LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT POURSUIT UN DÉBAT SUR LA CRÉATION D'ORGANES SUBSIDIAIRES ET DE COORDONNATEURS SPÉCIAUX
La Conférence du désarmement a poursuivi, ce matin, l'examen d'un projet de programme de travail pour 2019 présenté par son Président, l'ambassadeur M. Aidan Liddle du Royaume‑Uni.
Le Président a déclaré que les consultations à ce jour montraient que les délégations estimaient avant tout que les sujets abordés par les organes subsidiaires qu'il est envisagé de créer doivent être plus étroitement liés à l'ordre du jour de la Conférence. Il sera aussi nécessaire de préciser le mandat de coordonnateurs spéciaux. En fin de séance, il a indiqué qu'il ferait de son mieux pour produire un projet de programme de travail susceptible de recueillir le consensus et de structurer les travaux de manière à ce que la Conférence tienne des débats portant véritablement sur les questions de fond.
Le texte contenant une proposition de programme de travail soumis aux délégations par le Président prévoit la création de quatre organes subsidiaires chargés des questions suivantes: désarmement nucléaire; matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires ou autres dispositifs explosifs nucléaires; prévention d'une course aux armements dans l'espace; et arrangements internationaux efficaces pour garantir les États non dotés d'armes nucléaires contre l'emploi ou la menace de ces armes. Le projet précise que le but des organes subsidiaires serait notamment d'envisager des mesures efficaces, y compris des instruments juridiques pour des négociations et d'approfondir les discussions techniques. Le texte prévoit aussi la nomination de coordonnateurs sur chacun de ces points et propose que la Conférence nomme un coordonnateur spécial chargé des questions émergentes et des nouvelles technologies, ainsi qu'une «troïka» de coordonnateurs chargés des méthodes de travail et de l'élargissement de la composition de la Conférence.
Au cours des échanges, plusieurs délégations ont estimé qu'il fallait décrire de manière détaillée les tâches de chaque organe subsidiaire envisagé, de manière à parvenir à un meilleur résultat que l'an dernier. Une délégation a souligné l'importance de veiller à l'équilibre, à la diversité et à la parité entre les sexes parmi les coordonnateurs et les présidents d'organes subsidiaires. Plusieurs intervenants se sont opposés à des suggestions faites ce matin de prendre deux décisions séparées, l'une concernant la création des organes subsidiaires, l'autre la nomination des coordonnateurs.
Les délégations suivantes ont pris part au débat: Venezuela, États-Unis, Ukraine, Brésil, Argentine, Canada, Viet Nam, Fédération de Russie, Australie, Chine, France et Japon. La Colombie a pour sa part fait une déclaration sur la position de son pays s'agissant des questions de fond dont est saisie la Conférence.
Ce matin, la Conférence a par ailleurs accepté les demandes faites par Bahreïn et la République de Macédoine du Nord de participer à ses travaux en tant qu'observateurs.
La Conférence doit poursuivre le débat sur le projet de programme de travail dans le cadre d'une séance informelle qui se tiendra le jeudi 7 mars à 10 heures. La prochaine réunion plénière publique de la Conférence sera annoncée ultérieurement.
Déclaration
La Colombie a rappelé sa position au sujet des différents points de l'ordre du jour de la Conférence. Ainsi, la Colombie plaide pour un désarmement complet, appuyé par la création de zones exemptes d'armes nucléaires ainsi que la mise en place de synergies et processus complémentaires. La Colombie est également favorable à la négociation d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins militaires, qui serait une étape essentielle vers le désarmement nucléaire et l'élimination des armes nucléaires. La Colombie estime par ailleurs que l'exploration de l'espace doit poursuivre des buts exclusivement pacifiques. Pour ce faire, elle juge nécessaire d'introduire des mesures de confiance et des normes de comportement responsable, notamment la prise d'engagements unilatéraux par lesquels les États s'engagent à ne pas être les premiers à déployer des armes dans l'espace extra-atmosphérique. Quant aux garanties négatives de sécurité, elles constituent un objectif international de désarmement nucléaire et de non-prolifération.
