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« La Chine poursuit la politique nucléaire la plus stable, la plus cohérente et la plus prévisible de tous les États dotés d’armes nucléaires », affirme le Ministre chinois des affaires étrangères devant la Conférence du désarmement

Compte rendu de séance

 

La Conférence du désarmement a entendu ce matin, dans le cadre du débat de haut niveau de sa session de 2021, une allocution de M. Wang Yi, Conseiller d’État et Ministre des affaires étrangères de la République populaire de Chine. De nombreuses délégations ont ensuite fait des déclarations.

Dans son allocution, qui avait pour thème « préserver le multilatéralisme et rechercher la sécurité collective », le Ministre chinois a d’abord souligné que le multilatéralisme était la bonne voie que tous les pays ont à suivre pour promouvoir la sécurité commune et faire progresser le processus de contrôle des armements, de désarmement et de non-prolifération au niveau international. Le Ministre a avancé plusieurs pistes pour aller de l’avant dans ce processus, notamment la collaboration entre les États pour maintenir la stabilité stratégique mondiale, ainsi que le respect des traités internationaux de maîtrise des armements, en particulier le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.

M. Yi a aussi recommandé de perfectionner la gouvernance mondiale pour la sécurité dans de nouveaux domaines. À cet égard, le Ministre a appelé la Conférence à ouvrir rapidement des négociations sur un traité visant à prévenir la course aux armements dans l’espace. Il a également précisé que son pays entendait explorer avec toutes les parties une solution planétaire aux problèmes liés aux systèmes d’armes létales autonomes.

La Chine, a affirmé son Ministre des affaires étrangères, poursuit résolument une politique de défense nationale à caractère défensif, de même que la politique nucléaire la plus stable, la plus cohérente et la plus prévisible de tous les États dotés d’armes nucléaires.

Les délégations suivantes ont fait des déclarations après l’intervention de M. Yi : Bélarus, Zimbabwe, Cuba, Éthiopie, Brésil, Chili, Kazakhstan, Kenya, Iran, Argentine, Mexique, Algérie, Pakistan, Fédération de Russie, Syrie et Indonésie.

Les États-Unis et la Chine ont exercé leur droit de réponse en fin de séance.

 

La prochaine séance publique de la Conférence se tiendra mardi 15 juin, à 10 heures. Elle sera consacrée à un débat sur le point 5 de l’ordre du jour, relatif aux nouveaux types et systèmes d’armes de destruction massive, ainsi qu’aux armes radiologiques.

 

Déclaration du Président de la Conférence

L'Ambassadeur SALOMON EHETH du Cameroun, Président de la Conférence du désarmement, s'exprimant au nom du Cameroun et des cinq autres présidents de la Conférence en 2021, a exprimé sa profonde gratitude à la délégation chinoise pour la tenue d'un discours à ce niveau. Il a appelé les autres États à prendre des initiatives similaires pour aider à maintenir les objectifs de paix et de sécurité des Nations Unies.

Allocution du Ministre des affaires étrangères de la Chine : « Préserver le multilatéralisme et rechercher la sécurité collective »

M. WANG YI, Conseiller d’État et Ministre des affaires étrangères de la République populaire de Chine , a déclaré que son pays poursuivait résolument la voie du développement pacifique, une politique extérieure d’indépendance et de paix, ainsi qu’une politique de défense nationale à caractère défensif. La Chine poursuit en outre la politique nucléaire la plus stable, la plus cohérente et la plus prévisible de tous les États dotés d’armes nucléaires, a affirmé M. Yi.

Le Ministre a insisté sur le fait que le multilatéralisme était la bonne voie que tous les pays ont à suivre pour promouvoir la nouvelle vision de la sécurité commune, globale, coopérative et durable et faire progresser le processus de contrôle des armements, de désarmement et de non-prolifération au niveau international. Le Ministre a ensuite avancé plusieurs pistes pour aller de l’avant dans ce processus.

M. Yi a d’abord demandé aux États de travailler ensemble pour maintenir la stabilité stratégique mondiale. Ainsi, les deux plus grands États dotés d’armes nucléaires devraient réduire encore leurs arsenaux nucléaires pour créer les conditions propices au processus multilatéral de désarmement nucléaire. Les pays du « P5 » devraient notamment réaffirmer qu’une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit jamais être menée, ainsi que renforcer la coopération en matière de réduction des risques stratégiques et dans d’autres domaines.

