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LE CONSEIL DES DROITS DE L’HOMME EXAMINE LES RAPPORTS SUR LE DROIT À LA VIE PRIVÉE ET SUR LE LOGEMENT CONVENABLE

Compte rendu de séance
Il achève en outre son débat sur la protection des droits de l’homme dans la lutte antiterroriste

Après avoir achevé son débat interactif sur la protection des droits de l'homme dans la lutte antiterroriste en entendant les interventions de plusieurs délégations*, le Conseil des droits de l’homme a examiné, ce matin, les rapports sur le droit à la vie privée et sur le logement convenable, présentés par les deux rapporteurs spéciaux en charge de ces questions, à savoir, respectivement, M. Joseph Cannataci et Mme Leilani Farha.

M. Cannataci a expliqué que les violations du droit à la vie privée fondées sur le genre sont une forme systémique de déni des droits de l’homme; elles sont discriminatoires et perpétuent des structures politiques, socioéconomiques et culturelles inégalitaires, ce qui porte préjudice aux individus mais également à la société tout entière, a-t-il souligné. De leur côté, les violations de la vie privée en ligne reflètent et élargissent celles commises hors ligne du fait même que les technologies numériques amplifient leur portée et intensifient leur impact, a-t-il fait observer. Les mesures prises par les États pour faire face à ces violations sont souvent faibles et peu concluantes, a-t-il par ailleurs indiqué.

M. Cannataci a en outre rappelé avoir publié ses conclusions et recommandations préliminaires à l’issue de ses visites effectuées en Argentine en mai 2019 et en République de Corée en juillet 2019. Il a ajouté avoir accepté une invitation du Nigéria pour une visite dans le pays en novembre prochain. Il a ajouté poursuivre ses enquêtes sur des cas individuels, y compris les plaintes déposées par M. Julian Assange, de Wikileaks, et par le Président Lenin Moreno de l’Équateur.

Le Rapporteur spécial a également indiqué qu’il œuvre également à une initiative collective pour traiter de la problématique du cryptage et à une autre initiative sur les prisonniers et le droit à la vie privée.

De nombreuses délégations** ont pris part au dialogue avec le Rapporteur spécial.

Mme Farha a présenté son rapport contenant des lignes directrices relatives à la réalisation du droit à un logement convenable en expliquant qu’elles fournissent aux États des outils pour répondre aux besoins urgents en matière de droit au logement. Ces lignes directrices affirment aussi que l’éviction forcée est une violation flagrante des droits de l’homme et rappellent aux États que les évictions pour arriérés de loyers ou non remboursement d’emprunts doivent être effectuées dans le respect et la dignité. L’une des directives contenues dans ces lignes directrices instruit en outre les États et les gouvernements locaux sur la nécessité de fournir aux locataires une meilleure protection, notamment en interdisant la vente de logements sociaux publics, le blanchiment d’argent ou l’évasion fiscale. Aucun investissement ne doit être autorisé s’il ne respecte pas les droits de l’homme, a insisté la Rapporteuse spéciale.

La Rapporteuse spéciale a par ailleurs rendu compte des visites qu’elle a menées au Nigéria et en France et a indiqué que son rapport sur sa visite en Nouvelle-Zélande serait publié ultérieurement.

En tant que pays concernés, le Nigéria et la France se sont exprimés et la Commission nationale consultative des droits de l’homme de la France est également intervenue. De nombreux intervenants*** ont ensuite pris part au dialogue engagé avec la Rapporteuse spéciale.


Le Conseil reprendra ses travaux cet après-midi, à 15 heures. Il conclura son débat interactif avec Mme Farah, avant de se pencher sur les rapports du Groupe de travail intergouvernemental à composition non limitée sur les sociétés transnationales et autres entreprises et les droits de l’homme. Il entendra aussi la présentation des rapports thématiques du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et du Secrétaire général au titre du point 3 de l’ordre du jour (Promotion et protection de tous les droits de l'homme, civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, y compris le droit au développement).

Les débats de cette quarante-troisième session et l’ensemble des interventions auxquelles ils ont donné lieu peuvent être suivis et réentendus en consultant le site UN Web TV.


