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FACE AUX ALLÉGATIONS D’ENRÔLEMENT DE JEUNES PANAMÉENS PAR LES FARC, LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT S’ENQUIERT DES MESURES PRISES PAR LES AUTORITÉS PANAMÉENNES POUR ÉVITER L’ENRÔLEMENT D’ENFANTS AUX FRONTIÈRES DU PAYS

Compte rendu de séance

Le Panama est l’un des rares pays au monde à ne pas avoir de forces armées. Néanmoins, face aux allégations d’enrôlement de jeunes panaméens par les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), plusieurs membres du Comité des droits de l'enfant se sont enquis des mesures prises par les autorités panaméennes pour éviter l’enrôlement d’enfants aux frontières du pays.

Alors que le Comité examinait, cet après-midi, le rapport initial soumis par le Panama au titre du Protocole facultatif sur l’implication d’enfants dans les conflits armés, les experts se sont également enquis des mesures prises pour éviter le recrutement d’enfants dans les entreprises de sécurité privées, car – a-t-il été relevé – il semblerait qu’elles soient autorisées à engager des enfants pour des tâches non dangereuses.

En réponses à ces préoccupations, la délégation panaméenne, dirigée par Mme Sara Rodríguez, Directrice du Secrétariat national de l’enfance, de l’adolescence et de la famille du Panama, a souligné qu’il n’y aucune exception qui permettrait l’embauche d’enfants dans les forces de sécurité publique, pas plus que les enfants ne peuvent être recrutés dans les sociétés de sécurité privées – l’âge minimum pour travailler dans ce type de sociétés étant fixé à 21 ans.

Alors que l’appartenance à un groupe armé est érigée en infraction, le Code pénal prévoit en outre que le droit du Panama s’applique à l’étranger pour autant que les faits en question aient des effets sur le territoire panaméen; ainsi, le Protocole est-il applicable de manière extraterritoriale, a d’autre part fait valoir la délégation, avant d’attirer l’attention sur les mesures préventives prises aux frontières pour protéger les enfants.

La prévention est aussi utilisée pour éviter l’enrôlement dans des gangs ou dans des groupes armés, même si aujourd’hui, il n’y a pas de « maras » (gang) au Panama, a indiqué la délégation. Toutes les mesures sont prises pour éviter que les enfants ne soient recrutés dans quelque groupe armé que ce soit, a-t-elle insisté.

Auparavant, la cheffe de la délégation panaméenne avait elle aussi assuré qu’il n’y a pas au Panama de groupes armés qui se trouveraient en marge de la loi. Présentant le rapport de son pays, Mme Rodríguez avait rappelé qu’il n’y a pas de guerre civile au Panama et que le pays vit dans la paix et la sécurité.

Mme Rodríguez a en outre souligné que les lois organiques relatives aux organes de sécurité disposent que pour en faire partie il faut être majeur. L’intérêt supérieur de l’enfant est un principe fondamental pris en compte dans toutes les politiques qui touchent aux enfants, a-t-elle ajouté.

Au Panama, un tiers des jeunes vivent dans les conditions de pauvreté, a d’autre part indiqué la cheffe de la délégation. Malgré la croissance économique, les inégalités sociales et économiques entretiennent des problèmes qui ont un impact négatif sur le développement intégral de l’enfant, a-t-elle reconnu.

La délégation panaméenne était également composée de M. Juan Alberto Castillero Correa, Représentant permanent du Panama auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de représentants de la Commission nationale permanente des droits de l’homme et du Ministère des affaires étrangères.

La délégation a répondu à d’autres questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, plus particulièrement, des questions relatives aux migrations et à l’asile; de l’interdiction du travail des enfants; de la lutte contre les violences à l’encontre des enfants; ou encore de la participation des enfants.

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Panama, qu’il rendra publiques à l’issue de la session, le 27 septembre prochain.


Lundi après-midi, à 15 heures, le Comité organisera en salle XVI du Palais des Nations un événement public à l’occasion de la célébration du trentième anniversaire de la Convention relative aux droits de l’enfant.


