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Panama : le Comité des droits de l'homme s'inquiète de la situation des communautés autochtones et des migrants, du règlement des cas de disparitions forcées du passé

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'homme a examiné, au cours de séances qui se sont tenues jeudi, vendredi et cet après-midi, le rapport périodique du Panama sur la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Le Ministre du Gouvernement du Panama, M. Roger Tejada Bryden, a notamment attiré l'attention sur une large consultation des acteurs de la société panaméenne qui a permis un accord sur des politiques, des lois et des règlements afin de répondre aux priorités du pays : atteindre les objectifs de développement durable, lutter contre la pauvreté et les inégalités. Il a aussi souligné que le Panama est depuis longtemps un pays de transit et de destination des migrations et fait valoir qu'il rejette tout acte ou doctrine fondée sur la supériorité ou les différences ethniques, politiques, culturelles. Le ministre a aussi attiré l'attention sur le Plan pour le développement intégral des peuples autochtones leur permettant de participer effectivement aux processus de croissance et de développement du pays, grâce à des accords durables adoptés à l'issue de consultations libres, préalables et éclairées.

Outre M. Tejada, la délégation panaméenne était également composée de la Ministre du développement social et de représentants des Ministères de la justice et des affaires étrangères. Elle a répondu aux questions des membres du Comité s'agissant notamment des affaires de disparitions forcées durant la dictature militaire, le rôle et les moyens dont dispose le Médiateur, les mesures de lutte contre la discrimination, la situation des femmes autochtones, la question du travail domestique, les conditions de détention, la lutte contre la traite, la protection de la liberté d'expression et d'association, la situation des personnes d'ascendance africaine, le traitement des migrants et demandeurs d'asile, le respect des droits des populations autochtones, le travail forcé des enfants.

Les membres du Comité se sont notamment souligné la nécessité de remédier aux violations des droits de l'homme commises pendant la dictature militaire (1968-1990), en particulier les cas de disparitions forcées. Des cas d'usage excessif de la force par la police ont été relevés et il a été observé que la police ne semble plus fonctionner comme un service public mais plutôt comme une agence privée. Les experts se sont aussi préoccupés de la question de la protection des communautés autochtones dans le cadre de la construction de grandes infrastructures. Ils se sont inquiétés de cas de harcèlement et de violence à l'encontre de défenseurs des droits de l'homme et des communautés autochtones. Il a par ailleurs été reproché à l'État partie une vision sécuritaire des migrations.

Le Panama est le dernier rapport de pays examiné au cours de la présente session. Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées qui se tiendront d'ici la fin de la session, le 24 mars prochain, des observations finales sur chacun des six rapports examinés depuis le 27 février dernier.

 

La prochaine séance publique du Comité des droits de l'homme se tiendra le jeudi 16 mars à 15 heures. Il sera saisi de rapports d'étape présentés par ses rapporteurs spéciaux chargés, respectivement, du suivi des observations finales du Comité portant sur l'examen des rapports des États parties, et des constatations adoptées au titre du Protocole facultatif sur les plaintes.

 

Examen du rapport du Panama

Le Comité des droits de l'homme était saisi du rapport périodique du Panama (CCPR/C/PAN/4), ainsi que des réponses de l'État partie à une liste de points à traiter qui lui avait été adressée par le Comité.

Présentation du rapport

M. ROGER TEJADA BRYDEN, Ministre du Gouvernement du Panama, a déclaré que la Constitution du Panama établit comme objectif suprême de garantir la liberté, la démocratie et la stabilité institutionnelle, ainsi que l'exaltation de la dignité humaine. Le Panama considère par ailleurs l'autodétermination comme un droit fondamental.

Le chef de la délégation a indiqué qu'en 2021, tous les acteurs de la société panaméenne ont été conviés à un espace de consultation appelé « Pacte du bicentenaire : Combler les lacunes », qui a permis de se mettre d'accord sur des politiques, des lois et des règlements afin de répondre aux priorités du pays. Le résultat de ce processus a été la présentation de 175 000 propositions citoyennes, qui se sont traduites en 187 accords reflétant les aspirations des Panaméens à atteindre les objectifs de développement durable, à lutter contre la pauvreté et les inégalités en tant que questions prioritaires de l'agenda national.