S'agissant des questions de procédure, la Colombie juge nécessaire d'élargir la composition de la Conférence tout en soulignant que le consensus ne doit pas être utilisé comme une forme de veto. La Colombie a enfin a déclaré qu'elle continuerait de travailler activement avec le Président s'agissant de son projet révisé de programme de travail, et s'est dite convaincue qu'il reflèterait les points de vue exprimés par les délégations pendant les consultations.
Examen du programme de travail
Le Président de la Conférence, M. AIDAN LIDDLE (Royaume-Uni), a remercié les délégations de leurs observations au sujet de son projet de programme de travail (distribué aux délégations le 21 février en tant que document de travail CD/WP.619). Les consultations à ce jour montrent, a dit le Président, que les délégations estiment avant tout que les sujets abordés par les organes subsidiaires qu'il est proposé de créer doivent être plus étroitement liés à l'ordre du jour de la Conférence. Il sera aussi nécessaire de préciser le mandat des coordonnateurs spéciaux et de faire preuve de souplesse dans la façon d'aborder le point relatif aux questions émergentes.
Le Venezuela a regretté que le contexte très politisé de la Conférence ne soit pas propice à la réalisation du mandat de négociation de la Conférence. Le Venezuela a ensuite proposé que le projet de programme de travail mentionne les rapports adoptés par les organes subsidiaires en 2018. Il a regretté que le projet ne prévoie pas d'organe subsidiaire chargé des questions émergentes et des nouvelles technologies et que l'on ne connaisse pas les mécanismes envisagés pour l'organisation des réunions des coordonnateurs spéciaux. À cet égard, le Venezuela souhaite des garanties sur le caractère inclusif et transparent de ces réunions.
Le Venezuela a par ailleurs plaidé pour un élargissement de la composition de la Conférence mais a mis en garde contre toute modification procédurale qui aurait pour but de supprimer le principe de présidence tournante. Il dénonce le manque de volonté politique de certains États, peu désireux de voir la Conférence adopter un programme de travail. Le Venezuela a enfin recommandé de prendre deux décisions successives au moment d'adopter le projet, une première décision concernant la création des organes subsidiaires, l'autre la nomination des coordonnateurs.
Les États-Unis se sont dits opposés à toute tentative de séparer en deux décisions les propositions du Président. Remarquant que certaines délégations sont réticentes à l'idée de discuter de la composition et des méthodes de travail de la Conférence, les États-Unis ont rappelé que le règlement intérieur imposait un examen périodique de la composition de la Conférence. Les États-Unis souhaitent que la Conférence accepte la proposition du Président «en bloc».
L'Ukraine a salué la démarche choisie par le Président, estimant qu'elle s'inscrivait dans le prolongement de celle retenue par la présidence ukrainienne au début de la session de 2019.
Le Brésil s'est dit d'accord avec la manière dont le Président entendait réviser son projet de programme de travail. Il a recommandé que soit décrit de manière détaillée le travail de chaque organe subsidiaire, en veillant à aller au-delà de ce qui a été obtenu l'an dernier.
L'Argentine a insisté sur l'importance de ne pas diviser l'ordre du jour de la Conférence en plusieurs parties. Elle estime par ailleurs qu'il faut modifier les méthodes de travail pour parvenir à des résultats. Elle a constaté qu'aucune délégation n'avait proposé de méthode démocratique pour élargir la composition de la Conférence.
Le Canada a souligné l'importance de veiller à l'équilibre, à la diversité et à la parité entre les sexes parmi les coordonnateurs et les présidents d'organes subsidiaires.
Le Viet Nam s'est félicité du succès rencontré par le débat de haut niveau organisé par la Conférence du désarmement au cours de la première moitié de la semaine dernière et qui a témoigné des attentes de la communauté internationale dans le domaine du désarmement. Il a dit attendre avec intérêt l'adoption du projet révisé de programme de travail, ce qui marquerait un progrès important vers la reprise des travaux de fond. Le Viet Nam a cité le Secrétaire général des Nations Unies qui avait déclaré, au cours du débat de haut niveau, que «la Conférence sera évaluée surtout en fonction de ses résultats».