Présentation du rapport

Le Comité est saisi du rapport initial présenté par le Panama (CRC/C/OPAC/PAN/1) au titre du Protocole facultatif sur l’implication d’enfants dans les conflits armés ainsi que des réponses du pays à une liste de questions qui lui a préalablement été adressée.

M. JUAN ALBERTO CASTILLERO CORREA, Représentant permanent du Panama auprès des Nations Unies à Genève, a expliqué que la délégation panaméenne représente l’ensemble des institutions qui veillent à la mise en œuvre de la Convention. Il a présenté les membres de la délégation avant de céder la parole à la cheffe de la délégation.

MME SARA Rodríguez, Directrice du Secrétariat national de l’enfance, de l’adolescence et de la famille du Panama, a rappelé que le présent rapport était le premier remis par le Panama au titre du Protocole facultatif que le pays a ratifié en 2000. Ce rapport a été élaboré grâce aux informations fournies par la Commission nationale permanente chargée d’assurer le respect et le suivi des engagements nationaux et internationaux pris par le Panama en matière de droits de l'homme (créée en 2012), qui regroupe l’ensemble des institutions agissant dans le domaine des droits de l’homme dans ce pays, a-t-elle précisé.

La Constitution du pays prévoit que le Panama n’a pas d’armée, a ensuite rappelé Mme Rodríguez, soulignant que dans ce sens, cette déclaration peut être brandie pour répondre aux dispositions du Protocole.

Les lois organiques relatives aux organes de sécurité disposent que pour en faire partie il faut être majeur, a ensuite souligné la cheffe de la délégation. Elle a en outre rappelé que le Panama a créé un bureau de l’Ombudsman en vue de la promotion et de la protection des droits de l’homme.

Le Panama a ratifié de nombreuses conventions de La Haye et de Genève et a transposé dans son droit national la protection de l’emblème de la Croix-Rouge, a d’autre part fait valoir Mme Rodríguez.

Le Code pénal panaméen érige en délit les infractions contre la sécurité collective ainsi que les crimes contre l’humanité, a-t-elle poursuivi. L’État peut ainsi appliquer le droit international humanitaire et ériger en infraction (et donc poursuivre) les activités de groupes armés, a-t-elle souligné, avant de faire observer qu’il n’y a pas de guerre civile au Panama. Le pays vit dans la paix et la sécurité, a-t-elle insisté. La paix et la démocratie entretiennent un processus de solidarité humaine, a affirmé Mme Rodriguez. Voilà pourquoi un certain nombre de plans contiennent des approches de prévention pour empêcher toute violation du Protocole facultatif, a indiqué la cheffe de la délégation.

L’intérêt supérieur de l’enfant est un principe fondamental pris en compte dans toutes les politiques qui touchent aux enfants, a ensuite déclaré Mme Rodríguez.

Au Panama, un tiers des jeunes vivent dans les conditions de pauvreté, a poursuivi la cheffe de la délégation. Malgré la croissance économique, les inégalités sociales et économiques entretiennent des problèmes qui ont un impact négatif sur le développement intégral de l’enfant, a-t-elle reconnu.

Selon la loi, est considérée comme enfant toute personne âgée de moins de 18 ans, a précisé Mme Rodríguez. L’État est tenu de veiller au respect du droit des enfants à la vie et, conformément à la loi fondamentale, la discrimination fondée sur toute une série de motifs est interdite. En outre, les Panaméens et les étrangers sont égaux devant la loi.

Il n’y a pas au Panama de groupes armés qui se trouveraient en marge de la loi, a ajouté la cheffe de la délégation.

Mme Rodríguez a ensuite fait état d’un décret ayant prévu la création de refuges de courte durée destinés à protéger les migrants qui en font la demande. Un mécanisme prévoit la prise en charge adaptée des enfants ayant besoin d’une aide internationale. Un décret datant de 2018 a permis au Panama d’adapter sa législation aux normes internationales de protection des enfants, a insisté la cheffe de la délégation.

