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S’AGISSANT DE L’AUTRICHE, LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT S’INQUIÈTE DU TRANSFERT DE LA COMPÉTENCE DE LA PROTECTION DE L’ENFANCE AUX LÄNDER

Compte rendu de séance
Les experts se sont néanmoins réjouis de la levée de plusieurs réserves et autre déclaration que le pays avait émises à l’égard de certaines dispositions de la Convention

Alors qu’était examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport soumis par l’Autriche au titre de la Convention relative aux droits de l'enfant, des membres du Comité des droits de l’enfant se sont dits très préoccupés par le transfert de la compétence exclusive du domaine de la protection de l’enfance aux Länder.

Cela risque d’avoir pour conséquence une mise en œuvre fragmentée de la Convention en Autriche, a souligné une experte du Comité. La mise en œuvre de la Convention doit se faire sur l’ensemble du territoire, a rappelé un autre expert, avant de déplorer en outre l’absence d’une institution unique chargée de veiller à la mise en œuvre des dispositions de la Convention dans le pays.

L'État fédéral et les Länder se sont engagés à maintenir et à développer davantage le niveau de protection existant, répondant ainsi aux craintes que le transfert de compétences aux Länder ne nuise au niveau de protection, a pour sa part fait valoir la délégation autrichienne, précisant qu’un accord dans ce domaine est entré en vigueur le 1er janvier dernier.

Demeurent en Autriche des problèmes en matière de discrimination à l’encontre des enfants, notamment pour ce qui est des « discriminations cachées » à l’encontre des enfants migrants, des enfants handicapés ou des enfants qui ne parlent pas la langue nationale, a ensuite affirmé une experte du Comité.

Malgré l’interdiction en Autriche du mariage en dessous de 18 ans, il existe des dérogations pour les adolescents âgés entre 16 et 18 ans, a-t-il également été relevé.

Durant le dialogue entre la délégation autrichienne et les membres du Comité, ont également été évoquées, entre autres, l’interdiction du port du voile à l’école ; la situation des enfants handicapés ; la situation des enfants migrants ; ou encore celle des enfants partis en Syrie ou en Iraq – puis revenus en Autriche.

Présentant le rapport de son pays, M. Helmut Tichy, Directeur général des affaires juridiques au Ministère de l’Europe, de l’intégration et des affaires étrangères de l’Autriche, a fait état des trois réserves et de la déclaration qui avaient été émises à l’égard de certaines dispositions de la Convention et que le pays a décidé de retirer suite aux recommandations du Comité.

Le chef de la délégation a ensuite insisté sur l’importance de la Loi constitutionnelle fédérale sur les droits des enfants de 2011, pour les droits des enfants vivant en Autriche. Même si le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant est un principe fondamental mis en œuvre depuis des décennies en Autriche, l’inscription explicite de la primauté de l’intérêt supérieur de l’enfant à l’article premier de cette loi constitutionnelle a sensibilisé davantage à ce principe, a-t-il souligné.

L'intérêt supérieur de l'enfant a également joué un rôle décisif dans le cadre de la refonte des compétences entre l'État fédéral et les neuf Länder autrichiens: en 2018, le Parlement autrichien a décidé de transférer certains pouvoirs législatifs, y compris la protection de l'enfance et de la jeunesse, aux Länder, avec l'objectif d'établir des compétences et des responsabilités claires, a poursuivi M. Tichy. Dans le système fédéral autrichien, les Länder jouent un rôle essentiel dans la mise en œuvre des droits de l'enfant, a-t-il insisté.

Afin de mettre en œuvre les recommandations du Comité concernant la détention des enfants, la loi sur les tribunaux pour mineurs a été réformée en 2015, a d’autre part fait observer M. Tichy.

