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LE FORUM SUR LA GOUVERNANCE D’INTERNET TIENT UN DÉBAT DE HAUT NIVEAU SUR l’AVENIR DE LA GOUVERNANCE NUMÉRIQUE MONDIALE

Communiqué de presse
Openness, Confidence and Trust, Digital Skills for All, and Human-Centred Internet Values Feature in Leaders’ Visions of Future Digital Governance

Le Forum sur la gouvernance d’Internet a tenu cet après-midi, au Palais des Nations de Genève, un débat de haut niveau qui avait pour thème : « Donner forme à la gouvernance numérique de demain ». Présidé par Nathalie Ducommun, journaliste à la Radio Télévision Suisse (RTS), le débat a notamment bénéficié de la participation de la Présidente de la Confédération suisse, du Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales des Nations Unies, de la Commissaire européenne à l’économie et à la société numérique et de plusieurs représentants de gouvernements, d’organisations internationales et de la société civile.

La Présidente de la Confédération suisse, Mme Doris Leuthard, a regretté qu’il y ait tant de « fake news » (fausses nouvelles) sur Internet et a déploré les nombreuses cyberattaques à l’encontre des entreprises. Ces phénomènes peuvent avoir des conséquences néfastes sur la confiance de la population en Internet; il y a beaucoup à faire dans ce domaine, a-t-elle souligné, avant de souhaiter que ce Forum puisse élaborer les grandes lignes de la Gouvernance d’Internet.

M. Liu Zhenmin a pour sa part souligné qu'il fallait des institutions pour mettre en œuvre la gouvernance d’Internet. Pour le bien-être de l’être humain, il est temps maintenant de réguler Internet, a affirmé le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales.

M. Masahiko Tominaga, Ministre adjoint chargé de la coordination politique au Ministère de l'intérieur et des communications du Japon, a expliqué que l’ampleur d’Internet allait bien au-delà des révolutions précédentes. Il faut dès lors permettre une discussion qui vise à trouver une feuille de route pour aboutir à une meilleure gouvernance numérique harmonisée. Il est important d’avoir une approche multipartite dans ce domaine, a-t-il insisté. C’est aussi l’avis de Mme Kathy Brown, Présidente d'Internet Society, qui a souligné que pour aboutir à une gouvernance d’Internet, il fallait s’engager en faveur d'un modèle multipartite avec une approche multidisciplinaire. Ce n’est pourtant pas ce qui se passe aujourd’hui, a-t-elle déploré, appelant à bien réfléchir avant de prendre des décisions.

Mme Anriette Esterhuysen, Directrice de la stratégie et de la politique globale de l’Association for Progressive Communications, a expliqué qu’Internet ne fait que refléter le monde tel qu’il est: inégal, rempli de violence et d’incompréhension. Il faut reconnaître que ce n’est pas le réseau en qui nous n'avons pas confiance, mais en nous-mêmes et aux autres, a-t-elle expliqué, avant d'insister sur la nécessité de créer un cadre basé sur des principes respectueux de l’intégrité de l’Internet et des droits de l’homme. Il faut des normes et des règles qui permettent d’assurer un espace plus ouvert d’Internet, a-t-elle ajouté.

M. Houlin Zhao, Secrétaire général de l’Union internationale des télécommunications (UIT), a évoqué les quatre « i » concernant le futur des technologies de l’information et de la communication (TIC). Le premier c’est le « i » d’infrastructures, qui est nécessaire pour permettre à tout le monde d’être connecté. Il y a ensuite l’investissement: il faut en effet investir davantage dans le domaine de la gouvernance. Mais l’argent ne suffit pas; il faut aussi l’innovation, qui est donc le troisième « i ». Enfin, le dernier « i » est celui de l’inclusivité, car il faut veiller à ce que les TIC soient bénéfiques pour tous et que personne ne soit laissé pour compte.

Mme Mariya Gabriel, Commissaire européenne à l’économie et la société numériques, a expliqué que l’Internet du futur doit continuer à être un Internet des valeurs, c’est-à-dire libre, inclusif et ouvert, mais aussi plus transparent et plus digne de confiance. Il faut œuvrer pour que les nouvelles technologies soient perçues par les citoyens comme une opportunité et non pas comme une menace, a-t-elle souligné.

Toujours s’agissant de l’avenir de la gouvernance mondiale d’Internet, M. Eric Loeb, Vice-Président de l’opérateur AT&T, aux États-Unis, et membre de la Chambre de commerce internationale, a insisté sur le potentiel des technologies, telles que la réalité virtuelle et d’autres outils de collaboration en ligne, pour permettre à tous, y compris aux personnes handicapées, de prendre part aux débats qui les concernent. Pour l'un des créateurs d'Internet, M. Vint Cerf, de Google, si le Forum remplit sa mission, Internet en 2027 devrait être plus fiable et les internautes devraient être plus compétents pour évaluer les contenus qu’ils consultent. Il faudra absolument éviter la fragmentation d’Internet, a-t-il mis en garde.

M. Hasanul Haq Inu, Ministre de l'information du Bangladesh, a rappelé pour sa part que les trois quarts de la population mondiale ne sont pas connectés à Internet. Il a proposé aux Nations Unies d’adopter un traité sur le cyberespace, ainsi qu'une déclaration universelle sur Internet en tant que droit fondamental. Des plans d’action devraient aussi être lancés en matière de formation et d’éducation et de suppression des obstacles au e-commerce, a suggéré M. Haq Inu. Mme Lakshmi Puri, Directrice exécutive adjointe d’ONU-Femmes, a demandé aux gouvernements d’accorder la priorité aux politiques d’égalité entre les sexes, et notamment aux mesures temporaires spéciales permettant aux femmes de participer à la gouvernance d’Internet et à Internet lui-même.

