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Les crimes de guerre et contre l’humanité s’intensifient au Myanmar et la transformation espérée pour relever les défis de longue date à Sri Lanka ne s’est toujours pas matérialisée, est-il indiqué au Conseil des droits de l’homme

Compte rendu de séance

 

Ce matin, le Conseil des droits de l’homme a tenu un dialogue autour du rapport présenté par M. Nicholas Koumjian, Chef du Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar, avant d’entamer l’examen d’un rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme sur la situation des droits de l’homme à Sri Lanka, qu’a présenté Mme Nada Al-Nashif, Haute-Commissaire adjointe aux droits de l’homme.

En fin de séance, M. Lejeune Mbella Mbella, Ministre des relations extérieures du Cameroun, a fait une déclaration dans laquelle il a notamment renouvelé l’engagement de son Gouvernement en faveur de la préservation des droits humains et de la construction d’un monde fondé sur davantage de justice et d’équité. Le Ministre s’est en outre réjoui que face aux exactions de la secte de Boko Haram au Cameroun, la situation soit « aujourd'hui maîtrisée ».

Présentant le rapport du Mécanisme d’enquête qu’il dirige, M. Koumjian a déploré l’augmentation de la fréquence et de l'intensité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité commis ces derniers mois au Myanmar. Il a fait état de bombardements aériens et de pilonnages à l’aveugle entraînant la mort de civils innocents, y compris des enfants. Il a également constaté une augmentation des exécutions de combattants et de civils capturés, ainsi que des incendies intentionnels de maisons et de villages. Le nombre d'arrestations sans procès équitable a également augmenté et des preuves crédibles ont été recueillies concernant des détenus soumis à la torture, à des violences sexuelles et à d'autres mauvais traitements graves, a-t-il ajouté.

Le Mécanisme d’enquête indépendant continue à se heurter au problème de l'impossibilité d'accéder au Myanmar, a souligné M. Koumjian.  Il a précisé avoir entamé une enquête spécifique sur les informations financières relatives aux entités et aux individus qui ont contribué aux crimes internationaux graves commis au Myanmar ou qui en ont tiré profit. Soulignant que la mission du Mécanisme d’enquête n’est pas simplement de stocker des preuves, M. Koumjian a indiqué avoir l'intention d'utiliser les informations et preuves obtenues pour faciliter le cour de la justice dans les tribunaux désireux et capables de poursuivre ces affaires. L’équipe partage actuellement des informations et des éléments de preuve avec trois procédures en cours portant sur les crimes commis contre les Rohingya à la Cour internationale de justice, à la Cour pénale internationale et en Argentine, a précisé le Chef du Mécanisme.

De nombreuses délégations* ont ensuite pris part au dialogue avec M. Koumjian, nombre d’entre elles déplorant que la situation des droits humains au Myanmar se soit dégradée.

S’agissant de Sri Lanka, Mme Al-Nashif a pour sa part indiqué qu’un an après le remarquable mouvement de protestation exigeant de profondes réformes politiques et démocratiques au Sri Lanka, la transformation espérée pour relever des défis de longue date ne s’est toujours pas matérialisée.  Si la crise économique a considérablement affecté la jouissance des droits de larges segments de la population sri-lankaise, elle a surtout touché les communautés pauvres et marginalisées, a-t-elle en outre souligné, plaidant pour que la communauté internationale, y compris les institutions financières internationales, continue d’aider Sri Lanka à se relever, tout en insistant pour que de véritables progrès soient réalisés en matière de gouvernance, de transparence et de responsabilité.

Il est impératif que le Gouvernement sri-lankais garantisse un environnement qui respecte la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et l’espace démocratique comme base de la réconciliation et de la cohésion sociale, a recommandé Mme Al-Nashif.  Elle a souligné que le rapport présenté aujourd’hui fournit une analyse des préoccupations que suscitent certaines lois à venir, en particulier le projet de loi antiterroriste remplaçant la loi sur la prévention du terrorisme et une nouvelle loi réglementant la radiodiffusion dans les médias.

Quatorze ans après la fin de la guerre, des dizaines de milliers de victimes et leurs familles continuent de souffrir dans l’agonie et le chagrin et attendent vérité, justice et réparation, a en outre rappelé Mme Al-Nashif.

