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Le Conseil dialogue avec les titulaires de mandat sur la protection des droits de l’homme dans la lutte antiterroriste et sur l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes d’albinisme

Compte rendu de séance

 

Le Conseil des droits de l’homme a tenu ce matin ses dialogues avec la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, Mme Fionnuala Ní Aoláin, et avec l’Experte indépendante sur l’exercice des droits de l'homme par les personnes atteintes d’albinisme, Mme Muluka-Anne Miti-Drummond.

Présentant son rapport, qui présente un suivi de l’Étude conjointe de 2010 sur les pratiques mondiales concernant le recours à la détention secrète dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, Mme Ní Aoláin a déclaré que nous devrions tous nous sentir profondément troublés par la réalité persistante de la détention arbitraire et de la torture, des traitements cruels, inhumains et dégradants qui se poursuivent depuis 2001 [dans le contexte de la lutte antiterroriste] malgré l’appel sans équivoque de l’Étude conjointe de 2010 à y mettre fin.

La partie la plus importante du rapport est son annexe, a indiqué la Rapporteuse spéciale, précisant que cette annexe reprend les noms de chaque individu identifié dans l'Étude conjointe de 2010 ayant fait l'objet d'une détention secrète.

Mme Ní Aoláin a déclaré qu’elle aimerait pouvoir dire que les pratiques de détention secrète et de torture « appartiennent au passé » ; mais nous savons tous que ce n’est pas le cas, a-t-elle souligné. Avec le Groupe de travail sur la détention arbitraire, le Groupe de travail sur les disparitions forcées et le Rapporteur spécial sur la torture, il existe des preuves documentées de pratiques en cours dans plusieurs États, a-t-elle souligné. Mme Ní Aoláin a fait observer que son rapport renforce la position défendue par le droit international, à savoir que la détention secrète est une violation du droit à la liberté individuelle et constitue une infraction au regard de l'interdiction de la détention arbitraire.

La Rapporteuse spéciale s’est par ailleurs dite satisfaite d’avoir pu effectuer en Ouzbékistan en novembre/décembre 2021 une visite qui lui a permis d’évaluer les pratiques du pays en matière de rapatriement [en provenance] de multiples zones de conflit et de réintégration ; la Rapporteuse spéciale a salué l’approche globale adoptée par le Gouvernement ouzbèke et a déclaré que les autres pays qui ont systématiquement manqué à assurer le retour de leurs ressortissants ont beaucoup à apprendre de l’approche adoptée par l’Ouzbékistan.

L’Ouzbékistan a fait une déclaration en tant que pays concerné, avant que de nombreuses délégations* ne prennent part au dialogue avec la Rapporteuse spéciale. Il a été rappelé que la lutte contre le terrorisme et l'extrémisme violent ne doit jamais servir de prétexte à des violations des droits de l'homme.

Présentant son rapport, Mme Miti-Drummond a indiqué avoir reçu des informations inquiétantes d'attaques et d'enlèvements de personnes atteintes d'albinisme dans deux pays différents – des pays où les attaques contre les personnes atteintes d'albinisme étaient pourtant rares jusqu'à ces derniers mois. Le rapport présenté ce jour est donc axé sur les pratiques néfastes et les crimes de haine à l'encontre des personnes atteintes d'albinisme, a-t-elle précisé. Il souligne que les violations flagrantes à l'encontre des personnes atteintes d'albinisme peuvent être qualifiées de crimes de haine.

L'adoption de lois spécifiques sur les crimes de haine, dans lesquelles les personnes atteintes d'albinisme peuvent être reconnues comme des victimes présentant des caractéristiques protégées, permettra non seulement de condamner le mobile discriminatoire des crimes commis à leur encontre, mais aussi de susciter des enquêtes plus approfondies et d'influer sur la manière dont les victimes sont traitées, sur la façon dont elles sont interrogées et sur la gravité des peines infligées aux délinquants, a résumé Mme Miti-Drummond.