La délégation autrichienne était également composée, entre autres, de représentants du Ministère du travail, des affaires sociales, de la santé et de la protection du consommateur ; du Ministère de l’Europe, de l’intégration et des affaires étrangères ; du Ministère de l’éducation, des sciences et de la recherche ; du Ministère de l’intérieur ; et du Ministère de la justice.

Le Comité adoptera ultérieurement ses observations finales sur l’Autriche et les rendra publiques à l’issue de la session, le vendredi 7 février prochain.


Jeudi prochain, 6 février, à 15 heures, le Comité tiendra une réunion informelle avec les États.


Présentation du rapport

Le Comité est saisi du document regroupant les cinquième et sixième rapports périodiques de l’Autriche (CRC/C/AUT/5-6), ainsi que de ses réponses à une liste de points à traiter qui lui avait été soumise.

Présentant ce rapport, M. HELMUT TICHY, Directeur général des affaires juridiques au Ministère de l’Europe, de l’intégration et des affaires étrangères de l’Autriche, a fait état des trois réserves et de la déclaration qui avaient été émises à l’égard de certaines dispositions de la Convention et que le pays a décidé de retirer suite aux recommandations du Comité. Ces réserves avaient été émises dans le but de préserver la cohérence entre les normes internationales et européennes de protection des droits de l'homme, a-t-il expliqué ; toutefois, a-t-il ajouté, l'Autriche est arrivée à la conclusion que ces réserves n'étaient plus nécessaires et a accepté le point de vue du Comité selon lequel elles pouvaient être retirées.

Le chef de la délégation a ensuite insisté sur l’importance de la Loi constitutionnelle fédérale sur les droits des enfants de 2011, pour les droits des enfants vivant en Autriche. Même si le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant est un principe fondamental mis en œuvre depuis des décennies en Autriche, l’inscription explicite de la primauté de l’intérêt supérieur de l’enfant à l’article premier de cette loi constitutionnelle a sensibilisé davantage à ce principe, a-t-il souligné.

L'intérêt supérieur de l'enfant a également joué un rôle décisif dans le cadre de la refonte des compétences entre l'État fédéral et les neuf Länder autrichiens: en 2018, le Parlement autrichien a décidé de transférer certains pouvoirs législatifs, y compris la protection de l'enfance et de la jeunesse, aux Länder, avec l'objectif d'établir des compétences et des responsabilités claires, a poursuivi M. Tichy. Dans le système fédéral autrichien, les Länder jouent un rôle essentiel dans la mise en œuvre des droits de l'enfant, a-t-il insisté. L'État fédéral et les Länder se sont aussi engagés à maintenir et à développer davantage le niveau de protection existant, répondant ainsi aux craintes que le transfert de compétences aux Länder ne nuise au niveau de protection. Un accord dans ce domaine est ainsi entré en vigueur le 1er janvier 2020.

Afin de mettre en œuvre les recommandations du Comité concernant la détention des enfants, la loi sur les tribunaux pour mineurs a été réformée en 2015, a d’autre part indiqué M. Tichy. L'un des principaux objectifs de la réforme est de garantir que les jeunes ne soient détenus que lorsque cela est nécessaire. Pour les jeunes délinquants détenus, des mesures de formation, d'éducation et de soutien et suivi (coaching) sont prises pour faciliter leur resocialisation et leur réinsertion. Depuis 2016, il est également possible de reporter une détention pour permettre à un jeune de moins de 21 ans de terminer sa formation ou ses études, a indiqué la chef de délégation.

S’agissant de la détention administrative, la loi sur la police des étrangers dispose que les mineurs de moins de 14 ans ne doivent pas être détenus en attendant leur expulsion, a poursuivi M. Tichy. Pour ce qui est de détenir un mineur âgé de 14 à 18 ans en attendant son expulsion, la décision doit être justifiée en détail et ne peut être prise que si un logement et des soins appropriés sont garantis, a-t-il ajouté.

