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Conseil des droits de l’homme : la crise climatique appelle une action urgente pour assurer la transition vers des économies vertes qui transformeront le monde du travail, souligne la Haute-Commissaire aux droits de l’homme par intérim

Compte rendu de séance

 

Le Conseil des droits de l’homme a tenu, ce matin, une réunion-débat consacrée à « l’avenir du droit au travail au regard de l’action et de la riposte face aux changements climatiques et des effets de ces changements dans le contexte d’économies durables et inclusives ». Lors de cette réunion-débat, un représentant de l’Organisation internationale du Travail a souligné que « ce n'est pas l'action contre les changements climatiques, mais plutôt l'inaction qui détruira des emplois et des moyens de subsistance à grande échelle ».

Dans des remarques liminaires, Mme Nada Al-Nashif, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme par intérim, a fait observer que la crise climatique, menace existentielle pour tous, aggravée par la récession sans précédent provoquée par la pandémie de COVID-19, appelle une action urgente pour assurer la transition vers des économies vertes, durables et inclusives qui transformeront le monde du travail.

Dans un tel contexte, il est fondamental de protéger les travailleurs contre le chômage pendant la transition vers les économies vertes, a souligné Mme Al-Nashif, recommandant que les États réservent des budgets afin de garantir le droit à la protection sociale et l'accès aux services essentiels.

La Haute-Commissaire par intérim a par ailleurs jugé inquiétant que la crise énergétique actuelle conduise un certain nombre de pays à intensifier l'exploitation des combustibles fossiles, au lieu d'accélérer la mise en œuvre des énergies renouvelables tout en insistant sur une plus grande efficacité énergétique.

Présentant lui aussi des remarques liminaires, M. Ahmed Ihab Abdelahad Gamaleldin, Représentant permanent de l’Égypte auprès des Nations Unies à Genève, a fait remarquer que « nous sommes engagés dans une course pour sauver notre planète » et a espéré que la COP 27, qui se tiendra en novembre prochain à Charm-el-Sheikh, permettrait d'accomplir les progrès indispensables.

Le débat a ensuite compté avec les contributions de quatre panélistes. M. Vic Van Vuuren, Directeur général adjoint par intérim pour les politiques de l'Organisation internationale du Travail, a souligné que la crise climatique a des effets profondément perturbateurs sur les personnes et leurs moyens de subsistance et met en péril la jouissance d’une multitude de droits, avec des implications particulièrement graves pour le droit au travail. Les pertes d’emplois causées par les changements climatiques dépassent largement celles liées aux politiques de transition écologique ; en fait, ces politiques de transition s’accompagnent d’énormes opportunités de création d’emplois, a-t-il fait observer.

« Ce n'est pas l'action contre les changements climatiques, mais plutôt l'inaction qui détruira des emplois et des moyens de subsistance à grande échelle », a insisté M. Van Vuuren.

Pour sa part, M. Ian Fry, Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme dans le contexte des changements climatiques, a constaté que si des efforts étaient bien consentis pour orienter les travailleurs des industries fossiles vers des emplois verts et décents, le Fonds monétaire international (FMI) estimait, dans le même temps, que le secteur des combustibles fossiles avait reçu 4700 milliards de dollars de subventions en 2015. Ces subventions ancrent l'industrie dans une position qui contredit les obligations de tous les pays de réduire leurs émissions [de gaz à effet de serre], a regretté M. Fry. En outre, a-t-il ajouté, les entreprises concernées utilisent le traité sur la charte de l'énergie pour verrouiller les contrats relatifs aux combustibles fossiles, ce qui est totalement irresponsable.

Les impacts des changements climatiques sur les travailleurs ne sont pas le fait de ces derniers : les principaux pays producteurs de gaz à effet de serre en sont responsables et il est temps que les pollueurs paient pour les pertes et les dommages qu'ils causent aux pays en développement, a demandé le Rapporteur spécial, plaidant pour la création d’un fonds de compensation des pertes et dommages.

M. Mahmoud Mohieldin, Envoyé spécial des Nations Unies pour le financement du Programme de développement durable à l’horizon 2030, et Champion de haut niveau pour l’action climatique pour la COP27, a affirmé qu’il n’est pas réaliste d’agir contre les changements climatiques sans tenir compte des objectifs de développement durable. L’introduction progressive de technologies à faibles émissions et la réduction progressive de celles à fortes émissions doivent répondre aux droits et aux besoins de toutes les personnes impactées par cette transition, y compris leur droit au travail, a-t-il indiqué.