Le Panama est depuis longtemps un pays de transit et de destination des migrations; un point de rencontre et un centre de connectivité où de multiples cultures coexistent. C'est pourquoi le Panama rejette tout acte ou doctrine fondée sur la supériorité ou les différences ethniques, politiques, culturelles ou tout acte qui affecte l'exercice des droits et garanties fondamentaux, a déclaré M. Tejada.

Le Plan pour le développement intégral des peuples autochtones, avec ses douze structures traditionnelles, a été mis en œuvre pour la population autochtone en tant que mécanisme permettant de participer effectivement aux processus de croissance et de développement du pays, grâce à des accords durables adoptés à l'issue de consultations libres, préalables et éclairées, a-t-il indiqué.

La santé est une question prioritaire pour le Panama, a par ailleurs souligné le ministre. C'est pour cette raison que l'ONU a accordé au pays une reconnaissance comme l'un des pays dotés des systèmes de vaccination de masse les meilleurs et les plus efficaces, dans la catégorie de la résilience institutionnelle et des réponses innovantes à la pandémie de COVID-19. Le Panama a adopté en 2022 un plan garantissant une protection sociale organisée et ciblée territorialement pour renforcer les plus petites unités administratives, caractérisées par l'existence d'une pauvreté multidimensionnelle, a indiqué le chef de la délégation.

Le Panama a signé les instruments internationaux sur les migrants et les réfugiés en 2018, volontairement et de bonne foi, reconnaissant les avantages de la migration et les questions d'asile afin d'offrir une protection internationale visant à trouver des solutions durables. Pendant la crise de la COVID-19, le Panama a construit pour les réfugiés et les migrants des abris temporaires, pour contrer les effets de la pandémie et leur fournir des conditions minimales de sécurité, a souligné M. Tejada, qui a indiqué que les mesures exceptionnelles appliquées pour maintenir certains migrants dans des centres temporaires d'assistance humanitaire ont été jugées nécessaires, raisonnables et proportionnées.

S'agissant de la lutte contre la traite des personnes, le Ministère de la sécurité publique a renforcé ses capacités, et le ministère public a créé un bureau du procureur spécial chargé de poursuivre et de punir les membres des organisations criminelles transnationales organisée et de lutter contre ce fléau.

Le ministre a par ailleurs souligné que, lors de la huitième Conférence annuelle sur l'Océan, qui s'est tenue les 2 et 3 mars derniers au Panama, le pays a renouvelé l'engagement en faveur de la préservation de la faune marine de la planète et élargi ses aires protégées sur une superficie de 93 390,71 km2, atteignant 54,33% de l'aire marine protégée.

Le Panama dispose également d'un programme de transition énergétique à l'horizon 2030 qui promeut un changement fondamental dans la façon de produire et de consommer l'énergie, l'augmentation de l'utilisation des énergies renouvelables, principalement éoliennes et solaires, ainsi que des stratégies en faveur de la mobilité électrique.

Questions et observations des membres du Comité

Un membre du Comité a souligné que le rapport du Panama n'apportait pas de réponses dans les domaines suivants : la création d'un mécanisme ou d'une procédure spécifique pour la mise en œuvre des recommandations du Comité ; les affaires dans lesquelles les tribunaux nationaux se sont référés aux dispositions du Pacte ; les informations sur le contenu de la formation des fonctionnaires de justice, ainsi que des informations sur les activités entreprises pour sensibiliser la population aux droits reconnus dans le Pacte et leur applicabilité directe dans le droit interne ; les informations sur les droits affectés par les mesures prises pour lutter contre la COVID-19 ; l'adoption éventuelle de mesures dérogeant à l'un quelconque des droits protégés par le Pacte.

L'expert a en outre demandé des informations sur le processus de sélection et de nomination du Médiateur (Défenseur du peuple), ainsi que sur le processus de révocation de cette autorité. Il a par ailleurs relevé que l'accréditation du Bureau du Médiateur avait été rétrogradée à de catégorie B par l'Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l'homme.

