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Devant le Conseil des droits de l’homme, le Haut-Commissariat recense 6114 civils tués et 9132 blessés en Ukraine et indique que la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo s’est quelque peu améliorée

Compte rendu de séance

 

Cet après-midi, le Conseil des droits de l’homme a examiné un rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme sur la situation des droits de l’homme en Ukraine, avant d’engager un dialogue renforcé sur la situation des droits de l’homme en République démocratique du Congo.

S’agissant de l’Ukraine, M. Christian Salazar Volkmann, Directeur de la Division des opérations sur le terrain et de la coopération technique du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, a indiqué que jusqu'à hier [ 3 octobre 2022], le Haut-Commissariat a recensé 6114 civils tués, dont de nombreux enfants, et 9132 blessés, dont 690 enfants ; les chiffres réels sont probablement beaucoup plus élevés, a-t-il souligné. « La grande majorité des victimes civiles documentées par le Haut-Commissariat ont été causées par l'utilisation d'armes explosives, la plupart du temps par les forces armées russes et les groupes armés affiliés, dans des zones peuplées », a-t-il précisé.

Au-delà de l’effet direct des hostilités, le Haut-Commissariat est préoccupé par les droits à la liberté d'opinion, d'expression et de réunion pacifique, a poursuivi M. Salazar Volkmann. Ces droits sont restreints dans le territoire occupé par la Fédération de Russie ou contrôlé par les forces armées russes et les groupes armés affiliés. Le Haut-Commissariat note également que le Parlement ukrainien a introduit une interdiction des publications russes, qui n'a pas encore été signée par le Président. Si la liberté d'expression et d'information peut être restreinte en cas d'urgence publique, le Haut-Commissariat rappelle que de telles interdictions doivent être exceptionnelles et limitées dans le temps, a indiqué M. Salazar Volkmann.

Le Haut-Commissariat continue de corroborer les allégations de meurtres de civils dans plus de trente localités des régions de Kiev, Tchernihiv, Kharkiv et Soumy, lorsqu'elles étaient contrôlées par les forces armées russes en février et mars 2022, a poursuivi le représentant du Haut-Commissariat. Les disparitions forcées et la détention arbitraire de civils sont devenues généralisées dans le territoire contrôlé par les forces armées russes ou les groupes armés affiliés, a également fait savoir M. Salazar Volkmann. Le Haut-Commissariat a aussi documenté 47 cas d'arrestation et de détention arbitraires, ainsi que 31 cas pouvant s'apparenter à une disparition forcée, par les forces de l'ordre ukrainiennes ; la plupart de ces victimes ont été libérées ou leur détention a été officialisée, mais deux d'entre elles sont toujours portées disparues, a fait savoir M. Salazar Volkmann.

Des rapports effroyables font état de tortures et de mauvais traitements sur des civils et des prisonniers de guerre, a ajouté M. Salazar Volkmann. Dans la majorité des cas documentés, les prisonniers de guerre ukrainiens ont été soumis à la torture ou à des mauvais traitements par leurs gardiens ; dans deux cas, des militaires ukrainiens ont été torturés à mort. À une échelle moindre, le Haut-Commissariat a aussi documenté des cas de torture et de mauvais traitements infligés par les forces armées ukrainiennes à des prisonniers de guerre.

L’Ukraine a fait une déclaration après cette présentation, après quoi de nombreuses délégations* ont engagé le dialogue autour du rapport du Haut-Commissariat. La Fédération de Russie a exercé son droit de réponse en fin de séance.

S’agissant de la République démocratique du Congo, le Conseil s’est penché cet après-midi, dans le cadre d’un dialogue renforcé, sur deux rapports établis respectivement par l’ancienne Haute-Commissaire aux droits de l’homme, Mme Michelle Bachelet, et par l’Équipe d’experts internationaux sur la situation au Kasaï – Équipe dont le mandat avait été étendu à tout le territoire congolais aux termes de la résolution 48/20 (2021) du Conseil.

Présentant le rapport de l’ancienne Haute-Commissaire, M. Salazar Volkmann a d’abord constaté que la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo s’était quelque peu améliorée depuis la présentation du précédent rapport en octobre 2021, le nombre de violations des droits de l'homme comme du droit international humanitaire ayant en effet diminué. Cependant, la situation reste marquée par un contexte politique et sécuritaire fragile qui engendre des violations des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les conflits étant alimentés par l'impunité dont bénéficient les auteurs des violations, a-t-il fait observer.

Alors que les Nations Unies et les autorités congolaises sont engagées dans le processus de transition de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), M. Salazar Volkmann a mis en garde contre un retrait précipité et non coordonné de la Mission, qui pourrait avoir de graves conséquences sur la situation des droits de l'homme dans l'est du pays et plus généralement dans la sous-région.

Étaient également invités à participer au dialogue M. Albert Fabrice Puela, Ministre des droits humains de la République démocratique du Congo ; Mme Bintou Keita, Représentante spéciale du Secrétaire général pour la République démocratique du Congo et Cheffe de la MONUSCO ; Mme Marie-Thérèse Keita-Bocoum, membre de l’Équipe d’experts internationaux sur le Kasaï ; et M. Dismas Kitenge Senga, défenseur des droits de l’homme et Président-fondateur du Groupe Lotus.

