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CEDAW : la situation des femmes au Honduras reste préoccupante, notamment au regard de nombreuses dispositions constitutionnelles et pénales toujours en vigueur un an après l’élection de la première femme Présidente du pays

Compte rendu de séance

 

Il y a eu un changement de gouvernement au Honduras, avec une nouvelle Présidente qui va célébrer sa première année au pouvoir. Le Comité n’en reste pas moins préoccupé par la situation des droits des femmes dans le pays, notamment du fait de la réforme constitutionnelle ayant gravé dans le marbre l’interdiction de l’avortement, de l’interdiction de la distribution de la pilule contraceptive ou encore de l’interdiction du mariage entre personnes du même sexe.

C’est ce qu’a souligné une experte du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes alors qu’était examiné, hier après-midi et cet après-midi, le rapport soumis par le Honduras au titre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

L’experte a dès lors demandé si les autorités actuelles du pays envisageaient de revenir en arrière s’agissant de cette réforme constitutionnelle, ce à quoi la délégation hondurienne a répondu – durant le dialogue noué autour de l’examen de son rapport – en faisant observer qu’il y avait certes toujours des « verrous » hérités de la période de la dictature et que le Parlement était aujourd’hui encore composé de forces conservatrices. La priorité du Gouvernement est d’avancer vers la dépénalisation de la distribution de la pilule du lendemain par décret présidentiel ; de même, le Gouvernement a une position très claire sur l’avortement et tente de trouver des alliances au sein du Congrès pour avancer dans ce domaine, a précisé la délégation.

Parmi les autres sujets de préoccupations soulevés par les membres du Comité, ont figuré la persistance de stéréotypes négatifs à l’encontre des femmes ou encore les chiffres alarmants concernant les violences domestiques.

La réforme dont a fait l’objet le Code pénal a de graves conséquences, a-t-il par ailleurs été souligné, s’agissant notamment des féminicides, désormais considérés comme des homicides ; des réductions de peine prévues pour les crimes commis contre les femmes et les enfants, avec la possibilité pour les auteurs de tels crimes de rester en liberté conditionnelle ; de la révision à la baisse des peines encourues pour viol ; ou encore de l’incrimination de manifestations.

Il a par ailleurs été estimé que l’État hondurien n’avait pas pris assez de mesures temporaires spéciales, en particulier dans le monde du travail.

Une experte s’est enquise des progrès obtenus s’agissant de l’élimination de la discrimination raciale contre les femmes autochtones au Honduras. Le sort de Berta Cáceres a laissé une trace profonde dans le pays, a-t-elle relevé, avant de s’enquérir de ce qui était fait pour protéger les militants qui défendent les terres des autochtones.

Les membres du Comité ont néanmoins salué le fait que l’institution nationale des droits de l’homme ait obtenu le « statut A » de pleine conformité aux Principes de Paris, ainsi que les efforts consentis par le Gouvernement pour donner aux femmes et aux filles des soins de qualité. Sur ce dernier point, un effort supplémentaire doit toutefois être consenti afin de renforcer les services dans les zones rurales, surtout dans le domaine de la santé sexuelle et procréative, a-t-il été observé.

La cheffe de la délégation hondurienne, Mme Doris Yolany García Paredes, Secrétaire d'État au Bureau des affaires féminines du Honduras, a fait observer que sa délégation se retrouvait, en défendant le présent rapport, à devoir répondre des échecs enregistrés pendant treize ans par le Gouvernement issu du coup d’État, et à répondre de huit mois seulement d’action du nouveau Gouvernement. Elle a rappelé que le coup d’État de juin 2009 avait changé le cours de l’histoire de son pays pendant treize ans, jusqu’au 28 novembre 2021, date à laquelle la première femme Présidente constitutionnelle de la République, Mme Iris Xiomara Castro Sarmiento, a été élue à une écrasante majorité.

Le credo selon lequel rien au sujet des femmes ne doit se faire sans les femmes est l’un des piliers fondamentaux du plan gouvernemental visant à refonder le Honduras et à répondre de manière responsable à l’engagement en faveur de la promotion de la femme, de la réduction des inégalités entre les sexes et de l’élimination de toutes les formes de discrimination et de violence fondées sur le sexe dans le pays, a indiqué Mme García Paredes.