M. Mohieldin a jugé indispensable que lors de la Conférence de Charm el-Cheikh de 2022 sur les changements climatiques , dite COP27, les accords et les promesses soient traduits en initiatives plus concrètes, qui permettent de créer de nouveaux emplois. Le passage à une économie résiliente et à faible émission de carbone peut et devrait être un moteur net de création d'emplois, a insisté M. Mohieldin, tout en reconnaissant des défis transitoires pour les travailleurs, les communautés et les pays au fur et à mesure que ces changements se produiront.

Pour sa part, Mme Sharan Burrow, Secrétaire générale de la Confédération syndicale internationale, a attiré l’attention sur les lignes de faille révélées par la pandémie de COVID-19, à savoir que certains travailleurs et travailleuses oeuvrent tous les jours, mais avec des salaires très bas, dans des services essentiels, pour que le reste d'entre nous puisse survivre. Face aux crises, en particulier face à la crise climatique, la transition doit se faire d'abord sur le lieu de travail, a ensuite souligné Mme Burrow. L'urgence climatique ne connaissant pas de frontières, il faut donc partager les solutions, la technologie, le financement, tant pour l'atténuation que pour l'adaptation, a-t-elle indiqué.

La transition juste signifie aussi que les gens ont le droit de concevoir leur propre avenir ; et pour les travailleurs, les garanties en la matière sont simples : il s’agit de veiller à ce que les syndicats soient à la table des négociations et assurent le respect des droits des travailleurs, a souligné Mme Burrow.

De nombreuses délégations* ont ensuite pris part à la discussion.

 

Ce midi, jusqu’à 13 heures, et cet après-midi, à partir de 15 heures, le Conseil poursuit son débat général au titre des situations relatives aux droits de l’homme qui requièrent son attention. Il en sera rendu compte dans un communiqué distinct publié en fin de journée .

 

Réunion-débat sur l’avenir du droit au travail au regard de l’action et de la riposte face aux changements climatiques et des effets de ces changements dans le contexte d’économies durables et inclusives

Conformément à sa résolution 49/11, le Conseil tient ce matin une réunion-débat sur l’avenir du droit au travail au regard de l’action et de la riposte face aux changements climatiques et des effets de ces changements dans le contexte d’économies durables et inclusives, en mettant l’accent sur l’importance de la coopération et des partenariats internationaux, afin de recenser les principales difficultés, les expériences et les meilleures pratiques.

La réunion-débat a été ouverte par MME KATHARINA STASCH, Vice-Présidente du Conseil des droits de l’homme, qui a présenté les intervenants.

Déclarations liminaires

MME NADA AL-NASHIF, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme par intérim, a fait observer qu’en raison de la pandémie de COVID-19, plus de 350 millions d'emplois avaient été perdus, alors que le nombre de personnes extrêmement pauvres est passé de 119 à 124 millions pour la seule année 2020 et que la faim dans le monde augmente à nouveau, avec environ 820 millions de personnes souffrant de la faim et 2 milliards de personnes en situation d'insécurité alimentaire. La crise de la COVID-19 a aussi entraîné une baisse estimée à 60% du revenu des travailleurs informels dans le monde, a-t-elle ajouté.

La crise climatique, menace existentielle pour tous, aggravée par la récession sans précédent provoquée par la pandémie, appelle une action urgente pour assurer la transition vers des économies vertes, durables et inclusives qui transformeront le monde du travail, a indiqué Mme Al-Nashif.

Il est fondamental, a poursuivi la Haute-Commissaire par intérim, de protéger les travailleurs contre le chômage pendant cette transition vers des « économies vertes ». De même, investir dans le secteur public et aider les personnes marginalisées doit devenir une priorité urgente. Dans ce contexte, l'éducation joue un rôle essentiel dans la réalisation d'un travail décent pour tous. Les États doivent investir dans le droit des personnes à l'éducation, y compris dans l'apprentissage tout au long de la vie, a souligné Mme Al-Nashif. Elle a par ailleurs insisté sur le fait que les femmes jouent un rôle essentiel dans l'économie mais que leurs contributions sont souvent ignorées, tandis que l'écart de rémunération entre les sexes est estimé à environ 23% au niveau mondial. Actuellement, 740 millions de femmes gagnent leur vie dans l'économie informelle, a fait observer la Haut-Commissaire par intérim.