M. Puela a notamment mis en avant la mise en place des mécanismes de justice transitionnelle dans son pays, précisant que leur mise en œuvre devait être effectuée à travers des consultations nationales populaires dans toutes les provinces.

Mme Keita a pour sa part appelé la population à participer à ces consultations populaires et à exprimer leurs aspirations en matière de vérité, justice, réconciliation et garanties de non-répétition. Elle a constaté que la République démocratique du Congo avait continué à renforcer son dispositif législatif. Si de solides avancées ont été enregistrées depuis le précédent dialogue au Conseil, la situation continue d’être préoccupante, en particulier en raison de la persistance de l’insécurité à l’est du pays, a-t-elle toutefois souligné.

Mme Keita-Bocoum a, quant à elle, estimé que la République démocratique du Congo avait le potentiel de bâtir un système judiciaire national, seul à même d’être à la hauteur des besoins et des espoirs de son peuple. Elle a recommandé que le Gouvernement adopte une approche pragmatique de la justice transitionnelle, qui tienne compte des besoins de la population, y compris dans le contexte d’insécurité et de conflits intercommunautaires.

Enfin, M. Kitenge Senga a fait savoir que malgré les avancées enregistrées sur le plan militaire, l’état de siège instauré dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri peinait à protéger efficacement les civils contre les exactions commises par les groupes armés actifs dans ces régions. Il est primordial, a-t-il dit, que la communauté internationale consolide le mandat du Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme et le rende capable de couvrir l’ensemble du pays.

 

Deux délégations** ont ensuite entamé le débat avec les invités au dialogue renforcé sur la situation des droits de l’homme en République démocratique du Congo – débat qui se poursuivra demain matin à partir de 9 heures.

 

Dialogue autour de la mise à jour du Haut-Commissariat sur la situation des droits de l’homme en Ukraine

Dans sa résolution 47/22, le Conseil a invité « la Haute-Commissaire aux droits de l’homme à continuer de [lui] présenter oralement les conclusions de chacun des rapports du Haut-Commissariat sur la situation des droits de l’homme en Ukraine […], dans le cadre des dialogues et selon les modalités qu’il a définies, conformément à sa résolution 5/1 du 18 juin 2007, jusqu’à sa cinquante-troisième session ». Le Conseil est donc saisi d’une mise à jour relative au trente-quatrième rapport périodique du Haut-Commissariat sur la situation des droits de l’homme en Ukraine, rapport couvrant la période du 1er février au 31 juillet 2022.

Présentation

Depuis le début de la période sous examen, l'attaque armée à grande échelle de la Fédération de Russie a entraîné une situation dramatique en matière de droits humains dans toute l'Ukraine, a déclaré d’emblée M. CHRISTIAN SALAZAR VOLKMANN, Directeur de la Division des opérations sur le terrain et de la coopération technique du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, présentant cette mise à jour.

Les civils font d’abord les frais des hostilités : jusqu'à hier [ 3 octobre 2022], le Haut-Commissariat a recensé 6114 civils tués, dont de nombreux enfants, et 9132 blessés, dont 690 enfants ; les chiffres réels sont probablement beaucoup plus élevés, a indiqué M. Salazar Volkmann. « La grande majorité des victimes civiles documentées par le Haut-Commissariat ont été causées par l'utilisation d'armes explosives, la plupart du temps par les forces armées russes et les groupes armés affiliés, dans des zones peuplées », a-t-il ajouté.

Bien que le Haut-Commissariat n'ait pas été en mesure d'évaluer le respect du droit international humanitaire pour chaque incident individuel, l'ampleur même des dommages et des destructions est une forte indication que des violations ont eu lieu, a dit M. Salazar Volkmann. Les hostilités ont endommagé et détruit des maisons et des infrastructures civiles essentielles, à une échelle qui suggère le non-respect des règles du droit international humanitaire régissant la conduite des hostilités, notamment les principes de distinction, de proportionnalité et de précaution, et l'interdiction des attaques sans discrimination, a-t-il déclaré. Le Haut-Commissariat a enregistré l'endommagement ou la destruction de 252 centres de santé et de 384 écoles ; et 90 lieux de culte ont été détruits ou endommagés.

Au-delà de l’effet direct des hostilités, le Haut-Commissariat est préoccupé par les droits à la liberté d'opinion, d'expression et de réunion pacifique, a poursuivi M. Salazar Volkmann. Ces droits sont restreints dans le territoire occupé par la Fédération de Russie ou contrôlé par les forces armées russes et les groupes armés affiliés. Les chaînes de télévision et les stations de radio ukrainiennes ont été remplacées par des chaînes russes ou des chaînes des « républiques autoproclamées ». En Crimée, la Fédération de Russie applique une loi pénalisant un large éventail d'expressions jugées critiques et des pressions sont exercées sur les enseignants pour qu'ils approuvent l'attaque armée, a ajouté M. Salazar Volkmann.

Le Haut-Commissariat note également que le Parlement ukrainien a introduit une interdiction des publications russes, qui n'a pas encore été signée par le Président. Si la liberté d'expression et d'information peut être restreinte en cas d'urgence publique, le Haut-Commissariat rappelle que de telles interdictions doivent être exceptionnelles et limitées dans le temps, a également indiqué M. Salazar Volkmann.