De nombreuses délégations** ont ensuite pris part au dialogue avec l’Experte indépendante. A particulièrement été appréciée l’approche de la nouvelle Experte indépendante, notamment en ce qu’elle qualifie de « crimes haineux » les violences contre les personnes atteintes d’albinisme. L’albinisme est présent sur tous les continents et des discriminations y sont partout observées à l’encontre des personnes atteintes d’albinisme, a-t-il par ailleurs été souligné.

 

Le Conseil poursuivra ses travaux cet après-midi, à 15 heures, pour tenir ses dialogues avec la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question de la violence contre les enfants et la Représentante spéciale du Secrétaire général pour le sort des enfants en temps de conflit armé.

 

Dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste

Le Conseil est saisi du rapport de la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste (A/HRC/49/45 à paraître en français), qui présente un suivi de l’Étude conjointe de 2010 sur les pratiques mondiales concernant le recours à la détention secrète dans le contexte de la lutte contre le terrorisme (A/HRC/13/42). Le Conseil est également saisi du rapport sur la visite effectuée par la Rapporteuse spéciale en Ouzbékistan (A/HRC/49/45/Add.1, à paraître en français).

Présentation

MME FIONNUALA NI AOLAIN, Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, a indiqué qu’elle avait publié cette année de nombreuses communications sur la lutte contre le terrorisme, le financement de cette lutte et la législation sur l’extrémisme à l’intention de l’Algérie, de l’Autriche, du Bélarus, du Brésil, de la Chine, du Danemark, de la France, d’Haïti, des Pays-Bas, de la Nouvelle-Zélande, du Nicaragua, de Sri Lanka, de la Thaïlande, de la Turquie, du Royaume-Uni, de l’Ouzbékistan, du Venezuela, du Zimbabwe, ainsi que de l’Union européenne. La Rapporteuse a ajouté avoir pu également mener deux visites de travail à Washington et a remercié le Gouvernement des Etats-Unis pour le dialogue constructif noué autour d’un certain nombre de questions liées à la lutte contre le terrorisme et aux droits de l’homme. Mme Ní Aoláin s’est dite également satisfaite d’avoir pu effectuer en Ouzbékistan en novembre/décembre 2021 une visite qui lui a permis d’évaluer les pratiques du pays en matière de rapatriement de multiples zones de conflit et de réintégration ; la Rapporteuse spéciale a salué l’approche globale adoptée par le Gouvernement ouzbèke et a déclaré que les autres pays qui ont systématiquement manqué à assurer le retour de leurs ressortissants ont beaucoup à apprendre de l’approche adoptée par l’Ouzbékistan.

La Rapporteuse spéciale a ensuite déclaré que nous devrions tous nous sentir profondément troublés par la réalité persistante de la détention arbitraire et de la torture, des traitements cruels, inhumains et dégradants qui se poursuivent depuis 2001 [dans le contexte de la lutte antiterroriste] malgré l’appel sans équivoque de l’Étude conjointe de 2010 sur les pratiques mondiales concernant le recours à la détention secrète dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, ainsi que d’autres organes de défense des droits humains, à y mettre fin. Elle a précisé que le rapport établit une distinction « claire et durable » entre la torture et les transferts extraterritoriaux de prisonniers qui ont accompagné la soi-disant « guerre contre le terrorisme » et les pratiques contemporaines de détention arbitraire massive et de torture, de traitements cruels, inhumains et dégradants au Xinjiang en Chine et dans le nord-est de la Syrie. C'est précisément le manque d'accès, de transparence, de responsabilité et de recours qui a permis et maintenu un environnement permissif pour la détention à grande échelle et les atteintes aux individus, a-t-elle déclaré.