Fin du débat interactif sur la protection des droits de l'homme dans la lutte contre le terrorisme

Aperçu des débats

Nombre de délégations ont présenté les mesures adoptées par leurs gouvernements pour prévenir, combattre et réprimer les actes de terrorisme et d’extrémisme violent. Ces mesures incluent l’adoption ou l’amendement de législations spécifiques, des programmes de déradicalisation et, dans certains cas, le rapatriement de combattants étrangers. Les États doivent aussi rechercher l’intérêt supérieur de l’enfant, car les enfants ne sont pas responsables des actes de leurs parents, a-t-il été souligné.

Il a été aussi dit qu’il fallait avoir une « tolérance zéro » face à cet « ennemi commun » qu’est le terrorisme, tout en se penchant, pour éliminer de tels actes, sur leurs sources et leurs causes profondes.

Les États doivent respecter les droits de l’homme et toutes les libertés fondamentales dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, y compris en s’abstenant de tout acte de torture, a-t-il en outre été rappelé. À cet égard, certaines délégations ont dénoncé les pratiques de certains États qui, selon elles, recourent à la torture, à la disparition forcée, aux exécutions extrajudiciaires ou adoptent des lois, concepts et définitions vagues et contraires aux normes internationales pour réprimer les opposants et la société civile, sous prétexte de lutte contre le terrorisme.

Il a également été demandé à la Rapporteuse spéciale de partager des exemples de bonnes pratiques, si elle en avait.

Remarques et conclusion de la Rapporteuse spéciale

MME FIONNUALA NÍ AOLÁIN, Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, a réitéré que toute règlementation et toute mesure dans le domaine de la lutte contre le terrorisme et contre l’extrémisme violent devaient être conformes aux droits de l’homme, c’est-à-dire, en particulier, être proportionnées, légitimes et non discriminatoires.

*Liste des intervenants : Algérie, Nigéria, Indonésie, Maldives, Sénégal, Chine, Géorgie, Belgique, Royaume Uni, Niger, Cameroun, Arménie, Tchad, Bahreïn, UNESCO, Iraq, Comité consultatif mondial de la Société des amis, International Service for Human Rights (au nom également de Christian Solidarity Worldwide), Rights Livehood Award Foundation, Sikh Human Rights Group, Cairo Institute for Human Rights studies, Commission internationale de jurists, Article 19, RADDHO, Human Rights Watch, Maat for Peace, International Bar Association.

Débat interactif sur le droit à la vie privée

Présentation du rapport

Le Conseil est saisi du rapport du Rapporteur spécial sur le droit à la vie privée (A/HRC/43/52, à paraître)

M. JOSEPH CANNATACI, Rapporteur spécial sur le droit à la vie privée, dont le mandat comprend une perspective de genre, a donné un aperçu de ses activités en 2019 avant d’aborder la thématique des atteintes à la vie privée fondée sur le sexe. Le rapport sur cette question est alimenté par les conclusions contenues dans son rapport de mai 2019 sur la vie privée et le genre, a-t-il précisé.

Les violations du droit à la vie privée fondées sur le genre sont une forme systémique de déni des droits de l’homme; elles sont discriminatoires et perpétuent des structures politiques, socioéconomiques et culturelles inégalitaires, ce qui porte préjudice aux individus mais également à la société tout entière, a souligné le Rapporteur spécial. De leur côté, les violations de la vie privée en ligne reflètent et élargissent celles commises hors ligne du fait même que les technologies numériques amplifient leur portée et intensifient leur impact, a fait observer M. Cannataci. Les mesures prises par les États pour faire face à ces violations sont souvent faibles et peu concluantes et les stratégies préventives ciblant uniquement des individus sont inefficaces, a-t-il indiqué.

M. Cannataci a précisé que dans son rapport, il formule une longue série de recommandations à l’adresse des États et des acteurs non étatiques, sur la base d’instruments internationaux tels que la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, la Convention relative aux droits de l’enfant, les Principes de Jogjakarta révisés et la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Parmi les recommandations contenues dans le rapport, le Rapporteur spécial met l’accent sur le fait que le respect de la vie privée est un droit de tous, indépendamment du sexe, et que l’identité de genre est partie intégrante de la personnalité, de l’autodétermination, de la dignité et de la liberté. La vie privée « n’est pas un luxe réservé à quelques-uns mais un droit essentiel de tous », a insisté M. Cannataci. À ce titre, a-t-il ajouté, ce droit doit être protégé par la législation de tous les États, ainsi que par les institutions nationales, régionales et internationales. M. Cannataci a préconisé l’élaboration d’une recommandation sur le droit à la vie privée et le genre. Il est aussi fondamental d’établir des orientations internationales pour la protection de ce droit pour tous les citoyens.