Le Haut-Commissariat continue de corroborer les allégations de meurtres de civils dans plus de trente localités des régions de Kiev, Tchernihiv, Kharkiv et Soumy, lorsqu'elles étaient contrôlées par les forces armées russes en février et mars 2022, a poursuivi le représentant du Haut-Commissariat. Des civils ont été abattus alors qu'ils fuyaient dans leur véhicule, traversaient la route ou essayaient de trouver à manger. Des personnes tuées ont été sommairement exécutées, et les victimes ont été retrouvées avec des signes de torture sur le corps, a indiqué M. Salazar Volkmann. Dans un cas corroboré par le Haut-Commissariat, trois hommes civils ont été retrouvés morts dans une cave, les mains et les jambes liées, avec des blessures au couteau et des doigts coupés, a-t-il ajouté.

Les disparitions forcées et la détention arbitraire de civils sont devenues généralisées dans le territoire contrôlé par les forces armées russes ou les groupes armés affiliés, a ensuite fait savoir M. Salazar Volkmann, précisant que le Haut-Commissariat a ainsi documenté 407 cas (359 hommes, 47 femmes, un garçon), dont 18 victimes ont finalement été retrouvées mortes.

Le Haut-Commissariat a aussi documenté 47 cas d'arrestation et de détention arbitraires, ainsi que 31 cas pouvant s'apparenter à une disparition forcée, par les forces de l'ordre ukrainiennes ; la plupart de ces victimes ont été libérées ou leur détention a été officialisée, mais deux d'entre elles sont toujours portées disparues, a fait savoir M. Salazar Volkmann.

Des rapports effroyables font état de tortures et de mauvais traitements sur des civils et des prisonniers de guerre, a ajouté M. Salazar Volkmann. Dans la majorité des cas documentés, les prisonniers de guerre ukrainiens ont été soumis à la torture ou à des mauvais traitements par leurs gardiens ; dans deux cas, des militaires ukrainiens ont été torturés à mort. À une échelle moindre, le Haut-Commissariat a aussi documenté des cas de torture et de mauvais traitements infligés par les forces armées ukrainiennes à des prisonniers de guerre.

Les employés du Haut-Commissariat ont bénéficié d'un accès sans entrave aux lieux d'internement des prisonniers de guerre contrôlés par le Gouvernement ukrainien, le Haut-Commissariat, malgré ses demandes, n’a malheureusement toujours pas obtenu d'accès confidentiel aux prisonniers de guerre internés par la Fédération de Russie et les groupes armés affiliés, a indiqué M. Salazar Volkmann. En outre, a-t-il ajouté, le Haut-Commissariat n'a eu accès aux personnes détenues à la suite de processus dits de « filtrage », ni à la Fédération de Russie, pour y vérifier les allégations de déportation d'Ukrainiens vers ce pays.

Le présent rapport fait également état de cas de violences sexuelles liées au conflit, même s'il reste difficile d'évaluer l'ampleur de ce phénomène, a poursuivi M. Salazar Volkmann, précisant que le Haut-Commissariat a documenté 43 cas de violences sexuelles liées au conflit, dont la majorité ont été commises par les forces de sécurité russes.

L'attaque armée de la Fédération de Russie a causé la mort de milliers de personnes et entraîné la destruction généralisée de biens et d'infrastructures civils, a constaté M. Salazar Volkmann. De plus, avec la prétendue annexion des régions ukrainiennes de Donetsk, Louhansk, Kherson et Zaporijia à la suite de « référendums », la Fédération de Russie a pris des mesures qui approfondissent le conflit au lieu de le résoudre et qui exacerbent les violations des droits de l'homme qui en découlent.

Comme il a été dit clairement par le Secrétaire général des Nations Unies, a rappelé M. Salazar Volkmann, toute annexion du territoire d'un État par un autre État résultant de la menace ou de l'usage de la force constitue une violation des principes de la Charte des Nations Unies et du droit international. De plus, le redécoupage de frontières internationales n'est pas une question juridique abstraite : il a des répercussions concrètes sur les droits de l'homme des personnes situées de part et d'autre des lignes ainsi redessinées, a souligné M. Salazar Volkmann.

Pays concerné

L’Ukraine a dénoncé l’agression russe menée contre elle, qui s’accompagne de « crimes contre l’humanité jamais vus depuis la Seconde Guerre mondiale » et représente la « destruction délibérée de la Charte des Nations Unies centrée sur les droits de l’homme ». Alors que « les projets du Kremlin échouent », la Fédération de Russie, « par sa menace nucléaire, place le monde au bord de l’impensable » : le bombardement de la centrale de Zaporijia expose le continent au danger nucléaire, a déclaré la délégation ukrainienne, avant d’attirer l’attention sur les enjeux de la faim et de l’énergie, qui ne manquent pas de générer peur et insécurité.

Les informations du Haut-Commissariat sur la situation en Ukraine montrent clairement l’effet destructeur de la guerre russe sur les droits humains du peuple ukrainien, a poursuivi la délégation ukrainienne. Chaque jour depuis sept mois, des innocents sont tués, des maisons et des vies détruites sur ordre donné directement par « le terroriste numéro un », a-t-elle ajouté.