La Chine, a ajouté son Ministre des affaires étrangères, s’oppose au développement et au déploiement par certain pays des systèmes de défense antimissile régionaux et globaux qui nuisent à la stabilité stratégique, de même qu’au déploiement de missiles de portée intermédiaire basés à terre dans les régions périphériques d’autres pays.

En second lieu, le Ministre a souligné l’importance de respecter les traités internationaux de maîtrise des armements, notamment le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. Les États parties doivent, a recommandé le Ministre, faire avancer de manière équilibrée les actions autour des trois piliers du Traité : désarmement nucléaire, non-prolifération nucléaire et utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques, et à le dynamiser de sorte qu’il apporte une contribution encore plus grande à la préservation de la paix et de la sécurité, ainsi qu’au développement durable dans le monde.

Tous les États dotés d’armes nucléaires devraient respecter le moratoire sur les essais nucléaires et poursuivre leurs efforts pour l’entrée en vigueur du traité d’interdiction complète des essais nucléaires au plus tôt, a aussi recommandé le Ministre. La Conférence devrait, pour sa part, continuer de préparer les négociations sur un traité visant l’arrêt de la production de matières fissiles pour les armes nucléaires.

Troisièmement, il convient de régler les questions de non-prolifération par la négociation, a poursuivi le Ministre. À cet égard, le JCPOA (Accord sur le nucléaire iranien) est un résultat important de la diplomatie multilatérale. Les agissements unilatéraux d’intimidation des États-Unis sont la racine de la crise nucléaire iranienne, a affirmé le Ministre. La Chine propose d’établir une plate-forme de dialogue multilatéral pour la sécurité régionale dans la région du Golfe, afin de construire pas à pas une architecture de sécurité durable au Moyen-Orient. La Chine appuie en outre la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient, a indiqué le Ministre.

D’autre part, a dit M. Yi, la Chine, qui se prononce toujours pour le maintien de la paix et de la stabilité dans la péninsule coréenne, préconise une approche par étapes pour la réalisation des objectifs de dénucléarisation complète de la péninsule et de mise en place d’un mécanisme de paix durable.

Quatrièmement, M. Yi a recommandé de perfectionner la gouvernance mondiale pour la sécurité dans de nouveaux domaines. À cet égard, il a appelé la Conférence à ouvrir rapidement des négociations sur un traité visant à prévenir la course aux armements dans l’espace. Le Ministre a également précisé que son pays entendait explorer avec toutes les parties une solution planétaire aux problèmes liés aux systèmes d’armes létales autonomes. Il a également recommandé de s’opposer à ce que certain pays pratique le blocus technico-scientifique sous prétexte de la sécurité nationale.

Quant à la pandémie de COVID-19, elle met en lumière les nouveaux défis de la gouvernance de la biosécurité auxquels le monde est confronté, a estimé le Conseiller d’État. Dans ce contexte, a ajouté M. Yi, la Chine appuie l’établissement d’un régime de vérification dans le cadre de la Convention sur l’interdiction des armes biologiques et exhorte les États-Unis à rejeter leur position unilatérale consistant à entraver la négociation sur un protocole de vérification juridiquement contraignant.

Enfin, le Ministre a indiqué que la Chine se félicitait vivement de l’agenda pour le désarmement proposé par le Secrétaire général de Nations Unies et qu’elle continuerait de contribuer à sa réalisation.

Aperçu du débat

Le Bélarus a souligné que, comme la Chine, il était convaincu de la valeur d'une approche multilatérale pour résoudre les problèmes urgents de sécurité internationale. De l’avis du Bélarus, seule la reprise d'un dialogue international constructif peut permettre de surmonter les tensions politico-militaires et de restaurer la confiance.

Le Zimbabwe s’est dit déçu du peu de progrès réalisés depuis la négociation par la Conférence du traité d’interdiction complète des essais nucléaires. Le Zimbabwe s’est dit favorable à la conclusion d’un accord universel sur l'élimination totale des armes nucléaires, ainsi que d'un traité garantissant les États non dotés d'armes nucléaires contre l'emploi ou la menace d'emploi de ces armes. Cependant, seule l'élimination totale des armes nucléaires pourrait assurer la sécurité, a insisté le Zimbabwe.

