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Conseil des droits de l’homme : nous disposons des outils nécessaires pour mettre fin à la phase aiguë de la pandémie, mais de profondes inégalités compromettent cette chance, avertit le Directeur général de l’OMS

Compte rendu de séance

 

À l’ouverture de la réunion-débat que tenait ce matin le Conseil des droits de l’homme sur la manière de « garantir à tous les pays un accès équitable, rapide et universel, à un coût abordable, aux vaccins mis au point pour lutter contre la pandémie de COVID-19 », le Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), M. Tedros Adhanom Ghebreyesus, a souligné que « nous sommes à la croisée des chemins car, si nous disposons des outils nécessaires pour mettre fin à la phase aiguë de la pandémie, de profondes inégalités compromettent cette chance ».

En effet, a-t-il expliqué, les pays où les taux de vaccination sont élevés rouvrent petit à petit, tandis que d'autres, où les taux de vaccination et de dépistage sont faibles, sont laissés pour compte : il en résulte plus de 60 000 décès par semaine, avec un risque accru d'émergence de nouvelles variantes.

Ce matin, la Haute-Commissaire aux droits de l’homme, Mme Michelle Bachelet, pour sa part précisé que si plus de 10,5 milliards de doses de vaccin ont été administrées dans le monde – soit suffisamment pour protéger l'ensemble de la population mondiale contre les symptômes graves, l'hospitalisation et la mort –, seules 13% des personnes vivant dans les pays à faible revenu ont été vaccinées, contre près de 70% des personnes vivant dans les pays riches.

Mme Bachelet a recommandé de soutenir les transferts de technologie et la dérogation temporaire aux droits de propriété intellectuelle dans le cadre de l'accord sur les Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC). Elle a également plaidé en faveur du renforcement du dispositif COVAX, avant de demander aux sociétés pharmaceutiques d’assumer leurs responsabilités en matière de respect des droits de l'homme, et de recommander en outre de s’attaquer à l'hésitation à se faire vacciner.

Intervenant également dans le cadre de cette réunion-débat, M. Juan Carlos Holguín, Ministre des affaires étrangères et de la mobilité humaine de l'Équateur, a mis en garde contre l’impact négatif, pour la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, de l’inégalité dans l’accès aux vaccins. Pour sa part, le Ministre des affaires étrangères de l’Azerbaïdjan, M. Jeyhun Bayramov, a notamment indiqué que, lors de la session actuelle du Conseil, l'Azerbaïdjan, au nom du Mouvement des non-alignés, présenterait avec l’Équateur une résolution sur l'accès aux vaccins.

Le débat sur l’accès aux vaccins a ensuite compté avec la participation de quatre panélistes : M. Farid Ahmadov, Professeur associé de droit et cofondateur du programme de droit à Université ADA, Azerbaïdjan ; Mme Attiya Waris, Experte indépendante chargée d’examiner les effets de la dette extérieure et des obligations financières internationales connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels ; M. Thomas Cueni, Directeur général de la Fédération internationale des fabricants et associations pharmaceutiques (IFPMA) ; et Mme Gita Sen, Coordonnatrice générale de Development Alternatives with Women for a New Era (DAWN).

Parmi les délégations* qui ont pris part à la discussion, bon nombre ont dénoncé le « nationalisme vaccinal », le stockage des vaccins au-delà du légitime et le blocage des brevets. L’inégalité entre pays riches et pauvres, a-t-il été affirmé, ne pourra être réglée que par une redistribution équitable des vaccins, y compris au travers du mécanisme COVAX. L’accès universel aux vaccins contre la COVID-19 est absolument essentiel pour défendre le droit à la vie et garantir la relance économique mondiale, a-t-il été affirmé.

En fin de matinée, le Conseil a ensuite achevé son débat avec la Rapporteuse spéciale sur la vente et l’exploitation sexuelle d’enfants, Mme Mama Fatima Singhateh, entamé hier, en entendant les déclarations de plusieurs délégations**.