La Secrétaire d’État a ensuite indiqué que le Code pénal est en cours de révision afin d’apporter des changements importants en termes d’accès à la justice, en particulier pour les femmes. Elle a mentionné plusieurs réalisations du nouveau Gouvernement hondurien dans le domaine de la promotion et de la protection des droits des femmes, notamment la création du Secrétaire d’État au Bureau des affaires féminines ; le programme Ciudad Mujer, grâce auquel six centres apportent des services intégraux aux femmes dans tout le pays ; ou encore l’élaboration en cours d’un troisième plan national contre la violence faite aux femmes pour la période 2023-2033.

La Commission nationale des droits de l’homme du Honduras est également intervenue pour recommander, notamment, que le Gouvernement octroie des ressources financières suffisantes à toutes les institutions de l'État qui composent la Commission interinstitutions de suivi des enquêtes sur les morts violentes de femmes et les dossiers de féminicide ; et qu’il informe le Comité des mesures prises pour faire en sorte que la Commission nationale des droits de l’homme puisse exercer son mandat en toute indépendance. Des mesures doivent être prises pour que les femmes handicapées bénéficient d’un traitement conforme à leurs besoins, a aussi recommandé la Commission. Le Gouvernement doit en outre approuver la loi globale contre la violence à l'égard des femmes et la loi sur les refuges pour les femmes survivantes de la violence et leurs enfants, a-t-elle ajouté.

La délégation hondurienne était également composée, entre autres, de hautes fonctionnaires chargées des questions relatives à la coopération internationale ; à la promotion des droits de l’homme ; à la sécurité dans les affaires policières ; et au développement social. Le Ministère des affaires étrangères était aussi représenté.

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Honduras et les rendra publiques à l’issue de sa session, le 28 octobre.

 

Demain matin, à partir de 10 heures, le Comité examinera le rapport de la Gambie.

 

Examen du rapport

Le Comité est saisi du neuvième rapport périodique du Honduras (CEDAW/C/HND/9), ainsi que des réponses du pays à une liste de points à traiter qui lui avait été soumise par le Comité.

Présentation du rapport

MME DORIS YOLANY GARCÍA PAREDES, Secrétaire d'État au Bureau des affaires féminines du Honduras, a indiqué être la première à occuper ce poste, après avoir résisté pendant plus d’une décennie à la dictature qui a eu des conséquences inimaginables dans la vie du peuple hondurien en général et des femmes et des filles en particulier.

La cheffe de la délégation a rappelé que le coup d’État de juin 2009 avait changé le cours de l’histoire du Honduras – un pays qui avait surmonté les crises économiques, réduit les inégalités et construit un pouvoir populaire avec et pour le peuple. Le coup d’État a fracturé le pays, stoppé son développement et divisé la société hondurienne. Une dictature de plus de 13 ans s’est installée qui a provoqué l’obscurité, la misère, la pauvreté, la terreur, le trafic de drogue, le crime organisé, la corruption, l’impunité, la disparition forcée de nombreux Honduriens, de grandes caravanes de migrants, des meurtres de femmes et de jeunes, comme celui de la défenseuse des peuples autochtones et environnementaliste Berta Cáceres, aujourd’hui héroïne nationale. La Constitution de la République et toutes les lois ont été violées de manière répétée, des magistrats ont été destitués et il y a eu deux fraudes électorales, une pandémie, des ouragans et deux tempêtes – autant de faits qui se sont ajoutés à la crise, provoquant des souffrances systématiques.

Le Congrès national s’est transformé en représentant et complice des intérêts de l’oligarchie nationale, avec pour caractéristique l’exercice de pratiques patriarcales, causant un recul important pour les droits fondamentaux des femmes. Immédiatement après que le coup d’État, ont été attaquées les avancées substantielles qui avaient été obtenues en termes de santé intégrale, en particulier dans les droits sexuels et reproductifs , avec l’interdiction totale de l’avortement par réforme constitutionnelle.