Plus de 140 corps d’Ukrainiens portant des signes de torture ont été découverts après la libération d’Izium, ce qui témoigne de nouveaux crimes de guerre commis par la Fédération de Russie, a poursuivi la délégation. Elle a également dénoncé la déportation vers la Fédération de Russie, depuis des « camps de filtration », de prisonniers de guerre ukrainiens ; l’adoption massive de quelque 200 000 enfants ukrainiens « transférés de force des territoires occupés vers la Fédération de Russie » ; la conscription illégale de citoyens ukrainiens, en particulier de Tatars de Crimée ; et une « tentative grotesque » d’annexer une partie du territoire ukrainien.

La délégation ukrainienne a appelé le monde à ne pas rester neutre ni silencieux « face au mal ». La Fédération de Russie « méprise profondément le multilatéralisme » et ne mérite d’occuper aucun siège dans les instances multilatérales, a conclu l’Ukraine.

Aperçu du débat

Plusieurs délégations ont fermement condamné les violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises par la Fédération de Russie dans le contexte de sa guerre d’agression contre l’Ukraine. Un intervenant a affirmé que depuis le début de cette agression, des schémas clairs sont apparus, à savoir des incidents isolés de mauvais traitements contres des soldats russes de la part des forces ukrainiennes qui contrastent avec un grand nombre d’exécutions sommaires et autres violations commises par leurs homologues russes. Les auteurs de telles atrocités doivent être tenus pour responsables, a-t-il été souligné.

De nombreuses délégations ont réaffirmé leur soutien à l’indépendance, à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues. Le respect du droit international est essentiel pour maintenir l’ordre juridique international, a-t-il été rappelé.

D’aucuns ont dénoncé les « référendums illégaux » organisés par la Fédération de Russie dans les régions ukrainiennes de Donetsk, Kherson, Louhansk et Zaporijia. De nombreuses délégations ont rejeté les résultats de ces référendums comme étant nuls et non avenus et sans aucun effet juridique.

Les tentatives répétées de la Fédération de Russie de modifier par la force les frontières internationales d’un État souverain piétinent brutalement la Charte des Nations Unies et n’ont pas leur place dans l’architecture juridique internationale, a-t-on insisté.

De très nombreuses délégations ont dénoncé le grand nombre de violations des droits de l’homme commises du fait de l’agression militaire de la Fédération de Russie contre l’Ukraine. Ont particulièrement été dénoncées les exécutions extrajudiciaires, les disparitions forcées, ainsi que l’usage de la torture et des mauvais traitements à l’encontre des détenus civils par les forces russes et les groupes armés affiliés. Nombre d’intervenants ont en outre fait part de leurs inquiétudes face aux informations faisant état de camps de filtration et de la déportation illégale de très nombreux Ukrainiens. D’aucuns ont voulu en savoir davantage sur les allégations selon lesquelles la Fédération de Russie aurait déporté de force des milliers d’enfants ukrainiens vers des territoires sous contrôle militaire russe ainsi que vers son territoire.

Ont également été dénoncées les découvertes répétées de fosses communes en Ukraine : les preuves semblent clairement indiquer que les forces militaires russes sont les auteurs de ces crimes, ce qui fait craindre que les massacres découverts dans les villes et villages ukrainiens précédemment sous contrôle ou occupation russe ne soient qu'une fraction de ce qui reste à découvrir, a-t-il été affirmé.

Ce bain de sang continu s’accompagne de lourdes destructions matérielles, y compris celles d'écoles et d'hôpitaux, a-t-il été souligné.

Évoquant l’impact économique de cette guerre et ses retombées « désastreuses », plusieurs délégations ont déploré la flambée des prix des denrées alimentaires et de l’énergie, ainsi que les problèmes de sécurité alimentaire, qui touchent plus particulièrement les personnes et les pays vulnérables. Une délégation a précisé avoir débloqué une aide supplémentaire afin de permettre les exportations de céréales depuis l’Ukraine.

De nombreuses délégations ayant pris part au débat ont exhorté la Fédération de Russie à respecter pleinement ses obligations en vertu du droit international et à cesser immédiatement et inconditionnellement son agression contre l’Ukraine. La Fédération de Russie a ainsi été appelée à mettre en œuvre l’ordonnance en indication de mesures conservatoires rendue par la Cour internationale de justice le 16 mars dernier.

Alors que « la nation agressive » esquive depuis des mois son dialogue avec le Comité des droits de l'homme de l’ONU en prétextant des restrictions de voyage, l'Ukraine, elle, a continué de se soumettre aux examens des organes conventionnels, en format virtuel et depuis des abris d'urgence si nécessaire, a-t-il en outre été observé.

Plusieurs délégations ont pour leur part tenu à rappeler que le point 10 de l’ordre du jour [sous lequel se tient le présent débat] traite de l’assistance technique et du renforcement des capacités, en vue d’améliorer la situation des droits de l’homme sur le terrain. Aussi, le Haut-Commissariat a-t-il été prié de se conformer à son mandat de façon impartiale et objective et de veiller ce qu’il ne soit pas outrepassé sous ce point de l’ordre du jour. Le renforcement des capacités et l’assistance technique ne sauraient être utilisés pour engager un débat sur la Fédération de Russie, a-t-il été affirmé.