S’agissant de l’interdiction du travail des enfants, le Panama a modifié par décret la liste des pires formes de travail des enfants et le pays a créé divers mécanismes pour lutter ce phénomène. Le pays a ainsi donné suite aux recommandations du Comité sur cette question, a conclu Mme Rodríguez.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. PHILIP JAFFÉ, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport du Panama, a relevé que le Panama était l’un des rares pays au monde à ne pas avoir de forces armées.

Relevant que l’âge officiel de l’enrôlement était fixé à 18 ans au sein des forces de sécurité civile, M. Jaffé a souhaité savoir s’il y avait des exceptions à cette règle.

Le corapporteur s’est félicité des diverses mesures prises pour mettre en œuvre le Protocole facultatif, saluant notamment une loi de 2011 régissant la possession et le commerce des armes à feux, ainsi que la mise en œuvre des « écoles sûres ».
L’expert s’est ensuite enquis de la composition de la Commission permanente des droits de l’homme. Il a en outre demandé si des organisations non gouvernementales – et plus particulièrement des organisations de jeunes – avaient participé à la rédaction du présent rapport. M. Jaffé s’est également enquis des mesures prises pour diffuser le Protocole, notamment auprès des enfants.

M. Jaffé a d’autre part souhaité en savoir davantage face aux allégations d’enrôlement de jeunes panaméens par les FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie). Il s’est enquis des mesures prises par les autorités panaméennes pour éviter l’enrôlement d’enfants aux frontières du pays. L’expert a par ailleurs regretté le manque de données sur les enfants déplacés dans le pays et s’est demandé pourquoi le registre des enfants demandeurs d’asile n’enregistre pas d’enfants au-delà de l’âge de 17 ans.

M. Jaffé a par la suite demandé si les enfants bénéficiaient d’une aide juridictionnelle dans le cadre des procédures d’asile.

M. Jaffé s’est en outre enquis des mesures prises pour éviter l’enrôlement d’enfants dans les entreprises de sécurité privées, car – a-t-il relevé – il semblerait qu’elles soient autorisées à engager des enfants pour des tâches non dangereuses. Il a souhaité que ces entreprises ne soient à l’avenir explicitement plus autorisées à recruter des enfants – tout comme les groupes armés non étatiques.

Le corapporteur a souhaité connaître le nombre d’enfants qui se retrouvent dans des gangs et s’est demandé comment ces enfants étaient considérés par l’État.

M. Jaffé a également demandé comment l’Ombudsman travaillait pour veiller à la mise en œuvre du Protocole.

MME AISSATOU ALASSANE MOULAYE SIDIKOU, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de Panama, s’est – elle aussi – enquise des mesures prises par le Panama pour lutter contre l’enrôlement transfrontalier des enfants. Elle s’est aussi enquise des mesures de protection des mineurs non accompagnés.

Mme Sidikou a également souhaité savoir quels moyens financiers étaient alloués à la mise en œuvre du Protocole.

La délégation a par ailleurs été priée de préciser le taux de réponses favorables aux demandes d’asile formulées par les enfants.

Réponses de la délégation

La délégation a expliqué qu’il n’y aucune exception qui permettrait l’embauche d’enfants dans les forces de sécurité publique. Les enfants ne peuvent pas non plus être recrutés dans les sociétés de sécurité privées, a-t-elle ajouté, précisant que l’âge minimum est de 21 ans pour travailler dans ce type de sociétés.

Au Panama, il n’y a pas de mineurs de moins de 18 ans travaillant dans des entreprises de sécurité; cette situation n’existe pas, a insisté la délégation.

La délégation a d’autre part indiqué qu’un décret érige en infraction l’appartenance à un groupe armé. Le Code pénal prévoit en outre que le droit du Panama s’applique à l’étranger pour autant que les faits en question aient des effets sur le territoire panaméen. Le Protocole est donc applicable de manière extraterritoriale, a souligné la délégation.