La cheffe de la délégation a poursuivi en indiquant que les groupes au pouvoir n’ont alors pas réalisé qu’ils ouvraient la voie à l’émergence dans le pays du plus grand mouvement social et politique, qui s’est cristallisé le 28 novembre 2021, date à laquelle la première femme Présidente constitutionnelle de la République, Mme Iris Xiomara Castro Sarmiento, a été élue à une écrasante majorité, après 200 ans de gouvernement par les hommes.

La cheffe de la délégation a salué la décision du peuple hondurien d’exprimer massivement sa volonté dans les urnes, optant pour la proposition transformatrice d’un nouveau modèle de croissance économique alternative et de développement social inclusif qui implique de travailler à la construction d’une vision de refondation humaniste, démocratique, solidaire, populaire et imprégnée de respect des droits humains pour réaliser le bien commun, en particulier pour les femmes. Le credo selon lequel rien au sujet des femmes ne doit se faire sans les femmes est l’un des piliers fondamentaux du plan gouvernemental visant à refonder le Honduras et à répondre de manière responsable à l’engagement en faveur de la promotion de la femme, de la réduction des inégalités entre les sexes, de l’élimination de toutes les formes de discrimination et de violence fondées sur le sexe dans le pays, a déclaré Mme García Paredes.

La cheffe de la délégation a ensuite présenté une série de réalisations du nouveau Gouvernement dans le domaine de la promotion et de la protection des droits des femmes, notamment la création du Secrétaire d’État au Bureau des affaires féminines, « une décision historique » qui reconnaît la hiérarchie et le leadership des institutions féminines dans le pays. Mme García Paredes a également rappelé le programme Ciudad Mujer, au travers duquel six centres à travers le pays apportent des services intégraux aux femmes. Elle a en outre indiqué que le Protocole facultatif à la Convention avait été transmis par la Présidente de la République au Congrès national pour approbation. Elle a par ailleurs fait part du processus d’élaboration en cours d’un troisième plan national contre la violence faite aux femmes pour la période 2023-2033 et d’un troisième plan pour l’égalité et la justice de genre pour la même période, ainsi que des préparatifs en vue du lancement de la plateforme CONECTA Sin Fronteras comme mécanisme d’assistance aux femmes sur la route migratoire.

La Secrétaire d’État a d’autre part indiqué que le Code pénal est en cours de révision afin d’apporter des changements importants en termes d’accès à la justice, en particulier pour les femmes. Par ailleurs, la politique de genre de la Police nationale été institutionnalisée et la Commission interinstitutionnelle contre l’exploitation sexuelle à des fins commerciales et la traite de personnes a été activée, a ajouté Mme García Paredes. Elle a précisé que son Secrétariat d’État a formé au total 6039 fonctionnaires aux questions relatives à la prévention de la discrimination fondée sur le sexe, aux droits de l’homme des groupes en situation de vulnérabilité et au harcèlement sexuel. En outre, le protocole relatif à la prise en charge intégrale des victimes de violences sexuelles est en cours de mise à jour, a-t-elle indiqué, avant d’ajouter que l’évaluation et l’actualisation de la politique nationale de santé sexuelle et reproductive pour l’année 2023 avaient été lancées.

Mme García Paredes a également évoqué, entre autres, le fonds solidaire pour le secteur du handicap, qui répond à l’engagement d’assurer une protection intégrale et une vie digne aux personnes handicapées, en particulier aux femmes handicapées.

S’agissant de l’éducation, la cheffe de la délégation a fait observer que la Stratégie d’éducation inclusive avec une approche de genre et d’interculturalité vise à garantir le droit à l’éducation des enfants, adolescents et jeunes en situation de vulnérabilité.

En collaboration avec la société civile, des progrès ont été accomplis dans les efforts visant à réformer la loi portant création du Programme national de crédit solidaire pour les femmes rurales, a ajouté Mme García Paredes.

Pour conclure, la cheffe de la délégation a tenu à affirmer qu’être une femme au Honduras aujourd’hui signifie avoir une occasion historique de faire front contre des siècles de patriarcat, d’exclusion, d’inégalité et de violence sous toutes ses formes.