Le nouveau programme gouvernemental accorde une attention particulière à la lutte contre la pauvreté des enfants et reconnaît explicitement le risque de pauvreté plus élevé qu’encourent les enfants de parents isolés, a ensuite indiqué M. Tichy. Les opportunités pour les enfants étant largement déterminées par le revenu de leurs parents, le nouveau Gouvernement autrichien prévoit de mettre en œuvre une série de mesures visant à accroître les revenus des ménages les plus vulnérables, a-t-il fait valoir. En outre, une réduction de l'impôt sur le revenu pour les familles à faible revenu et un nouveau renforcement de l'avantage fiscal déjà existant pour les familles contribueront à réduire le risque de pauvreté des enfants, a-t-il précisé.

L'une des priorités centrales de la politique autrichienne en matière de droits de l’enfant est la protection des enfants contre la violence, a en outre souligné le chef de délégation. L'interdiction de la violence à l'égard des enfants est garantie non seulement par la Convention mais aussi par le Code pénal autrichien et par l'article 5 de la loi constitutionnelle relative aux droits des enfants, a-t-il fait valoir. En juin 2016, a rappelé M. Tichy, l'Autriche a accueilli à Vienne la réunion intergouvernementale de haut niveau ayant abouti à l’adoption de la résolution intitulée «Vers des enfants sans châtiments corporels». Soutenant pleinement cette résolution, l'Autriche s'est engagée à mettre en place un système fiable de collecte de données et à encourager la recherche sur la question. Une étude montre que la «fessée» est encore banalisée et acceptée par une part encore trop importante de la population ; de nouvelles mesures sont donc nécessaires pour garantir le droit absolu de tous les enfants de ne subir aucune forme de violence.
La dernière modification de la loi sur la protection contre la violence, entrée en vigueur le 1er janvier 2020, apporte plusieurs améliorations dans la protection des enfants contre la violence, notamment en prévoyant l’instauration d’une zone de protection de 100 mètres autour des victimes de violence domestique – zone dans laquelle l’auteur des violences ne peut pénétrer.

L’Autriche est consciente que la mise en œuvre des droits consacrés par la Convention, qui vise à assurer le bien-être et le meilleur développement possible de tous les enfants vivant en Autriche, est une tâche constante et qu'il existe des domaines où le pays doit encore faire davantage, a conclu M. Tichy.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. GEHAD MADI, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de l’Autriche, s’est dans un premier temps réjoui de la levée des réserves et autre déclaration que le pays avait émises à l’égard de certaines dispositions de la Convention.

M. Madi s’est ensuite dit très préoccupé par le transfert de la compétence exclusive du domaine de la protection de l’enfance aux Länder, ce qui risque d’avoir comme conséquence une mise en œuvre fragmentée de la Convention dans le pays. Il a insisté sur le fait que la mise en œuvre de la Convention doit se faire sur l’ensemble du territoire. Il a en outre déploré l’absence d’une institution unique chargée de veiller à la mise en œuvre des dispositions de la Convention. Il a par ailleurs demandé pourquoi le Bureau du médiateur des enfants dépendait du Ministère de la famille, ce qui – a-t-il fait observer – remet en cause son indépendance.

L’expert a par ailleurs expliqué que le Comité souhaitait recevoir des données statistiques sur l’ensemble des domaines couverts par la Convention. Il a souhaité savoir si le pays appliquait l’objectif de 0,7% du PNB alloué à l’aide publique au développement (APD), c’est-à-dire au domaine de la coopération, comme le prévoit le Programme de développement durable à l’horizon 2030.

M. Madi s’est ensuite enquis des résultats de l’enquête sur les châtiments corporels organisée en 2011. Il a demandé comment était expliqué le nombre très bas de plaintes pour cas de harcèlement en ligne. Il a également demandé combien de plaintes avaient été déposées pour des abus commis par les membres du clergé et s’est enquis des résultats des poursuites engagées dans ce domaine. L’expert a ensuite voulu connaître le nombre de personnes poursuivies pour avoir pratiqué une mutilation génitale féminine et les peines prononcées dans de telles affaires.