La partie la plus importante du présent rapport est son annexe, a poursuivi la Rapporteuse spéciale ; cette annexe reprend les noms de chaque individu identifié dans l'Étude conjointe de 2010 ayant fait l'objet d'une détention secrète. Les violations les plus flagrantes de la dignité humaine sont justifiées par le discours, la loi et la pratique antiterroristes, a observé avec regret la Rapporteuse spéciale. La pratique du waterboarding (simulation de noyade) était légalement justifiée et brutalement pratiquée dans des « sites noirs » contrôlés par les États-Unis, a-t-elle indiqué, attirant l’attention sur le cas du détenu Abu Zubaydah qui a été victime de cette pratique à 83 reprises en un seul mois. Les détenus ont été placés dans des structures semblables à des cercueils pendant de longues périodes, a-t-elle poursuivi. Ils ont été maintenus à l'isolement, souvent pendant des mois d'affilée. Ils ont été soumis à des simulations d'exécutions, à un froid extrême et à la privation de sommeil. Ils ont été privés de soins médicaux et privés de nourriture et d'eau. Ils ont été déshabillés, violemment giflés, secoués, frappés à coups de pied et jetés au sol. Ils n'étaient pas autorisés à prier et ils étaient moqués pour leurs croyances et pratiques religieuses. Ils ont été soumis à la pénétration anale par des objets. On leur a dit que de multiples préjudices graves seraient infligés aux membres de leur famille, notamment la violence physique, la détresse économique, la honte sociale et la violence sexuelle, a décrit la Rapporteuse spéciale.

Mme Ní Aoláin a ensuite déclaré qu’elle aimerait pouvoir dire que les pratiques de détention secrète et de torture « appartiennent au passé » ; mais nous savons tous que ce n’est pas le cas, a-t-elle souligné. Avec le Groupe de travail sur la détention arbitraire, le Groupe de travail sur les disparitions forcées et le Rapporteur spécial sur la torture, il existe des preuves documentées de pratiques en cours dans plusieurs États, parmi lesquels l'Algérie, la Chine, la République démocratique du Congo, l'Égypte, l'Iran, l'Iraq, Israël, la Jordanie, la Libye, le Pakistan, l’Arabie saoudite, Sri Lanka, le Soudan, la République arabe syrienne, le Turkménistan, l’Ouzbékistan, le Yémen et le Zimbabwe, a-t-elle indiqué. Il y a également la situation des 38 hommes musulmans encore détenus à Guantanamo Bay ; beaucoup de ces hommes entrent dans leur vingtième année de détention sous la garde des États-Unis et douze d'entre eux ont été inculpés de crimes liés au terrorisme et sont traités par le système des commissions militaires, ce qui, selon la Rapporteuse spéciale, pourrait ne pas répondre aux exigences d'un procès équitable requises par le droit international.

Le rapport répond également aux profondes préoccupations du Rapporteur spécial sur la torture concernant l'évolution de la pratique de la détention secrète vers des pratiques de transfert formellement légal, a ajouté Mme Ní Aoláin. Ces transferts, justifiés au nom de la lutte contre le terrorisme ou l'extrémisme, touchent parfois des personnes qui se sont livrées à des activités protégées par le droit international, notamment le droit à la liberté d’expression, de réunion pacifique et la participation aux affaires publiques, a-t-elle fait observer. L'ampleur et les conséquences de ces pratiques impliquant la Fédération de Russie et les pays de la Communauté des États indépendants (CEI) sont « particulièrement préoccupantes », a dit la Rapporteuse spéciale. Le rapport identifie en outre de graves préoccupations concernant les pratiques de détention massive et secrète arbitraires, d'autres violations graves du droit international dirigées contre les Ouïghours et d'autres groupes ethniques du Xinjiang ayant fait l'objet de multiples communications de la part de plusieurs mécanismes de procédures spéciales et d'experts du Conseil des droits de l'homme, a-t-elle ajouté.

Mme Ní Aoláin a ensuite indiqué qu’elle continuait de souligner l'ampleur des violations des droits de l'homme et du droit humanitaire qui découlent de la détention de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants dans une situation de détention arbitraire massive dans le nord-est de la Syrie. Les conditions dans ces camps atteignent le seuil de la torture et des traitements cruels, inhumains et dégradants en vertu du droit international. Le rapatriement [des personnes qui s’y trouvent] est la seule solution conforme au droit international à l'existence de ces camps et sites de détention, a expliqué la Rapporteuse spéciale.