La Commission nationale des droits de l’homme du Honduras a recommandé, notamment, que le Gouvernement octroie des ressources financières suffisantes à toutes les institutions de l'État qui composent la Commission interinstitutions de suivi des enquêtes sur les morts violentes de femmes et les dossiers de féminicide ; et qu’il informe le Comité des mesures prises pour faire en sorte que la Commission nationale des droits de l’homme puisse exercer son mandat en toute indépendance. Des mesures doivent être prises pour que les femmes handicapées bénéficient d’un traitement conforme à leurs besoins, a aussi recommandé la Commission. Le Gouvernement doit en outre approuver la loi globale contre la violence à l'égard des femmes et la loi sur les refuges pour les femmes survivantes de la violence et leurs enfants.

Questions et observations des membres du Comité

Mme Leticia Bonifaz Alfonzo, rapporteuse du Comité pour l’examen du rapport du Honduras, a relevé qu’il y a eu un changement de Gouvernement au Honduras, avec une nouvelle Présidente qui va célébrer sa première année au pouvoir. Le Comité n’en reste pas moins préoccupé par la situation des droits des femmes dans le pays, notamment du fait de la réforme constitutionnelle ayant gravé dans le marbre l’interdiction de l’avortement, de l’interdiction de la distribution de la pilule contraceptive ou encore de l’interdiction du mariage entre personnes du même sexe. L’experte a dès lors demandé si les autorités actuelles du pays envisageaient de revenir en arrière s’agissant de cette réforme constitutionnelle.

L’experte a souligné que la réforme dont a fait l’objet le Code pénal a de graves conséquences, notamment pour ce qui est des féminicides, désormais considérés comme des homicides. Le nouveau Code pénal prévoit également une réduction de peine substantielle pour les crimes commis contre les femmes et les enfants, avec la possibilité pour les auteurs de tels crimes de rester en liberté conditionnelle. Pour ce qui est du viol, les peines ont aussi été revues à la baisse, a déploré l’experte.

L’experte a par ailleurs regretté que le nouveau Code pénal incrimine les manifestations.

La rapporteuse a ensuite estimé que l’État hondurien n’avait pas pris assez de mesures temporaires spéciales, en particulier dans le monde du travail. Il semble que de telles mesures n’aient été adoptées que dans le domaine de la représentation politique, a-t-elle observé.

Une autre experte a souhaité savoir si le pays envisageait d’adopter un plan national multisectoriel sur les droits des femmes. Cette experte a par ailleurs salué le fait que l’institution nationale des droits de l’homme ait obtenu le « statut A » de pleine conformité aux Principes de Paris ; elle s’est toutefois enquise des mesures prises pour la renforcer.

Une autre experte a relevé que les stéréotypes négatifs à l’encontre des femmes restaient très présents au sein de la société hondurienne, notamment pour ce qui est de l’image de la femme au foyer. Elle a par ailleurs demandé à la délégation comment les autorités luttaient contre les pratiques préjudiciables à l’égard des filles et des adolescentes, notamment contre les mariages précoces. Elle a également souhaité connaître les mesures de protection accordées aux personnes LGBTI. L’experte s’est d’autre part inquiétée des chiffres alarmants des violences domestiques au Honduras et a souhaité savoir où en étaient le projet de loi contre les violences faites aux femmes et la législation sur les centres d’accueil.

Une autre experte s’est enquise des mesures prises pour lutter contre la traite des femmes à des fins d’exploitation sexuelle, notamment dans les zones touristiques du pays.

Une experte du Comité a estimé que le décrochage scolaire des jeunes filles enceintes constituait une discrimination à leur égard, ces jeunes filles étant seules à faire face aux conséquences de la grossesse. Le contenu de l’éducation sexuelle et génésique sera très important pour remédier au problème des grossesses parmi les adolescentes, a souligné une autre experte.