Un autre membre du Comité a relevé que le rapport du Panama ne contenait pas d'informations sur les mesures prises pour remédier aux violations des droits de l'homme commises pendant la dictature militaire (1968-1990), seuls certains cas particuliers étant cités. Il a dès lors demandé à la délégation de fournir des informations sur les mesures prises pour faire en sorte que tous les cas de violations graves des droits de l'homme, y compris ceux documentés par la Commission de la vérité, fassent l'objet d'enquêtes en bonne et due forme, que les responsables soient poursuivis et, le cas échéant, punis, et que les victimes ou leurs familles reçoivent une indemnisation équitable et adéquate. Il a également demandé à la délégation de fournir des informations sur la législation applicable à la prescription en cas de violations graves des droits de l'homme.

Une experte a demandé des informations sur certains cas de disparitions forcées mentionnés auparavant par le Comité mais pour lesquels le Panama n'a pas donné suffisamment d'informations, notamment celui de Heliodoro Portugal, dont la disparition et l'exécution remonterait au 14 mai 1970 et pour lequel, plus de 20 ans après, sa famille n'a toujours aucune certitude puisque les rapports d'examens médico-légaux sont contradictoires. Le second cas est celui de la disparition forcée de Rita Ward, pour lequel le Panama ne fournit pas d'information sur son sort, et n'a pas donné les raisons pour lesquelles la Commission vérité et réconciliation a mis fin à la procédure.

L'experte a demandé des informations à la délégation concernant une décision récente de la Cour suprême dans laquelle elle aurait conclu que l'interdiction du mariage entre personnes de même sexe ne serait pas inconstitutionnelle.

L'experte a également indiqué qu'il ne semblait pas y avoir d'amélioration dans le domaine du travail domestique, bien que le Panama ait ratifié la Convention n°189 de l'Organisation internationale du travail sur les travailleuses et travailleurs domestiques. Elle a ajouté que les femmes autochtones et les Afro-Panaméennes restent très majoritairement surreprésentées dans l'économie informelle.

Le Panama compte une Commission nationale contre la discrimination, liée au défenseur du peuple, mais l'experte a relevé, d'après les informations reçues, que cette commission ne fonctionnait pas faute de moyens financiers et humains, et de volonté politique. Elle ne peut pas recevoir de plaintes de la part des personnes qui font l'objet de discrimination raciale. Or, les problèmes sont bien réels : outre la discrimination au travail, le profilage ethnique serait utilisé par la police pour identifier de potentiels délinquants, sur la base de stéréotypes et de la couleur de peau des personnes.

Si les femmes sont majoritaires dans le corps électoral, elles restent minoritaires parmi les élus, a constaté l'experte. Ainsi, le Parlement ne compte que 22% de femmes députées, et il semblerait que le nombre de femmes au sein de l'exécutif ait diminué en 2021, 23% de femmes seulement ayant aujourd'hui une charge ministérielle.

Une experte a déclaré que, bien que l'État ait indiqué que la pratique est interdite par la loi, le Comité a reçu des informations selon lesquelles des tests de grossesse sont toujours réclamés comme condition d'accès à l'emploi, tant dans le secteur public que privé. Par ailleurs, le Comité a reçu des informations selon lesquelles des femmes enceintes ont vu leurs contrats suspendus en 2020, les laissant sans protection du Fonds de sécurité sociale pour obtenir des soins de santé et un congé de maternité.

De même, le Comité est préoccupé par les informations reçues concernant la sous-représentation des femmes aux postes de décision dans les entreprises privées et publiques, 71 % des entreprises n'ayant pas recruté de femmes à des postes de direction.

Relevant les nombreuses avancées législatives dans le domaine de la lutte contre les violences faites aux femmes, un membre du Comité a demandé des précisions sur la mise en œuvre de cette législation et sur la protection des victimes.

Selon des informations reçues, il y aurait eu plus de 300 cas de violence sexuelle contre des femmes, des filles, et des personnes appartenant à la communauté LGBT dans la région de Darién en 2021, tandis qu'entre janvier et juin 2022, plus de 140 cas de violence sexuelle ont été enregistrés, s'est inquiété le même expert. Les enquêtes sont difficiles, a-t-il souligné, car la victime qui porte plainte est obligée de rester dans cette région retirée pour effectuer des démarches alors qu'elle préfère la quitter le plus rapidement possible. L'expert a également souligné que le Comité avait reçu des informations selon lesquelles les crimes de violence à l'égard des femmes sont parmi les plus répandus au Panama, avec des chiffres en augmentation. Ainsi, 15 123 plaintes pour violences conjugales ont été déposées en 2020, contre 17 068 en 2021 et 17 659 en 2022. En 2021, 5959 cas de violence sexuelle ont été signalés et les données indiquent que 65% des victimes de violence sexuelle avaient entre 10 et 17 ans.