Cuba s’est dit heureuse d’entendre que la Chine était attachée au désarmement, à la non-prolifération et au multilatéralisme. Cuba estime que ce n’est que sur la base d'une action multilatérale que le monde pourra trouver des solutions aux défis importants auxquels l'humanité est aujourd'hui confrontée.

L'Égypte a déclaré qu'elle entretenait d'excellentes relations avec la Chine et a remercié le Ministre chinois pour ses remarques pertinentes.

L'Éthiopie a déclaré qu'elle attachait une grande importance au multilatéralisme fondé sur des règles. L'Éthiopie a indiqué avoir apporté une contribution constructive à l’action des Nations Unies pour la paix et la sécurité ainsi que pour la réduction de la pauvreté et pour le développement durable. L'Éthiopie est attachée à la maîtrise des armements et à la non-prolifération des armes de destruction massive. Le pays est également attaché à la reprise du mandat fondamental de la Conférence, qui consiste à négocier des traités de désarmement.

Le Brésil a estimé que le fait d'entendre la plus haute autorité diplomatique de la Chine avait un effet positif sur les débats thématiques que la Conférence du désarmement tenait en ce moment.

Le Chili a observé avec satisfaction que de nombreuses délégations avaient participé à ces débats thématiques. Il a remercié le Ministre des affaires étrangères de la Chine pour sa déclaration qui montre l'importance que la Chine accorde à la Conférence. La Conférence doit revenir à son mandat de négocier des instruments de désarmement juridiquement contraignants, afin de redevenir un acteur pertinent, a demandé le Chili.

Le Kazakhstan a dit partager pleinement le point de vue de M. Yi selon lequel il est d'une importance cruciale de maintenir et de renforcer la Conférence, ainsi que le consensus, principe fondamental sur lequel la Conférence se fonde. Pour le Kazakhstan, le désarmement nucléaire, les matières fissiles, la prévention d'une course aux armements dans l'espace et les garanties négatives de sécurité sont d'une importance capitale à la Conférence. Le Kazakhstan a remercié le Ministre d'avoir exprimé le soutien de la Chine à la proposition du Président du Kazakhstan de créer un organe multilatéral sur la sécurité biologique, qui rendrait compte au Conseil de sécurité.

Le Kenya s'est lui aussi félicité de l'intervention du Ministre chinois des affaires étrangères dans le cadre du débat de haut niveau. Le Kenya a regretté que l'incapacité de la Conférence à adopter un programme de travail empêche une fois de plus cet organe de se montrer à la hauteur de son mandat. Le Kenya a encouragé les deux principales puissances nucléaires à intensifier le dialogue et la coopération pour renforcer la maîtrise des armements, et a insisté sur le fait que l'assurance ultime d'un monde plus sûr résidait dans les accords multilatéraux.

Conscient que le transfert et le commerce illicites d'armes légères et de petit calibre contribuent à de nombreux conflits inutiles dans le monde, le Président du Kenya a amené, le 9 juin, la nation à brûler les armes légères illégales, a fait savoir la délégation.

L'Iran a dit apprécier l'approche constructive et responsable de la Chine ainsi que son engagement en faveur du multilatéralisme. L'objectif général du multilatéralisme est de servir de manière responsable les objectifs communs de la communauté internationale, a ajouté l’Iran. Il a critiqué l'unilatéralisme qui n'a aucun égard pour les engagements envers le multilatéralisme pris par les pays en vertu d'accords bilatéraux ou multilatéraux, voire de résolutions du Conseil de sécurité. Ces pays n'ont pas hésité à violer sans justification les obligations qui leur incombent en vertu des principaux traités bilatéraux et multilatéraux, a déploré l’Iran.

L’Iran a espéré, par ailleurs, que la Conférence d'examen du Traité de non-prolifération nucléaire se tiendrait bientôt et qu’elle enverrait un message sans équivoque selon lequel les armes nucléaires ne doivent plus jamais être utilisées et que le désarmement nucléaire est la seule garantie pour sauvegarder cet objectif.

L'Argentine a salué la participation du Ministre des affaires étrangères de la Chine à la Conférence, et souligné que la participation des plus hautes autorités contribuait à dynamiser les échanges sur la paix et la sécurité internationales au sein de la Conférence. Cependant, a ajouté la délégation, la Conférence doit reprendre la négociation des traités de désarmement. De l’avis de l’Argentine, des progrès rapides pourraient être réalisés concernant certains points de l'ordre du jour de la Conférence, comme les garanties négatives de sécurité. L'Argentine, en tant que présidente de la sixième conférence des États parties au Traité sur le commerce des armes, a félicité la Chine de son adhésion au Traité.