Une experte a demandé comment le Gouvernement hondurien contrôlait les conditions de travail des femmes employées dans le secteur informel, dans les maquiladoras et dans le secteur domestique. Elle a voulu savoir si le Honduras ratifierait les conventions de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur les travailleuses et travailleurs domestiques et sur l’élimination de la violence et du harcèlement dans le monde du travail.

S’agissant des questions de santé, une experte a constaté que le Gouvernement consentait des efforts pour donner aux femmes et aux filles des soins de qualité. Un effort supplémentaire doit toutefois être consenti, à cet égard, pour renforcer les services dans les zones rurales, surtout dans le domaine de la santé sexuelle et procréative. Le taux de contamination des femmes et des filles au papillomavirus humain reste élevé, a par ailleurs fait remarquer cette experte. Elle s’est en outre enquise de la stratégie déployée pour faire reculer les taux de grossesse chez les adolescentes, et a souhaité savoir et si le Gouvernement autoriserait au moins l’avortement en cas d’inceste, de viol ou de danger pour la mère ou le fœtus. Le nombre de cas de VIH ne cesse d’augmenter au Honduras, alors même que les antirétroviraux ne sont pas disponibles, a d’autre part relevé l’experte. Des femmes séropositives sont stérilisées de force, a-t-elle également déploré.

Une experte a recommandé que le Gouvernement mette en place un système de protection sociale qui tienne compte de la place prépondérante des femmes dans le secteur informel, en particulier dans le travail domestique. L’experte a aussi remarqué que les hommes au Honduras gagnent beaucoup plus d'argent que les femmes et ont un taux d'activité nettement plus élevé (environ 85-87% pour les hommes contre 50-53% pour les femmes). Elle a demandé si le Gouvernement pourrait appliquer des mesures temporaires spéciales pour favoriser la propriété foncière des femmes, en particulier dans les zones rurales.

Une experte s’est enquise des progrès obtenus s’agissant de l’élimination de la discrimination raciale contre les femmes autochtones au Honduras. Le sort de Berta Cáceres a laissé une trace profonde dans le pays, a relevé l’experte, qui a demandé ce qui était fait pour protéger les militants qui défendent les terres des autochtones.

Une experte du Comité a regretté que, selon certaines informations, les organisations non gouvernementales assurent l’essentiel de la réintégration des femmes et des jeunes filles expulsées ou rapatriées après les caravanes vers les États-Unis.

Réponses de la délégation

La délégation a reconnu qu’il y a toujours des « verrous » qui subsistent de la période de la dictature. Le Parlement aujourd’hui encore est composé de forces conservatrices, voire ultraconservatrices, notamment religieuses, a-t-elle souligné. Cependant, la priorité du Gouvernement est d’avancer vers la dépénalisation de la distribution de la pilule du lendemain par décret présidentiel, a assuré la délégation. Le Gouvernement a aussi une position très claire sur l’avortement et tente de trouver des alliances au sein du Congrès pour avancer dans ce domaine. La délégation a dénoncé les violences qu’entraînent ces débats au Parlement.

Le pouvoir judiciaire est lui aussi encore influencé par la dictature, a déploré la délégation. Cependant, des réformes sont attendues dans ce domaine, avec notamment la création d’une nouvelle Cour suprême de justice. Tout ce processus doit permettre d’élire au sein du monde judiciaire des femmes qui donneront un autre angle à la justice, avec une justice féministe, afin de rembourser la dette de l’État vis-à-vis des femmes, a déclaré la délégation.

L’exécutif est totalement engagé à obtenir des progrès, mais au quotidien, les autorités doivent faire face à des campagnes de déstabilisation, face à la volonté de l’exécutif d’adopter des réformes qui favorisent les femmes et les personnes LGBTIQ, notamment.

