO.

Aperçu du dialogue

Plusieurs délégations ont rappelé que la Déclaration universelle des droits de l’homme, dont le monde commémore cette année le 75ème anniversaire cette année, indique [dans son article 26] que toute personne a droit à l’éducation. L’éducation est un droit humain et joue un rôle crucial dans la lutte contre les inégalités et la consolidation du développement durable, ont fait remarquer plusieurs intervenants.

A l’instar de la Rapporteuse spéciale, plusieurs délégations ont relevé l’importance de considérer l’éducation comme un bien public, ce qui – a-t-il été souligné – doit contribuer à renforcer l’interdépendance entre l’éducation, la science et la culture.

Malheureusement, dans le monde, 244 millions d’enfants et de jeunes ne reçoivent pas d’éducation pour des raisons sociales, économiques et culturelles, a-t-il été déploré. Quatre enfants et jeunes sur 10 ne terminent pas leurs études secondaires, et près de la moitié des enfants du monde ne sont pas scolarisés dans l’enseignement pré-primaire, a rappelé une délégation, avant d’ajouter que la grande majorité des pays n’ont pas atteint la parité entre les sexes dans l’enseignement secondaire.  Cela a comme conséquence que 773 millions d’adultes, principalement des femmes, sont analphabètes, a regretté une autre délégation.

Le coût de l’éducation reste un obstacle important, touchant de manière disproportionnée les enfants et les adolescents issus de familles à faible revenu, les filles, les enfants handicapés et les personnes d’âge scolaire en situation de vulnérabilité, a-t-il été relevé.

Les conflits, les changements climatiques, les catastrophes naturelles et la pandémie de COVID-19 ont exacerbé la crise mondiale de l’éducation, a-t-il été souligné. Plusieurs intervenants ont également condamné les attaques contre les établissements d’enseignement dans le cadre des conflits.

Plusieurs appels ont été lancés afin que les États garantissent l’accès à une éducation gratuite, de qualité et inclusive pour tous les enfants – de l’école maternelle à l’école secondaire – et assurent son financement adéquat.

Pour la réalisation du droit à l’éducation, les États doivent combler le fossé technologique en garantissant l’égalité d’accès aux outils éducatifs numériques, a-t-il été souligné ; ils doivent parallèlement tenir compte des potentiels effets négatifs involontaires des outils numériques que constituent la désinformation, le harcèlement ou encore les discours de haine.

Certains intervenants ont appelé les États à renouveler leur engagement auprès du Partenariat mondial pour l’éducation et à soutenir les efforts de l'UNESCO pour créer un nouveau « contrat social pour l'éducation » dans le monde.

Une délégation a par ailleurs relevé que l’éducation aux droits de l’homme fait partie intégrante du droit à l’éducation, comme cela est souligné dans la Déclaration des Nations Unies sur l’éducation et la formation aux droits de l’homme.

Plusieurs délégations ont en outre présenté des projets régionaux de coopération entre les pays dans l’enseignement supérieur et la recherche scientifique, dont l’objectif est de réaliser des progrès dans ce domaine.

Enfin, un groupe de pays a encouragé les États à reconnaître et promouvoir l'enseignement et la formation techniques et professionnels (EFTP) en tant qu'aspect important du droit à l'éducation et catalyseur du développement humain, de l'inclusion sociale, de l'emploi et du développement durable.

**Liste des intervenants : Luxembourg (au nom d’un groupe de pays), Union européenne, Oman (au nom du Conseil de coopération du Golfe), Liban (au nom du groupe des États arabes), Côte d’Ivoire (au nom du groupe des États africains), Bénin (au nom d’un groupe de pays), Pakistan (au nom de l’Organisation de la coopération islamique), Timor-Leste (au nom d’un groupe de pays), Qatar (au nom d’un groupe de pays), Kazakhstan (au nom d’un groupe de pays), El Salvador (au nom d’un groupe de pays), Lituanie, Émirats arabes unis, Portugal, République de Corée, Israël, Sierra Leone, ONU Femmes, Égypte, Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Tchéquie, Arménie, Italie, Burkina Faso, Viet Nam, Slovénie, Équateur, Paraguay, Espagne, Costa Rica, France, États-Unis, et Maurice.

 

 

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