Mme Al-Nashif a recommandé que les États réservent des budgets afin de garantir le droit à la protection sociale et l'accès aux services essentiels. En effet, les systèmes de sécurité sociale contribueront, notamment, à minimiser l'impact de la perte de quelque 2,7 millions d'emplois induite par l'action climatique et à garantir les droits à la santé, à l'alimentation, à l'eau et à l'assainissement, à l'éducation et au logement.

D’autre part, les États devraient profiter de la reprise après la COVID-19 pour mieux reconstruire, lutter contre le changement climatique et protéger les travailleurs et les communautés par des politiques et des mesures ancrées dans les droits de l'homme.

La Haute-Commissaire par intérim a jugé inquiétant que la crise énergétique actuelle conduise un certain nombre de pays à intensifier l'exploitation des combustibles fossiles, au lieu d'accélérer la mise en œuvre des énergies renouvelables tout en insistant sur une plus grande efficacité énergétique. Il est essentiel, a-t-elle ajouté, que les pays développés et la communauté internationale des donateurs, guidés par le principe de la coopération internationale, apportent un soutien financier et technique aux actions des pays à faible revenu en faveur d'économies vertes, durables et inclusives.

Pour sa part, M. AHMED IHAB ABDELAHAD GAMALELDIN, Représentant permanent de l’Égypte auprès des Nations Unies à Genève, a souligné que le droit au travail était à la fois indispensable à la réalisation des autres droits de l'homme, inhérent à la dignité humaine et à la justice sociale, et essentiel pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD).

Dans le même temps, les changements climatiques représentent une menace existentielle à laquelle la communauté internationale doit faire face collectivement et rapidement. Les travailleurs et les communautés touchés par les changements climatiques devraient être couverts par la protection sociale, par des investissements visant à créer des opportunités économiques ainsi que par une formation et une assistance appropriées pour les demandeurs d'emploi, afin d'assurer une transition juste vers des économies et des sociétés écologiquement durables.

Cette transition pose de nombreux problèmes, notamment ceux liés aux effets de toute restructuration économique, à savoir le déplacement de travailleurs et d'éventuelles pertes d'emplois, mais aussi ceux liés à l'adaptation aux changements climatiques, tant pour les entreprises que pour les lieux de travail, afin d'éviter la perte d'actifs et de moyens de subsistance, ou encore ceux découlant des effets négatifs de la hausse des prix de l'énergie et des produits de base sur les revenus des ménages pauvres.

« Nous sommes engagés dans une course pour sauver notre planète », a aussi souligné M. Gamaleldin, « et nous devons veiller à ce que la prochaine COP 27 * soit un moyen d'accomplir les progrès indispensables. Nous devons passer des promesses à la mise en œuvre, et faire en sorte que toutes les promesses se concrétisent sur le terrain dans les pays qui en ont le plus besoin. »

[* La Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques se tiendra à Charm-el-Sheikh, en Égypte, du 6 au 18 novembre prochain.]

Déclarations des panélistes

M. VIC VAN VUUREN, Directeur général adjoint par intérim pour les politiques de l'Organisation internationale du Travail (OIT), a indiqué que cette discussion avait lieu à un moment où les implications de la crise climatique sont ressenties avec acuité dans toutes les régions du monde. La crise climatique a des effets profondément perturbateurs sur les personnes et leurs moyens de subsistance et met en péril la jouissance d’une multitude de droits, avec des implications particulièrement graves pour le droit au travail, a-t-il souligné.

Le travail, a rappelé M. Van Vuuren, est au cœur du mandat de l’OIT – qui consiste à promouvoir un travail décent pour tous – et est également au cœur de sa mission, qui est de faire progresser la justice sociale. Le travail est également essentiel pour l’existence de chaque être humain. Il s’inscrit à l’agenda du développement durable, précisément à travers l’Objectif n°8 du Programme de développement durable à l’horizon 2030, qui appelle à la promotion d’une croissance économique soutenue, inclusive et durable, du plein emploi productif et du travail décent.

Les changements climatiques ont eu un large éventail d’impacts sur le monde du travail et le droit au travail lui-même, a fait observer M. Van Vuuren, rappelant que selon un rapport de l’OIT de 2019, l’équivalent de 80 millions d’emplois à temps plein pourraient être perdus d’ici 2030. Les pertes d’emplois causées par les changements climatiques dépassent en outre largement celles liées aux politiques de transition écologique ; en fait, ces politiques de transition s’accompagnent d’énormes opportunités de création d’emplois. Selon les estimations de l’OIT, 24 millions de nouveaux emplois pourraient être créés d’ici 2030 si l’Accord de Paris de 2015 sur les changements climatiques est mis en œuvre. De plus, des millions d'emplois pourraient être créés dans le cadre d'une transition vers une économie circulaire et même si cette dernière pourrait entraîner la perte de millions d'emplois, il y aurait tout de même un solde positif, a insisté le Directeur général.