Le Mexique s’est félicité de la participation de M. Yi et d’avoir pu entendre ainsi le point de vue de la Chine. Le multilatéralisme est de la plus haute importance pour qu'un jour le monde soit exempt d'armes nucléaires, a dit le Mexique. La participation d'autorités de haut niveau à la Conférence du désarmement cette année reflète l'engagement politique des pays envers cet organe. Le Mexique a appelé la Conférence à remplir son mandat de négociation.

L'Algérie a salué la participation du Ministre des affaires étrangères de la Chine ainsi que l’engagement réitéré de la Chine en faveur de la non-prolifération et du multilatéralisme. L'Algérie a aussi insisté sur la nécessité de donner un nouvel élan aux travaux de la Conférence.

Le Pakistan a salué l’exposé détaillé de M. Yi au sujet de la position de la Chine sur le système de sécurité mondial ancré dans les Nations Unies. Le Pakistan a félicité la Chine pour son soutien au multilatéralisme et a salué son engagement en faveur de la paix et de la sécurité.

La Fédération de Russie a estimé que la déclaration du Ministre des affaires étrangères de la Chine était très importante pour la Conférence et pour comprendre la position de la Chine sur les questions traitées à la Conférence. La Fédération de Russie et la Chine ont un partenariat stratégique et ont des positions très similaires ou très proches. La Conférence a entendu un message très sérieux et doit penser à des efforts collectifs pour résoudre les problèmes évoqués par le Ministre. Une partie très importante du message concernait le fait que la Chine soutiendrait activement les différents forums travaillant sur le désarmement et le contrôle des armes, a relevé la Fédération de Russie.

La Syrie a déclaré qu'elle avait écouté avec beaucoup d'attention la déclaration du Ministre chinois, qui reflétait l'engagement de la Chine en faveur du multilatéralisme et du rôle central joué par les Nations Unies face aux défis internationaux. La Syrie a dit partager le point de vue de la Chine sur l'importance, pour la Conférence, de reprendre son rôle de pilier du désarmement nucléaire. La Syrie a également salué l'engagement de la Chine en faveur d'une zone exempte d'armes nucléaires au Moyen-Orient.

L'Indonésie s'est félicitée de l'allocution du Ministre chinois. En tant que membre de la famille de la Conférence du désarmement, l'Indonésie a salué les efforts déployés pour renforcer le dialogue et la consultation entre les pays afin que la Conférence puisse aller de l'avant.

Exerçant leur droit de réponse après la déclaration de M. Yi, les États-Unis ont appelé la Chine à s'engager avec eux dans des discussions bilatérales sur la réduction des risques et la stabilité stratégique. Les États-Unis ont regretté que la Chine s’y soit refusée jusqu’à présent. Ils ont précisé que leur objectif était de préserver l’ordre international fondé sur des règles, qui a contribué à maintenir la paix et à répandre la prospérité pendant sept décennies. Les États-Unis ont assuré qu’ils s'opposeraient vigoureusement aux États qui tentent de saper cet ordre international fondé sur des règles ou de le remodeler à leur propre image autocratique.

En réponse à la déclaration des États-Unis, la Chine a assuré qu’elle n'avait jamais rejeté le dialogue bilatéral sur la paix et la stabilité internationales avec le « P5 », y compris avec les États-Unis. La Chine est impatiente de s'engager dans une communication franche avec les pays, y compris les États-Unis, sur la base du respect mutuel et de l'égalité, pour promouvoir la confiance mutuelle et stratégique, et défendre conjointement la stabilité et la sécurité internationales.

Les États-Unis ont demandé à la Chine si elle était prête à accepter, lors de cette plénière, de tenir des discussions bilatérales avec les États-Unis sur la réduction des risques et la stabilité stratégique.

La Chine a déclaré qu’un dialogue bilatéral avec les États-Unis sur la maîtrise des armements et la non-prolifération devrait être organisé sur la base des communications entre les deux capitales. Le nouveau gouvernement des États-Unis n'a pas fait de suggestions ou de demandes officielles par l'intermédiaire des deux capitales, a dit la délégation chinoise.

 

CD21.029F