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Examen du rapport du Tadjikistan devant le CERD : l’essentiel du dialogue s’articule autour de la situation des minorités et des réfugiés

Compte rendu de séance

 

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport périodique présenté par le Tadjikistan au titre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. La discussion a essentiellement porté sur la situation des minorités, en particulier des Pamiris et des Roms, et sur la situation des réfugiés venus d’Afghanistan.

Une experte membre du Comité s’est ainsi enquise de ce qui était fait pour améliorer la situation des Roms (Jughi), notamment les femmes et les filles roms, alors que le Comité est informé que ce groupe est victime d'une discrimination structurelle au Tadjikistan. L’experte a aussi fait état de discrimination et de stéréotypes négatifs à l'encontre des Pamiris vivant dans la région autonome du Gorno-Badakhshan, l'une des plus pauvres du pays, avec un accès limité aux infrastructures et aux services de base.

Le Comité, a précisé l’experte, a reçu des informations selon lesquelles, après les manifestations de novembre 2021, la situation des droits de l'homme dans le Gorno-Badakhshan s’était encore détériorée, la répression des manifestations de la minorité pamiri s’étant traduite, notamment, par des arrestations arbitraires, la stigmatisation des Pamiris dans les médias et l'usage excessif et illégal de la force.

Des inquiétudes ont en outre été exprimées au sujet de la détention arbitraire présumée de quatre défenseurs des droits de l'homme et représentants de la minorité pamiri dans la région autonome : Mme Ulfathonim Mamadshoeva et MM. Khursand Mamadshoev, Faromuz Irgashov et Manuchehr Kholiknazarov.

Un expert a félicité le Tadjikistan pour les mesures que le pays a prises pour permettre aux membres de minorités de recevoir un enseignement dans leurs langues maternelles.

Des préoccupations ont par ailleurs été exprimées devant le fait que, selon certaines informations, les demandeurs d'asile afghans arrivés au Tadjikistan depuis juillet 2021 ne reçoivent pas d’autorisation de séjour, laquelle est pourtant une condition préalable au dépôt d'une demande d'asile. L'expulsion hors du Tadjikistan de plusieurs dizaines de ressortissants afghans, notamment des réfugiés, des demandeurs d'asile et des Afghans dont le visa avait expiré, en violation du principe de non-refoulement, a été déplorée à plusieurs reprises. Les requérants d’asile au Tadjikistan ne disposent que d’un seul jour pour faire appel du refus opposé à leur demande, a-t-il été regretté.

Une experte a par ailleurs salué l’adoption de la Loi sur l'égalité et l'élimination de toutes les formes de discrimination en 2022. Le Comité, a-t-elle cependant ajouté, est préoccupé par le fait que cette Loi n'inclut pas le motif de l'ascendance comme base interdite de discrimination, et par le fait que la discrimination raciale et les actes de violence à motivation raciale ne sont toujours pas érigés en infractions pénales au Tadjikistan.

Présentant le rapport de son pays, M. Muzaffar Ashuriyon, Ministre de la justice du Tadjikistan, a notamment fait savoir que, pour appliquer les dispositions de la Convention et les recommandations des organes des Nations Unies, la Loi sur l'égalité et l'élimination de toutes les formes de discrimination avait été adoptée en 2022. Cette Loi institue un système juridique pour la prévention et la protection efficace contre toutes les formes de discrimination, et s'applique à tous les organes de l'État, ainsi qu’aux fonctionnaires et aux personnes physiques et morales, a-t-il précisé. En vertu de cette Loi, le Commissaire aux droits de l'homme est l'organisme public chargé de garantir l'égalité et d'éliminer toutes les formes de discrimination dans le pays, a fait savoir le Ministre.

Au Tadjikistan, a poursuivi M. Ashuriyon, aucune distinction n'est opérée sur la base de la race ou du statut social dans la société : les minorités nationales ont le droit à la liberté de choix, d'association et de réunion, à la liberté d'expression et d'utilisation des médias, ainsi qu’à la liberté de choisir une religion et de la pratiquer. La création et les activités d'associations volontaires qui prônent la haine raciale, nationaliste, sociale ou religieuse sont interdites, a d’autre part souligné le Ministre.

Une attention particulière est accordée aux questions relatives à la langue de communication des membres des minorités nationales dans le pays, a ajouté M. Ashuriyon.

