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Le Conseil des droits de l’homme achève son débat sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable et se penche sur les questions relatives aux disparitions forcées et à l’utilisation de mercenaires

Compte rendu de séance

 

Ce matin, le Conseil des droits de l’homme a tenu un dialogue avec le Groupe de travail sur les disparitions forcées, après avoir clos – en entendant les déclarations de plusieurs intervenants* – son dialogue entamé hier avec l’Expert indépendant sur la promotion d'un ordre international démocratique et équitable, M. Livingstone Sewanyana. Le Conseil a également engagé ce matin son dialogue avec le Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Présentant le rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, qu’il préside, M. Luciano Hazan a rappelé que cette année marquait le trentième anniversaire de la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Il a ensuite indiqué que le rapport annuel du Groupe de travail documente la transmission de 375 nouveaux cas à 26 États, parmi lesquels 54 cas ont été transmis en procédure d’action urgente à 13 États ; ces chiffres élevés ne sont en aucun cas une représentation complète et fiable de l’ampleur des disparitions forcées dans le monde aujourd’hui, a-t-il souligné.

M. Hazan a affirmé que face aux nouvelles pratiques relatives aux disparitions forcées, de nouvelles réponses et une nouvelle approche étaient nécessaires. Ainsi, le Groupe de travail a-t-il annoncé son intention de mener une étude thématique sur les nouvelles technologies et les disparitions forcées.

M. Hazan a ensuite rendu compte de la visite que le Groupe de travail a effectuée à Chypre en avril 2022 et a indiqué que le rapport sur la visite que le Groupe a faite en Uruguay en juillet dernier serait présenté lors de la session de septembre 2023 du Conseil.

D’une manière générale, de nombreux progrès ont été réalisés dans la lutte contre les disparitions forcées, mais ils demeurent insuffisants pour enrayer complètement ce fléau, a souligné M. Hassan. Il a lancé un appel à la communauté internationale afin qu’elle s’unisse et redouble d’efforts pour faire face à ce terrible crime. Tout effort à cette fin devra s’articuler autour des besoins spécifiques des victimes, a-t-il conclu, appelant tous les États à ratifier la Convention internationale sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et à reconnaître la compétence du Comité pour recevoir et examiner des plaintes individuelles et interétatiques.

Chypre a fait une déclaration en tant que pays concerné avant que de nombreuses délégations** ne prennent part au dialogue avec M. Hazan.

Intitulé « Accès à la justice, établissement des responsabilités et voies de recours pour les victimes de mercenaires, d’acteurs liés au mercenariat et de sociétés militaires et de sécurité privées », le rapport du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires a quant à lui été présenté par Mme Sorcha McLeod, Présidente-Rapporteuse dudit Groupe. Au fil des ans, le Groupe de travail a observé avec inquiétude l'utilisation croissante de mercenaires, d'acteurs liés au mercenariat et de sociétés militaires et de sécurité privées dans des contextes de conflit, d'après-conflit et de temps de paix, a souligné Mme McLeod. Le Groupe a déjà noté avec inquiétude la manière dont des États tiers non impliqués dans des conflits armés s'insèrent de plus en plus dans des conflits en recrutant, formant, finançant et déployant des mercenaires dans des guerres dites par procuration (proxy), a-t-elle insisté. Le présent rapport met à nouveau en garde contre le recrutement de ces acteurs qui prolongent les conflits, augmentent considérablement le risque de violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international et sapent les efforts de paix, a-t-elle expliqué.

De même, a poursuivi la Présidente-Rapporteuse, le Groupe de travail constate que les entreprises militaires et de sécurité privées se repositionnent pour attirer de nouveaux clients ; dans certains cas, elles offrent des services qui ont longtemps été considérés comme relevant des États et qui peuvent augmenter la probabilité de violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international. Ces tendances suscitent de vives inquiétudes quant aux effets négatifs de ces activités, en particulier pour des groupes particuliers de victimes, a expliqué Mme McLeod.

La capacité des victimes d’obtenir justice dépend de l'existence de services publics efficaces et équitables, a poursuivi la Présidente-Rapporteuse, avant d’ajouter que le Groupe de travail préconise une approche intersectionnelle centrée sur les victimes pour garantir l’accès à la justice et aux recours. Le Groupe de travail appelle en outre les États à adopter un instrument international juridiquement contraignant sur les activités des sociétés militaires et de sécurité privées, a rappelé la Présidente-Rapporteuse.