Suite à cette présentation, Sri Lanka a fait une déclaration en tant que pays concerné, avant que plusieurs délégations** n’engagent le dialogue avec Mme Al-Nashif.

 

À 15 heures cet après-midi, le Conseil achèvera ce dialogue avec Mme Al- Nashif, avant d’examiner le rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Afghanistan, M. Richard Bennett.

 

Déclaration du Ministre des relations extérieures du Cameroun

M. LEJEUNE MBELLA MBELLA, Ministre des relations extérieures du Cameroun, a commencé son intervention en exprimant sa solidarité au peuple du Maroc dans les moments pénibles qu’il vit actuellement.

Le Ministre s’est ensuite réjoui de pouvoir aujourd’hui livrer la vision du Cameroun sur les grandes thématiques contemporaines concernant les droits de l’homme, à la veille du 75ème  anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme et à quelques mois du passage du Cameroun à l’Examen périodique universel (EPU). Il a rendu un hommage appuyé au Haut-Commissaire aux droits de l’homme pour son travail en ces temps difficiles. 

Le Ministre a renouvelé l’engagement du Chef de l’État du Cameroun en faveur de la préservation des droits humains et de la construction d’un monde fondé sur davantage de justice et d’équité. Notre Conseil a une mission noble, a-t-il poursuivi: accompagner l'humanité dans la réalisation des droits de l’homme. Cette haute responsabilité incombe aux représentants des États, a-t-il souligné, avant de déplorer que près de huit décennies après l’adoption de la Charte des Nations Unies, la communauté internationale n’arrive toujours pas à consolider tous ces fondements, au premier rang desquels les droits humains dans toutes leurs dimensions - politiques, civiles, économiques, sociales et culturelles. 

Le Ministre a ensuite souhaité qu’il soit procédé aux réformes pertinentes du système international pour un multiculturalisme rénové. Il a lancé un appel à tous les pays pour qu’ils oeuvrent en synergie à la matérialisation de la paix. Il a estimé que la consolidation de l’état de droit et de la démocratie doit être une priorité. Rappelant l’importance que le Haut-Commissariat accompagne les États dans l’instauration d’une véritable culture démocratique et des droits humains – « gage de la paix et du développement », il a indiqué que son pays a mis à disposition du Haut-Commissariat de nouveaux locaux mieux adaptés à ses ambitions. 

Par ailleurs, le Ministre s’est dit attaché au règlement pacifique des différends, tant sur le plan bilatéral que sur le plan multilatéral. Il a estimé que les défis de la paix, de la sécurité et du développement passent par une politique commune et concertée contre la maladie. À cet égard, il a fait part d’un projet de traité, dans son pays, portant sur la prévention et le renforcement des capacités en cas de pandémie. Il s’est d’autre part élevé contre la prolifération de tout type d’armes et de munitions, saluant à cet égard l’initiative de l’Union africaine visant à redynamiser les activités de la Conférence du désarmement. Le Ministre a également salué l’inscription dans les travaux du Conseil de la question du droit au développement, qui revêt une grande importance pour son pays. 

M. Mbella Mbella s’est par ailleurs réjoui que face aux exactions de la secte de Boko Haram, grâce aux efforts et sacrifices du pays et de ses alliés, ainsi que grâce à l’assistance internationale, la situation soit « aujourd'hui maîtrisée ».

Dialogue avec le Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar

Le Conseil est saisi du Rapport du Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar (A/HRC/54/19).

Présentation du rapport

Présentant ce rapport, M. NICHOLAS KOUMJIAN, Chef du Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar, a rappelé avoir signalé au Conseil, lors de sa dernière mise à jour, une augmentation des crimes graves commis dans le pays. Malheureusement, a-t-il souligné, la fréquence et l'intensité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité n'ont fait qu’augmenter au cours des derniers mois. M. Koumjian a fait état de bombardements aériens et de pilonnages à l’aveugle entraînant la mort de civils innocents, y compris des enfants. Il a également constaté une augmentation des exécutions de combattants et de civils capturés, ainsi que des incendies intentionnels de maisons et de villages. Le nombre d'arrestations sans procès équitable a également augmenté et des preuves crédibles ont été recueillies concernant des détenus soumis à la torture, à des violences sexuelles et à d'autres mauvais traitements graves.