Cet après-midi, nombre de représentants de la société civile ont fait part de leur soutien au peuple ukrainien qui souffre de la guerre en cours. Plusieurs intervenants se sont également dits solidaires de « ceux qui refusent de tuer » et ont appelé la communauté internationale à assurer la pleine garantie juridique de leur droit à l’objection de conscience et à leur fournir protection et asile.

Beaucoup d’ONG ont appelé les États Membres de l'ONU à poursuivre de toute urgence la voie des négociations de paix.

Comment le Haut-Commissariat entend-il réorienter sa mission à la suite des événements récents en Ukraine, a-t-il en outre été demandé ?

*Liste des intervenants : Estonie (au nom d'un groupe de pays), Union européenne, Danemark (au nom d'un groupe de pays), Norvège, République de Corée, Slovénie, Suisse, Allemagne, Irlande, France, Macédoine du Nord, Australie, Luxembourg, Lituanie, Venezuela, Fédération de Russie, Pays-Bas, République arabe syrienne, République tchèque, Bosnie-Herzégovine, Islande, Estonie, États-Unis, Royaume-Uni, Bélarus, Italie, Monténégro, Danemark, République de Moldova, Slovaquie, Belgique, Pologne, Bulgarie, Portugal, Suède, Géorgie, Malawi, Albanie, Lettonie, Türkiye, Autriche, Chine, Roumanie, Japon, Finlande, Liechtenstein (au nom d’un groupe de pays), Commissaire aux droits de l'homme du Parlement ukrainien, Mouvement international de la réconciliation, Conscience and Peace Tax International (CPTI), World Federation of Ukrainian Women's Organizations, Baptist World Alliance, Fondation de la Maison des droits de l'homme, The Next Century Foundation, Union internationale humaniste et laïque, iuventum e.V., Center for Global Nonkilling, Commission internationale de juristes.

Réponses et remarques de conclusion

M. SALAZAR VOLKMANN a souligné que les Tatars de Crimée continuent d’être opprimés et a plaidé en faveur d’un accès sans entrave à la Crimée, tout en exhortant la communauté internationale à rappeler à la Fédération de Russie les obligations qui lui incombent vis-à-vis de la population de Crimée.

Alors que l’hiver approche, la situation des droits de l’homme est extrêmement préoccupante en Ukraine, a poursuivi le représentant du Haut-Commissariat aux droits de l’homme. Il faut appuyer l’évacuation des personnes vulnérables et s’assurer que l’aide humanitaire parvienne aux groupes les plus vulnérables, a-t-il insisté, recommandant pour cela de s’appuyer sur des réseaux locaux.

En réponse à la question posée concernant les déportations forcées d’Ukrainiens, M. Salazar Volkmann a indiqué que le Haut-Commissariat avait reçu des allégations crédibles mais n’était pas en mesure de fournir davantage de détails. En revanche, a-t-il ajouté, le Haut-Commissariat a obtenu des informations sur les camps de filtration et vérifié un certain nombre de données, indiquant notamment que les femmes et les hommes détenus dans ces camps et ayant des liens avec les institutions ukrainiennes faisaient l’objet de détentions arbitraires et de torture.

Pour ce qui est des violences sexuelles dans le cadre du conflit, M. Salazar Volkmann a fait observer qu’il était extrêmement difficile d’évaluer la situation car les survivants ne souhaitent pas toujours être interrogés sur ce sujet ni même parler de leur histoire.

Dialogue renforcé sur la situation des droits de l’homme en République démocratique du Congo

Dans sa résolution 48/20, le Conseil des droits de l’homme avait prié l’ancienne Haute-Commissaire d’établir un rapport complet sur la situation des droits de l’homme en République démocratique du Congo ; il avait aussi renouvelé le mandat de l’Équipe d’experts internationaux sur la situation au Kasaï et l’avait étendu à tout le territoire de la République démocratique du Congo. Le Conseil examine cet après-midi les rapports de l’ancienne Haute-Commissaire (A/HRC/51/61, version préliminaire en anglais) et de l’Équipe d’experts internationaux (A/HRC/51/60).

Présentations

Le rapport de l’ancienne Haute-Commissaire a été présenté par M. SALAZAR VOLKMANN, Directeur de la Division des opérations sur le terrain et de la coopération technique du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, qui a d’abord constaté que la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo s’était quelque peu améliorée depuis la présentation du rapport précédent, en octobre 2021. Le nombre de violations des droits de l'homme, tout comme du droit international humanitaire, a en effet diminué. Cependant, la situation reste marquée par un contexte politique et sécuritaire extrêmement fragile qui engendre diverses formes de violations des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Ainsi, entre le 1er juin 2021 et le 31 mai 2022, le Bureau conjoint pour les droits de l'homme en République démocratique du Congo a documenté au moins 6782 violations des droits de l'homme ainsi que des violations du droit international humanitaire, soit une diminution de 3% par rapport à la période précédente. La majorité des violations et exactions sont attribuées à des groupes armés, et 44% à des agents de l'État, principalement des membres des Forces armées de la République démocratique du Congo et de la Police nationale congolaise.