 

Suite à cette présentation, plusieurs délégations*** ont engagé avec Mme McLeod un dialogue qui se poursuivra cet après-midi à 15 heures. Le Comité engagera ensuite son dialogue avec le Rapporteur spécial sur les incidences sur les droits de l’homme de la gestion et de l’élimination écologiquement rationnelles des produits et déchets dangereux.

 

Fin du dialogue avec l’Expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable

Aperçu du dialogue

Les organisations non gouvernementales (ONG) qui ont pris la parole ce matin se sont félicitées que l'Expert indépendant reconnaisse l’importance de traiter tous les cas d’utilisation illégale de la force qui ont eu lieu depuis que les Nations Unies ont été créées. Il a été rappelé qu’il n'y a pas de prescription pour les crimes de guerre ou d'agression.

La nécessité de réformer les principaux organes des Nations Unies ainsi que celle d'une plus grande participation de la société civile aux processus de gouvernance mondiale a été reconnue à plusieurs reprises. Une ONG a insisté sur l’importance de prévenir les conflits et de dégager des ressources pour la transition écologique, pour changer l’économie, pour construire une paix durable et, enfin, pour augmenter le budget de l'ONU.

Une ONG a mis en garde contre la prolifération de groupes armés dans les conflits armés, qui constitue une menace imminente pour la paix et la sécurité internationales, en raison des graves violations – y compris des crimes contre l’humanité – que ces groupes commettent.

L’Expert indépendant a été appelé à se pencher sur les menaces pour la paix et la sécurité internationales et pour l’état de droit qu’engendrent les mesures coercitives unilatérales – mesures que d’aucuns ont considéré relever d’une forme d’unilatéralisme. L’engagement des États-Unis envers la démocratie et l'équité a été mis en cause.

*Liste des intervenants : International-Lawyers.Org,Center for Global Nonkilling,Associazione Comunita Papa Giovanni XXIIIMedical Support Association for Underprivileged Iranian PatientsJameh Ehyagaran Teb Sonnati Va Salamat Iranian,China Society for Human Rights Studies (CSHRS)Shaanxi Patriotic Volunteer Association et Maat for Peace, Development and Human Rights Association.

Réponses et remarques de conclusion de l’Expert indépendant

M. LIVINGSTONE SEWANYANA, Expert indépendant sur la promotion d'un ordre international démocratique et équitable, a insisté sur le fait qu’il était impératif d’atteindre la paix et la sécurité en tant que condition de l’instauration d’un ordre international équitable et démocratique.

Les États devraient s’abstenir de menacer de recourir à la force pour régler leurs différends. Ils devraient aussi s’abstenir de faire preuve d’unilatéralisme et de recourir aux mesures coercitives unilatérales, a demandé M. Sewanyana.

La réforme du Conseil de sécurité devrait être initiée par une Assemblée générale revitalisée, a par ailleurs plaidé l’Expert indépendant. Il a indiqué qu’il s’intéresserait, l’année prochaine, à la question du droit à l’autodétermination.

Dialogue avec le Groupe de travail sur les disparitions forcées

Le Conseil est saisi du rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires (A/HRC/51/31) et des annexes au rapport traitant de la visite du Groupe à Chypre (A/HRC/51/31/Add.1 et 2, à paraître en français) et du trentième anniversaire de la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées A/HRC/51/31/Add.3, également à paraître en français).

Présentation

M. LUCIANO HAZAN, Président-Rapporteur du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, a rappelé que cette année marquait le trentième anniversaire de la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. À cette occasion, le Groupe de travail a lancé une initiative spéciale de commémoration qui vise à faire le point sur les progrès du droit international concernant les disparitions forcées et à définir les obstacles qui entravent la mise en oeuvre de la Déclaration, ainsi que les moyens par lesquels le Groupe de travail pourrait aider les États à les surmonter, notamment au travers de l’assistance technique et de la coopération, a indiqué M. Hazan.

Tout au long de ces trente dernières années, le Groupe de travail [créé par l’ancienne Commission des droits de l’homme en 1980] a travaillé sans relâche, et continuera de le faire, pour aider des milliers de proches de personnes disparues, a rappelé M. Hazan. Des progrès ont été réalisés, notamment avec l’adoption en 2006 de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Cependant, a souligné le Président-Rapporteur du Groupe, malgré les engagements et les promesses des États, cette horrible pratique continue d’exister et de nouvelles tendances alarmantes ont émergé.