M. Van Vuuren a tenu à préciser que « ce n'est pas l'action contre les changements climatiques, mais plutôt l'inaction qui détruira des emplois et des moyens de subsistance à grande échelle ». Toutefois, il ne faut pas sous-estimer l'ampleur et la difficulté des transformations structurelles requises, a-t-il ajouté, soulignant que parmi les défis à relever figure la répartition géographique inégale des créations et des pertes d'emplois.

Le Directeur général a également indiqué que sur les quelque 20 millions de nouveaux emplois attendus dans le cadre de la transition énergétique durable d'ici à 2030, on estime que seuls 6 millions d'emplois iront aux femmes. Une transition vers une économie verte n'entraînera pas automatiquement des résultats inclusifs et équitables et pourrait exacerber les inégalités existantes, notamment pour les femmes, les personnes handicapées, les peuples indigènes et tribaux, ou les travailleurs migrants.

C’est pourquoi il est nécessaire de mettre en place des cadres politiques complets et cohérents, a fait savoir M. Van Vuuren. Cela signifie qu'il faut également s'attaquer aux inégalités, les surmonter et donner des moyens d'action aux principaux agents du changement. Il est essentiel de garantir une transition équitable pour tous et de promouvoir et protéger les droits de l'homme et du travail. Reprenant les propos du Secrétaire général des Nations Unies, M. Van Vuuren a estimé qu’il fallait de toute urgence « un contrat social renouvelé », ancré dans les droits de l'homme, afin de faire progresser la justice sociale.

Entre autres réflexions, M. IAN FRY, Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme dans le contexte des changements climatiques, a constaté que si des efforts étaient bien consentis pour orienter les travailleurs des industries fossiles vers des emplois verts et décents, le Fonds monétaire international (FMI) estimait, dans le même temps, que le secteur des combustibles fossiles avait reçu 4700 milliards de dollars de subventions en 2015. Ces subventions ancrent l'industrie dans une position qui contredit les obligations de tous les pays de réduire leurs émissions, a regretté l’expert. D’autre part, les entreprises concernées utilisent le traité sur la charte de l'énergie pour verrouiller les contrats relatifs aux combustibles fossiles, ce qui est totalement irresponsable, a-t-il ajouté. Enfin, les lobbies de travailleurs de l'industrie des combustibles fossiles freinent la transition des pays vers des économies fondées sur les énergies renouvelables, a constaté le Rapporteur spécial.

M. Fry a insisté sur l’importance, pour les pays en développement, de trouver des politiques de transition justes et efficaces. La difficulté est que ces pays ne disposent pas des technologies nécessaires pour passer à une économie fondée sur les énergies renouvelables ni pour mettre en place les filets de sécurité nécessaires aux travailleurs qui seront contraints de quitter l'industrie des combustibles fossiles. En théorie, les travailleurs devraient pouvoir bénéficier d'un renforcement de leurs compétences afin de trouver d'autres opportunités d'emploi, notamment dans le secteur des énergies renouvelables : mais peu de choses se passent dans ce domaine, car le secteur privé a peu d'obligations dans les pays en développement et les gouvernements ont une flexibilité économique limitée pour soutenir de telles actions.

Les changements climatiques, a résumé l’expert, ont un impact énorme sur les économies de nombreux pays en développement et sur la possibilité pour des millions de personnes de jouir du droit au travail. Les impacts des changements climatiques sur ces travailleurs ne sont pas le fait de ces derniers : les principaux pays producteurs de gaz à effet de serre en sont responsables et il est temps que les pollueurs paient pour les pertes et les dommages qu'ils causent aux pays en développement, a demandé le Rapporteur spécial, qui a plaidé pour la création d’un fonds de compensation des pertes et dommages.

M. MAHMOUD MOHIELDIN, Envoyé spécial des Nations Unies pour le financement du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et Champion de haut niveau pour l’action climatique pour la COP27, a estimé que lorsque l’on s’attaque aux effets néfastes des changements climatiques, il est impératif d'adopter une approche holistique dans le cadre d'un programme plus global de développement durable. Il n’est pas réaliste d’agir contre les changements climatiques sans tenir compte des objectifs de développement durable (ODD), a-t-il insisté. Il a expliqué qu’une transition juste vers un modèle économique à faibles émissions et résilient au climat signifie qu’il faut s’assurer que l’action climatique mondiale et locale protège la planète, les personnes et l’économie. Ainsi, l’introduction progressive de technologies à faibles émissions et la réduction progressive de celles à fortes émissions doivent répondre aux droits et aux besoins de toutes les personnes impactées par cette transition, y compris leur droit au travail, a-t-il indiqué.