La délégation tadjike était également composée, entre autres, de Mme Gulnora Hasanzoda, Ministre du travail, de la migration et de l'emploi ; de M. Jamshed Khamidov, Représentant permanent du Tadjikistan auprès des Nations Unies à Genève ; ainsi que de représentants des services de la Présidence du Tadjikistan et des Ministères de l’intérieur, des affaires étrangères, de la santé et de la protection sociale de la population, de l'éducation et des sciences, et de la justice.

Pendant le dialogue avec le Comité, la délégation a insisté sur le fait que, du point de vue non seulement du Tadjikistan mais aussi d’éminents spécialistes de l’Asie centrale, les Pamiris ne constituent pas « une minorité » mais sont des Tadjiks à part entière. La délégation a par ailleurs fustigé les organisations créées par de prétendus défenseurs des droits de l’homme qui enfreignent systématiquement la loi et poursuivent des buts criminels radicalement opposés à leur statut officiel.

 

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Tadjikistan et les rendra publiques à l’issue de sa session, le 28 avril.

 

Examen du rapport du Tadjikistan

Le Comité est saisi du rapport valant douzième et treizième rapports périodiques du Tadjikistan (CERD/C/TJK/12-13).

Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays, M. MUZAFFAR ASHURIYON, Ministre de la justice de la République du Tadjikistan, a notamment fait savoir que la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, y compris la définition de la discrimination raciale qu’elle contient, faisait partie du système juridique du pays et, en vertu de l'article 10 de la Constitution, était directement applicable.

D’autre part, pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention ainsi que les recommandations des organes des Nations Unies, la Loi sur l'égalité et l'élimination de toutes les formes de discrimination a été adoptée en 2022, a indiqué le Ministre, précisant que cette Loi, qui institue un système juridique pour la prévention et la protection efficace contre toutes les formes de discrimination, s'applique à tous les organes de l'État, aux autorités des cantons et des municipalités, ainsi qu’aux fonctionnaires et aux personnes physiques et morales. En vertu de cette Loi, le Commissaire aux droits de l'homme (ou Médiateur) est l'organisme public chargé de garantir l'égalité et d'éliminer toutes les formes de discrimination dans le pays, a fait savoir le Ministre.

Selon le dernier recensement de la population et du logement (2020), les nationalités les plus représentées au Tadjikistan sont les suivantes : Tadjiks (86,1%), Ouzbeks (11,3%), Kirghizes (0,4%) et Russes (0,3%), suivis, dans l’ordre, des Tatars, Lakais, Congrats, Karlugans, Katagans, Durmans, Barlos, Yuzas et Jugs, a indiqué le Ministre. Il existe au Tadjikistan 3967 écoles tadjikes, 77 écoles ouzbèkes, 60 écoles russes, 15 écoles kirghizes et cinq écoles anglaises dans différentes villes et districts. Quelque 306 établissements prodiguent des enseignements en tadjik et en ouzbek, et 159 en tadjik et en russe, a ajouté M. Ashuriyon.

Conformément à la loi, a poursuivi le Ministre, aucune distinction n'est opérée sur la base de la race ou du statut social dans la société. Les minorités nationales jouissent de tous les droits prévus par la loi. Elles ont le droit à la liberté de choix, d'association et de réunion, à la liberté d'expression et d'utilisation des médias, ainsi qu’à la liberté de choisir une religion et de la pratiquer.

L'article 14 de la Loi sur les associations volontaires interdit la création et les activités d'associations volontaires qui prônent la haine raciale, nationaliste, sociale ou religieuse, a d’autre part souligné le Ministre. En vertu de cette Loi, plus de 2000 associations bénévoles fonctionnent actuellement au Tadjikistan, dont 45 associations de minorités ethniques et cent succursales et bureaux de représentation d'organisations étrangères.

M. Ashuriyon a ensuite indiqué qu’en vertu de l'article 26 de la Constitution, chacun au Tadjikistan a le droit de déterminer en toute indépendance son attitude à l'égard de la religion, de professer, seul ou en communauté avec d'autres, n'importe quelle religion ou aucune. Quant à la Loi de 2009 sur la liberté de conscience et les associations religieuses, elle est conforme aux exigences des instruments juridiques internationaux et, par rapport à la loi précédente, a considérablement simplifié la procédure d'enregistrement des associations religieuses et l'exercice du droit à l'éducation religieuse et à la liberté de croyance.