L’approche très pratique de la Rapporteuse spéciale s’agissant de la protection des enfants contre la vente et l'exploitation sexuelle a été saluée à plusieurs reprises. Mme Singhateh a en effet précisé que son rapport contenait une «check list» pour aider les États et autres acteurs à lutter contre la vente et l’exploitation sexuelle des enfants, de même qu’une liste des services devant être offerts aux victimes.

Le Conseil poursuivait ses travaux à la mi-journée en examinant des rapports sur les effets de la dette et sur la liberté de religion.

Réunion-débat sur le thème « Garantir à tous les pays un accès équitable, rapide et universel, à un coût abordable, aux vaccins mis au point pour lutter contre la pandémie de COVID-19 »

Documentation

Le Conseil est saisi du rapport de la Haute-Commissaire intitulé « Incidences sur les droits de l’homme des lacunes dans l’accès rapide, équitable et universel à des vaccins contre la maladie à coronavirus et leur distribution à un prix abordable et du creusement des inégalités entre les États » (A/HRC/49/35 ).

Déclarations liminaires

MME MICHELLE BACHELET, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a d’abord constaté que le monde avait la grande chance de disposer de vaccins efficaces contre la COVID-19. Malheureusement, « nous n'avons pas réussi à administrer les vaccins de manière juste et équitable » et « cet échec prolonge la pandémie », a regretté la Haute-Commissaire.

En effet, plus de 10,5 milliards de doses de vaccin ont été administrées dans le monde, soit suffisamment pour protéger l'ensemble de la population mondiale contre les symptômes graves, l'hospitalisation et la mort – mais, si près de 70% des personnes vivant dans les pays à revenu élevé ont reçu au moins une dose de vaccin, à peine plus de 13% des personnes vivant dans les pays à faible revenu ont été vaccinées.

« Injuste et immoral », cet échec est aussi profondément contre-productif, a dit la Haute-Commissaire, car les hospitalisations et les décès continuent de survenir principalement chez les personnes non vaccinées, tandis que les faibles taux de vaccination dans de nombreux pays créent des conditions idéales pour l'émergence de nouvelles variantes plus contagieuses du coronavirus.

Parallèlement, a mis en garde Mme Bachelet, le nationalisme vaccinal prive les gens de leur droit inaliénable au développement, aggrave la pauvreté et creuse les inégalités. À moins que l'on puisse garantir un accès universel et équitable aux vaccins dans le monde, la thésaurisation des vaccins contre la COVID-19 n'est pas conforme aux obligations des États en matière de droits de l'homme, a déclaré la Haute-Commissaire.

Mme Bachelet a recommandé de soutenir les transferts de technologie et la dérogation temporaire aux droits de propriété intellectuelle dans le cadre de l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC). Elle a également plaidé en faveur du renforcement du dispositif COVAX, relevant à ce propos que des dizaines de millions de vaccins excédentaires doivent être détruits faute d’avoir été utilisés ; elle a en outre demandé aux sociétés pharmaceutiques d’assumer leurs responsabilités en matière de respect des droits de l'homme. Enfin, il faut s’attaquer à l'hésitation à se faire vacciner en veillant à ce que des informations factuelles parviennent à tous, partout, a ajouté Mme Bachelet.

Pour conclure, la Haute-Commissaire s’est félicitée de la décision de négocier un « traité sur les pandémies » : tous les acteurs concernés devront participer au processus de rédaction pour garantir que le traité soit solidement ancré dans le droit international des droits de l'homme, a-t-elle recommandé.

M. JUAN CARLOS HOLGUÍN, Ministre des affaires étrangères et de la mobilité humaine de l'Équateur, a d’abord mis en avant le succès du programme de vaccination de son pays : le Gouvernement équatorien a en effet formulé une réponse d'unité nationale, avec la participation de multiples acteurs. Il s'agit de la plus grande campagne de vaccination de l'histoire du pays, menée dans un but collectif, avec une attention particulière pour les personnes les plus vulnérables et avec le soutien important de la coopération internationale.

À ce jour, 85% de la population du pays est vaccinée ; la vaccination des enfants dès l'âge de cinq ans signifie que le pays aura bientôt l'un des taux de vaccination les plus élevés au monde et atteindra une « immunité de ruche », « produit d’une intelligence collective », a fait valoir le Ministre équatorien.

