Aller au contenu principal

Les mesures visant à contenir la COVID-19 ont souvent des effets néfastes sur les enfants et viennent aggraver leur vulnérabilité face à la violence, soulignent deux expertes de l’ONU

Compte rendu de séance

 

Actuellement, près de trois enfants sur quatre âgés de 2 à 4 ans sont régulièrement victimes d’une discipline violente de la part des personnes qui s’occupent d’eux ; environ un enfant sur quatre âgé de moins de 5 ans vit avec une mère victime de violences de la part de son compagnon ; une femme sur cinq et un homme sur 13 déclarent avoir été victimes de violences sexuelles dans leur enfance ; et un peu plus d'un enfant sur trois dans le monde est victime de violences psychologiques. Tel est le constat dressé cet après-midi devant le Conseil des droits de l’homme par la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la violence contre les enfants, Mme Najat Maalla M’jid.

Dans ce contexte, a fait observer la Représentante spéciale, la pandémie actuelle et les mesures d'atténuation qui l’accompagnent viennent aggraver les inégalités existantes ainsi que la vulnérabilité des enfants à la violence.

Les mesures restrictives prises pour contenir la pandémie ont souvent eu des effets néfastes sur les enfants, a elle aussi souligné la Représentante spéciale pour la question des enfants et des conflits armés, Mme Virginia Gamba. « Le nombre de violations graves contre les enfants est resté à un niveau inacceptable, tandis que le respect du droit international humanitaire, du droit international des droits de l’homme et des droits de l’enfant continue de s’éroder », a-t-elle déclaré.

Mme Gamba a fait part de sa grave préoccupation face à l’augmentation des cas d’enlèvements d’enfants, affirmant que « cette violation, ainsi que la violence sexuelle, y compris le viol, et les attaques contre les écoles et les hôpitaux, sont les violations pour lesquelles une augmentation plutôt qu'une diminution par rapport à l'année précédente a été constatée, tandis que les chiffres concernant le refus d'accès humanitaire sont restés élevés ». La détention d’enfants pour leur association réelle ou présumée avec des parties au conflit, y compris celles désignées comme terroristes par les Nations Unies, demeure une réalité inquiétante, a ajouté la Représentante spéciale. La plupart de ces violations ont eu lieu dans le contexte de la pandémie de COVID-19, a-t-elle souligné.

Dans le cadre du dialogue avec Mme M’jid, auquel ont participé de nombreuses délégations*, la communauté internationale a été appelée à agir pour que la crise sanitaire ne se transforme pas en une crise plus large des droits de l'enfant, qui aurait des conséquences irréversibles sur la vie de générations entières.

Plusieurs délégations** ont également engagé avec Mme Gamba un dialogue qui se poursuivra demain après-midi. Elles se sont dites profondément préoccupées par l'ampleur et la gravité des violations du droit international et des abus commis contre les enfants dans le contexte des conflits armés. Les attaques contre les hôpitaux et les travailleurs de la santé ont été jugées particulièrement odieuses, tandis qu’était dénoncée l'instrumentalisation des écoles dans le cadre des hostilités. La nécessité de garantir un accès humanitaire sans entrave aux enfants touchés par les conflits a été soulignée à plusieurs reprises.

En fin de journée, les délégations des pays ci-après ont exercé leur droit de réponse : Brésil, Indonésie, Arabie saoudite, Syrie, Azerbaïdjan, Arménie, Iran et Soudan du Sud.

 

Demain matin, à 10 heures, le Conseil poursuivra son dialogue avec le Rapporteur spécial sur la torture, entamé ce matin. Il sera ensuite saisi de rapports thématiques au titre de la promotion et de la protection de tous les droits de l’homme.

 

Dialogue avec la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question de la violence contre les enfants

Le Conseil est saisi du rapport de la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question de la violence contre les enfants (A/HRC/46/40).