Une autre experte a estimé que le Panama était loin d'assurer la protection de la liberté des femmes, comme le montre notamment la pratique des stérilisations forcées des femmes autochtones provenant de la province de Bocas del Toro.

Par ailleurs, l'accès à une interruption volontaire de grossesse sûre et légale continue à être lourdement entravé par la criminalisation de l'avortement et, même lorsqu'il remplit les conditions légales, par les obstacles pratiques empêchant les femmes et les jeunes filles d'y avoir recours.

Un autre membre du Comité a relevé que le Panama n'avait pas adopté à ce jour une législation spécifique pour interdire la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle, l'identité de genre ou les caractéristiques sexuelles. En outre, la police nationale dispose toujours d'un règlement interne qui inclut les relations homosexuelles comme une infraction grave, contribuant sans aucun doute à une normalisation de l'homophobie, de la lesbophobie et de la transphobie parmi ses membres. L'expert a souligné qu'une enquête avait mis en lumière une situation connue mais difficile à vérifier, s'agissant des « thérapies de conversion », effectuées clandestinement au sein de certaines institutions religieuses échappant au contrôle de l'État.

Une experte a relevé que, selon d'autres informations reçues, bien que la législation panaméenne établisse que le pouvoir judiciaire doit être indépendant, le système judiciaire est inefficace, vulnérable à la corruption et à l'influence tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pouvoir judiciaire, et fait face à des allégations de manipulation par l'exécutif. Selon d'autres informations, des juges « intérimaires » sont nommés par des magistrats qui, à leur tour, sont nommés par l'exécutif, qui sont souvent sujets à des conflits d'intérêts et manquent d'expérience, a-t-elle relevé.

S'agissant des conditions de détention, l'experte a indiqué que selon les informations en possession du Comité, de nombreux défis demeurent comme la surpopulation carcérale et la non-protection des besoins élémentaires des personnes privées de liberté.

Un autre expert a demandé à la délégation de rendre compte des progrès accomplis en vue d'incorporer dans la législation pénale une définition de la torture qui soit pleinement conforme à la Convention contre la torture.

Plusieurs affaires présumées d'usage excessif de la force par la police tendraient à montrer une tendance inquiétante à la hausse de ce type de faits ces dernières années, a relevé une experte. Elle a par ailleurs regretté qu'il semblait que la police ne fonctionne plus comme un service public mais plutôt comme une agence privée. Cela donne l'impression que les policiers ne sont plus formés, qu'ils ne font plus leur travail essentiel de protection adéquate de la sécurité publique et qu'ils se retrouvent à mener des activités du même type qu'une agence de sécurité, a regretté l'experte

Un membre du Comité a posé des questions sur la lutte contre la traite des personnes au Panama et la protection des victimes.

Un expert a interrogé la délégation sur les difficultés d'accès à la justice auxquelles font face les personnes handicapées. Il s'est aussi inquiété du profilage racial dans les statistiques des peines prononcées par la justice pénale, qui serait plus sévère à l'endroit des personnes d'ascendance africaine ou issues des communautés autochtones.

Il a été demandé à la délégation des informations sur le fonctionnement et les résultats obtenus par le parquet spécialisé dans la protection des communautés autochtones. En outre, plusieurs experts ont demandé des informations quant à la distribution de terres collectives aux peuples autochtones, et quant à la construction de grandes infrastructures sur leurs terres, notamment le projet hydroélectrique de Barro Blanco. En outre, des allégations de violences de la part des forces de l'ordre contre les manifestants issus de communautés autochtones ont été rapportées au Comité.

Un autre expert a souhaité obtenir des renseignements concernant le nombre de plaintes reçues dans les cas de harcèlement et de violence à l'encontre de défenseurs des droits de l'homme et des communautés autochtones, et l'issue de ces plaintes. Il s'est également enquis des garanties offertes aux défenseurs des droits de l'homme et aux journalistes, alors que certains d'entre eux ont fait l'objet de poursuites liées à leurs enquêtes, notamment sur la base de plaintes pour diffamation.