Mais, a-t-il ajouté, malgré le consensus sur la nécessité de vacciner tout le monde, il faut reconnaître que des inégalités persistent et que de nombreux pays rencontrent des difficultés pour vacciner leur population. Cela aura un impact négatif sur les droits de l'homme et la réalisation des objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a mis en garde le Ministre.

M. JEYHUN BAYRAMOV, Ministre des affaires étrangères de l’Azerbaïdjan, a exposé plusieurs initiatives du Mouvement des non-alignés face à la pandémie, notamment la décision de convoquer une session extraordinaire de l'Assemblée générale des Nations unies en réponse à la COVID-19 (3-4 décembre 2020), ou encore, lors de la 46ème session du Conseil, la présentation par l'Azerbaïdjan et l'Équateur d’un projet de résolution sur l’accès universel aux vaccins contre la COVID-19, adoptée par le Conseil à l'unanimité.

Même si la situation de la vaccination dans le monde s'est améliorée par rapport à ce qu'elle était il y a un an, les pays les moins avancés (PMA) sont toujours très en retard en termes de niveaux de vaccination, a constaté le Ministre. Cela doit changer « si nous voulons respecter l'engagement de ne laisser personne de côté », a-t-il souligné. M. Bayramov a précisé que lors de la session actuelle du Conseil, l'Azerbaïdjan, au nom du Mouvement, ainsi que l'Équateur présenteraient une résolution de suivi sur l'accès aux vaccins. Nous comptons sur le soutien continu des États Membres de l'ONU à ces initiatives importantes, a déclaré le Ministre.

M. TEDROS ADHANOM GHEBREYESUS, Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a déclaré que le bilan de la COVID-19 – plus de six millions de personnes décédées – était probablement bien inférieur à la réalité de la crise. L'OMS plaide pour un accès universel et équitable aux vaccins contre la COVID-19 depuis leur introduction en décembre 2020, a rappelé le Directeur général.

« Nous sommes à la croisée des chemins », a-t-il poursuivi, car si « nous disposons des outils nécessaires pour mettre fin à la phase aiguë de la pandémie », « de profondes inégalités compromettent cette chance ». En effet, les pays où les taux de vaccination sont élevés rouvrent petit à petit, tandis que d'autres, où les taux de vaccination et de dépistage sont faibles, sont laissés pour compte. Il en résulte plus de 60 000 décès par semaine, avec un risque accru d'émergence de nouvelles variantes, a mis en garde le Directeur général de l’OMS.

Il a ensuite déclaré que le système de santé de l’Ukraine était aux prises avec la COVID-19 alors même que, dans un contexte de guerre, les fournitures en oxygène et de matériel médical sont dangereusement basses. Dans le cadre de son programme d'aide humanitaire, l'OMS livre de l'oxygène et d'autres fournitures médicales qui font cruellement défaut, a précisé le Directeur général. Il a en outre rappelé que « les attaques contre les hôpitaux, le personnel médical et les transports médicaux sont interdites par le droit humanitaire international [et que] toute attaque de ce type constitue une violation grave des Conventions de Genève ».

Exposés des panélistes

M. FARID AHMADOV, Professeur associé de droit et cofondateur du programme de droit à Université ADA (Azerbaïdjan), a fait observer que si les pays assouplissent progressivement les restrictions liées à la COVID-19, « c'est peut-être le signe que le virus perd de sa gravité et que l'humanité est en train de tourner cette page de son histoire ». Toutefois, des leçons doivent être tirées pour les générations futures, s’agissant notamment de ce qui aurait pu être fait pour que le fossé entre les pauvres et les riches n'affecte pas la jouissance de droits aussi fondamentaux que le droit à la santé.