Présentation

MME NAJAT MAALLA M'JID, Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question de la violence contre les enfants, a relevé qu’actuellement, près de trois enfants sur quatre âgés de 2 à 4 ans sont régulièrement victimes d’une discipline violente de la part des personnes qui s’occupent d’eux ; environ un enfant sur quatre âgé de moins de 5 ans vit avec une mère victime de violences de la part de son compagnon ; une femme sur cinq et un homme sur 13 déclarent avoir été victimes de violences sexuelles dans leur enfance ; et un peu plus d'un enfant sur trois dans le monde est victime de violences psychologiques.

Dans ce contexte, a poursuivi la Représentante spéciale, la pandémie actuelle et les mesures d'atténuation qui l’accompagnent viennent aggraver les inégalités existantes ainsi que la vulnérabilité des enfants à la violence, y compris la violence domestique, la violence sexuelle en ligne et la cyberintimidation. En outre, a-t-elle mis en garde, la crise socioéconomique à moyen et long termes provoquée par la COVID-19 augmentera la pauvreté et d'autres facteurs de risque associés à la violence contre les enfants.

Mme M’jid a constaté que face à cette crise (sanitaire), plusieurs pays avaient veillé à ce que les services de protection de l'enfance, de protection sociale et de santé mentale considérés comme essentiels soient accessibles pendant les périodes de confinement. Parmi d’autres mesures de soutien, les lignes d'assistance téléphonique ont été renforcées, des enfants qui étaient en détention ont été libérés et des transferts en espèces ont été alloués aux familles vulnérables. Mais de nombreux enfants vulnérables sont toujours laissés pour compte, a fait observer la Représentante spéciale.

Afin d’asseoir les fondations d’un système complet de protection sociale, Mme M’jid a recommandé que les secteurs de la protection de l'enfance, de la santé, de l'éducation, de la protection sociale et de la justice travaillent en étroite collaboration. Elle a aussi recommandé que les besoins, les droits et les opinions des enfants soient au cœur des initiatives visant à prévenir et combattre la violence. Lorsqu'ils sont responsabilisés par les décideurs, les enfants peuvent devenir d'importants agents de changement, a assuré Mme M’jid.

Enfin, la Représentante spéciale a recommandé d’allouer des budgets adéquats et de renforcer les services pour qu’ils soient réellement accessibles : il s'agit d'un investissement qui peut être extrêmement rentable pour les enfants, les familles et les sociétés, a insisté Mme M’jid.

Aperçu du dialogue

Les délégations ont dit prendre toute la mesure, comme la Représentante spéciale, des défis qui restent à relever pour mettre fin à la violence contre les enfants dans un contexte où la riposte à la pandémie de COVID-19 et la perturbation des services ont rendu les enfants encore plus vulnérables à la violence et aux différentes formes de négligence. Le risque accru d'exposition des enfants à la violence à la maison, à l'exploitation et aux abus sexuels en ligne, a été jugé particulièrement inquiétant.

Plusieurs pays ont présenté les mesures de soutien aux enfants qu’ils ont prises durant la pandémie de COVID-19 et les confinements y associés, citant notamment les subventions directes et le soutien psychosocial. Ont également été mentionnées les mesures prises en faveur de la suspension du droit de visite et d'hébergement des enfants chez un parent violent ; de l’interdiction des châtiments corporels à l’école ; ou encore des programmes visant à sensibiliser les enfants et les parents à un comportement sûr en ligne.

La reconstruction après la pandémie devra être l’occasion de réévaluer et d'améliorer les politiques relatives à la protection sociale et à l'enfance, ainsi que les services de santé mentale, a recommandé un intervenant. La communauté internationale a été appelée à agir pour que la crise sanitaire ne se transforme pas en une crise plus large des droits de l'enfant, qui aurait des conséquences irréversibles sur la vie de générations entières.

Une organisation non gouvernementale (ONG) a demandé aux États de libérer les enfants des lieux de détention, compte tenu des inquiétudes concernant la propagation de la COVID-19.

Une autre ONG a dénoncé les violences policières contre les enfants des rues.