M. Madi s’est également enquis des mesures prises pour protéger les personnes intersexes de toute intervention chirurgicale non indispensable pratiquée sans leur consentement.

Il a aussi voulu connaître les mesures prises pour favoriser l’inclusion des enfants handicapés.

Quelles mesures ont-elles été prises pour permettre la désignation d’un tuteur pour tous les enfants demandeurs d’asile, a ensuite demandé M. Madi ? Il a fait observer que tous les acteurs intervenants auprès des enfants réfugiés et demandeurs d’asile ne mettaient pas en pratique l’intérêt supérieur de l’enfant, eu égard notamment à la détention de ces enfants âgés de plus de 14 ans.

M. Madi a en outre souhaité savoir dans quels cas particuliers des enfants se retrouvent en prison avec des adultes, comme le note le rapport.

S’agissant du suivi du Protocole facultatif à la Convention qui traite de l’implication d’enfants dans les conflits armés, M. Madi a indiqué que le Comité invitait l’Autriche à envisager d’élever l’âge du recrutement volontaire pour le porter à 18 ans. Il a en outre déploré qu’au sein de l’académie militaire, il soit possible pour des enfants dès l’âge de 14 ans de manipuler des armes légères. L’expert a par ailleurs demandé comment l’Autriche avait traité les retours de jeunes autrichiens partis combattre en Syrie.

MME OLGA KHAZOVA, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de l’Autriche, a relevé que malgré l’interdiction, en Autriche, du mariage en dessous de 18 ans, il existe des dérogations pour les adolescents âgés entre 16 et 18 ans. Aussi, a-t-elle voulu savoir si les autorités envisageaient de revoir cette législation.

L’experte a ensuite souligné qu’il y avait encore des problèmes en matière de discrimination à l’encontre des enfants, notamment pour ce qui est des « discriminations cachées » à l’encontre des enfants migrants, des enfants handicapés ou des enfants qui ne parlent pas la langue nationale. La discrimination est particulièrement grave pour ces enfants, a insisté l’experte.

Mme Khazova a par ailleurs souhaité savoir où en était le projet de loi qui vise à interdire le port, dans les institutions publiques, de tout vêtement par lequel une personne peut être assimilée à une religion, ce qui pourrait pousser des filles de certaines communautés à aller vers l’enseignement privé.

Mme Khazova s’est ensuite réjouie que l’âge du droit de vote ait été abaissé à 16 ans, mais a regretté que les enseignants ne semblent pas enclins à donner des cours d’éducation civique.
L’experte a d’autre part relevé qu’il était difficile pour les enfants nés hors mariage d’obtenir la nationalité autrichienne. Elle a également souhaité savoir si le système dit de la « boite à bébé » existait toujours dans le pays et si tel ne devait pas être le cas, si une contrepartie était envisagée sous forme de soutien accordé aux familles et aux mères pour leur permettre d’assumer la maternité.

Mme Khazova a ensuite regretté que beaucoup d’écoles n’offrent pas de service de cantine, ce qui n’incite pas les enfants à manger sainement. Elle a aussi relevé qu’il n’existait pas de services psychiatriques spécifiques pour les enfants et que les enfants souffrant de troubles mentaux semblaient surmédicamentés. L’experte s’est également enquise de la proportion de maternités bénéficiant du label [maternités] « amies des enfants ».

Mme Khazova a souhaité connaître les critères appliqués pour déterminer l’opportunité de séparer un enfant de sa famille.

Un autre expert s’est enquis des mécanismes créés pour évaluer la mise en œuvre du plan d’action national pour les personnes handicapées. Il a souhaité savoir si ce plan prévoyait la désinstitutionnalisation des enfants handicapés et a souhaité connaître les efforts déployés par le pays pour améliorer l’inclusion des enfants handicapés au sein des établissements scolaires. Des campagnes ont-elles été organisées pour lutter contre la discrimination à l’encontre des enfants handicapés, a-t-il demandé ?