Des ambiguïtés demeurent concernant la portée du droit à la santé selon le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, et la manière d’atteindre le meilleur état de santé possible, a relevé M. Ahmadov. Il a néanmoins constaté qu’aux termes de l'article 2 du Pacte, chaque État partie « s'engage à agir, tant par son effort propre que par l'assistance et la coopération internationales, notamment sur les plans économique et technique, au maximum de ses ressources disponibles [en vue d’assurer progressivement le plein exercice des droits reconnus dans le présent Pacte]».

De même, aux termes notamment de la Déclaration d’Alma Ata sur les soins de santé primaires, les États parties doivent reconnaître le rôle essentiel de la coopération internationale et l’importance d'agir conjointement pour assurer la pleine réalisation du droit à la santé. En outre, étant donné que certaines maladies sont facilement transmissibles au-delà des frontières d'un État, la communauté internationale a la responsabilité collective de s'attaquer à ce problème. Les États parties économiquement développés ont la responsabilité et l'intérêt particuliers d'aider les États en développement plus pauvres à cet égard, a noté M. Ahmadov.

MME ATTIYA WARIS, Experte indépendante chargée d’examiner les effets de la dette extérieure et des obligations financières internationales connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels, a estimé qu’après la mise au point réussie de vaccins, il y a plus d'un an, on aurait pu faire beaucoup plus pour garantir que les agents de santé ou les personnes susceptibles de développer une forme grave de maladie soient rapidement vaccinés dans le monde entier.

Or, on constate au contraire des retards dans la levée des protections des droits de propriété intellectuelle, et dans le partage des technologies et du savoir-faire avec les fabricants du Sud – autant de mesures qui pourraient garantir un accès plus rapide aux vaccins. Ces retards assurent des milliards de dollars de bénéfices à une poignée de sociétés pharmaceutiques et découragent le développement de solutions de fabrication plus localisées et plus efficaces qui auraient pu atteindre plus rapidement les personnes dans le besoin, a souligné Mme Waris.

Dans un rapport, Amnesty International indique que, parmi tous les fabricants de vaccins analysés, seuls Johnson & Johnson et AstraZeneca ont mis plus de 50% de leur stock à la disposition des pays à revenu faible ou intermédiaire, le plus souvent sous forme de dons de pays à revenu élevé plutôt que de ventes. Toutes les autres entreprises incluses dans ce rapport ont donné la priorité aux profits et ont vendu aux plus offrants, a regretté l’Experte indépendante.

Une solution possible pourrait être de lutter contre les flux financiers illicites, y compris l'évasion fiscale, a suggéré l’experte. En effet, selon de estimations, les pays perdent quelque 483 milliards de dollars d'impôts par an en raison d’abus fiscaux, à l'échelle mondiale, de la part de sociétés multinationales et de particuliers fortunés : cette somme suffirait à vacciner entièrement la population mondiale contre la COVID-19 plus de trois fois, a indiqué l’Experte.

M. THOMAS CUENI, Directeur général de la Fédération internationale des fabricants et associations pharmaceutiques mondiaux (IFPMA), a assuré que, conscientes de leur responsabilité envers les patients et la société, les entreprises pharmaceutiques, grandes et petites, des pays développés et en développement, se sont engagées, dès les premiers jours de la pandémie, dans une collaboration sans précédent pour trouver des solutions à la COVID-19. Ces efforts collectifs ont été partiellement couronnés de succès, notamment avec le développement d'un vaccin en un peu moins d'un an – ce qui est très peu –, avec toutefois un échec en ce qui concerne l’accès équitable, a indiqué M. Cueni.

M. Cueni a ajouté que plus de 80% des vaccins COVAX étaient venus de quatre entreprises et que trois milliards de doses avaient été livrées à des pays à revenu faible et intermédiaire. « Les vaccins ne sont plus le problème : le problème, c’est la vaccination », a estimé l’intervenant. Il faut faire en sorte que les vaccins disponibles soient injectés et l’industrie est engagée à intensifier son action, avec des organisations telles que l’UNICEF et le GAVI (l’Alliance du Vaccin), pour déployer les doses de vaccins.