Le rapport annuel du Groupe de travail documente la transmission de 375 nouveaux cas à 26 États, parmi lesquels 54 cas ont été transmis en procédure d’action urgente à 13 États. Ces chiffres élevés ne sont en aucun cas une représentation complète et fiable de l’ampleur des disparitions forcées dans le monde aujourd’hui, a indiqué M. Hazan.

Le Président-Rapporteur du Groupe de travail a affirmé que face aux nouvelles pratiques relatives aux disparitions forcées, de nouvelles réponses et une nouvelle approche étaient nécessaires. Ainsi, lors de sa 125ème session, le Groupe de travail a-t-il annoncé son intention de mener une étude thématique sur les nouvelles technologies et les disparitions forcées, en étudiant trois aspects de la façon dont les nouvelles technologies sont utilisées. Sous un premier aspect, a précisé M. Hazan, il s’agit de voir comment elles sont utilisées contre les défenseurs des droits de l’homme et les organisations de la société civile, y compris les proches des personnes disparues et leurs représentants, et d’identifier quel type de stratégie de protection existent ou peuvent être établies. Sous un deuxième aspect, il s’agit d’examiner comment ces technologies peuvent être appliquées efficacement pour faciliter la recherche de personnes disparues et de veiller à ce que leur sort et leur localisation soient établis rapidement. Enfin, sous un troisième aspect, il s’agit de voir comment les technologies peuvent être utilisées pour obtenir des preuves d’actes de disparition forcée.

M. Hazan a d’autre part indiqué qu’au cours de la période couverte, le Groupe de travail a pu reprendre ses visites de pays en se rendant notamment à Chypre en avril 2022. Au cours de cette visite, le Groupe a relevé que la division de l’île continuait d’avoir des répercussions sur la promotion et la protection des droits de l’homme en général, y compris le droit à la vérité, à la justice, à la réparation et à la mémoire des proches des personnes disparues après les événements survenus entre 1963 et 1964 et en 1974. M. Hazan a reconnu que des progrès ont été accomplis, notamment grâce au travail du Comité bicommunautaire sur les personnes disparues. Toutefois, les progrès ralentissent ces dernières années et des défis importants subsistent, a souligné le Président-Rapporteur. Il a fait part de ses préoccupations quant au temps qui s’est écoulé depuis les disparitions et à l’âge avancé de nombreux proches et témoins. Aussi, a-t-il estimé qu’une action urgente est nécessaire pour accélérer les exhumations, l’identification et le retour des dépouilles des victimes. Il est essentiel de dépolitiser la question des personnes disparues en la traitant comme une question humanitaire et de droits de l’homme, et de dissiper la méfiance en vue de mettre un terme à la douleur des familles, a souligné M. Hazan.

Le Groupe de travail se félicite qu’à l’issue de cette visite, Chypre ait fait part de sa volonté d’entamer des consultations pour mieux comprendre et étudier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, que l'État a signée mais n'a pas encore ratifiée.

M. Hazan a indiqué que le Groupe de travail a également pu se rendre en Uruguay, en juillet 2022, et qu’il est en train de préparer son rapport de visite pour présentation lors de la session de septembre 2023 du Conseil.

D’une manière générale, de nombreux progrès ont été réalisés dans la lutte contre les disparitions forcées, mais ils demeurent insuffisants pour enrayer complètement ce fléau, a souligné M. Hassan. Il a lancé un appel à la communauté internationale afin qu’elle s’unisse et redouble d’efforts pour faire face à ce terrible crime. Tout effort à cette fin devra s’articuler autour des besoins spécifiques des victimes, afin d’alléger leurs souffrances, d’établir la vérité et d’assurer justice et réparation, a conclu le Président-Rapporteur, appelant tous les États à ratifier la Convention et à reconnaître la compétence du Comité pour recevoir et examiner des plaintes individuelles et interétatiques.

Pays concerné

Chypre a souligné que l’écoulement du temps avait pour effet de ralentir les progrès dans l’identification des victimes de disparition forcée. Les moindres fragments de dépouilles peuvent permettre d’identifier un corps, pour autant que l’accès aux lieux où les corps ont été enterrés, ou réenterrés, soit possible. Cette question doit être considérée comme une question humanitaire et non politique, a plaidé Chypre.

Aperçu du débat

Soulignant que l’on commémore cette année le trentième anniversaire de la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, plusieurs délégations ont déploré que les disparitions forcées demeurent une réalité alarmante, de sorte que cette question doive rester à l’ordre du jour.