Mme Ní Aoláin a souligné que son rapport renforce la position défendue par le droit international, à savoir que la détention secrète est une violation du droit à la liberté individuelle et constitue une infraction au regard de l'interdiction de la détention arbitraire. La détention secrète nie et subvertit le droit à un procès équitable ; elle équivaut à une disparition forcée, et lorsque son usage est généralisé et systématique, comme ce fut le cas au lendemain des événements du 11 septembre 2001, elle doit être appréhendée sous la rubrique d'un crime contre l'humanité, a conclu la Rapporteuse spéciale.

Pays concerné

L’Ouzbékistan s’est félicité de la visite et du rapport de la Rapporteuse spéciale, qui reflètent les progrès accomplis en peu de temps par le pays en termes de collaboration avec les mécanismes des droits de l’homme et de respect des droits de l’homme dans la lutte contre le terrorisme. Le rapport de Mme Ní Aoláin reflète une évaluation positive de la démarche de l’Ouzbékistan visant à créer un État de droit et reflète les efforts du Gouvernement pour rapatrier les citoyens ouzbèkes depuis des zones de conflit. L’Ouzbékistan élaborera un plan d’action pour appliquer les recommandations de la Rapporteuse spéciale concernant le respect des droits de l’homme dans la lutte contre le terrorisme, a indiqué la délégation ouzbèke.

Aperçu du débat

Des délégations ont souligné que la lutte contre le terrorisme et l'extrémisme violent ne devait jamais servir de prétexte à des violations des droits de l'homme et que toute mesure prise pour lutter contre le terrorisme devait respecter l'état de droit et toutes les obligations découlant du droit international, y compris le droit international des droits de l'homme, le droit international des réfugiés et le droit international humanitaire.

Toute personne privée de liberté doit bénéficier des garanties procédurales et les États doivent respecter le principe de non-refoulement d’une personne vers un pays où elle risquerait d’être victime de torture, a-t-il également été affirmé.

Des délégations ont repris à leur compte les recommandations de la Rapporteuse spéciale visant l'activation immédiate de mesures de protection pour des milliers d'enfants et de femmes détenus de manière secrète et arbitraire dans des camps et des centres de détention. A aussi été soulignée l’importance de traduire les terroristes devant un système de la justice juste et équitable, et de faire en sorte que les droits des victimes à la réparation et à la connaissance de la vérité soient respectés. Il a été espéré que la Rapporteuse spéciale accorderait davantage d'attention aux droits des victimes du terrorisme.

Les détentions et restitutions secrètes, les disparitions forcées et les pratiques associées de torture sont des actes inacceptables, a affirmé une délégation, avant de regretter que l’impunité pour ces violations du droit international crée un environnement propice à de nouvelles violations.

Plusieurs délégations ont évoqué les mesures prises par leur pays pour lutter contre le terrorisme, le radicalisme et l'extrémisme violent aux niveaux national et régional, ainsi que pour organiser le retour de combattants au pays, préserver le bien-être des enfants de ces combattants, ou encore réhabiliter et réintégrer les anciens terroristes par le biais de programme de déradicalisation.

La communauté internationale a été appelée à mettre en place un cadre juridique international applicable aux États pour les amener à interdire la détention secrète dans leurs législations nationales et permettre aux juridictions nationales ordinaires de connaître des infractions relatives aux terrorisme. La communauté internationale a aussi été appelée à sortir de l'impasse qui empêche l'adoption d'une convention globale sur le terrorisme international.

Les États, a-t-il été soutenu, devraient adopter une législation nationale claire interdisant la pratique de la détention secrète et d'autres formes de détention non officielles.

Une délégation a dénoncé la pratique, par les États-Unis, de la « détention clandestine » de personnes qui sont « toujours détenues dans des prisons illégales telles que Guantánamo et les prisons secrètes de la CIA ». « Certains pays européens » ont été appelés à ne pas cautionner des actes de torture ou des transferts illégaux de détenus. Une organisation non gouvernementale a rappelé que 38 personnes étaient toujours détenues de manière arbitraire à Guantánamo.

Une délégation a affirmé que le camp d'Al-Hol et les autres camps du nord-est de la Syrie, mentionnés dans le rapport, étaient « des camps de détention gérés par des milices séparatistes avec la protection et le patronage des forces d'occupation américaines qui sont illégalement présentes sur le territoire syrien ».