Les délégations ont souscrit au point de vue de Mme M’jid selon lequel il est essentiel de faire participer activement les enfants et les jeunes aux décisions qui les concernent. Des délégations ont jugé encourageantes les expériences de jeunes – de jeunes filles notamment – qui, à travers le monde, mènent leurs propres campagnes de sensibilisation contre la violence ou pour la participation des jeunes aux processus civiques.

Une approche fondée sur les droits de l'enfant, combinée à la volonté politique de parvenir à un monde sans violence, est indispensable pour créer un environnement sûr pour les enfants, a-t-il été souligné. Une ONG a insisté sur le fait que la non-discrimination devait être au cœur de toutes les stratégies de participation des enfants.

* Liste des intervenants : Union européenne, Lituanie (au nom des pays nordiques et baltes), Cameroun (au nom du Groupe des États africains), Monaco, Allemagne, État de Palestine, Qatar, Israël, Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Ordre souverain de Malte, Slovénie, France, Libye, Fédération de Russie, Togo, Philippines, Mauritanie, Indonésie, Équateur, Arménie, Belgique, Îles Marshall, Venezuela, Maroc, Iran, Afrique du Sud, Namibie, Malte, États-Unis, Égypte, Malaisie, Ghana, Algérie, Croatie, Uruguay, Autriche, Chine, Paraguay, Monténégro, Azerbaïdjan, Italie, Sierra Leone, Fidji, Royaume-Uni, Cuba, Soudan du Sud, Panama, République-Unie de Tanzanie, Géorgie, Bulgarie, ONU Femmes, Kenya, Timor-Leste, Tchad, Chypre, Tunisie, Burkina Faso, Jamaïque.

Plusieurs organisations de la société civile ont aussi fait des déclarations : Law Council of Australia, Defence for Children International, Fédération internationale Terre des Hommes, Edmund Rice International Limited, Arigatou International , Consortium for Street Children, Fédération luthérienne mondiale, Union internationale humaniste et laïque, Centre européen pour le droit, la justice et les droits de l'homme et China Soong Ching Ling Foundation.

Réponses et remarques de conclusion de la Représentante spéciale

MME M’JID a déclaré qu’il fallait, dans ces circonstances difficiles, réagir contre la vulnérabilité accrue des enfants à l’égard de la violence, de la traite et de l’exploitation sexuelle, dont témoigne l’augmentation du nombre des cas recensés. L’intégration des droits de l’enfant « dans toutes nos activités » ne doit pas se faire au détriment de la défense des autres droits, notamment des droits des femmes, a-t-elle ajouté.

Mme M’jid a plaidé pour la sensibilisation des forces de l’ordre au problème de la violence envers les enfants et pour l’adoption de mesures alternatives à la détention des mineurs.

La Représentante spéciale a enfin souligné que son mandat coopérait avec des organisations régionales en Afrique, en Europe et aux Amériques, ainsi qu’avec des équipes et commissions régionales des Nations Unies.

Dialogue avec la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la question des enfants et des conflits armés

Le Conseil est saisi du rapport de la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la question des enfants et des conflits armés (A/HRC/46/39) sur les activités qu’elle a menées dans le cadre de son mandat.

Présentation du rapport

MME VIRGINIA GAMBA, Représentante spéciale du Secrétaire général pour la question des enfants et des conflits armés, a rappelé que cette année marque le vingt-cinquième anniversaire de la création, par l’Assemblée générale, du mandat concernant les enfants et les conflits armés. L’année 2020 a été une année difficile, a-t-elle souligné.

« Le nombre de violations graves contre les enfants est resté à un niveau inacceptable, tandis que le respect du droit international humanitaire, du droit international des droits de l’homme et des droits de l’enfant continue de s’éroder », a déclaré Mme Gamba. Elle a fait part de sa grave préoccupation face à l’augmentation des cas d’enlèvements d’enfants, affirmant que « cette violation, ainsi que la violence sexuelle, y compris le viol, et les attaques contre les écoles et les hôpitaux, sont les violations pour lesquelles une augmentation plutôt qu'une diminution par rapport à l'année précédente a été constatée, tandis que les chiffres concernant le refus d'accès humanitaire sont restés élevés ». La détention d’enfants pour leur association réelle ou présumée avec des parties au conflit, y compris celles désignées comme terroristes par les Nations Unies, demeure une réalité inquiétante, a ajouté la Représentante spéciale.