Les États ont été encouragés à coopérer activement avec le Groupe de travail, en autorisant notamment les visites de terrain et en mettant en œuvre, au niveau national, ses recommandations. La contribution du Groupe de travail est importante, notamment dans le contexte actuel, a souligné une délégation. Les disparitions forcées continuent d’être une réalité dans toutes les régions du monde et connaissent même une résurgence, ont relevé de nombreuses délégations, rappelant que ces pratiques peuvent constituer des crimes contre l’humanité.

Nombre d’intervenants ont rappelé que l’adoption de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, entrée en vigueur il y a douze ans, a marqué une étape décisive dans la lutte contre ces pratiques. Aussi, un appel a-t-il été lancé pour que davantage d’États ratifient cet instrument et reconnaissent la compétence du Comité contre les disparitions forcées pour examiner des plaintes individuelles et interétatiques, comme le recommande le Groupe de travail.

Aucune circonstance, quelle qu’elle soit – qu’il s'agisse d'une menace de guerre, d'un état de guerre, d'une situation d’instabilité politique intérieure ou de tout autre état d'exception – ne peut être invoquée pour justifier des disparitions forcées, a-t-il été souligné. L’attention a d’autre part été attirée sur les représailles subies par les familles des victimes et les défenseurs des droits humains, ainsi que sur le nombre croissant de disparitions forcées de journalistes et de travailleurs des médias – autant de phénomène jugés particulièrement alarmants.

Certains États ont fait part des progrès qu’ils ont réalisés pour enquêter et résoudre les cas de disparitions forcées dans leur pays. D’autres ont insisté sur la nécessité de lutter contre ces pratiques odieuses et, notamment, de traduire en justice les auteurs de ces crimes. Il a été expressément demandé aux États de mettre un terme aux disparitions forcées, de les prévenir, et de mener des enquêtes impartiales et indépendantes sur les cas de disparition.

Plusieurs intervenants ont salué la pertinence du choix du Groupe de travail d’envisager une étude thématique sur l’utilisation des nouvelles technologies. Cette étude permettra aux États de comprendre comment ces nouvelles technologies sont utilisées contre des défenseurs des droits de l’homme et comment elles peuvent faciliter la recherche de personnes disparues et être utilisées pour obtenir des preuves de la commission d’un crime de disparition forcée, a-t-il été relevé.

Un certain nombre de délégations ont déploré certaines allégations contenues dans le rapport du Groupe de travail, qu’elles ont jugées sans fondement, d’aucuns appelant le Groupe de travail à respecter son mandat en toute impartialité et objectivité. Un intervenant a déploré que le rapport du Groupe de travail ne contienne aucun cas ni ne fasse part d’aucune préoccupation concernant les pays occidentaux, malgré les différentes plaintes et preuves accablantes présentées par la société civile sur des cas de disparition forcée de migrants, de réfugiés et de membres de minorités ethniques dans ces pays.

**Liste des intervenants : Lituanie (au nom d'un groupe de pays), Union européenne, Organisation des États américains, Belgique (au nom d'un groupe de pays), Argentine (au nom d'un groupe de pays), France, Égypte, République populaire démocratique de Corée, Iraq, Afghanistan, Maldives, Venezuela, Afrique du Sud, Fédération de Russie, Chine, Honduras, République arabe syrienne, Arménie, Cameroun, États-Unis, Indonésie, Bangladesh, Pakistan, Croatie, Népal, Ukraine, Yémen, Niger, Azerbaïdjan, Thaïlande, Portugal, Cuba, Kenya, Royaume-Uni, Malawi, Serbie, Japon, Grèce, Türkiye, Gambie, Iran, Bosnie-Herzégovine, Tunisie, Cambodge et Équateur.

Les institutions nationales des droits de l’homme du Burundi et de l’Arménie ont également pris la parole, ainsi que les organisations non gouvernementales ci-après : Association internationale des avocats et juristes juifs, Institut International pour les Droits et le Développement, Asian Legal Resource Centre, Organisation internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, Peace Brigades International, The Organization for Poverty Alleviation and Development, Meezaan Center for Human Rights, Conectas Direitos Humanos, Fédération latino-américaine des associations des familles des détenus disparus - FEDEDAM, Lawyers' Rights Watch Canada.