La poursuite de ces violences a contraint le Mécanisme à étendre ses enquêtes à de nombreuses régions du pays, a poursuivi M. Koumjian, tout en réaffirmant son engagement à se concentrer sur la collecte et l'analyse des preuves de la campagne menée contre la population rohingya au cours des « opérations de nettoyage » de 2016 et 2017. Il a précisé que des preuves irréfutables ont été recueillies concernant l'incendie de villages rohingya, ainsi que des agressions et des meurtres de civils. Enfin, il s’est dit particulièrement horrifié par les nombreux récits de crimes sexuels partagés avec les enquêteurs. La quantité de preuves et d'informations recueillies au cours de l'année écoulée auprès d'individus et d'organisations est sans précédent et, franchement, imprévue, a-t-il insisté.

Le Mécanisme d’enquête indépendant continue à se heurter au problème de l'impossibilité d'accéder au Myanmar, les demandes répétées d'information et d'accès ayant été ignorées par les autorités. Pour y faire face, l’équipe fait usage de techniques innovantes pour faire avancer les enquêtes, telles que le recours à des technologies de pointe pour l’analyse et la vérification de grandes quantités de documents, et l'imagerie géospatiale, permettant de déterminer les dommages subis par les villages avant et après les attaques. Ce type de preuves est ensuite recoupé avec les informations reçues d'au moins 700 sources, dont plus de 200 récits de témoins, a précisé M. Koumjian. Enfin, il a indiqué avoir entamé une enquête spécifique sur les informations financières relatives aux entités et aux individus qui ont contribué aux crimes internationaux graves commis au Myanmar ou qui en ont tiré profit. Sont examinées dans cette optique les chaînes d'approvisionnement en armes et la confiscation de terres, de maisons et d'entreprises, en particulier lors des opérations de déminage dans l'État rakhine.

Soulignant que la mission du Mécanisme d’enquête n’est pas simplement de stocker des preuves, M. Koumjian a indiqué avoir l'intention d'utiliser les informations et preuves obtenues pour faciliter le cour de la justice dans les tribunaux désireux et capables de poursuivre ces affaires. L’équipe partage actuellement des informations et des éléments de preuve avec trois procédures en cours portant sur les crimes commis contre les Rohingya à la Cour internationale de justice, à la Cour pénale internationale et en Argentine. Trois rapports analytiques sont actuellement finalisés afin d’être partagés avec ces organes concernant : la chaîne de commandement militaire dans l'État rakhine ; l'absence d’enquête par les autorités du Myanmar sur les crimes sexuels et sexistes ; et la diffusion organisée de contenus haineux sur Facebook par l'armée du Myanmar au cours des « opérations de nettoyage » de 2017.

Concluant sa présentation, M. Koumjian a exprimé sa reconnaissance à l’égard des courageux survivants de ces crimes qui ont partagé leurs témoignages. Il a salué le soutien du Conseil et a appelé tous les États Membres qui se sont engagés à mettre fin à la violence au Myanmar à soutenir le travail du Mécanisme d’enquête et à lui donner l'accès dont il a besoin aux témoins et aux informations sur leur territoire. Le peuple du Myanmar souffre profondément des effets de ces crimes horribles qui se poursuivent, a-t-il insisté, tout en réaffirmant l’engagement du Mécanisme à leur rendre justice et à ne ménager aucun effort pour que les auteurs de ces crimes soient un jour amenés à rendre compte de leurs actes.

Aperçu du dialogue

Durant le dialogue, de nombreuses délégations ont fermement condamné les crimes commis au Myanmar et ont regretté que la situation des droits humains - qui a été qualifiée de « dramatique », « tragique » et « complexe » - se soit dégradée. Face aux « preuves solides » d’une augmentation substantielle des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité au Myanmar, une délégation a appelé la communauté internationale à unir ses efforts, appelant notamment à mettre fin à la vente d’armes au « régime » du Myanmar.

Ont été particulièrement condamnés les bombardements aériens aveugles et les massacres de civils; l’utilisation d’armes à sous-munitions; les violences sexuelles et sexistes, ainsi que l’absence d’enquêtes à leur sujet; les incendies de bâtiments civils et de villages entiers; les actes de torture et de harcèlement à l’encontre des opposants politiques; les attaques contre les minorités et contre la société civile; ainsi que les discours de haine visant les Rohingya.