Le Ministre a par ailleurs fait savoir que plus de 20 000 fonctionnaires travaillaient dans toutes les branches de l'exécutif, aux niveaux central et local, dont 5,08% sont issus de minorités nationales ; parmi ceux-ci, 28,2% occupent des postes de direction.

D’autre part, une attention particulière est accordée aux questions relatives à la langue de communication des membres des minorités nationales dans le pays, a poursuivi M. Ashuriyon. Ainsi, la Constitution garantit la liberté d'expression, la liberté de la presse et le droit d'utiliser les médias, la censure de l'État et la persécution pour cause de critique étant interdites. Un grand nombre de médias travaillent dans différentes langues, notamment 27 journaux publiés en russe et 86 en tadjik et russe. Un programme d'une heure intitulé Tadjikistan, ma terre natale, est diffusé une fois par semaine pour les représentants des différentes diasporas vivant au Tadjikistan.

Questions et observations des membres du Comité

MME SHEIKHA ABDULLA ALI AL-MISNAD, rapporteuse du groupe de travail du Comité chargé de l’examen du rapport du Tadjikistan, a d’abord regretté que le rapport ne contienne pas de données ventilées sur la composition ethnique de la population, ni sur les indicateurs sociaux et économiques intéressant l’application de la Convention, pas plus que sur l'exercice par les minorités et les non-ressortissants des droits que leur garantit la Convention. Mme Al-Misnad a demandé si le recensement de 2020 abordait la situation des groupes ethniques pamiri et yaghnobi.

Mme Al-Misnad a salué l’adoption de la Loi sur l'égalité et l'élimination de toutes les formes de discrimination en 2022. Le Comité est toutefois préoccupé par le fait que cette Loi n'inclut pas le motif de l'ascendance comme base interdite de discrimination, comme le stipule l'article premier de la Convention, ainsi que par le fait que la discrimination raciale et les actes de violence à motivation raciale ne sont toujours pas érigés en infractions pénales au Tadjikistan, contrairement à ce que demande la Convention, a regretté l’experte.

Le rapport du Tadjikistan mentionne la formation aux droits de l'homme et des activités menées pour sensibiliser le public aux droits garantis par la Convention, mais il ne donne pas d'informations sur le nombre de plaintes et d'actions en justice relatives à la discrimination raciale, a ensuite fait observer Mme Al-Misnad. Le fait qu’il n’y ait pas de plainte ne signifie pas qu'il n'y a pas de discrimination raciale, a-t-elle souligné. Elle a souhaité obtenir des données ventilées sur les plaintes pour discrimination raciale reçues par les forces de l'ordre et les autres organes d'enquête, et a voulu savoir si le Tadjikistan entendait reconnaître la compétence du Comité pour recevoir des plaintes individuelles.

Concernant la situation des groupes minoritaires, Mme Al-Misnad a demandé ce qui était fait au Tadjikistan pour améliorer la situation des Roms ( Jughi), notamment les femmes et les filles, alors que le Comité est informé que ce groupe est victime d'une discrimination structurelle dans le pays. Les Frères musulmans, les femmes portant le hijab ou encore les hommes arborant de longues barbes seraient victimes de discrimination au Tadjikistan, s’est d’autre part inquiétée l’experte.

Mme Al-Misnad s’est d’autre part enquise des mesures prises pour lutter contre la discrimination et les stéréotypes négatifs à l'encontre des Pamiris : la région autonome de Gorno-Badakhshan, où vivent la majorité des Pamiris, est l'une des régions les plus pauvres du pays, avec un accès limité aux infrastructures et aux services de base et une migration continue des jeunes vers la Fédération de Russie en raison du manque d'emplois, a-t-elle observé. Mme Al-Misnad a ajouté que le Comité avait reçu des informations indiquant qu’à la suite des manifestations de novembre 2021, la situation des droits de l'homme dans le Gorno-Badakhshan s’était détériorée. La répression des manifestations de la minorité pamirie s'est traduite par des arrestations arbitraires, la restriction de l'accès à Internet, la stigmatisation des Pamiris dans les médias, l'usage excessif et illégal de la force et l'implication de l'armée, a-t-elle souligné.