Réponses et remarques de conclusion

M. HAZAN a tout d’abord voulu réagir à l’intervention de la délégation de Chypre, qui s’est dite engagée en faveur des recommandations formulées par le Groupe de travail à l’intention de ce pays. Le Groupe de travail tient à attirer l’attention sur le travail du Comité bicommunautaire, qui est une source d’inspiration et un modèle pour d’autres pays qui font face à des conflits armés, et il met l’accent sur la nécessité de dépolitiser la question des personnes disparues, a indiqué le Président-Rapporteur. Seul un processus participatif et bicommunautaire peut permettre de faire connaître la vérité, a-t-il ajouté.

M. Hazan a ensuite précisé que le Groupe de travail œuvre sur la base de signalements transmis. À ceux qui insinuent que le Groupe serait partial et participerait à un programme politique, il a rappelé que le Groupe fonctionne sur la base de normes impartiales, comme en témoigne sa composition puisqu’il est constitué de cinq experts indépendants issus de cinq régions différentes et élus via un mécanisme indépendant.

M. Hazan a par ailleurs fait savoir que les informations reçues par le Groupe de travail indiquent que des disparitions de personnes ont été commises par des groupes de soldats appartenant à la Fédération de Russie ou affiliés à la Fédération de Russie. Le Groupe de travail a également reçu des informations convaincantes indiquant que les personnes disparues des régions de Louhansk et de Donetsk ont été transférées vers la Fédération de Russie, a ajouté le Président-Rapporteur.

S’adressant à la République arabe syrienne, M. Hazan a souligné que le Groupe de travail n’était pas un canal de communication entre le Gouvernement et les familles des personnes disparues. Ces dernières, a-t-il dit, souhaitent que soit créé un mécanisme spécial et indépendant chargé de mener des enquêtes sur les cas de disparitions.

Concernant sa visite à Chypre, M. Hazan a rappelé que les éléments pertinents du rapport ont été portés à la connaissance du Gouvernement turc et qu’aucune réponse de la part de ce dernier n’avait été reçue.

M. Hazan a par ailleurs lancé un appel au Bangladesh pour que cet État accepte une visite du Groupe de travail. Il s’est en outre félicité que l’Iraq ait accepté d’accueillir une visite du Groupe.

S’agissant de l’Arménie et de l'Azerbaïdjan, le Groupe de travail souhaite que les victimes ne soient pas utilisées comme un élément de négociations par les deux pays.

Dialogue avec le Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires

Le Conseil est saisi du rapport du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes (A/HRC/51/25), intitulé « Accès à la justice, établissement des responsabilités et voies de recours pour les victimes de mercenaires, d’acteurs liés au mercenariat et de sociétés militaires et de sécurité privées ».

Présentation

Présentant ce rapport, MME SORCHA MACLEOD, Présidente-Rapporteuse du Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, a indiqué qu’au fil des ans, le Groupe de travail a observé avec inquiétude l'utilisation croissante de mercenaires, d'acteurs liés au mercenariat et de sociétés militaires et de sécurité privées dans des contextes de conflit, d'après-conflit et de temps de paix. Le Groupe a déjà noté avec inquiétude la manière dont des États tiers non impliqués dans des conflits armés s'insèrent de plus en plus dans des conflits en recrutant, formant, finançant et déployant des mercenaires dans des guerres dites par procuration (proxy), a-t-elle souligné. Le présent rapport met à nouveau en garde contre le recrutement de ces acteurs qui prolongent les conflits, augmentent considérablement le risque de violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international et sapent les efforts de paix, a expliqué Mme McLeod.

De même, a poursuivi la Présidente-Rapporteuse, le Groupe de travail constate que les entreprises militaires et de sécurité privées se repositionnent pour attirer de nouveaux clients. Dans certains cas, elles offrent des services qui ont longtemps été considérés comme relevant des États et qui peuvent augmenter la probabilité de violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international. Les activités de ces sociétés privées couvrent un éventail de contextes opérationnels, qui sont examinés en détail par le Groupe de travail, notamment les situations de détention et de privation de liberté, les industries extractives, les migrations, le cyberespace et la sécurité maritime.

Ces tendances suscitent de vives inquiétudes quant aux effets négatifs de ces activités, en particulier pour des groupes particuliers de victimes, a expliqué Mme McLeod. En effet, des formes multiples et croisées de discrimination peuvent déterminer la manière dont les individus subissent les violations commises par ces acteurs. Ainsi, les femmes, les enfants, les migrants et les réfugiés, les personnes handicapées, les personnes LGBTI+, les personnes âgées, les minorités, les peuples autochtones, les défenseurs des droits de l'homme et les journalistes, entre autres, peuvent subir des effets différenciés et disproportionnés, sur l’exercice de leurs droits humains, de l’activité des sociétés militaires et de sécurité privées. Non seulement toutes ces personnes auront des attentes différentes en matière de recours, mais elles rencontreront aussi des obstacles différents dans l'accès à la justice, a indiqué Mme McLeod.