Enfin, l'expert a souhaité obtenir des commentaires de la part de la délégation sur l'encadrement strict de la liberté d'association des organisations non gouvernementales et des syndicats.

Un autre membre du Comité a souhaité obtenir des données ventilées sur le nombre de demandeurs d'asile ces dernières années, et sur l'issue de leur demande, notamment concernant les femmes. Il a reproché à l'État partie sa vision sécuritaire des migrations. Il s'est déclaré préoccupé par la situation dans les camps de migrants qui sont surpeuplés et de l'hygiène déplorable qui y règne.

Une experte a regretté que l'État panaméen n'ait pris aucune mesure pour interdire les châtiments corporels à l'égard des enfants. Notant que le Panama avait adopté plusieurs mesures contre le travail forcé des enfants, l'experte a souhaité que la délégation développe son propos, chiffres à l'appui, notamment concernant les réparations auxquelles ils ont le droit.

Réponses de la délégation

Apportant des informations complémentaires sur le cadre institutionnel et juridique de l'application du Pacte, la délégation du Panama a présenté différentes affaires dans lesquelles les dispositions du Pacte ont été invoquées, notamment dans des cas où étaient dénoncées des décisions au sujet desquelles les peuples autochtones n'avaient pas été consultés. La délégation a également présenté plusieurs formations dispensées à l'intention du personnel de justice sur les droits figurant dans le Pacte.

S'agissant des violations des droits de l'homme commises durant la dictature militaire, la délégation a indiqué que quatre affaires concernant des victimes du régime militaire étaient encore pendantes sur les 77 engagées. D'autres affaires ont été réouvertes en raison des progrès réalisés dans les techniques d'analyse de l'ADN. Une victime a pu ainsi être identifiée grâce à ces nouvelles techniques.

Parmi les affaires de disparitions forcées mentionnées par les membres du Comité, la délégation, s'agissant de l'affaire relative à Heliodoro Portugal, a indiqué qu'en 2008, un arrêt a été rendu dans cette affaire. Les restes osseux ont été identifiés et, le 20 juillet 2022, il a été décidé que les restes seraient remis à la famille. Le ministère public a mené une enquête, ce qui a permis d'aboutir à ce que les personnes poursuivies à l'époque ont été déclarées innocentes, a expliqué la délégation. S'agissant du cas de Rita Ward, la délégation a indiqué que la tentative de procédure pour un règlement à l'amiable a été interrompue et l'affaire devrait se poursuivre sur le fond.

Un membre du Comité ayant posé des questions sur le processus de révocation du Médiateur, la délégation a indiqué que la loi prévoit que le Médiateur peut être destitué avec une majorité des deux tiers au Parlement. Après la publication d'un rapport, il a été décidé que la personne sur ce poste n'avait plus l'autorité morale pour exercer cette fonction. Complétant sa réponse par la suite, la délégation a indiqué que contrairement à ce qu'avaient suggéré des membres du Comité, les ressources du Médiateur (Défenseur du peuple) avaient augmenté aussi bien en termes de ressources humaines que financières.

En réponse à des questions portant sur la lutte contre la discrimination, la délégation a notamment fait valoir que les autorités recueillent des données ventilées pour identifier les actes de violence fondée sur l'orientation sexuelle ou l'identité sexuelle. S'agissant de la situation des Panaméens d'ascendance africaine, la délégation a indiqué que l'État avait adopté une loi en 2018 visant à lutter contre tout comportement discriminatoire dans le secteur public. Selon ses dispositions, toute personne qui aurait agi de manière discriminatoire se verrait appliquer des sanctions lorsque les faits sont passibles d'une peine.

Répondant à une question sur la situation des personnes LGBTIQ+, la délégation a indiqué que des enquêtes allaient être menées s'agissant de la pratique des « thérapies de conversion » en vue d'établir les responsabilités.