L’experte a aussi évoqué l’opération antiterroriste menée en mai 2022 qui s'est soldée par la mort d'au moins 29 manifestants dans le Gorno-Badakhshan. Le Tadjikistan, a-t-elle fait remarquer, n'a pas encore répondu aux communications des titulaires de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme concernant la détention arbitraire présumée de quatre défenseurs des droits de l'homme et représentants de la minorité pamirie dans la région autonome : Mme Ulfathonim Mamadshoeva et MM. Khursand Mamadshoev, Faromuz Irgashov et Manuchehr Kholiknazarov. Les défenseurs des droits de l'homme, les journalistes appartenant à des minorités ethniques, religieuses et linguistiques, ainsi que les personnes qui défendent leurs droits, doivent pouvoir mener leur travail dans un environnement sûr et favorable, sans craindre d'être qualifiés de « terroristes » , a insisté Mme Al-Misnad.

Mme Al-Misnad a par la suite voulu savoir si une réflexion était menée au Tadjikistan sur les raisons pour lesquelles le Gorno-Badakhshan est depuis si longtemps en proie au conflit et sa population n’est pas traitée comme le reste de la population tadjike.

L’experte a aussi demandé des renseignements sur les taux de scolarisation primaires et secondaires des enfants pamiri et roms. Selon des informations reçues par le Comité, a-t-elle relevé, on compte peu d'écoles répondant aux besoins pédagogiques spécifiques des minorités ethniques, et les langues des minorités ne sont guère présentes dans les médias.

Le Comité, a ajouté Mme Al-Misnad, souhaiterait savoir si le Tadjikistan envisage de ratifier bientôt la Convention relative au statut des apatrides et la Convention sur la réduction des cas d'apatridie.

L’experte a enfin voulu savoir si le Tadjikistan avait introduit des procédures pour accorder la citoyenneté aux réfugiés et pour enregistrer tous les enfants nés dans l'État partie, indépendamment du statut juridique de leurs parents ou de la disponibilité de documents d'identité.

Pour sa part, MME YANDUAN LI, membre du groupe de travail du Comité chargé de l’examen du rapport du Tadjikistan, a demandé si le Tadjikistan entendait abolir les règlements qui restreignent le droit des demandeurs d'asile et des réfugiés – dont la majorité est originaire d'Afghanistan – à jouir de la liberté de circulation et de résidence, comme l’avait demandé le Comité lors de l’examen du précédent rapport du pays.

L’experte a voulu savoir comment le Gouvernement tadjik s’assure que tous les demandeurs d'asile aient effectivement accès à des procédures d'asile équitables et efficaces, et ne soient pas pénalisés indûment pour leur entrée ou leur séjour irrégulier dans le pays. Mme Li a rappelé que le Comité avait recommandé à l'État partie d'abroger l'article 499 (3) du Code administratif, en vue d’interdire le recours à l'expulsion du Tadjikistan en tant que sanction.

Mme Li a aussi regretté que, selon ce qu’indiquent certaines informations, les demandeurs d'asile afghans arrivés au Tadjikistan depuis juillet 2021 ne reçoivent pas d’autorisation de séjour, laquelle est une condition préalable au dépôt d'une demande d'asile.

Mme Li a en outre voulu savoir dans quelle mesure le système scolaire tadjik défendait l'acceptation et la tolérance à l'égard des différentes minorités du pays.

M. GUN KUT, rapporteur chargé du suivi des recommandations du Comité, a fait observer que le rapport de suivi du Tadjikistan concernant les observations finales du Comité issues de l’examen du précédent rapport avait été reçu dans les délais. Ledit rapport traite des questions jugées prioritaires par le Comité, à savoir la participation équitable des membres de minorités ethniques à la vie publique et politique ; la mise en conformité de plusieurs textes de loi avec la Convention ; et l’adoption d’une stratégie en faveur des Roms (Jughi).

Un autre expert membre du Comité a recommandé que le Tadjikistan adopte une loi pour la protection des défenseurs des droits de l’homme. Il a été remarqué que la définition du terrorisme donnée par la loi tadjike était ambiguë.

Plusieurs questions ont porté sur le statut de la minorité pamirie et de la région autonome de Gorno-Badakhshan.

Les requérants d’asile au Tadjikistan ne disposent que d’un seul jour pour faire appel du refus opposé à leur demande, ont regretté plusieurs experts.

La délégation a aussi été priée de dire combien de plaintes pour discrimination raciale avaient été traitées par les tribunaux forains mis en place par le Tadjikistan.

Plusieurs experts ont fait part de leurs préoccupations devant l'expulsion du Tadjikistan de plusieurs dizaines de ressortissants afghans, notamment des réfugiés, des demandeurs d'asile et des Afghans dont le visa avait expiré, en violation du principe de non-refoulement.