Depuis le début de 2022, le Bureau conjoint a également documenté une recrudescence des restrictions dans l'espace civique et politique, à savoir des arrestations arbitraires de membres des partis d'opposition et des menaces contre les journalistes et les membres de la société civile de la part des services de renseignement. M. Salazar Volkmann a appelé les autorités à faire en sorte que ces restrictions cessent et à renforcer le contrôle judiciaire sur les services de renseignement.

Le Haut-Commissariat reste aussi préoccupé par la prolifération des discours de haine et des messages incitant à la violence, à la discrimination et à l'hostilité, notamment en relation avec la compétition politique, ainsi que par le conflit armé dans l'est du pays et par les conflits intercommunautaires dans le reste du pays.

M. Salazar Volkmann a constaté que la situation sécuritaire en République démocratique du Congo, plus particulièrement dans les provinces orientales, restait très préoccupante. Les mesures prises pour appliquer l'état de siège, entré en vigueur le 6 mai 2021 dans les provinces du Nord-Kivu et de l'Ituri, ne semblent pas avoir dissuadé les groupes armés d'attaquer les civils, notamment dans les sites de personnes déplacées. Selon le Bureau de coordination de l’aide humanitaire, près de 5,5 millions de personnes ont été contraintes de quitter leur foyer en raison des violences. Sont aussi préoccupantes la résurgence du M23 dans le Nord-Kivu et ses attaques contre les civils et contre la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), a ajouté M. Salazar Volkmann.

Les conflits en République démocratique du Congo sont alimentés par l'impunité dont bénéficient les auteurs de graves violations des droits de l'homme, a fait observer M. Salazar Volkmann. Il a salué l'élaboration par la République démocratique du Congo d'une stratégie nationale de poursuite des cas emblématiques, avec le soutien du Bureau conjoint des droits de l'homme et d'autres entités des Nations Unies. Entre le 1er juin 2021 et le 31 mai 2022, le Bureau conjoint a documenté 442 condamnations liées à de graves violations des droits de l'homme ; parmi celles-ci, 156 impliquaient les forces de défense et de sécurité et 118 des membres de groupes armés.

Enfin, alors que les Nations Unies et les autorités congolaises sont engagées dans le processus de transition de la MONUSCO, M. Salazar Volkmann a mis en garde contre un retrait hâtif et non coordonné de la Mission, qui – a-t-il averti – pourrait avoir de graves conséquences sur la situation des droits de l'homme dans l'est du pays et plus généralement dans la sous-région.

M. ALBERT FABRICE PUELA, Ministre des droits humains de la République démocratique du Congo, a rappelé que lors de la dernière intervention de son pays devant cette même tribune au cours de la 49ème session du Conseil au mois de mars dernier, « nous avions relevé les grandes avancées engrangées par notre Gouvernement dans le domaine de la protection et de la promotion des droits humains en République démocratique du Congo, notamment la mise en place des mécanismes de justice transitionnelle dont la mise en œuvre devait être effectuée à travers des consultations nationales populaires dans toutes les provinces ». Ces consultations, a souligné le Ministre, constituent le premier référendum jamais tenté en vue de recueillir, parmi les victimes, leurs vraies attentes afin d’éviter les erreurs du passé, de prévenir de nouveaux conflits et de restaurer la paix, la réconciliation et la cohésion nationale.

S’agissant des 239 recommandations acceptées par son pays lors de son Examen périodique universel (EPU), M. Puela a fait savoir que le Gouvernement avait jugé nécessaire de soumettre à mi-parcours un rapport qui renseigne sur l’évolution des réalisations visant à les mettre en œuvre. Le Comité interministériel des droits de l’homme, chargé d’élaborer tous les rapports requis en vertu des traités internationaux et régionaux auxquels le pays est partie, va débuter des consultations avec toutes les parties prenantes, notamment la société civile et la Commission nationale des droits de l’homme, pour l’élaboration du rapport afin de démontrer la ferme volonté du Gouvernement de faire profiter tous les Congolais de leurs droits, a indiqué le Ministre des droits humains.

La République démocratique du Congo, à travers l’implication personnelle du Président de la République, se trouve résolument engagée vers la promotion et la protection des droits de l’homme, a d’autre part assuré le Ministre. Pour y parvenir, des textes importants ont été élaborés, a-t-il fait valoir : il s’agit de la proposition de loi sur l’accès à l’information ; de la loi portant protection des défenseurs des droits de l’homme ; de la proposition de loi sur les manifestations publiques ; ainsi que de lois importantes pour l’application effective de la justice transitionnelle, y compris le décret portant création d’un Fonds national des réparations en faveur des victimes de violences sexuelles et autres crimes graves de droit international et du droit international humanitaire.

« Nous sommes convaincus que la communauté tant locale qu’internationale voit à quel point cette question des victimes des conflits armés, de la recherche de la vérité, de la justice, des réparations, des garanties de non-répétition et de vetting est au centre des préoccupations des objectifs du Chef de l’Etat, et de tout son Gouvernement parce qu’elle constitue le seul moyen de lutter contre l’impunité des seigneurs de guerres, des dignitaires du pays mis en cause et de réduire toutes les tensions entre les communautés », a conclu le Ministre.