Une délégation a salué « les progrès réalisés par la Chine dans la lutte contre le terrorisme et l'extrémisme par des mesures conformes à la loi, en particulier dans le Xinjiang qui jouit de la stabilité sociale (…) ». Plusieurs intervenants ont demandé à la Rapporteuse spéciale de ne pas faire preuve de « sélectivité », d’éviter de « se faire l'écho de la désinformation » et de se départir de « la manipulation des droits de l'homme par certaines forces politiques ».

*Liste de intervenants : Union européenne, Mexique (au nom d’un groupe de pays), ONU Femmes, Égypte, Émirats arabes unis, Libye, Iraq, Cuba, Venezuela, France, Maldives, Syrie, Sénégal, Luxembourg, Burkina Faso, Inde, Chine, Arménie, Pays-Bas, Cameroun, Pakistan, Fédération de Russie, Indonésie, Bénin, Panama, Yémen, Irlande, Bangladesh, États-Unis, Afghanistan, Royaume-Uni, Azerbaïdjan, Grèce, Botswana, Géorgie, Espagne, Chypre, Iran, Bélarus, Arabie saoudite, Ukraine, Bolivie et Suisse.

De nombreuses organisations non gouvernementales ont aussi participé au débat : Amnesty International, Organisation mondiale contre la torture, Conectas Direitos Humanos, Al Haq, Families of Victims of Involuntary Disappearance (FIND), Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme, Article 19, Commission internationale des juristes,Cairo Institute for Human Rights Studies et Lawyers’ Rights Watch Canada.

Réponses et remarques de conclusion

MME NI AOLAIN a insisté pour que les États révisent leurs lois antiterroristes, afin de s’assurer qu’elles respectent les droits de l'homme. Elle a également assuré de son impartialité dans l’exercice de son mandat. La lutte contre le terrorisme doit respecter les droits de l'homme si l’on veut qu’elle soit efficace, a-t-elle insisté. Il est en outre important de juger les auteurs des crimes commis dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, a souligné la Rapporteuse spéciale.

Dialogue avec l’Experte indépendante sur l’exercice des droits de l’homme par les personnes atteintes d’albinisme

Le Conseil est saisi du rapport de la nouvelle Experte indépendante sur l’exercice des droits de l'homme par les personnes atteintes d'albinisme (A/HRC/49/56).

Présentation

Présentant son premier rapport, MME MULUKA-ANNE MITI-DRUMMOND, Experte indépendante sur l’exercice des droits de l'homme par les personnes atteintes d'albinisme, a dit avoir reçu des informations inquiétantes d'attaques et d'enlèvements de personnes atteintes d'albinisme dans deux pays différents – des pays où les attaques contre les personnes atteintes d'albinisme étaient pourtant rares jusqu'à ces derniers mois. L'une des victimes était une enfant dont le corps aurait été jeté dans une rivière après l'ablation de ses yeux et de ses organes, sans doute à des fins rituelles, a-t-elle précisé.

Le rapport présenté ce jour est donc axé sur les pratiques néfastes et les crimes de haine à l'encontre des personnes atteintes d'albinisme, a indiqué l’Experte. Il souligne que les violations flagrantes à l'encontre des personnes atteintes d'albinisme peuvent être qualifiées de crimes de haine : ceux-ci sont des crimes perpétrés avec un motif de partialité, c'est-à-dire que la personne qui commet le crime a un préjugé contre une caractéristique réelle ou perçue de l'identité de la victime.

Les crimes de haine diffèrent des crimes ordinaires par leur impact sur les personnes ou la communauté visées, a poursuivi Mme Miti-Drummond. Ils provoquent des blessures psychologiques plus graves, ainsi qu'un sentiment accru de vulnérabilité chez les victimes, qui sont incapables de modifier les caractéristiques qui les ont rendues victimes au départ, a-t-elle souligné. Pour de nombreuses personnes atteintes d'albinisme, la réalité quotidienne est faite d’expériences d'ostracisme, de rejet et de peur d'être enlevées ou attaquées sur le chemin de l'école, du travail ou de la maison, a ajouté l’Experte indépendante.