La délégation a reconnu que le Honduras est un « pays féminicide ». Les autorités n’ont aucune intention de cacher cette réalité, a-t-elle assuré, affirmant que les féminicides sont plus fréquent que les épidémies dans ce pays. C’est un problème qui porte atteinte à la sécurité des femmes ; il est donc nécessaire de lutter contre cette violence. Les autorités ont également la volonté de réformer le « code de l’impunité » du Honduras, ainsi que la loi sur le commerce des armes – puisque 70% des femmes qui sont tuées le sont avec une arme à feu, a précisé la délégation. L’impunité aujourd’hui dans le domaine des féminicides est de 90%, a déploré la délégation ; cela pousse à trouver des alternatives afin de stimuler les investigations [sur ces crimes] de manière plus efficace. Le Comité interinstitutionnel pour la lutte contre les féminicides vise précisément à lutter contre l’impunité et à accorder la priorité à la conduite d’enquêtes directes dans les villes dans lesquelles les chiffres de violences et de féminicides sont les plus élevés. Six unités de réaction rapide au sein de la police ont ainsi été créées au sein des six villes les plus touchées par les féminicides, a fait valoir la délégation.

Les autorités se sont engagées à mener des actions visant à une réparation intégrale des femmes victimes de violence, a poursuivi la délégation.

Le Honduras, a fait savoir la délégation, est enfin doté d’un avant-projet de loi intégrale contre les violences faites aux femmes , qui prévoit cinq programmes fondamentaux : le programme national de relèvement intégral pour les femmes victimes de violence ; le programme national de réparation intégrale ; le programme national des centres d’accueil et de logement ; le programme national relatif aux agresseurs ; et le programme national pour les enfants et adolescents orphelins suite à un féminicide. Cette initiative vise à protéger le droit à la vie des femmes et de leurs enfants.

L’insécurité dans le pays donne obligation aux autorités de protéger la population, notamment contre les activités du crime international organisé. Il ne fait aucun doute qu’il est indispensable de travailler au niveau de la prévention dans ce domaine. C’est pour cette raison que le pays travaille en coopération avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) sur ces matières, a indiqué la délégation.

En ce qui concerne la santé des femmes, la délégation a d’abord fait état d’une augmentation régulière du budget de la santé. Le Gouvernement a créé un groupe de travail chargé d’élaborer le tout premier plan pour prévenir et réduire autant que possible les grossesses parmi les adolescentes et il entend se doter d’éléments scientifiques pour mieux évaluer la réponse à donner, ainsi que pour promulguer des lois vigoureuses afin d’accompagner ses efforts dans ce domaine. Les autorités élaborent aussi un nouveau cadre juridique relatif à la santé périnatale, a indiqué la délégation. Un grand travail reste en outre à faire pour prévenir le cancer du col de l’utérus, qui est un sujet de préoccupation, a ajouté la délégation. Le nouveau Gouvernement travaille à l’organisation de campagnes de sensibilisation, ainsi que de détection du papillomavirus humain.

La délégation a insisté sur la politique de prévention des grossesses précoces chez les adolescentes qui est en cours d’élaboration et qui devrait permettre d’avoir une vision précise de la situation en la matière dans le pays. Cette problématique est une source de préoccupation profonde, car le taux de grossesses précoces au Honduras est le plus élevé d’Amérique latine, avec son lot de souffrances et de décès de jeunes filles, a souligné la délégation.

Le Gouvernement hérite d’un contexte difficile s’agissant de l’ éducation sexuelle à l’école, marqué par les revers pour les droits des femmes induits par le coup d’État d’il y a treize ans, a souligné la délégation. Le nouveau Gouvernement a repris des éléments d’anciennes réformes ayant eu un effet positif avant le coup d’État, s’agissant particulièrement de la vente de pilules d’urgence – une possibilité qui avait été supprimée dès le lendemain du coup d’État. Le Gouvernement devra mobiliser l’ensemble de la société civile, ainsi que les médias, pour mener une lutte de front contre les restrictions aux droits des femmes, a indiqué la délégation.

D’une manière globale, la protection de l’ensemble des droits humains est au centre du plan gouvernemental, a assuré la délégation. Elle a indiqué que les autorités honduriennes ont lancé une stratégie d’ éducation intégrale « transformatrice », accordant une attention particulière aux compétences des enseignants, afin de faire avancer la situation des femmes et des filles. Huit mois après son entrée en fonction, le nouveau Gouvernement travaille à une procédure d’accompagnement de l’intégration des questions d’égalité entre femmes et hommes à tous les niveaux, a-t-elle insisté.