Réponses de la délégation
La délégation a expliqué que le système fédéral de l’Autriche ne changeait en rien les obligations du pays au niveau de la mise en œuvre du droit international : peu importe que les compétences soient exercées par les Länder ou par l’État fédéral.

La volonté de l’État autrichien est d’assurer l’uniformatisation de la mise en œuvre des dispositions de la Convention sur l’ensemble du territoire, a insisté la délégation. Elle a rappelé que la réforme constitutionnelle de 2018 avait prévu que les Länder soient chargés de la protection de l’enfance, ce qui a provoqué certaines inquiétudes au sein de la société civile. Néanmoins, aujourd’hui, les Länder ont harmonisé l’ensemble des mesures de protection dans ce contexte, a assuré la délégation.

La délégation a ajouté que la création d’un mécanisme national de contrôle de la mise en œuvre de la Convention sur l’ensemble du territoire serait contreproductive, car cela compliquerait davantage la structure. L’Autriche est habitué à son système fédéral de compétences gérées par les Länder.

Pour ce qui est de l’indépendance du Bureau du médiateur, la délégation a indiqué que la Constitution prévoit que cette institution agit en toute indépendance.

S’agissant de l’aide publique au développement, le Gouvernement autrichien estime que l’objectif de 0,7% du PNB à consacrer à l’APD est une obligation, même s’il s’agit d’un objectif dont la réalisation s’inscrit dans le long terme. Le Gouvernement s’est moralement engagé à atteindre cet objectif, a ajouté la délégation.

S’agissant des «boites à bébé», la délégation a notamment rappelé que c’est en 2001 qu’une loi a autorisé l’accouchement anonyme. Ce système permet aussi aux mères de laisser à leurs enfants des informations qu’ils pourront découvrir plus tard, a-t-elle indiqué.

La délégation a ensuite fait valoir qu’il y a près de 300 pédopsychiatres en Autriche. Les enfants sont donc traités par des spécialistes (pédiatres et aux pédopsychiatres), ce qui permet de mieux diagnostiquer les problèmes qu’ils rencontrent et de mieux les traiter. Il n’y a aucune pénurie dans ce domaine, a précisé la délégation.

La délégation a expliqué que le plan d’action national pour les personnes handicapées a été prolongé sur demande des associations de personnes handicapées. Il reste encore 4% des mesures prévues dans ce plan à mettre en œuvre aujourd’hui, a fait savoir la délégation, ajoutant qu’à l’avenir, les Länder devraient participer davantage à la mise en œuvre de la suite du plan d’action.

Suite à une étude qui a été menée sur la présence des personnes handicapées dans les médias, les autorités poursuivent leurs efforts afin de mettre davantage en avant les personnes handicapées dans les médias, a en outre fait valoir la délégation.

Les personnes handicapées ont droit à un « passeport handicap » pour celles d’entre elles qui ont un taux de handicap d’au moins 50%, ce qui leur permet d’avoir accès à toute une série de services. Au total, ce sont près de 10 000 enfants âgés de 0 à 17 ans qui disposent d’un tel passeport, a précisé la délégation.

L’Autriche fait en sorte que les personnes qui sont placées dans les institutions aient la possibilité de les quitter avec un accompagnement direct et individuel, avec le cas échéant la possibilité de leur trouver une place sur le marché du travail.

Depuis 1993, a par la suite rappelé la délégation, il existe un programme d’intégration sociale des enfants handicapés, qui vise en particulier à favoriser leur intégration au sein de l’enseignement scolaire classique. C’est l’autorité scolaire de chaque land concerné qui évalue les besoins de ces élèves afin de s’y adapter.