D’autres questions des membres du Comité ont porté sur la présence des minorités ethniques dans la fonction publique ; la protection des femmes et des enfants de groupes minoritaires contre la traite des êtres humains ; ou encore l’accès des apatrides aux soins de santé pendant la pandémie de COVID-19.

Un expert a félicité le Tadjikistan pour les mesures que le pays a prises pour permettre aux membres de minorités de recevoir un enseignement dans leurs langues maternelles.

La Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine s’applique à tous les pays, indépendamment de l’importance des populations d’ascendance africaine sur leur sol, a-t-il par ailleurs été rappelé.

Réponses de la délégation

La délégation a tout d’abord précisé que, du point de vue non seulement du Tadjikistan mais aussi d’éminents spécialistes de l’Asie centrale, les Pamiris ne constituent pas « une minorité » mais sont bien des Tadjiks à part entière, d’ancienne origine iranienne. On trouve aussi des Pamiris en Chine (région de Tashkorgan) et en Afghanistan (région du Badakhshan), deux pays où ils sont d’ailleurs assimilés aux Tadjiks, a expliqué la délégation.

Au Tadjikistan, a poursuivi la délégation, les Pamiris vivent surtout dans leur territoire historique, la région du Gorno-Badakhshan (ou Haut-Badakhshan), dans les montagnes du Pamir – une région d’altitude dont l’éloignement a justifié l’octroi d’un statut autonome. Le Gouvernement y déploie d’importants projets de développement, y compris la construction de logements et de routes d’importance nationale, de même que l’octroi de lopins de terre. Toutes ces mesures ont permis de faire tomber le taux de pauvreté dans cette région de 97% en 1999 à 29% en 2019, a fait valoir la délégation. L’Académie des sciences de Khorog, la capitale de cette province autonome, mène actuellement des études sur les langues originelles de la région.

Toujours au Gorno-Badakhshan, plusieurs groupes criminels organisés – dont l’origine remonte à la guerre civile de 1992 – ont, avec l’aide d’acteurs basés en Afghanistan, basculé dans le terrorisme, a d’autre part indiqué la délégation. Ces groupes ont semé la terreur et nui au développement social et économique de la région, y compris en commettant des meurtres et des viols, en incendiant des bâtiments publics et en organisant des manifestations violentes à Khorog, entre autres nombreux crimes. Les autorités ont donc dû mener des actions de répression contre ces groupes. Elles ont, ce faisant, mis la main sur d’importants stocks de stupéfiants ainsi que d’armes, tant russes qu’occidentales, provenant d’Afghanistan, a affirmé la délégation. C’est dans ce contexte que M. Mamadshoev, mentionné par un expert du Comité, a été convaincu d’actes de terrorisme et de liens avec des services spéciaux d’autres États, a expliqué la délégation. De même, M. Irgashov est accusé d’avoir contribué à la création d’une organisation terroriste et d’avoir appelé au renversement du Gouvernement, a-t-elle ajouté.

La délégation a ensuite présenté un certain nombre de mesures de nature socioéconomique prises par le Gouvernement en faveur du développement accéléré du Haut-Badakhshan et de l’amélioration des conditions de vie de la population.

Le Tadjikistan a organisé en 2020 son troisième recensement depuis l’indépendance, a rappelé la délégation. Le résultat du recensement sera publié jusqu’en 2024, a-t-elle fait savoir, précisant que l’analyse des données porte actuellement sur les conditions de logement. Le recensement était basé sur l’autodéclaration de l’origine ethnique, a indiqué la délégation.

D’après les données préliminaires de ce recensement, on compte aujourd'hui quelque 3400 Roms au Tadjikistan, dont environ 2000 personnes en âge de travailler, essentiellement dans l’agriculture, a ajouté la délégation. Les Roms peuvent bénéficier des allocations sociales versées par les autorités aux familles nécessiteuses, y compris pour ce qui est des prestations de chômage, a-t-elle souligné. Ils sont concentrés dans quelques régions bien précises du pays, a-t-elle précisé.

La définition de la discrimination donnée par la loi tient compte du motif de l’origine, a ensuite souligné la délégation. Onze articles du Code pénal traitent de la discrimination, laquelle est aussi considérée comme une circonstance aggravante de la commission d’autres délits, a-t-elle fait valoir.