De nombreux appels ont été lancés aux autorités du Myanmar pour qu’elles arrêtent immédiatement les violences contre la population civile, libèrent tous les prisonniers politiques et permettent un accès sans entraves à l’aide humanitaire. Des délégations ont insisté sur l’importance de supprimer toutes les restrictions arbitraires imposées aux Rohingya, telles que les restrictions à la liberté de mouvement et à l’accès à la santé et à l'éducation. Plusieurs intervenants ont demandé que soit immédiatement initié le rapatriement sûr et digne des Rohingya déplacés de force.

L’absence de coopération du Myanmar avec le Mécanisme a été maintes fois déplorée. Plusieurs intervenants ont salué le courage des personnes qui ont témoigné des crimes commis au Myanmar. Une délégation a assuré qu’elle ne tournerait pas le dos aux courageux survivants et témoins, et qu’elle continuerait de demander des comptes.

L’obligation de rendre des comptes et l’établissement des responsabilités ont en effet été considérés comme essentiels pour trouver une solution juste et durable à la crise. Aucun responsable ne doit rester impuni; l’impunité ne saurait être tolérée, ont insisté nombre d’intervenants. 

Plusieurs délégations ont félicité le Mécanisme d’enquête pour son travail, l’une d’elles faisant remarquer qu’il s’effectue dans des conditions « difficiles et dangereuses », alors qu’une autre saluait le « précieux travail d’analyse » mené par le Mécanisme.  La documentation et le traitement des données sont un prérequis pour établir la responsabilité que « la junte » devra assumer par rapport aux crimes de guerre et aux crimes contre l’humanité qu’elle continue de perpétrer en toute impunité, a souligné une délégation.

Une délégation a toutefois estimé que le travail du Mécanisme doit être subsidiaire aux efforts des habitants du Myanmar eux-mêmes et a regretté la volonté de certains pays d’utiliser les instances internationales à des fins politiques, sapant ainsi les efforts du pays. Une autre délégation a estimé que l’Examen périodique universel (EPU) - et non les mandats par pays - est l’enceinte idoine pour examiner la situation des droits de l'homme (dans un pays donné) et que s’est au peuple du Myanmar et à lui seul, en sa capacité souveraine et sans ingérence, avec l’appui des pays épris de paix, de surmonter les défis qui se posent à lui. 

Au cours du dialogue, des délégations ont enfin souligné l’importance de soutenir le Bangladesh pour trouver une situation durable à la situation des réfugiés. Si l’hospitalité du Bangladesh a été saluée, d’aucuns ont déploré que l’accès aux frontières pour les réfugiés soit limité, appelant la communauté internationale à rappeler aux pays limitrophes l’obligation de protéger les populations réfugiées. Il faut éviter que la violence ne s’étende dans la région et protéger ceux qui fuient, a-t-il été souligné.

Réponses et remarques de conclusion du Chef du Mécanisme

Répondant aux nombreuses questions sur le soutien que les États pourraient apporter au Mécanisme, M. KOUMJIAN a souligné que leur coopération est essentielle. Le Mécanisme a besoin de la permission des États intéressés pour pouvoir accéder aux informations et aux témoins ; il faut que les États concernés collaborent et autorisent l’accès aux enquêteurs, a-t-il insisté. En outre, la protection des témoins est essentielle pour le travail du Mécanisme, a-t-il ajouté.  Quant à l’apport de la société civile et des organisations non gouvernementales (ONG) dans les enquêtes du Mécanisme, M. Koumjian a indiqué que ces dernières partagent des informations qui orientent et dirigent les enquêteurs.

M. Koumjian a par ailleurs précisé que le Mécanisme avait créé une unité OpenSource pour trouver et conserver les informations du terrain. Il a expliqué que le Mécanisme utilisait les technologies les plus pointues pour communiquer avec les personnes qui ne se trouvent pas dans des endroits sûrs. L’une des difficultés auxquelles est confrontée l’équipe a trait à la barrière linguistique, a ajouté M. Koumjian, avant de souligner que le Mécanisme d’enquête a besoin de personnes qui parlent le birman.