M. Mohieldin a jugé indispensable que lors de la Conférence de Charm el-Cheikh de 2022 sur les changements climatiques, dite COP27, les accords et les promesses soient traduits en initiatives plus concrètes, qui permettent de créer de nouveaux emplois. L’Envoyé spécial de l’ONU a en outre reconnu que certains secteurs et communautés pourraient subir des pertes d’emplois en raison de la transition vers des économies à faible émission de carbone. Toutefois, dans l’ensemble, davantage d'emplois pourraient être créés par le développement des secteurs verts, a-t-il fait valoir.

Sur la route de la COP27, la Présidence de la Conférence ainsi que les Commissions régionales de l'ONU et les Champions du climat ont lancé une série de cinq forums régionaux, a fait savoir M. Mohieldin. Quatre forums ont déjà eu lieu et plus de 100 projets sont prêts à être financés, a-t-il précisé. Ces projets climatiques montrent que la transition vers des économies à faible émission de carbone peut effectivement créer plus d'emplois ; ils ne doivent d’ailleurs pas être mis en œuvre uniquement aux niveaux régional et national, mais également au niveau local afin de relever les défis de la pauvreté et du chômage à l'échelle locale, a ajouté l’Envoyé spécial.

Le passage à une économie résiliente et à faible émission de carbone peut et devrait être un moteur net de création d'emplois, a insisté M. Mohieldin, tout en reconnaissant des défis transitoires pour les travailleurs, les communautés et les pays au fur et à mesure que ces changements se produiront. C’est pourquoi l'ensemble des dimensions environnementales, sociales et de gouvernance de l'investissement responsable doivent être intégrées dans des stratégies plus larges qui visent à lutter contre les impacts négatifs des changements climatiques, a-t-il souligné.

Pour sa part, MME SHARAN BURROW, Secrétaire générale de la Confédération syndicale internationale, a plaidé pour une réforme majeure de la façon dont nous pensons à construire un avenir juste et durable. En effet, la pandémie de COVID-19 a révélé les lignes de faille : certains travailleurs et travailleuses oeuvrent tous les jours, mais avec des salaires très bas, dans des services essentiels, pour que le reste d'entre nous puisse survivre. Non seulement ils sont mal payés, mais en plus ils ne bénéficient que de très peu de protection en matière de santé et de sécurité. D’autre part, les travailleurs et leurs familles ne peuvent pas se permettre les hausses de prix dues aux pics inflationnistes dans la nourriture et l'énergie, a souligné Mme Burrow.

Face aux crises, en particulier face à la crise climatique, la transition doit se faire d'abord sur le lieu de travail, a poursuivi l’oratrice. L'urgence climatique ne connaissant pas de frontières, il faut donc partager les solutions, la technologie, le financement, tant pour l'atténuation que pour l'adaptation, a-t-elle indiqué. La transition juste signifie aussi que les gens ont le droit de concevoir leur propre avenir ; et pour les travailleurs, les garanties en la matière sont simples : il s’agit de veiller à ce que les syndicats soient à la table des négociations et assurent le respect des droits des travailleurs, négociant une aide au revenu, un soutien aux compétences et une aide au redéploiement pour les jeunes travailleurs, de même que des investissements vers des secteurs où des emplois peuvent être créés, a souligné Mme Burrow.

Mme Burrow a aussi évoqué la nécessité de décharger les femmes du fardeau des soins, afin qu’elles puissent trouver des emplois dans d'autres secteurs, plus rémunérateurs ; de créer des emplois dans la transition industrielle ; et d’investir dans la protection sociale universelle.

Aperçu du débat

Les effets néfastes des changements climatiques sur l'exercice des droits de l'homme, y compris sur l'exercice du droit au travail, touchent de manière disproportionnée les femmes et les filles, les jeunes et les personnes âgées, les peuples autochtones, les personnes handicapées, celles qui vivent dans des zones de conflit et celles qui se trouvent dans les situations les plus vulnérables, a-t-il été souligné. Dans le même temps, les travailleurs de l'agriculture et de la sylviculture sont très exposés aux effets de la hausse des températures, a-t-il été ajouté. La modification du régime des précipitations et les phénomènes météorologiques extrêmes, comme les récentes inondations au Pakistan, perturbent les cycles agricoles et affectent gravement les revenus des agriculteurs et de leurs familles, a-t-on insisté.