La délégation a par la suite indiqué que le Gouvernement avait mis en place un réseau de renforcement de l’éducation dans les zones rurales, ce qui profite aux personnes qui y vivent dans un grand dénuement.

La délégation a par ailleurs indiqué que les nouvelles autorités redoublaient d’efforts pour lutter contre l’analphabétisme dans les zones les plus pauvres du pays. Une des tâches centrales du Gouvernement est de réduire autant que possible le taux d’analphabétisme parmi les femmes âgées, a-t-elle par la suite précisé.

Le pays manque depuis bien longtemps de politique en matière migratoire, a regretté la délégation. La question migratoire est un sujet brûlant pour le Gouvernement et toutes les institutions responsables sont actives et disposées à offrir une aide aux femmes et aux filles migrantes qui se trouvent sur le territoire hondurien, a-t-elle expliqué.

Il existe des enfants partout sur le territoire hondurien qui n’ont pas été enregistrés à leur naissance et qui ne sont dès lors pas reconnu par l’État, a déploré la délégation. Le pays prend des initiatives pour remédier à cette situation, a-t-elle assuré. L’ enregistrement des naissances dans les pays limitrophes du Honduras a été facilité afin que les parents honduriens puissent déclarer plus facilement la naissance de leurs enfants, a-t-elle précisé.

La délégation a d’autre part indiqué que le Secrétariat d’État aux affaires féminines a un rôle à jouer dans les propositions de loi, ce qui n’était pas le cas de l’Institut national de la femme. Le Secrétariat d’État veille en outre à ce que chaque plan national intègre une approche sexospécifique et il a coordonné la rédaction du troisième Plan national contre la violence à l’égard des femmes. La délégation a en outre estimé que le budget accordé à ce Secrétariat d’État n’était pas suffisant pour lui permettre de s’acquitter de l’ensemble de son mandat.

S’agissant des questions de travail, la délégation a souligné que l’écart de salaire entre les femmes et les hommes s’était approfondi pendant les treize ans de dictature. Des textes de loi ont été adoptés pour permettre aux femmes travaillant dans les maquiladoras de faire valoir leurs droits, a-t-elle fait valoir ; mais l’application de ces lois est lacunaire, a-t-elle reconnu. Le Gouvernement procède à un bilan de la situation des maquiladoras et à un réexamen du cadre juridique existant, avant de prendre d’autres mesures pour mieux protéger les femmes qui y travaillent, a fait savoir la délégation.

La délégation a attiré l’attention sur le plan « Femmes et économie solidaire » que les autorités ont lancé pour favoriser l’autonomisation des femmes. Le Gouvernement entend favoriser l’accès des femmes concernées aux antirétroviraux ainsi que leur protection contre le harcèlement sexuel, entre autres mesures pour améliorer leurs conditions de vie, a-t-elle ajouté. Un groupe de travail est chargé par le Ministère de la justice d’examiner la ratification de la Convention de l’OIT (n° 189) sur les travailleuses et travailleurs domestiques, a d’autre part indiqué la délégation.

Le nouveau Gouvernement a légalisé plus de 11 000 titres fonciers au profit de milliers de familles, dont 30% étaient dirigées par des femmes. Le Gouvernement a aussi soutenu financièrement plus de 500 organisations de la société civile qui aident les femmes rurales, a indiqué la délégation.

Le Honduras faisait naguère partie des pays les plus dangereux pour les défenseurs des droits de l’homme, a fait observer la délégation. Aussi, l’une des premières initiatives du nouveau Gouvernement a-t-elle été de financer le mécanisme national de protection des défenseurs et défenseuses des droits humains, qui sera pleinement opérationnel en 2023.

Remarques de conclusion

MME GARCÍA PAREDES a insisté sur le fait que sa délégation s’était retrouvée, en défendant ce rapport, à devoir répondre des échecs enregistrés pendant treize ans par le Gouvernement issu du coup d’État, et à répondre de huit mois seulement d’action du nouveau Gouvernement.

 

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CEDAW22.034F