M. Koumjian a enfin rappelé que le Mécanisme d’enquête n’a pas de mandat politique et que son rôle est de contribuer au plan en 5 points de l’Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ANASE). 

* Liste des intervenants : Finlande (au nom des pays nordiques et baltes); Union européenne ; Pakistan (au nom de l’Organisation de la coopération islamique); Liechtenstein; Égypte; Luxembourg; Costa Rica; Belgique; Pays-Bas; France; États-Unis; Japon; Suisse; Türkiye; Malte; Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) ; Chine; Malawi; Canada; Malaisie; Indonésie; Roumanie; Fédération de Russie; Afrique du Sud; Bangladesh; Australie; Royaume-Uni; Venezuela; Mauritanie; Gambie; Iran; Bulgarie; Bélarus; Civicus; Centre pour les Droits Civils et Politiques - Centre CCPR; Southeast Asia Sexual Orientation, Gender Identity and Expression Caucus (ASC), Inc; International Lawyers.Org; Christian Solidarity Worldwide; iuventum e.V.; International Bar Association; Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement; Commission internationale de juristes; et Lawyers' Rights Watch Canada. 

Rapport du Haut-Commissariat sur la situation des droits de l’homme à Sri Lanka

Le Conseil est saisi du rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme sur la situation des droits de l’homme à Sri Lanka (A/HRC/54/20, à paraître en français).

Présentation

Présentant ce rapport, Mme Nada Al-Nashif, Haute-Commissaire adjointe aux droits de l’homme, a déclaré qu’un an après le remarquable mouvement de protestation exigeant de profondes réformes politiques et démocratiques, la transformation espérée pour relever des défis de longue date ne s’est toujours pas matérialisée à Sri Lanka.

Si la crise économique a considérablement affecté la jouissance des droits de larges segments de la population sri-lankaise, elle a surtout touché les communautés pauvres et marginalisées, a souligné Mme Al-Nashif.

La communauté internationale, y compris les institutions financières internationales, devrait continuer d’aider Sri Lanka à se relever, conformément aux obligations en matière de coopération et d’assistance internationales, en lui offrant la marge de manœuvre budgétaire nécessaire tout en insistant pour que de véritables progrès soient réalisés en matière de gouvernance, de transparence et de responsabilité, a plaidé la Haute-Commissaire adjointe.

L’acquisition de terres dans le nord et l’est du pays pour l’expansion des installations militaires, la conservation du patrimoine bouddhiste sur des sites hindous ou musulmans et la protection des forêts ont également aggravé les tensions, a-t-elle poursuivi, en indiquant que le Haut-Commissariat continuait de recevoir des cas d’utilisation abusive de gaz lacrymogènes et de canons à eau pendant les manifestations, affectant les manifestants et le personnel des médias. Les initiatives des victimes visant à commémorer leurs proches ont également été entravées, a-t-elle également déploré. Ces mesures restreignant le droit de manifester ne feront que générer plus de tensions dans le pays car elles empêchent les gens d’exprimer leurs griefs et de s’engager dans un débat critique, a-t-elle insisté.  Il est impératif que le Gouvernement sri-lankais garantisse un environnement qui respecte la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique et l’espace démocratique comme base de la réconciliation et de la cohésion sociale, a-t-elle recommandé.

Le présent rapport fournit une analyse des préoccupations que suscitent certaines lois à venir, en particulier le projet de loi antiterroriste remplaçant la loi sur la prévention du terrorisme et une nouvelle loi réglementant la radiodiffusion dans les médias, a indiqué la Haute-Commissaire adjointe.

Quatorze ans après la fin de la guerre, des dizaines de milliers de victimes et leurs familles continuent de souffrir dans l’agonie et le chagrin et attendent vérité, justice et réparation, a rappelé Mme Al-Nashif. Comme le souligne le rapport, des mesures urgentes de renforcement de la confiance sont nécessaires pour créer un environnement dans lequel un véritable processus de réconciliation et de justice transitionnelle pourrait réussir, a-t-elle expliqué.

Le présent rapport recommande ainsi au Gouvernement d’accélérer les enquêtes et les poursuites dans les cas emblématiques de violations des droits de l’homme, y compris les attentats du dimanche de Pâques, conformément aux normes internationales relatives aux droits de l’homme.