Pour ce qui est de ses activités depuis mars 2019, le Rapporteur spécial a indiqué avoir examiné les défis soulevés par les nouvelles technologies; avoir effectué des visites de pays à caractère officiel et non officiel, promu la protection du droit à la vie privée et plaidé en faveur des principes y afférents; et avoir sensibilisé à ce droit et aux mesures de réparation. M. Cannataci a en outre fait état de violations présumées du droit à la vie privée.

Le Rapporteur spécial s’est félicité du nombre croissant d’États qui sollicitent son avis en vue de la rédaction de lois sur le droit à la vie privée. Il a indiqué qu’il coopère en outre avec le Comité des droits de l’enfant dans le but de rédiger des directives concernant la protection de la vie privée des enfants. M. Cannataci a également indiqué avoir présenté à l’Assemblée générale son rapport incluant la recommandation sur les données de santé préparée par l’Équipe spéciale chargée de la confidentialité des données de santé. Cette recommandation a été positivement accueillie partout dans le monde, s’est-il réjoui, en remerciant le Professeur Nikolaus Forgo et tous les membres de ladite Équipe.

M. Cannataci a rappelé avoir également publié ses conclusions et recommandations préliminaires à l’issue de ses visites effectuées en Argentine en mai 2019 et en République de Corée en juillet 2019. Il a ajouté avoir accepté une invitation du Nigéria pour une visite dans le pays en novembre prochain.

Le Rapporteur spécial a par ailleurs indiqué avoir organisé, les 8 et 9 octobre dernier au Royaume-Uni, la quatrième édition du Forum international de surveillance du renseignement - International Intelligence Oversight Forum (IIOF) –, qui a vu la participation de plus de 170 délégués provenant d’agences indépendantes, de comités parlementaires et de services de renseignement d’une quarantaine de pays; les délégués ont discuté des pratiques optimales d’amélioration de la protection de la vie privée par la surveillance du renseignement.

M. Cannataci a ajouté poursuivre d’autre part ses enquêtes sur des cas individuels, y compris les plaintes déposées par M. Julian Assange, de Wikileaks, et par le Président Lenin Moreno de l’Équateur.

Le Rapporteur spécial a enfin indiqué qu’il œuvre également à une initiative collective pour traiter de la problématique du cryptage et à une autre initiative sur les prisonniers et le droit à la vie privée.

Aperçu des débats

Plusieurs pays ont salué l’approche de genre adoptée par le Rapporteur spécial, insistant sur le fait que le droit à la vie privée doit être protégé pour tous, tant il est fondamental et essentiel au respect de la dignité humaine et se trouve à la base de la vie démocratique. Dans ce contexte, plusieurs délégations ont présenté les mesures en vigueur dans leurs pays respectifs afin de protéger ce droit; elles ont aussi condamné toutes les pratiques, y compris celles des États, visant à le violer, notamment par le biais des technologies numériques.

D’autres délégations se sont pour leur part inquiétées du fait que les procédures spéciales des Nations Unies établissent ou cherchent à intégrer « coûte que coûte » dans leurs rapports des notions et concepts non admis ou reconnus au plan international. Cela menace l’espace de dialogue, ont-elles prévenu, tandis qu’une délégation se disait « perplexe » face à la persistance de M. Cannataci à n’aborder cette question [du droit à la vie privée] que sous l’angle du genre alors que d’autres problématiques existent s’agissant de ce droit, comme par exemple celle de la surveillance électronique des citoyens par l’État.

L’attention a également été attirée sur la nécessité de protéger la vie privée des minorités, des réfugiés et des migrants.

A par ailleurs été dénoncée la surveillance étatique des citoyens à leur insu, souvent suivie de fausses accusations, d’inspections à domicile et de confiscations de matériels électroniques. A également été dénoncé le piratage de données et la surveillance Internet de certains pays par d’autres.