La délégation a ajouté que le pays n’avait pas pris la décision de fermer les écoles spécialisées. Alors qu'une écrasante majorité des enfants handicapés sont intégrés dans les écoles ordinaires, il existe également des écoles spéciales qui répondent aux besoins des enfants souffrant de handicaps spécifiques, a-t-elle expliqué.

S’agissant des personnes intersexes, la Cour constitutionnelle a reconnu que ces personnes ont le droit d’être inscrites dans le registre d’état civil selon le genre qu’elles choisissent. Les premiers documents à cet égard ont été produits en 2019, a indiqué la délégation.

Dans certains cas urgents, notamment en cas de danger vital, une opération immédiate est possible dès après la naissance, a poursuivi la délégation. Dans tous les autres cas, il faut attendre au moins jusqu’à la deuxième année de vie pour établir une expertise multidimensionnelle avant de songer à une modification (de sexe) par opération chirurgicale. Ce n’est qu’après cette évaluation globale qu’un traitement peut être envisagé avec l’accord explicite des parents, a insisté la délégation.

La délégation a ensuite rappelé que l’Autriche a pris des mesures de protection fortes pour lutter contre les violences domestiques et les violences familiales.

La délégation a expliqué que l’Autriche s’occupait de la question des abus sexuels à l’encontre des enfants de manière très sérieuse depuis plus de 10 ans maintenant. Différentes commissions ont été mises en place avec un Procureur désigné, chargé de la défense des enfants. Plus de 2000 personnes ont perçu des réparations financières suite au travail de ces commissions. Les Länder ont aussi créé des institutions qui ont permis aux victimes d’obtenir des réparations.

La délégation a par ailleurs fait état de l’existence d’un programme complet d’évaluation des risques qui doit permettre d’évaluer la nécessité de séparer un enfant de sa famille. Cette décision est loin d’être prise à la légère ; dans tous les cas, la séparation est une décision de dernier recours, a assuré la délégation.

S’agissant de l’interdiction du foulard [à l’école] par décret, la délégation a expliqué qu’elle n’était en vigueur que pour les cours d’éducation physique, pour les filles de moins de 10 ans ou pour des raisons de sécurité. S’agissant des cours de natation, les élèves ont l’autorisation de porter un « burkini » si elles le souhaitent afin qu’elles puissent participer à cette activité. Le décret adopté explique comment gérer le problème lorsque l’obligation d’interdiction du port du voile pour les enfants jusqu’à 10 ans n’est pas respectée. La Cour constitutionnelle a été saisie de cette question et va devoir décider si ce décret est ou non constitutionnel, a fait savoir la délégation.

La délégation a ajouté que les autorités autrichiennes n’avaient pas observé de « fuite » de certaines élèves vers l’enseignement privé suite à cette mesure concernant le voile.

Depuis les années 1960, a ensuite rappelé la délégation, l'Autriche a dû faire face aux défis liés à l'éducation des enfants de migrants et de travailleurs migrants, qui ne parlaient pas l'allemand. L'arrivée d'un grand nombre d'enfants réfugiés syriens en 2015 a constitué un défi majeur. L'Autriche a alloué quelque 143 millions d'euros de financement supplémentaire à leur intégration dans le système éducatif.

Tous les enfants ont l’obligation d’aller à l’école en Autriche, a rappelé la délégation. Le pays a tenté de relever le défi d’intégrer tous les enfants migrants dans les écoles du pays, avec un financement spécial pour l’apprentissage de l’allemand. Les enfants de plus de 15 ans, qui ne sont plus tenus par l’obligation scolaire, sont néanmoins tenus d’acquérir les capacités nécessaires pour poursuivre leur formation.

La délégation a rappelé que l’autorité qui régit la procédure d’asile doit déterminer l’âge du demandeur d’asile afin d’évaluer si la personne est mineure ou non. Cette détermination de l’âge se fait sur une base volontaire. L’an dernier, quelque 230 examens de ce type ont eu lieu en Autriche et parmi ces cas, un seul doute a été soulevé qui a finalement été tranché en faveur du requérant – qui a donc été reconnu mineur. Cette manière de procéder se fait en collaboration avec le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR), qui a approuvé cette procédure.