Parallèlement, plusieurs fabricants se sont engagés à développer des capacités de production en Afrique : Moderna a ainsi annoncé investir pour fabriquer 500 millions de doses au Kenya. « Plus de la moitié des vaccins ont été fabriqués en Inde et en Chine et on a vu une coopération sans précédent avec les fabricants de vaccins des pays en voie de développement », a précisé M. Cueni.

Pour ce qui est de la question des brevets, M. Cueni a recommandé de ne pas sous-estimer la complexité de la fabrication de vaccins – trois des plus grandes sociétés pharmaceutiques ont échoué à cet égard, a-t-il rappelé. D’ailleurs, il faut aller bien au-delà des partages de brevets, a dit M. Cueni, qui a recommandé des partages de connaissances et la formation de personnels qualifiés.

Enfin, pour la préparation aux pandémies futures, il faudra veiller à ce que le COVAX, ou son successeur, dispose d’emblée des moyens nécessaires pour acheter des vaccins rapidement ; et il faudra en outre mettre en place des capacités de fabrication, a conclu M. Cueni.

Enfin, MME GITA SEN, Coordonnatrice générale de Development Alternatives with Women for a New Era (DAWN), a posé plusieurs constats. D’abord, l'augmentation de l'extrême pauvreté dans les pays à revenu faible et moyen a fait reculer les progrès d'une décennie, avec la diminution des emplois et des revenus. Ensuite, le taux de létalité des infections dans ces pays est deux fois plus élevé que dans les pays à revenu élevé, a-t-elle observé. Enfin, a-t-elle relevé, les grandes entreprises pharmaceutiques et leurs alliés refusent aux pays et aux populations pauvres l’accès complet non seulement aux vaccins mais aussi aux tests, aux thérapeutiques, aux équipements.

Mme Sen a mis en cause la mainmise sur les droits de propriété intellectuelle de la part des grandes entreprises pharmaceutiques, axées sur le profit. Elle a plaidé pour la renonciation aux ADPIC – une mesure demandée par l'Afrique du Sud et l'Inde et maintenant soutenue par plus de cent pays –, ainsi que pour la levée des politiques d'austérité et du fardeau de la dette.

M. FEDERICO VILLEGAS, Président du Conseil des droits de l’homme, a voulu savoir quel avait été le rôle des États pour encourager les entreprises privées à développer des vaccins très rapidement, et quel avait été le rôle de l’OMS pour simplifier les procédures de validation des vaccins.

Aperçu du débat

De très nombreuses délégations ont relevé avec « inquiétude » et « vive préoccupation » le manque de coopération et de solidarité internationales en ce qui concerne la lutte contre la pandémie. Les pays les plus pauvres n’ont pas eu accès équitablement aux vaccins, a-t-il été souligné. En Afrique, a illustré un groupe de pays, seulement 10% de la population a achevé son cycle complet de vaccination. L’objection de l’OMS de parvenir à 70% de personnes vaccinées dans le monde au cours de cette année reste « difficile » à atteindre, a déploré ce groupe de pays.

Nombre de délégations ont relevé que cette situation se produit alors même que les pays riches font campagne et s’orientent vers une quatrième dose et jettent même des milliards de doses parce qu’elles sont périmées. Le nationalisme vaccinal, le stockage au-delà du légitime et le blocage des brevets ne peuvent être justifiés, a-t-il été souligné. Pour de nombreuses délégations, cette inégalité entre pays riches et pauvres ne pourra être réglée que par une redistribution universelle, juste, équitable et abordable des vaccins, y compris au travers du mécanisme COVAX. L’accès universel aux vaccins contre la COVID-19 est absolument « essentiel » pour défendre le droit à la vie et garantir une relance économique mondial, a-t-on insisté.

Pour nombre de délégations, l’accès aux vaccins ne devrait être qu’une étape ; au-delà, ce qu’il faut, c’est renforcer les capacités des pays vulnérables à produire les vaccins, ont-elles souligné, expliquant que cela peut se réaliser par la construction d’unités de production locales, ou par le transfert de technologie, non seulement pour les vaccins, mais aussi pour les tests et les médicaments. Dans ce contexte, a été soutenue l’initiative de l’Inde et de l’Afrique du Sud visant à revoir les Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC). Des délégations se sont également prononcées en faveur d’un instrument juridiquement contraignant sur les pandémies, qui permettrait de déroger aux droits de propriété intellectuelle en temps de pandémie.