Toutes ces questions constituent probablement la plus grande menace qui guette le monde, a-t-il été affirmé. Il a été rappelé que souvent, des photos et vidéos privées de responsables politiques ou étatiques sont publiées sans le consentement de la personne concernée.

Remarques et conclusion du Rapporteur spécial

M. CANNATACI a estimé que des mesures éducatives devaient être mise en place pour permettre d’apprendre dès le plus jeune âge à repérer les dangers en ligne.

En ce qui concerne la surveillance (électronique des citoyens), le Rapporteur spécial a assuré reconnaître ce problème. Il a ajouté qu’il reconnaît également l’existence de divergences culturelles et religieuses sur la question du genre. Mais, a-t-il rappelé, son mandat lui demande d’intégrer cette dimension dans ses rapports.

Internet devrait en principe être une plateforme sûre; or, il ne l’est pas, ce qui exige de passer par une réglementation robuste, a ensuite souligné M. Cannataci. Il a dit avoir le cœur brisé d’entendre les témoignages de femmes ayant subi des violations de leur vie privée en ligne, sans pouvoir avoir aucune réparation ni aucun recours.

Le Rapporteur spécial a lancé un appel à des contributions financières pour être en mesure de mener les tâches qui lui incombent dans le cadre du mandat.

**Liste des participants : Pakistan (au nom de l’Organisation de coopération islamique), Lettonie, Union européenne, Brésil, Allemagne, Cuba, Iraq, France, Philippines, Équateur, Burkina Faso, Égypte, Grèce, Fédération de Russie, République de Corée, Espagne, République islamique d’Iran, Venezuela, Indonésie, Malte, Chine, Royaume-Uni, Arménie, Barbade, Autriche, Soudan, Sikhs Human Rights Group, iuventum e.V, Commission internationale des juristes, Association pour la communication progressive, International Internship Program, International Muslims Women Union, American for Democracy and Human Rights in Bahraïn, Liberation, China Society for Human Rights Studies, Association Adala-Justice.

Débat interactif sur le logement convenable

Le Conseil est saisi du rapport de la Rapporteuse spéciale sur le logement convenable (A/HRC/43/43), qui contient des lignes directrices relatives à la réalisation du droit à un logement convenable qui indiquent les principales conditions d’une intervention efficace et menée dans le respect des droits face aux problèmes actuels. Il est également saisi des additifs 1 et 2 au rapport, qui concernent respectivement les visites que la Rapporteuse spéciale a effectuées au Nigéria et en France.

MME LEILANI FARHA, Rapporteuse spéciale sur le logement convenable en tant qu’élément du droit à un niveau de vie suffisant, ainsi que sur le droit à la non-discrimination à cet égard, a présenté ses trois rapports, incluant ceux sur ses visites en France et au Nigéria, et a précisé que le rapport sur sa visite en Nouvelle-Zélande serait publié ultérieurement.

Concernant la France, Mme Farha a observé que le pays avait bien adopté un nombre ambitieux de lois et politiques qui ont drastiquement amélioré les conditions de logement d’un grand nombre de personnes. Cependant, des inégalités persistent sur l’ensemble du territoire, a-t-elle souligné. Dans les métropoles, ceux qui invoquent devant les tribunaux leur droit au logement doivent encore attendre des années avant de pouvoir accéder à un logement convenable; à tel point qu’un grand nombre de personnes se tournent vers le marché privé, où souvent les conditions d’hébergement ne répondent pas aux normes minimales.

Par ailleurs, en raison de la cherté des loyers, le nombre de campements illégaux a augmenté en France, a poursuivi la Rapporteuse spéciale. Les résidents de ces camps n’ont pas toujours accès aux services de base et risquent des évictions forcées. Dans le nord du pays, les migrants vivent sous des tentes et sont régulièrement expulsés par la police. Alors que la France dispose d’un des plus grands stocks de logements sociaux d’Europe, ce nombre est insuffisant, a insisté la Rapporteuse spéciale, appelant la France à revoir sa législation, à répondre aux besoins urgents des sans-abri et à cesser sa politique d’évictions et d’expulsions forcées.