Dans ce contexte, d'ici à 2030, quelque 80 millions d'emplois, y compris ceux relevant de services essentiels, pourraient être perdus en raison de la hausse des températures, et ce sans compter la croissance des emplois précaires, ont mis en garde des intervenants. Il faut donc s’adapter à la nouvelle réalité et, notamment, garantir le droit au travail, a-t-il été souligné. Alors que les gouvernements cherchent à respecter les engagements pris dans le cadre de l'Accord de Paris, il est impératif de trouver des moyens de limiter les pertes d'emplois liées à l'action climatique, ont fait observer des pays.

Il faut trouver un équilibre entre une action climatique sérieuse et l'engagement en faveur du développement humain et social, a-t-il été recommandé, d’aucuns insistant sur l’intérêt certain qu’il y a à partager des expériences et des modalités de soutien et de coopération qui facilitent la transition vers des activités économiques productives et la création d'emplois alignés sur le développement durable, la protection de l'environnement et la résilience climatique.

Plusieurs délégations ont mis en avant le potentiel de création d’emplois dans l’économie verte. Les pays en voie de développement devront être aidés à créer ces emplois durables et à mettre au point des paquets de mesures destinées à atteindre les objectifs de l’Accord de Paris, a-t-on recommandé.

Dans une transition juste, les droits des travailleurs doivent passer au premier plan, tandis que l’égalité entre les sexes au travail doit elle aussi être garantie, a-t-il été affirmé. Une grande question sera de savoir comment la transition après la pandémie de COVID-19 pourra être respectueuse de l’environnement, a estimé une délégation.

Relevant que le système alimentaire agro-industriel est l'un des principaux moteurs de l'urgence climatique et de l'écodestruction, une ONG a plaidé pour que la transition vers l'agroécologie se fasse en accord avec les droits de l’homme et la Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales.

Des délégations ont recommandé de tenir compte des enjeux climatiques dans tous les domaines des droits de l’homme, y compris pour ce qui est du droit au développement ; de défendre l'égalité des sexes sur le lieu de travail tout en protégeant l'environnement ; et de renoncer à l'utilisation irresponsable des ressources naturelles.

Liste des intervenants : Trinité-et-Tobago (au nom d'un groupe de pays), Union européenne, Lituanie (au nom d'un groupe de pays), Arabie saoudite (au nom du Conseil de coopération du Golfe), Viet Nam (au nom de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est), Timor-Leste (au nom d’un groupe de pays), Iraq, Samoa, Sénégal, Maldives, Costa Rica, Portugal (au nom de la Communauté des pays de langue portugaise),Global Initiative for Economic, Social and Cultural Rights, Ordem dos Avocados do Brasil, Centre Europe Tiers-Monde, Libye, Népal, Émirats arabes unis, Viet Nam, Niger, Pologne, Îles Marshall, Organisation de la coopération islamique, Bhoutan, Mauritanie, Sierra Leone, France, Fian International, Earth Justice et Make Mothers Matter.

Réponses et remarques de conclusion

M. VAN VUUREN a dit avoir constaté que des progrès techniques importants avaient été réalisés pour faire face aux changements climatiques. Il existe cependant un fossé toujours plus grand, à cet égard, entre les économies développées et celles en développement. Il faut instaurer des cadres réglementaires appropriés dans tous pays et tenir compte des aspects sociaux, climatiques et économiques de manière intégrée, a-t-il plaidé.

Le grand problème, c’est que les politiques de formation produisent des jeunes qui ne sont pas employables, a ensuite fait remarquer le Directeur général adjoint par intérim pour les politiques de l'OIT. Les jeunes doivent être dotés de compétences qui seront nécessaires à l’avenir, compétences dont l’OIT participe à la définition, a-t-il indiqué. Il a en outre plaidé pour le dialogue social et pour un rapprochement avec les PME créatrices des emplois de demain : elles doivent, elles aussi, participer à l’amélioration des aspects environnementaux de l’économie, a-t-il souligné.

 

Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information ; il ne constitue pas un document officiel.

Les versions anglaise et française de nos communiqués sont différentes car elles sont le produit de deux équipes de couverture distinctes qui travaillent indépendamment.

 

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