Il a ensuite été affirmé que l’institution du Commissaire aux droits de l’homme était pleinement conforme aux Principes de Paris. Le Commissaire accorde toute son attention à chaque plainte qu’il reçoit (vingt en 2023), a assuré la délégation : s’il constate une violation des droits de l’homme, le Commissaire enquête et peut alerter les autorités compétentes.

La délégation a par la suite fustigé les organisations créées par de prétendus défenseurs des droits de l’homme qui enfreignent systématiquement la loi et poursuivent des buts criminels, radicalement opposés à leur statut officiel.

Les restrictions apportées aux déplacements de réfugiés afghans sont liées à la situation qui règne actuellement dans leur pays d’origine, a-t-il été expliqué. Les enfants de ces réfugiés sont scolarisés dans les 57 écoles se trouvant dans des villes et chefs-lieux dont la délégation a donné les noms.

Quelque 5891 personnes réfugiées sont enregistrées au Tadjikistan, toutes en provenance d’Afghanistan, sauf deux venant du Pakistan, a ensuite précisé la délégation.

Depuis 2020, a-t-elle poursuivi, les migrants disposent de sept jours pour faire recours contre une décision d’expulsion. Tous les ressortissants étrangers, y compris afghans, qui arrivent au Tadjikistan pour demander l’asile peuvent demander une autorisation de séjour permanent, a ajouté la délégation.

Le Gouvernement oblige les personnes réfugiées au Tadjikistan à résider près de la capitale, a confirmé la délégation. Cette restriction n’empêche pas les personnes concernées de se déplacer à l’intérieur du pays pour aller travailler, par exemple, a-t-elle souligné.

Le ressortissant étranger ou l’apatride qui épouse une femme tadjike doit répondre à certains critères liés notamment à la résidence au Tadjikistan : le but est de protéger les femmes tadjikes contre les mariages blancs, a expliqué la délégation. Les mêmes exigences s’appliquent à la femme étrangère ou apatride qui souhaite épouser un citoyen tadjik, a-t-elle ajouté.

Aucun problème concret ou pratique ne fait obstacle à l’ enregistrement des naissances, a d’autre part assuré la délégation.

Les personnes appartenant à des minorités nationales ou à des groupes vulnérables sont protégées par le Code du travail : si elles estiment être victimes de discrimination dans le domaine de l’emploi, elles peuvent saisir les tribunaux, a indiqué la délégation. Les autorités ont aussi la possibilité d’imposer des quotas d’employés appartenant à des minorités.

Plus de mille partisans des salafistes et des Frères musulmans originaires du Tadjikistan participent actuellement à des opérations illégales dans des pays étrangers, ainsi qu’à des recrutements illégaux au Tadjikistan, a d’autre part affirmé la délégation. C’est pourquoi les organisations concernées sont interdites au Tadjikistan comme dans plusieurs autres pays, a-t-elle ajouté.

La délégation tadjike a en outre décrit les mesures prises par le pays pour réprimer la traite des êtres humains et pour venir en aide aux victimes. Le Gouvernement dispense des formations à l’intention de policiers spécialisés dans la lutte contre ce problème, a-t-elle précisé.

La délégation a donné d’autres informations concernant les aides octroyées aux populations vulnérables, y compris des personnes apatrides, pendant la pandémie de COVID-19.

La délégation a par ailleurs indiqué que plusieurs députés représentant les minorités siégeaient dans les deux chambres du Parlement.

Elle a également décrit la politique de l’État destinée à favoriser la participation des femmes à la vie publique.

Remarques de conclusion

MME AL-MISNAD a dit espérer que les préoccupations exprimées par les membres du Comité seraient entendues, s’agissant notamment des Pamiris, et auraient une incidence sur la protection des droits de l’homme au Tadjikistan. Elle a recommandé que le pays trouve d’autres solutions que la manière forte pour traiter des préoccupations relatives à la situation des Pamiris.

MME LI a remercié la délégation tadjike pour sa coopération.

M. ASHURIYON a remercié les experts du Comité pour leur approche constructive et les a invités à venir constater sur place que les Pamiris sont bel et bien des Tadjiks à part entière.

Le Ministre a en outre insisté sur le fait que la délégation n’avait pu, faute de temps, faire état de tous les progrès réalisés par le Tadjikistan pour améliorer le respect des droits de l’homme. Il a assuré que son Gouvernement tiendrait dûment compte des recommandations du Comité, par le biais notamment de l’institution gouvernementale chargée, depuis peu, de donner suite aux recommandations des organes statutaires et conventionnels des Nations Unies.

 

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