Pour ce qui concerne le Nigéria, en dépit de la considérable croissance économique du pays, près 50% de la population vivent dans l’extrême pauvreté, a ensuite souligné la Rapporteuse spéciale. Alors que les logements de luxe fleurissent à Lagos et à Abuja, on compte à travers le pays un déficit en logements de 22 millions d’unités, a chiffré Mme Farha. En raison de la cherté des logements, des millions de personnes sont contraintes de vivre dans les pires conditions de logement que la Rapporteuse spéciale ait vues en six ans de mandat.

Mme Farha s’est également dite préoccupée par les discriminations touchant les personnes LGBTI, les personnes handicapées et celles vivant avec le VIH/sida en termes d’accès au logement au Nigéria. Il arrive que les propriétaires, ou même les centres gérés par le Gouvernement, les attaquent, les expulsent ou les emprisonnent, alors qu’elles n’ont commis aucun crime. En outre, les personnes pauvres dans les zones urbaines sont souvent la cible systématique de la police et sont arrêtées en masse.

Mme Farha a ajouté que le seul programme de logement qu’elle ait pu constater au Nigéria visait la construction de logements de fonction pour les officiels gouvernementaux. Aussi, la Rapporteuse spéciale a-t-elle émis le vœu que son rapport ouvrirait la voie à une prise de conscience et pousserait le Gouvernement nigérian à se conformer à ses obligations.

Concernant les lignes directrices relatives à la réalisation du droit à un logement convenable, la Rapporteuse spéciale a souligné qu’elles avaient été développées en consultation avec les États et d’autres partenaires. Elles fournissent aux États des outils pour répondre aux besoins urgents en matière de droit au logement. Elles affirment aussi que l’éviction forcée est une violation flagrante des droits de l’homme et rappellent aux États que les évictions pour arriérés de loyers ou non remboursement d’emprunts doivent être effectuées dans le respect et la dignité. La directive 12 instruit notamment les États et les gouvernements locaux sur la nécessité de fournir aux locataires une meilleure protection, notamment en interdisant la vente de logements sociaux publics, le blanchiment d’argent ou l’évasion fiscale. Aucun investissement ne doit être autorisé s’il ne respecte pas les droits de l’homme, a insisté la Rapporteuse spéciale.

Pays concernés

La France a pris bonne note du rapport de Mme Farha suite à sa visite dans le pays et a précisé qu’elle avait eu l’occasion de faire part à la Rapporteuse spéciale de ses remarques et de lui exprimer nos positions sur son projet de rapport.

La Commission nationale consultative des droits de l’homme de la France (CNCDH), qui a indiqué avoir accueilli la Rapporteuse spéciale à Paris le 11 avril 2019 lorsqu’elle a présenté ses premières recommandations, a dit accueillir ce rapport avec une grande satisfaction. Pour sa part, la CNCDH, qui a adopté en 2016 un avis intitulé « Le logement : un droit pour tous », attache une grande importance à l’effectivité de ce droit fondamental.

Sur le plan juridique, la loi de 2007 visant à rendre opposable le droit au logement marque un progrès important, a poursuivi la CNCDH. Mais, elle rencontre de nombreuses difficultés de mise en œuvre, a-t-elle aussitôt ajouté. Malgré des sélections souvent drastiques, des dizaines de milliers de familles pauvres reconnues prioritaires restent en attente de logement pendant des années; et certains ménages sont encore expulsés de leur logement alors que la loi est censée les protéger. Si le Gouvernement français a adopté en 2018 un plan quinquennal, la situation reste particulièrement critique puisque 4 millions de personnes vivent dans un logement inacceptable ou sont sans abri. Les logements restent inabordables pour les plus pauvres, d’une part parce que l’offre est insuffisante et, d’autre part, parce que le logement social est délégué aux organismes HLM qui sont soumis à de fortes contraintes financières : les décisions du Gouvernement, notamment la réduction de 1,5 milliard d’euros de leur budget, ne font que renforcer cette tendance. Quant aux hébergements d’urgence, ils font face à des problèmes persistants qui ont été décrits par la Rapporteuse spéciale : les capacités d’accueil sont saturées, tout comme le numéro d’urgence à Paris.

La CNCDH demande au Gouvernement français de construire ses politiques publiques en matière de logement selon une approche fondée sur les droits de l'homme rendant le logement social accessible aux plus pauvres.