Au lieu de donner la priorité à la concurrence et au profit, les vaccins doivent être considérés comme un bien public mondial, a-t-il été indiqué. L’accès aux vaccins ne saurait relever de la charité, ni d’une discussion commerciale, a-t-il été affirmé. Il s’agit de protéger le droit à la vie et de faire preuve de solidarité et d’assistance mutuelle : la santé est un droit et une obligation morale, ont plaidé des délégations.

Tout en partageant le même constat global concernant l’inégalité d’accès aux vaccins, plusieurs délégations ont fait état de leurs contributions à divers plans bilatéraux et multilatéraux tels que le mécanisme COVAX. Deux délégations de pays en développement ont annoncé que leurs territoires accueilleraient bientôt des unités locales de fabrication de vaccins contre la COVID-19.

*Liste des intervenants : Espagne, Norvège (au nom des pays nordiques), Indonésie (au nom de l’Association des nations du Sud-Est asiatique - ANASE), Guyana, Côte d’Ivoire (au nom du Groupe africain), Équateur (au nom d’un groupe de pays), Brésil (au nom d’un groupe de pays), Union européenne, Azerbaïdjan (au nom du Mouvement des non-alignés), Pakistan (au nom de l’Organisation de la coopération islamique - OCI), Fidji, République arabe syrienne, Bangladesh, Allemagne, Sénégal, Belgique, Éthiopie, Japon, Chine, Arabie saoudite, Indonésie, Cambodge, Maroc, Haut-Commissariat aux droits de l'homme de la Fédération de Russie, APG XXIII , Emergency for life support in War, Centre d’Étude légales et sociales au nom d’un groupe d’organisations, Friends World committee for Consultations et CARITAS internationalis.

Réponses et remarques de conclusion des panélistes

M. AHMADOV a insisté sur l’importance de la coopération entre les États pour lutter contre les effets de la COVID-19. S’il existe des avis divergents quant à la portée des obligations découlant du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels s’agissant du droit à la santé, il n’en demeure pas moins constant que, parmi leurs obligations élémentaires, les États sont tenus d’agir pour concrétiser leurs obligations envers le droit fondamental à la santé, a répété M. Ahmadov.

MME WARIS s’est dite encouragée par les nombreuses actions prises par les pays pour lutter contre la pandémie. Mais, comme nous ne sommes pas encore revenus à la normale et que le risque de retomber dans une situation difficile existe toujours, il est essentiel que nous restions concentrés, a-t-elle souligné. La crise actuelle, a dit l’Experte indépendante, ne touche pas seulement à la santé : il faut aussi répondre à des questions fondamentales de légitimité, d’équité et de justice, et être prêts au compromis, qui est essentiel pour faire avancer les questions de santé. Mme Waris a demandé que l’on repense les questions lies à la dette, à ses conditions et à son remboursement.

Pour M. CUENI, il importe de ne pas oublier que la question est désormais d’obtenir le vaccin – qui existe – pour pouvoir immuniser les personnes qui en ont besoin. Le secteur privé s’est montré à la hauteur, notamment dans le cadre des partenariats innovants noués avec les États, a estimé M. Cueni. Il a aussi relevé que l’OMS avait joué dès le départ, et jouait toujours, un rôle important de surveillance des risques et de garantie de qualité des vaccins.

Enfin, MME SEN a constaté que, malgré les progrès techniques, malgré les dons de vaccins, malgré le COVAX, des inégalités extrêmes persistent dans l’accès aux vaccins. Il faut donc renoncer temporairement aux brevets et opérer de nouveaux transferts de technologie pour favoriser la montée en puissance de la production dans les pays à revenu inférieur et intermédiaire. Les droits de l’homme doivent passer avant le profit, a insisté Mme Sen.