La plupart de ces violations ont eu lieu dans le contexte de la pandémie de COVID-19, a poursuivi Mme Gamba. Les mesures restrictives prises pour contenir la pandémie ont souvent eu des effets néfastes sur les enfants ; elles ont également eu un impact sur la capacité des Nations Unies à mener un travail vital pour prévenir et stopper les violations graves, notamment en réduisant les possibilités d'engagement avec les parties au conflit et en retardant les entretiens avec les victimes.

Malgré les problèmes persistants et émergents, d'importants progrès ont été réalisés l’année dernière pour prévenir et arrêter les violations graves, notamment dans le domaine de la justice transitionnelle, a précisé Mme Gamba, avant de rendre compte de mesures positives prises au Soudan du Sud, au Myanmar, en République centrafricaine ou encore au Mali et en Colombie.

La Représentante spéciale a ensuite indiqué que son bureau préparait des notes d'orientation techniques sur, entre autres, l'enlèvement d'enfants et le refus de l'aide humanitaire aux enfants. Par ailleurs, Mme Gamba a fait savoir que le Secrétaire général lui avait demandé, pour marquer le vingt-cinquième anniversaire du mandat, de réaliser une étude sur l'évolution du mandat au fil des ans.

« Si nous voulons construire des sociétés fortes et résilientes et briser les cycles de violence, nous devons investir dans les droits des enfants et placer leur protection au premier plan de toutes nos actions », a conclu la Représentante spéciale du Secrétaire général.

Aperçu du dialogue

Des délégations se sont dites profondément préoccupées par l'ampleur et la gravité des violations du droit international et des abus commis contre les enfants dans le contexte des conflits armés. Les attaques contre les hôpitaux et les travailleurs de la santé ont été jugées particulièrement odieuses, tandis qu’était dénoncée l'instrumentalisation des écoles dans le cadre des hostilités, y compris par des mouvements terroristes. L’utilisation d’enfants en tant que boucliers humains par des acteurs armés non étatiques a été fortement condamnée par une délégation

La nécessité de garantir un accès humanitaire sans entrave aux enfants touchés par les conflits a été soulignée à plusieurs reprises, y compris sous l’angle des effets néfastes que la pandémie et les mesures prises pour l'endiguer peuvent avoir sur l’accès humanitaire.

Les États ont été appelés à mettre fin à l'impunité des auteurs de violations graves contre les enfants dans les conflits armés et à se concentrer sur la réhabilitation et la réintégration sociale à long terme de ces enfants. Une délégation a indiqué avoir soutenu l’approbation, par le Conseil de sécurité, du guide pratique élaboré par la Représentante spéciale visant à placer les enfants au centre des initiatives de rétablissement de la paix.

Les États qui ne l’ont pas encore fait ont été appelés à ratifier le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.

La Représentante spéciale a été priée de dire quelles mesures supplémentaires elle prenait pour assurer – en dépit de la pandémie – le bon fonctionnement, en se fondant sur des faits établis, du mécanisme d’inscription et de désinscription à la liste des parties qui commettent de graves violations.

** Liste des intervenants : Estonie (au nom des pays nordiques et baltes), Union européenne, Cameroun (au nom du Groupe des États africains), Belgique (au nom d'un groupe de pays), Argentine (au nom d'un groupe de pays), Allemagne, Israël, UNICEF, Ordre souverain de Malte, Slovénie, Libye, France, Philippines, Iraq, Suisse, Indonésie, Arabie saoudite, Venezuela, États-Unis, Maroc et Belgique.

Ce débat se poursuivra demain après-midi.

 

HRC21.031F