La délégation a indiqué que le pays avait réalisé des progrès dans le domaine de la lutte contre la violence politique à l'encontre des femmes grâce à une loi adoptée en 2020. Le Panama a aussi porté en infraction pénale toute menace ou toute violence à l'encontre des personnalités politiques. La délégation a par ailleurs relevé que le secrétariat d'État aux femmes venait d'être élevé au rang de ministère. Elle a ajouté que le principe de parité était respecté au sein de l'administration de l'État.

La délégation a indiqué que des mesures avaient été adoptées pour mettre en œuvre un mécanisme qui est chargé, depuis 2021, de favoriser la participation des femmes dans tous les domaines du développement du pays.

La délégation a indiqué qu'en vue de l'autonomisation des femmes autochtones, 300 initiatives sont prévues dans le cadre de la mise en œuvre d'un plan élaboré en consultation avec les femmes autochtones.

En réponse à des questions sur le travail domestique, la délégation a indiqué qu'en juin et juillet 2020, un premier sondage sur les activités domestiques a été mené. Les chiffres montrent que 79% des personnes travaillant dans ce secteur n'ont pas de contrat formel. Suite à ce sondage, une campagne de sensibilisation a été menée auprès des travailleuses domestiques, notamment pour leur faire connaître leurs droits et en particulier la possibilité pour elles de rejoindre un syndicat.

Pour prévenir l'usage excessif de la force par les forces de l'ordre, la direction de la sécurité dispense des formations dans le domaine des droits de l'homme à l'intention des agents de police et des gardes-frontières, notamment. Depuis 2022, 373 plaintes ont été reçues, dont 172 sont en cours d'enquête. Quatre de ces cas ont abouti à une convocation devant le conseil disciplinaire. La délégation a par la suite souligné que le recours aux armes à feux exige de respecter les différentes législations en la matière. L'ensemble des agents de la police sont formés à l'usage de la force. Il n'y a pas eu de condamnation pour recours excessif à la force jusqu'à maintenant, a déclaré la délégation.

S'agissant de la situation à Barro Blanco et des violences qui ont émaillé les manifestations de communautés autochtones, la délégation a fait savoir qu'un groupe de manifestants avait attaqué la police avec des objets contondants. Celle-ci a donc dû répliquer de manière proportionnelle, notamment en tirant des balles en caoutchouc.

Répondant aux questions de membres du Comité s'agissant des conditions de détention au Panama, la délégation a fait valoir que des projets en cours visent à réduire la surpopulation carcérale et une rénovation des bâtiments a été engagée. Il a été décidé cette année de construire deux nouvelles prisons. Un projet de construction d'un établissement pénitentiaire destiné aux femmes a également été lancé. La délégation a précisé que quatre des 17 centres pénitentiaires du pays respectent entièrement la séparation entre personnes inculpées et condamnées.

En ce qui concerne la lutte contre la traite des personnes , la délégation a indiqué que le pays appliquait un plan national qui a permis d'assurer une meilleure articulation entre les institutions pour prévenir et sensibiliser les fonctionnaires s'agissant de leur responsabilité d'enquêter, de poursuivre et de sanctionner le délit de traite des personnes. De plus, une sensibilisation est menée auprès de la population générale, afin, notamment, qu'elle puisse témoigner anonymement d'éventuels cas de traite.

Le Panama avait pris diverses mesures pour lutter contre les grossesses précoces chez les jeunes filles. Selon la délégation, ces mesures ont porté leurs fruits, puisque le taux de grossesses précoces a baissé sensiblement dans le pays ces dernières années. En mai 2022 a été adoptée la loi sur l'éducation à la sexualité, a par ailleurs indiqué la délégation.

La délégation a indiqué que les autorités étudiaient la possibilité de mettre en place un système de bracelet électronique dans le cadre de la prévention des violences sexuelles. La délégation a indiqué qu'une loi de 2013 prévoit la mise en place d'un système accusatoire plutôt qu'inquisitoire dans les affaires de violences basées sur le genre. Depuis l'application de cette loi, on constate une augmentation des condamnations dans ce domaine. La délégation a précisé que 68 000 mesures de protections avaient été prononcés par le parquet spécialisé en matière de violence domestique.

Interrogée sur les mesures prises par le Panama dans la lutte contre la torture, la délégation a indiqué que le code pénal érigeait la torture en délit. Le tribunal peut aussi évoquer la définition de la torture de la Convention contre la torture, à laquelle le Panama est partie.