MME BINTOU KEITA, Représentante spéciale du Secrétaire général pour la République démocratique du Congo et Cheffe de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), a constaté que la République démocratique du Congo avait continué à renforcer son dispositif législatif et à améliorer ses pratiques dans le domaine des droits de l’homme. Elle a cité à cet égard la promulgation de deux lois importantes portant sur les des droits des personnes vivant avec handicap et sur la protection des droits des peuples autochtones.

Mme Keita a aussi indiqué que la Mission qu’elle dirige avait continué d’appuyer les autorités nationales pour la mise en œuvre du processus de justice transitionnelle. Elle a appelé la population à participer aux consultations populaires qui ont été lancées et à exprimer leurs aspirations en matière de vérité, justice, réconciliation et garanties de non-répétition .

Mme Keita a relevé que si de solides avancées ont été enregistrées depuis le précédent dialogue au Conseil, la situation continue d’être préoccupante, en particulier en raison de la persistance de l’insécurité à l’est du pays. La résurgence du M23 – dont les atteintes aux droits de l’homme et violations du droit international humanitaire ont précipité des milliers de Congolais en dehors de leurs maisons – et la persistance des attaques des Forces démocratiques alliées (ADF) au Nord-Kivu et de la CODECO en Ituri sont autant de situations qui continuent de poser des défis considérables, a indiqué la Représentante spéciale du Secrétaire général.

Mme Keita a d’autre part salué les efforts politiques des chefs d’État des sous-régions d’Afrique de l’Est et des Grands Lacs à travers les processus de Nairobi et de Luanda, et dont la neutralisation définitive de tous les groupes armés et la normalisation des relations entre la République démocratique du Congo et du Rwanda sont les objectifs ultimes. La Mission continue de soutenir ces initiatives ; elle coordonne ses actions et ceux de la prochaine force Est-Africaine avec laquelle un mécanisme de conformité devrait être mis en place afin de s’assurer du respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire pendant les opérations militaires qui seront conduites sur le sol congolais.

D’autre part, « alors que nous continuons de soutenir les efforts des autorités dans le domaine de la protection des civils et de la neutralisation des groupes armés, des questions légitimes sont posées sur l’efficacité des actions de la Mission », a ajouté Mme Keita, avant d’estimer qu’une analyse froide et objective devait permettre d’améliorer les interventions en faveur des populations civiles. Les manifestations violentes enregistrées depuis le mois de juillet – et qui ont causé la mort de civils et du personnel de la Mission – sont une des conséquences directes des discours de haine, de l’appel à la violence et à l’hostilité, a indiqué Mme Keita.

Pour relever les défis sécuritaires que posent les groupes armés à la République démocratique du Congo, il est besoin de l’indispensable cohésion et du soutien des populations, sans qui la mise en œuvre du mandat de la MONUSCO est impossible, a insisté Mme Keita.

S’agissant du retrait de la MONUSCO, Mme Keita a précisé que les jalons du plan de transition vers un départ progressif, ordonné et responsable de la Mission accordaient une part importante aux indicateurs relatifs à l’amélioration de la situation des droits de l’homme.

Enfin, Mme Keita a fait part de son inquiétude face à la flambée de violence depuis juillet dans le territoire de Kwamouth, dans le Mai-Ndombe. La Mission, a-t-elle indiqué, travaille avec les humanitaires pour soutenir les autorités dans la réponse, la lutte contre l’impunité et la recherche des solutions durables à ces conflits qui sont présents dans plusieurs provinces du pays. Il faut à tout prix éviter une crise semblable à celle du Kasaï ou de Yumbi qui fait déjà l’objet de suivi par le Conseil, a conclu Mme Keita.

MME MARIE-THÉRÈSE KEITA-BOCOUM, membre de l’Équipe d’experts internationaux sur la situation au Kasaï, a indiqué qu’elle-même et M. Bacre Waly Ndiaye – Président de l’Équipe – partageaient deux convictions à savoir : d’abord, que la République démocratique du Congo a le potentiel de bâtir un système judiciaire national, seul à même d’être à la hauteur des besoins et des espoirs de son peuple et qui constitue le premier pilier de l’Etat de droit ; ensuite, que la volonté de paix et de réconciliation dans la justice et la solidarité nationale existe partout dans le pays et peut être identifiée même dans des contextes où la violence et les pillages continuent.

La République démocratique du Congo veut et peut briser le cycle de tensions sociopolitiques et de violents conflits armés ou communautaires qui ont un impact négatif sur la situation humanitaire et des droits de l’homme, a insisté l’experte. Seul un système de justice transitionnelle créé par et pour les Congolais, fort dans ses principes fondamentaux et souple dans son action au plus près de la population qui s’y reconnaîtra, permettra d’y parvenir, a-t-elle souligné.

S’agissant de l’administration de la justice, l’insuffisance flagrante de ressources humaines, financières et matérielles demeure le principal défi pour son fonctionnement effectif et efficace, note l’Équipe. Cependant, il convient de souligner les efforts du Gouvernement et de ses partenaires visant à répondre à ces besoins et, partant, d’améliorer l’accès des justiciables à la justice, grâce notamment au projet de recrutement de 2000 nouveaux magistrats dont 500 affectés à la justice militaire, qui verrait ainsi ses effectifs doubler.