Le Nigéria a remercié la Rapporteuse spéciale pour son rapport complet et a salué le professionnalisme avec lequel elle a mené son mandat dans le pays. Le Nigéria salue ce rapport, mais avec quelques réserves, a indiqué la délégation nigériane, regrettant que n’ait pas été prise en considération la volonté politique renouvelée du Gouvernement nigérian d’installer un système urbain pertinent tendant à la création d’emploi, à la réduction de la pauvreté, à l’amélioration de la prospérité des secteurs divers et à la promotion de la stabilité.

Aussi bien le Gouvernement que les autorités locales admettent que le manque de logements adéquats retarde le développement national et que le phénomène des sans-abri constitue une menace à la sécurité et pose toute une série de problèmes. Partant, une politique nationale du logement a été approuvée en vue de la construction d’un million de logements par an, dans l’objectif avoué de fournir un toit à tous les Nigérians indépendamment de leurs conditions financières. Tant cette politique que celle relative au développement urbain ont été révisées pour répondre au désir des Nigérians d’avoir des logements pour les femmes, les jeunes et les groupes vulnérables. Cela est fait en collaboration avec les institutions de crédit foncier et dans un cadre de coopération, a indiqué la délégation.

Aperçu du débat

Au regard du milliard environ d’êtres humains vivant dans des logements précaires et des 150 millions d’autres qui ne disposent d’aucun logement, ont été largement partagées les inquiétudes exprimées par la Rapporteuse spéciale face à la marginalisation et à la ségrégation sociale et aux défis de la surpopulation, de la promiscuité et des mauvaises conditions sanitaires.

Près de 20 millions de personnes par an perdent leur logement en raison de catastrophes naturelles, a-t-il en outre été souligné, la question de l’atténuation des risques étant alors soulevée.

Ont également été dénoncées les démolitions de logements dans une situation d’occupation étrangère accompagnée de l’établissement illégal de colonies de peuplement et de déplacements de populations.

Plusieurs délégations ont brièvement présenté leurs politiques en faveur d’un logement sûr, salubre et durable pour tous. A en outre été rappelée l’obligation qui incombe aux États, en vertu du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, de prendre des mesures pour réaliser progressivement la pleine jouissance du droit à un logement convenable. Les États se doivent également de prévenir le phénomène des sans-abri, d’interdire les expulsions forcées, de lutter contre la discrimination, de se concentrer sur les groupes les plus vulnérables et marginalisés, de garantir à tous la sécurité d’occupation [du logement] et de veiller à ce que le logement de chacun soit convenable, a-t-il été rappelé. Certains ont toutefois estimé qu’il n’est pas raisonnable d’exiger de tous les États de réaliser rapidement le droit au logement car les pays n’ont pas tous les mêmes moyens ni le même nombre d’habitants et certains traversent en outre des transitions politiques ou des périodes de changement socioéconomique.

Les lignes directrices de la Rapporteuse spéciale sur la mise en œuvre du droit à un logement convenable ont été saluées.

Remarques de la Rapporteuse spéciale

MME FARHA a déploré que la France ne se soit pas livrée aujourd’hui à un dialogue constructif à l’occasion du débat. Le droit au logement va bien au-delà de la mise à disposition de quatre murs et d’un toit; il signifie aussi d’être traité en toute dignité avec tout ce que cela implique.

La Rapporteuse spéciale s’est par ailleurs inquiétée de la politique nationale de logement du Nigéria, en se demandant si l’idée de construire un million de logements par an était réaliste lorsque l’on sait que 50% de la population vivent dans la pauvreté.

L’approche « un logement d’abord » est bonne, mais elle ne s’attaque pas nécessairement aux obstacles structurels fondamentaux, a souligné Mme Farha. Elle a insisté sur le fait que les sans-abri et les personnes marginalisées sont des titulaires de droits.

S’agissant du changement climatique, il faut consulter les communautés et coopérer avec elles car elles ont souvent les solutions pour faire face aux effets du changement climatique tout en restant là où elles habitent, a en outre souligné la Rapporteuse spéciale.

***Liste des intervenants : Burkina Faso (au nom du Groupe africain), Union européenne, Paraguay (au nom d’un groupe de pays), Allemagne, État de Palestine, Saint-Siège, Angola, Djibouti, Iraq, Barbade, Pakistan, Inde, Équateur, Namibie, Portugal, Tunisie, El Salvador, Croatie et Barbade.


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HRC20.015F