La délégation a d’autre part assuré que les organisations de la société civile travaillent avec la Commission nationale permanente des droits de l’homme afin que les rapports soumis aux organes de traités soient aussi équilibrés que possibles.

L’Ombudsman est une institution nationale des droits de l’homme qui est conforme aux Principes de Paris, a poursuivi la délégation. Cette institution fait partie de la Commission nationale permanente susmentionnée et participe aux débats sur les sujets qui la concernent.

S’agissant des réfugiés, le Panama a par décret énoncé un certain nombre d’exigences devant être respectées dans le traitement des étrangers relevant du statut de protection humanitaire. Les réfugiés peuvent par exemple se déplacer, aujourd’hui, sur l’ensemble du territoire, conformément à une recommandation qui avait été adressée au pays par le Comité des droits de l’homme, a fait valoir la délégation.

La délégation a ajouté que des mesures préventives sont prises aux frontières pour protéger les enfants. Une nouvelle unité a été mise sur pied dans ce domaine et a reçu une formation spécifique aux droits de l’enfant.

La délégation a insisté sur le fait que des équipes techniques réagissent aux diverses situations dans lesquelles peuvent se retrouver les enfants. Le pays prend en charge tous les enfants qui ont besoin d’une protection internationale; ces enfants bénéficient notamment d’un accès à des psychologues. Il faut néanmoins encore améliorer l’enregistrement des enfants pris en charge dans ce contexte, a reconnu la délégation.

La délégation a expliqué qu’il y avait très peu de demandes d’asile formulées par des enfants: à peine une quinzaine par an, a-t-elle précisé.

La Commission nationale intersectorielle pour la prévention de la violence à l’encontre des enfants est chargée de mettre en œuvre des politiques publiques pour lutter contre toutes les formes de violences à l’encontre des enfants et des adolescents, a ajouté la délégation. L’État a adopté une stratégie nationale de prévention de la violence qui prévoit notamment de prévenir la violence au sein des communautés. La prévention est aussi utilisée pour éviter l’enrôlement dans des gangs ou dans des groupes armés, même si aujourd’hui, il n’y a pas de « maras » (gang) au Panama, a déclaré la délégation. Toutes les mesures sont prises pour éviter que les enfants ne soient recrutés dans quelque groupe armé que ce soit, a-t-elle insisté.

La délégation a par ailleurs indiqué que des mécanismes de promotion de la participation des enfants ont été créés au niveau communautaire. Le Comité national de la prévention de la violence à l’encontre des enfants prévoit la participation des adolescents dans la conception des mesures de prévention de la violence à l’école ou au sein des communautés.

La délégation a ajouté qu’il n’y avait pas de parlement des enfants au Panama, mais que la participation des enfants était davantage favorisée au niveau municipal.

Remarques de conclusion

M. JAFFÉ a souligné que ce dialogue avec la délégation panaméenne avait été très intéressant car le Comité en a ainsi appris bien plus qu’à travers les seuls éléments figurant dans le rapport. Il s’est dit impressionné par le fait que le Panama avait une approche de la prévention très volontariste, tout en reconnaissant les éventuelles lacunes. L’élan est là, a insisté le corapporteur. Il a néanmoins estimé que la voix des enfants n’était pas assez entendue dans le rapport.

MME Rodríguez a, quant à elle, remercié le Comité pour ce dialogue interactif et a affirmé que la ratification du Protocole par le pays avait permis de mieux protéger et promouvoir les droits des enfants au Panama. Les lois du pays ont en effet été modifiées pour les harmoniser avec cet instrument, a-t-elle souligné.

Le pays est conscient qu’il lui faut encore adopter de nouvelles mesures pour mettre en œuvre le Protocole, a poursuivi la cheffe de la délégation panaméenne. Le Panama reconnaît aussi les problèmes qui empêchent la mise en œuvre de certaines recommandations qui lui sont adressées, a-t-elle ajouté, assurant que le pays s’efforce de parvenir le plus rapidement possible à la pleine reconnaissance des enfants en tant que sujet de droits.


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