Par vidéo-conférence, M. Brad Smith, Président de la société Microsoft, a constaté que la technologie numérique était devenue un élément incontournable de notre vie quotidienne. Cette situation soulève beaucoup de questions s’agissant de la sécurité des personnes sur Internet. Dans ce domaine, Microsoft recommande aux États d’adopter une « convention de Genève numérique » et d’investir dans la formation et l’éducation.

Durant le débat qui a suivi ces propos liminaires des panélistes, il a été recommandé aux gouvernements de mettre l’accent sur la formation des jeunes aux compétences de base en matière d’Internet. Il a aussi été suggéré d’orienter la coopération pour le développement dans des projets de wifi gratuit pour tous, comme cela a été fait au Rwanda, étant donné que ce type d’investissements n’est pas assuré dans les programmes traditionnels. Cette dernière idée a été appuyée par plusieurs intervenants, qui ont souligné l’importance de disposer d’infrastructures numériques performantes pour concrétiser l’idée d’«alphabétisation numérique» et pour combler l’écart entre l’éducation et les exigences du monde du travail. Ici encore, la participation des femmes a été jugée cruciale, étant donné qu’elles constituent actuellement la majorité des personnes non connectées. Un panéliste a souligné que la concrétisation de ces principes exigeait des financements importants, qui manquent encore.

Le Ministre de l’information du Bangladesh a présenté les mesures prises par son Gouvernement, en collaboration avec le secteur privé, pour faciliter l’accès de toute la population à Internet et aux réseaux de téléphonie mobile. Les entreprises hésitent encore à investir dans les réseaux de fibre optique, a-t-il noté, avant de rappeler que le droit à l’accès à Internet était inscrit dans la Constitution de son pays. Le Ministre a en outre souligné qu’il fallait toujours arbitrer entre la défense de la liberté d’expression et la nécessaire protection de la sûreté publique.

Une panéliste a observé que si les pouvoirs publics ne pouvaient pas toujours se substituer à l’initiative privée, ils pouvaient cependant soutenir des initiatives en faveur de l’acquisition des compétences techniques nécessaires (comme le blockchain), en tant que catalyseurs du changement.

Une experte a recommandé de s’interroger sur le processus de décision en matière de gouvernance d’Internet; il n’est pas certain qu’il faille adopter de nouvelles lois, a-t-elle noté, plaidant pour le respect des instruments internationaux déjà existants et pour que les acteurs concernés rendent compte de la manière dont ils assument leurs responsabilités.

Des intervenants se sont quant à eux interrogés sur la capacité des lois de modifier les comportements relatifs à Internet et sur la volonté de la communauté internationale de protéger les intérêts numériques des générations à venir.

Un intervenant a voulu savoir quelles initiatives les gouvernements et les organisations intergouvernementales pouvaient prendre pour soutenir les militants des droits de l’homme en ligne.

Le Vice-Ministre des télécommunications de la Fédération de Russie a jugé utile de réfléchir dès maintenant aux moyens de remédier aux effets collatéraux de la numérisation, pour éviter de se trouver, dans dix ans, face à des situations impossibles à gérer. Les enjeux sont immenses et touchent tout un chacun; ils doivent faire l’objet d’une réflexion au plus niveau et en particulier au sein des Nations Unies, a affirmé le Vice-Ministre. Un représentant de l’ICANN a alors fait observer que c’était là la raison même de la nécessité d’impliquer toutes les personnes dans la gouvernance d’Internet. Une panéliste a pour sa part relevé que le Forum faisait bel et bien partie des Nations Unies et qu’il servait précisément à traiter des difficultés induites par la numérisation.

Répondant à la proposition de Microsoft de faire adopter une «convention de Genève numérique», des panélistes ont jugé nécessaire de s’assurer au préalable que tous les acteurs concernés poursuivent un même objectif et qu’ils partagent des valeurs communes. M. Cerf a souligné, à ce propos, que toute la difficulté consistait précisément à trouver des points de convergence; il s’est donc dit encouragé par la multiplication des réunions d’acteurs régionaux et nationaux concernés par la gouvernance d’Internet, parallèlement au Forum. Une panéliste a estimé que l’adoption d’un nouvel instrument international ne correspondait pas nécessairement aux aspirations des citoyens, qui ne souhaitent pas nécessairement que les gouvernements prennent toutes les décisions relatives à Internet.

Un représentant de la société civile a constaté qu’aucun gouvernement ne savait, au juste, quelles étaient les attentes de ses citoyens s’agissant d’Internet. En tout état de cause, a conclu le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales des Nations Unies, les six milliards de personnes qui seront en ligne d’ici à 2027 devront bénéficier de bonnes conditions de sécurité en ligne. Mme Puri a pour sa part jugé indispensable de réglementer Internet pour mieux combattre la violence contre les femmes.

En guise de conclusion, une panéliste a souligné qu’il fallait oser utiliser les outils du XXIe siècle pour mettre en œuvre les politiques. Un autre panéliste a souligné que la politique des petits pas allait permettre de trouver une solution globale à la gouvernance d’Internet. Internet doit permettre l’autonomisation des peuples et des femmes, a conclu un intervenant.

Le Forum sur la gouvernance d’Internet poursuivra ses travaux demain matin, à 10 heures, en salle XVII du Palais des Nations, en tenant notamment une séance thématique de haut niveau sur l’impact de la numérisation sur les politiques, la confiance du public et la démocratie.


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