Les mineurs sont considérés par l’Autriche comme un groupe particulièrement vulnérable dans le cadre de la procédure d’asile. Une brochure contenant des informations sur la procédure d’asile pour les mineurs en Autriche a été publiée dans de nombreuses langues, a ajouté la délégation.

En réponse aux observations de certains membres du Comité, la délégation a indiqué qu’elle ne connaissait pas la notion de « discrimination cachée » et que la situation réelle du pays était contraire à ce que laissaient entendre les observations de ces experts. En Autriche, les enfants migrants sont considérés comme un groupe vulnérable et le personnel d’accompagnement est spécifiquement formé pour les accueillir. Les mineurs peuvent aussi être aidés par un tuteur.

En cas de disparition d’un requérant d’asile mineur, la délégation a expliqué que si le jeune concerné a moins de 14 ans, les forces de police sont informées et un avis de recherche est diffusé. La procédure d’asile reste alors en suspens pour une période maximum de deux ans. Le fait de quitter le centre d’accueil n’est pas un acte délictuel, a ajouté la délégation. Si la disparition dure plus de deux ans, le jeune doit recommencer l’ensemble de la procédure d’asile.

La délégation a ensuite indiqué que sur les 21 mineurs autrichiens qui étaient allés en Syrie et en Iraq, trois sont rentrés en Autriche ; ces trois personnes ayant toutes plus de 14 ans – et donc atteint l’âge de la responsabilité pénale – elles ont été interceptées par les autorités autrichiennes. Il n’y a pas de programme spécifique de prise en charge des personnes qui reviennent de ces pays, mais des mesures adaptées ont été élaborées avec toutes les parties concernées ; le problème est que les moyens financiers pour la mise en œuvre de ces mesures ne sont pas encore disponibles, a expliqué la délégation.

S’agissant de la responsabilité pénale, la délégation a indiqué que c’est à partir de 14 ans révolus que l’individu se voit accorder plus de responsabilités en Autriche, ce qui a aussi des conséquences dans le cadre pénal car, à partir de cet âge, le jeune doit donc répondre de ses actes dans toute une série de domaines.

Le Code civil prévoit que l’enfant de plus de 14 ans peut aussi choisir librement sa formation, a fait valoir la délégation. Si les parents refusent le choix de l’enfant, ce dernier a le droit de porter la question devant le tribunal, qui tranchera alors en faveur de l’intérêt supérieur de l’enfant.

La délégation a d’autre part assuré que tous les élèves devaient suivre un cours d’éducation civique.

La délégation a déclaré que depuis janvier 2017, des unités spécialisées au sein des tribunaux suivent la question spécifique des crimes de haine. Les étrangers, les réfugiés ou les personnes ayant d’autres croyances sont tous protégés contre les crimes de haine. Des sanctions pénales sont prévues en cas de discours haineux en public, a souligné la délégation.

Remarques de conclusion

MME KHAZOVA a remercié la délégation pour la franchise avec laquelle elle a répondu aux questions des membres du Comité. Le Comité comprend toutes les difficultés rencontrées par l’Autriche en raison des flux migratoires qui arrivent en Europe, a-t-elle assuré, avant d’ajouter qu’il fait confiance au pays pour relever ces défis. Elle a en outre indiqué que le Comité espérait que l’Autriche allait ratifier le troisième Protocole facultatif à la Convention (qui instaure une procédure de plaintes individuelles).

M. TICHY a indiqué que l’Autriche n’était pas encore tout à fait prête pour adopter ce troisième Protocole facultatif. Il a assuré que les recommandations finales du Comité joueraient un rôle important dans la définition des futures politiques relatives aux droits de l’enfant en Autriche.


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