Suite et fin du dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur la vente et l’exploitation sexuelle d’enfants

L’approche très pratique de la Rapporteuse spéciale s’agissant de la protection des enfants contre la vente et l'exploitation sexuelle a été saluée à plusieurs reprises pendant le débat.

Des délégations ont présenté les mesures prises par leur pays pour combattre la vente et l’exploitation d’enfants en ligne. Ont été mentionnées, par exemple, création d’unités spécialisées de la police ; la publication de listes publiques de criminels ; le développement de compétences pour prévenir la violence envers les enfants et les adolescents ; la mise en place de réseaux de protection des enfants contre la traite ; l’établissement de base de données ADN contre la traite des êtres humains ; ou encore l’élaboration de programmes de protection des enfants vivant dans la rue contre la violence.

Il a notamment été recommandé de prévoir un déclenchement automatique et systématique des poursuites, sans possibilité de s’y soustraire, dans les cas de viol.

Une délégation s’est enquise des changements qu’il conviendrait d’opérer au niveau du secteur privé pour pouvoir mieux lutter contre la vente et l'exploitation d'enfants en ligne. Une ONG a dénoncé la gestation pour autrui, estimant qu’il s’agissait d’une forme de vente d’enfants.

La communauté internationale a été appelée à agir pour mettre un terme à la vente et à l’exploitation des filles en Afghanistan et au Yémen. Une délégation a demandé ce qui pouvait être fait de plus pour lutter contre le trafic d'enfants à travers la Méditerranée à des fins de vente et d'exploitation sexuelle.

L'attaque aveugle de la Fédération de Russie contre des civils innocents en Ukraine a été jugée « ahurissante » : cette attaque a déjà produit plus de 1,7 million de réfugiés, dont la plupart sont des femmes et des enfants, a-t-il été relevé. Dans le même contexte, une ONG a demandé de prendre impérativement en compte les risques d’exploitation sexuelle, qui sont réels, car des groupes de criminels s’organisent au-delà des frontières ; les mineurs non accompagnés sont particulièrement vulnérables, a insisté cette ONG.

** Liste des intervenants : Namibie, Cameroun Pakistan Indonésie, Fédération de Russie, Bénin, Afrique du Sud, États-Unis, Belgique, Afghanistan, Royaume-Uni, Grèce, Botswana, Colombie, Géorgie, Malawi, Malte, Arabie saoudite, Maurice, Bangladesh, Tunisie, Iran, Gabon, Arménie, Conseil national des droits de l’homme du Maroc, Association d’entraide médicale Guinée ?, HatzeOir.org, Caritas Internationalis, Jubilee Campaign, International Organization for the Right to Education and Freedom of Education (OIDEL), APG23, China Society for Human Rights Studies et Promotion du développement économique et social.

Réponses et remarques de conclusion de la Rapporteuse spéciale

La Rapporteuse spéciale sur la vente et l’exploitation sexuelle d’enfants, MME MAMA FATIMA SINGHATEH, a précisé que son rapport, accessible et facile à lire, contenait une «check list» pour aider les États et autres acteurs à lutter contre la vente et l’exploitation sexuelle d’enfants. Si un cadre juridique solide est essentiel pour aider la police à combattre la violence en ligne, a ajouté la Rapporteuse spéciale, il faut aussi disposer de services et de fonctionnaires compétents et dotés en ressources suffisantes. Il importe, dans ce contexte, que la loi tienne compte des risques spécifiques auxquels sont exposés les filles, les garçons et les jeunes non binaires.

L’une des recommandations les plus importantes réside dans l’ouverture de lignes d’assistance téléphonique gratuites, pour que les gens sachent vers qui s’adresser en cas de problème, a souligné Mme Singhateh. Un autre volet important est celui de l’information et de la sensibilisation sur le risque d’exploitation et de traite d’enfants, a-t-elle ajouté.

La Rapporteuse spéciale a insisté sur l’importance des services devant être offerts aux victimes – services dont une liste figure en annexe de son rapport, a-t-elle indiqué.

 

Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel.

Les versions anglaise et française de nos communiqués sont différentes car elles sont le produit de deux équipes de couverture distinctes qui travaillent indépendamment.

 

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