Pays concerné

Sri Lanka a d’emblée rappelé que le Gouvernement sri-lankais a systématiquement rejeté les résolutions 46/1 et 51/1 qui ont conduit à la mise en place du prétendu « projet de responsabilisation ». Sri Lanka a ajouté que la majorité des États Membres se sont opposés ou se sont abstenus de voter sur ces résolutions, car ils étaient en désaccord fondamental avec leur « contenu inacceptable », en particulier le prétendu mécanisme de collecte de preuves, dont la mise en place est sans précédent.  Ces résolutions sont intrusives et polarisantes et ne sont soutenues que par une poignée de pays pour des raisons sans rapport avec les droits de l’homme, a insisté la délégation sri-lankaise.

Le pays rejette également le compte rendu écrit (rapport) présenté ce matin, ses conclusions et ses recommandations, a en outre souligné la délégation.  Le contenu de ce compte rendu ne reflète pas la situation réelle sur le terrain à Sri Lanka, a-t-elle affirmé. La stabilisation économique, sociale et financière que Sri Lanka a obtenue au cours de l’année écoulée a été appréciée et reconnue aux niveaux national et extérieur, a-t-elle poursuivi. Il est regrettable que le Haut-Commissariat ait également choisi d’ignorer la résilience démocratique du pays et de ses institutions, démontrée au cours de l’année écoulée, a déclaré la délégation.

Sri Lanka reste fermement résolue à réaliser des progrès tangibles en matière de droits de l’homme par l’intermédiaire de ses institutions nationales, a indiqué la délégation, évoquant certains « progrès significatifs » dans ce domaine. 

Aperçu du débat

Durant le dialogue, ont été reconnus les défis auxquels Sri Lanka a été confrontée en raison de la crise économique et financière tout au long de l’année dernière. Plusieurs délégations ont insisté sur les conséquences négatives de cette crise économique sur la population, et plus particulièrement sur les personnes vulnérables, notamment les enfants. Dans ce contexte, a néanmoins été saluée la ligne de conduite positive adoptée ces derniers mois, qui a conduit le pays sur la voie de la stabilisation économique.

Pour être juste et durable, la reprise après la grave crise économique à Sri Lanka doit s'accompagner de réformes institutionnelles et politiques profondes, ainsi que d’une rupture avec la culture d'impunité pour les violations des droits humains, a affirmé une délégation. Il est important que cette reprise économique se fasse avec une approche axée sur les droits de l’homme, a également plaidé une autre délégation.

D’aucuns ont insisté sur la nécessité de faire respecter tous les droits de l’homme, y compris les droits à la liberté d’opinion, d’expression et de réunion, ainsi que les droits économiques, sociaux et culturels de toutes les personnes à Sri Lanka, y compris les personnes vulnérables et marginalisées. Une délégation a plaidé pour que les autorités sri-lankaises protègent davantage les journalistes et les défenseurs des droits de l’homme.

Plusieurs délégations ont appelé à la réconciliation, à l’obligation redditionnelle et à la résolution des nombreux cas de disparitions forcées.

Une délégation a dit prendre note des projets de mécanismes de réconciliation, du dialogue du Président avec les partis politiques tamouls, ainsi que de la promesse de mettre fin aux acquisitions de terres à des fins archéologiques, forestières ou de sécurité. Cependant, ces actions doivent encore être concrétisées, a-t-elle relevé.

Une délégation a pour sa part souligné qu’il importe d’adhérer aux principes d’universalité, d’objectivité et de non-sélectivité lors de l’examen des questions relatives aux droits de l’homme à Sri Lanka, d’éviter la politisation des droits de l’homme et leur exploitation pour s’ingérer dans les affaires intérieures, tout en prêtant attention au renforcement des capacités des institutions nationales et à la coopération technique. Une autre délégation a dénoncé la mise en place de mécanismes qui se font sans l’accord du pays concerné ; de tels mécanismes sont contre-productifs, a-t-elle insisté.

**Liste des intervenants : Nouvelle-Zélande, Union européenne, Royaume-Uni (au nom d’un groupe de pays), Oman (au nom de Conseil de coopération du Golfe), Liechtenstein, Égypte, Luxembourg, Allemagne, France, États-Unis, Japon, Israël, Suisse, Türkiye, Canada et Cuba.

 

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