L'adoption de lois spécifiques sur les crimes de haine, dans lesquelles les personnes atteintes d'albinisme peuvent être reconnues comme des victimes présentant des caractéristiques protégées, permettra non seulement de condamner le mobile discriminatoire des crimes commis à leur encontre, mais aussi de susciter des enquêtes plus approfondies et d'influer sur la manière dont les victimes sont traitées, sur la façon dont elles sont interrogées et sur la gravité des peines infligées aux délinquants, a résumé Mme Miti-Drummond.

Elle a ajouté que son rapport recensait des « bonnes pratiques » en matière de lutte contre les pratiques préjudiciables et les crimes de haine, tel que le Plan d'action de l'Union africaine pour mettre fin aux attaques et autres violations des droits de l'homme visant les personnes atteintes d'albinisme (2021-2031).

Mme Miti-Drummond a indiqué qu’elle s’efforcerait de faire entendre la voix des personnes atteintes d'albinisme. Après avoir regretté que de nombreuses personnes ignorent encore que les droits des personnes atteintes d'albinisme ne doivent pas être protégés uniquement en Afrique, l’Experte indépendante a rappelé aux États qu’ils avaient pris l'engagement, dans le cadre des objectifs de développement durable, de veiller à ce que personne ne soit laissé de côté.

Aperçu du débat

Les délégations ont dit apprécier les priorités et l’approche de la nouvelle Experte indépendante, notamment en ce qu’elle qualifie de « crimes haineux » les violences contre les personnes atteintes d’albinisme. Plusieurs délégations ont souhaité connaître son analyse de la manière dont les systèmes de justice traitent ces crimes spécifiques. Il lui a été demandé de préciser les mesures que les États pourraient prendre pour renforcer les capacités des personnes atteintes d’albinisme. Des délégations ont également demandé des exemples de bonnes pratiques.

L’albinisme est présent sur tous les continents et des discriminations y sont partout observées à l’encontre des personnes atteintes d’albinisme, ont souligné des organisations de la société civile, appelant à un changement de mentalités.

Quelques pays ont présenté les mesures qu’ils ont prises au plan national pour protéger les droits des personnes atteintes d’albinisme, y compris pour lutter contre toutes les attaques, les crimes et les discriminations dont ces personnes sont victimes. Mais, « il faut aller plus loin », a plaidé une délégation, appelant à des efforts concertés au plan international, dans un contexte où les croyances, mythes et superstitions qui font croire que les personnes atteintes d’albinisme, ou des parties de leur corps, ont des pouvoirs magiques ou maléfiques continuent d’alimenter les crimes, y compris les assassinats, dont elles sont victimes. Les États doivent prendre des mesures plus strictes encore pour protéger ces personnes, a plaidé une délégation, tandis qu’une autre appelait tous les pays africains à mettre en œuvre les recommandations de l’Experte indépendante ainsi que le Plan d'action régional de l’Union africaine pour mettre fin aux attaques et à la discrimination contre les personnes atteintes d'albinisme (2021-2031).

L’adoption de la résolution 47/8 du Conseil des droits de l'homme sur l’élimination des pratiques préjudiciables associées à des accusations de sorcellerie et à des agressions rituelles, en juillet 2021, a été saluée par de nombreuses délégations.

**Liste des intervenants : Finlande (au nom d’un groupe de pays), Union européenne, Égypte (au nom d’un groupe de pays), Israël, Djibouti, Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Malaisie, Venezuela, Kenya, Chine, Lesotho, Afrique du Sud, États-Unis, Portugal, Malawi, Nigéria, République-Unie de Tanzanie, Panama, Namibie, ainsi que RADDHO, World Barua Organization, Mother of Hope Cameroon,International Humanist and Ethical Union,World Jewish CongressChina Society for Human Rights Studies et Under The Same Sun Fund.

 

Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information ; il ne constitue pas un document officiel.

Les versions anglaise et française de nos communiqués sont différentes car elles sont le produit de deux équipes de couverture distinctes qui travaillent indépendamment.

 

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