La délégation a assuré que des efforts étaient déployés pour favoriser l' accès des personnes handicapées à la justice, comme en atteste l'importante participation d'interprètes en langue des signes dans le système judiciaire panaméen.

S'agissant des questions relatives à la liberté d'expression et aux dispositions légales en matière de diffamation, la délégation a indiqué que la critique, notamment sur les réseaux sociaux, des fonctionnaires et élus pouvait si nécessaire faire l'objet d'une constitution de partie civile au tribunal. Elle a toutefois fait savoir que nombre de ces constitutions de parties civiles aboutissaient à des non-lieux, notamment lorsqu'elles visent des journalistes.

Pour ce qui est de la liberté d'association, la délégation a assuré que la loi panaméenne ouvrait largement le champ de l'association à tous les secteurs de la société civile, quels que soient leurs buts : religieux, défense des droits de l'homme, sportifs, par exemple. Plusieurs centaines d'associations sont aujourd'hui enregistrées librement. La délégation a également informé le Comité que plus de 900 syndicats étaient enregistrés à l'heure actuelle au Panama. Aucune représentation syndicale n'a été fermée en 2018-2019, a-t-elle ajouté. La délégation a aussi assuré que nombre d'organisations non gouvernementales bénéficiaient de subventions de la part des autorités.

Concernant la situation des personnes d'ascendance africaine, la délégation a fait savoir qu'une journée nationale avait été créée pour mettre en lumière l'apport positif de la communauté afro-panaméenne. Lors du dernier recensement, il était possible d'indiquer l'origine ethnique à laquelle on souhaitait appartenir et près d'un tiers de la population s'est auto-identifié comme étant d'ascendance africaine.

Les principaux pays de départ des migrants au Panama sont le Nicaragua, le Venezuela, la Colombie, Cuba, El Salvador, le Honduras et le Guatemala. Le Panama s'efforce de donner une réponse aux demandes d'asile en moins de six mois. Pour ce faire, de nombreux fonctionnaires ont été formés, en lien avec les organisations internationales. La délégation a de plus fermement réfuté les commentaires des experts du Comité faisant état d'une approche sécuritaire voire d'une militarisation dans la gestion des migrants, en atteste l'accord passé entre l'Organisation internationale des migrations et le Service national des frontières. Le Panama porte secours aux déplacés qui en ont besoin et ils disposent de toutes les garanties offertes par la Constitution. La délégation a attiré l'attention sur le fait que le nombre de migrants qui s'étaient présentés aux frontières du Panama ces dernières années excédait la population totale du pays. En revanche, le Panama lutte activement contre les criminels et les passeurs, qui constituent un danger tant pour la population que pour les migrants eux-mêmes, notamment sur la route migratoire très dangereuse qui passe par la forêt tropicale du Darién.

S'agissant de la situation des populations autochtones, la délégation a notamment fait valoir que des efforts ont été faits s'agissant du statut des terres collectives, précisant que cinq titres fonciers collectifs avaient été accordés aux communautés autochtones vivant en dehors des terres ancestrales, et 29 sont encore en cours d'examen.

Des mesures ont été mises en place pour s'assurer que, dans les régions avec une forte présence de communautés autochtones, les tribunaux municipaux rendent la justice dans les langues autochtones. Le parquet supérieur des affaires autochtones dispose de 12 procureurs permanents pour poursuivre les crimes et délits commis à l'encontre des personnes issues des communautés autochtones. Ils ont également pour mission d'appliquer des mesures de protection provisoires en leur faveur.

La délégation a en outre assuré que la construction des infrastructures était accompagnée de budgets pour la construction de routes, d'écoles et de centre de santé à destination des communautés autochtones.

La délégation a enfin assuré le Comité que les enfants étaient aujourd'hui protégés de manière spécialisée et prioritaire face aux cas de négligence et d'abus. Le droit des enfants et des adolescents à vivre sans violence et dans leurs familles est consacré par la loi, a fait valoir la délégation. S'agissant de la lutte contre le travail forcé des enfants , la délégation a affirmé pouvoir faire état de progrès notables, alors que cette question a toujours été « un problème difficile » au Panama.

 

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