La Fédération de Russie a estimé que le projet présenté par le Président constituait une bonne base pour continuer d'examiner l'ordre du jour et pour rechercher des points communs en vue d'un accord sur le programme de travail. Elle a recommandé que le préambule du projet mentionne le lien indissociable entre les organes subsidiaires et les tâches futures prévues par le programme de travail et proposé de regrouper les points de l'ordre du jour par grands thèmes. La Fédération de Russie a estimé, d'autre part, que le mandat du coordonnateur spécial sur les méthodes de travail devait être précisé. Le règlement intérieur ne parle pas d'élargissement de la Conférence, a aussi fait observer la Fédération de Russie. Elle a par ailleurs estimé que la tentative de « tout mettre dans un même paquet » serait vouée à l'échec.
L'Australie a déclaré que le projet de programme devait être considéré comme un tout. Elle a aussi plaidé pour une certaine souplesse dans la recherche d'une solution.
La Chine a dit attendre la version révisée du projet de programme de travail qui, a-t-elle espéré, tiendra compte de tous les points de vue exprimés – surtout les points de vue divergents. Elle a prié M. Liddle d'accélérer le rythme de travail étant donné que sa présidence s'achève déjà la semaine prochaine.
Le Président a annoncé avoir l'intention de convoquer la Conférence en séance plénière informelle le jeudi 7 février en vue de faire adopter le projet de programme de travail avant la fin de sa présidence.
Pour la France, il serait utile de renforcer le lien entre les travaux des organes subsidiaires et la construction d'un consensus en faveur d'un programme de travail qui permettrait enfin à la Conférence de renouer avec son mandat de négociation d'accords de désarmement. À ce propos, la France s'est dite très attachée à la négociation rapide, par la Conférence, d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles. La France a d'autre part appuyé, comme le Canada, tout ce qui irait dans le sens d'une plus grande parité parmi les présidents des organes subsidiaires. Le représentant français a regretté les tentatives de dissocier les travaux de fond des interrogations sur la procédure, la composition et le fonctionnement de la Conférence.
Quant à la proposition de regrouper plusieurs points de l'ordre du jour, la France souligne qu'elle risquerait d'empêcher tout progrès sur chacun des domaines concernés: cessation de la course aux armements nucléaires et désarmement nucléaire; prévention de la guerre nucléaire; et arrangements pour garantir les États non dotés d'armes nucléaires contre l'emploi ou la menace de ces armes.
Le Japon a demandé que l'on accélère les travaux et que l'on se prononce sur le projet dans son ensemble, avec tous ses éléments.
La Fédération de Russie a relevé que ses propositions étaient très proches de la proposition de programme de travail pour laquelle l'immense majorité des participants étaient près de voter en 2017. Elle a dit ne pas avoir entendu d'argument convaincant contre ses propositions. La Fédération de Russie a, par ailleurs, demandé au Président s'il envisageait des candidatures de femmes en tant que coordonnatrices; et au Canada s'il était candidat à la présidence de l'organe subsidiaire relatif à la production de matières fissiles.
Le Président a répondu que la Conférence comptait en son sein un large éventail de talents et qu'il avait l'intention de distribuer une liste de candidats coordonnateurs.
Le Canada a rappelé que des femmes avaient présidé tant le groupe d'experts que le groupe préparatoire sur le traité d'interdiction de la production de matières fissiles.
Le Mexique a remercié le Président d'avoir tenu compte des observations des États membres pendant les consultations. Le travail des organes subsidiaires a pour but de faire sortir la Conférence de l'ornière en trouvant des éléments à même de faire l'objet de négociations, a rappelé le Mexique.
Le Président de la Conférence du désarmement a remercié les délégations pour leurs observations et a déclaré que le Royaume-Uni s'efforcerait de prendre en compte autant de points que possible lors de la révision du projet de texte, d’autant plus que certains des points soulevés ne sont pas compatibles entre eux. Le Royaume-Uni fera de son mieux pour produire un texte susceptible de susciter le consensus et de structurer les travaux de manière à permettre des débats portant véritablement sur les questions de fond pour le reste de la session de cette année.
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DC/19/17F