La capacité des victimes d’obtenir justice dépend de l'existence de services publics efficaces et équitables, notamment pour ce qui est de la justice pénale et civile, de l'aide juridique et de l'assistance immédiate et à long terme, ou encore du soutien aux victimes, y compris en ce qui concerne la fourniture d'informations et d'une assistance pour leur permettre d'accéder à leurs droits juridiques.

Le rapport examine aussi le problème du « recrutement prédateur », ou l'exploitation d’hommes issus d'environnements touchés par des conflits, recrutés comme mercenaires d'une manière qui tire parti de leur statut socioéconomique, et qui peut impliquer un recrutement coercitif sous la contrainte.

Le Groupe de travail préconise donc une approche intersectionnelle centrée sur les victimes pour garantir l’accès à la justice et aux recours. Cela exige une vision globale, qui traite les lacunes de la réglementation afin de prévenir de nouvelles violations et de créer des recours qui répondent réellement aux besoins des victimes.

Le Groupe de travail appelle en outre les États à adopter un instrument international juridiquement contraignant sur les activités des sociétés militaires et de sécurité privées, ainsi qu'une réglementation cohérente au niveau national, comprenant des normes sur la prévention des violations des droits de l'homme, sur la protection des victimes, sur la responsabilité et sur les recours effectifs, a indiqué la Présidente-Rapporteuse.

Aperçu du débat

Face aux violations des droits de l’homme engendrées par le mercenariat et les sociétés miliaires et de sécurité privées, face aussi à l’impunité des auteurs de ces violations, l’approche de la communauté internationale doit être axée sur l’aide aux victimes, y compris par des réparations et indemnisations, mais elle ne doit pas se limiter à cet aspect, a-t-il été souligné : il faudra aussi réglementer strictement le mercenariat et les sociétés miliaires et de sécurité privées, de même que créer des mécanismes juridiquement contraignants de reddition des comptes, le cas échéant par le biais de juridictions internationales telles que la Cour pénale internationale, a-t-il été affirmé.

Il a été fait état de l’adoption, dans certains pays, d’orientations sur les normes internationales existantes en matière de diligence raisonnable, ou encore de l’obligation faite aux entreprises concernées de faire preuve d’une « diligence raisonnable » en matière de droits de l'homme et de droit de l'environnement dans l'ensemble de leurs chaînes de valeur et de leurs activités.

Il a été recommandé de ne pas confondre le rôle et les actions des mercenaires avec les activités des sociétés militaires et de sécurité privées, dont le recours est licite dans certaines circonstances, ont expliqué certains intervenants, d’aucuns estimant que le travail du Groupe de travail s'avérerait plus efficace si son champ d'action se limitait aux mercenaires.

La proposition du Groupe de travail de voir les organisations de la société civile, les défenseurs des droits de l'homme et d'autres acteurs collecter des données ventilées sur les activités mercenaires et les violations des droits de l'homme est intéressante, a dit un intervenant, avant de juger frappant qu'un tel mécanisme n'existe pas, compte tenu du grand activisme des ONG et d'autres acteurs dans d'autres domaines des droits de l'homme.

Des délégations ont dénoncé l’utilisation de mercenaires par les États-Unis, la Fédération de Russie, l'Australie, l’Azerbaïdjan et l’Arménie. Une délégation a estimé que, depuis la prise de pouvoir illégale par les Taliban, l'état de droit et la sécurité étaient absents et l'impunité était omniprésente en Afghanistan, ce qui crée un environnement idéal pour que de tels acteurs puissent prospérer aux dépens du peuple afghan.

**Liste des intervenants : Union européenne, Libye, Cuba, Iraq, Luxembourg, Afghanistan, Panama, Venezuela, Fédération de Russie, Namibie, Chine, Arménie, Cameroun, Pakistan, Azerbaïdjan, Grèce, Malawi, Iran, Tunisie et France.

 

Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information ; il ne constitue pas un document officiel.

Les versions anglaise et française de nos communiqués sont différentes car elles sont le produit de deux équipes de couverture distinctes qui travaillent indépendamment.

 

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