Dans le cadre du suivi des dossiers judiciaires dans la région du Kasaï, l’Équipe a constaté que sur les seize cas prioritaires initialement identifiés, un seul a fait l’objet d’une décision rendue en premier ressort par la justice militaire : celui relatif au meurtre des deux experts des Nations Unies, Zeida Catalán et Michael Sharp. L’Équipe se félicite de ce que, au-delà de la province du Kasaï-Central, d’autres décisions de justice aient été aussi rendues par la Haute Cour militaire dans les cas emblématiques, notamment l’assassinat de Floribert Chebeya Bahizire et de Fidèle Bazana.

Le processus national de justice transitionnelle fait face à des défis majeurs, a souligné Mme Keita-Bocoum. Pour les relever, l’Équipe appelle notamment le Gouvernement à garantir un financement national du processus de justice transitionnelle pour en assurer la crédibilité et la durabilité ; à prendre en compte la dimension transfrontalière des conflits entre groupes armés ou communautés animés par la course au contrôle des ressources naturelles et foncières ; à accélérer le processus de création d’un fonds national de réparations ; et enfin à adopter une approche pragmatique de la justice transitionnelle, qui tienne compte des besoins exprimés par la population, y compris dans le contexte d’insécurité et de conflits intercommunautaires.

Mme Keita-Bocoum a salué la coopération exemplaire du Gouvernement de la République démocratique du Congo à la mise en œuvre du mandat de l’Équipe d’experts.

S’exprimant en tant que défenseur des droits de l’homme, M. DISMAS KITENGE SENGA, Président-fondateur du Groupe Lotus, a affirmé que dans le contexte actuel marqué par la persistance des conflits armés dans la partie orientale du pays et la préparation aux élections générales de décembre 2023, les violations graves du droit internationale humanitaire et des droits humains, ainsi que le rétrécissement de l’espace démocratique sont à déplorer et à condamner. Il a estimé que le processus de paix et de rétablissement de l’autorité de l’État dans les régions affectées appelle une combinaison de plusieurs approches - politique, diplomatique, communautaire, militaire et relative aux droits humains.

M. Kitenge Senga a fait savoir que malgré les avancées enregistrées sur le plan militaire, l’état de siège instauré dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri peine à stopper les massacres à l’encontre des civils et à les protéger efficacement contre les exactions et les atrocités commises par les groupes armés actifs dans ces régions.

M. Kitenge Senga a ensuite salué les efforts menés pour lutter contre l’impunité et la corruption qui, a-t-il ajouté, méritent d’être bien définis et considérés comme une politique structurée et échelonnée à long terme répondant à toutes les normes internationales. Les quelques procès qui se sont tenus ont constitué un déclic encourageant, mais la société congolaise considère que toute la lumière n’a pas été faite, a-t-il fait observer. La justice congolaise se trouve en outre confrontée à des difficultés en termes de ressources et d’indépendance, a-t-il ajouté. Dans une société marquée par la persistance des conflits armés, les mécanismes de justice transitionnelle - soutenus par les autorités congolaises et accompagnés par des acteurs internationaux - doivent être portés par des victimes et des organisations de la société congolaise, a plaidé M. Kitenge Senga.

Par ailleurs, M. Kitenge Senga a fait savoir que les inquiétudes ne cessent de monter à l’approche des élections. Il a notamment fait état de menaces et d’intimidations à l’encontre des défenseurs des droits humains, des journalistes et des opposants politiques. À cet égard, il a rappelé que des retards importants ont été constatés non seulement dans la finalisation du processus législatif des lois essentielles en matière de protection des droits humains, mais également dans la procédure politique de renouvellement du mandat des membres de la Commission nationale des droits de l’homme

M. Kitenga Senga a insisté sur l’importance de privilégier des échanges réguliers et permanents entre les autorités congolaises et la MONUSCO. Ces échanges, a-t-il indiqué, doivent également être ouverts à la société civile pour, d’une part, consolider les acquis des processus de paix et, d’autre part, définir des modalités réalistes et concrètes du plan de désengagement et de retrait de la Mission, afin d’éviter l’anarchie et le chaos.

Aperçu du débat

Les deux délégations qui ont ouvert le débat ont déploré le rétrécissement significatif de l’espace démocratique et les violations des droits et des libertés fondamentales en République démocratique du Congo. Ont notamment été dénoncées les menaces, arrestations arbitraires et détentions visant des journalistes, des défenseurs des droits de l’homme et des activistes jugés critiques à l’égard des autorités congolaises, notamment en cette période pré-électorale.

L’accent a en outre été mis sur l’importance des mécanismes de reddition des comptes. L’impunité des auteurs de violations des droits humains et du droit international humanitaire souligne le caractère incontournable de la justice transitionnelle et de la prise en compte des aspects transfrontaliers des conflits, a-t-il été souligné. Les défis qui accompagnent ce caractère transfrontalier sont l’insécurité et l’exploitation illégale des ressources, a-t-il été précisé.

**Liste des intervenants : Union européenne, Islande (au nom d’un groupe de pays).

 

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