Aller au contenu principal

LE COMITÉ POUR LA PROTECTION DES DROITS DES MIGRANTS EXAMINE LE RAPORT DU MEXIQUE

Communiqué de presse

Le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille a examiné hier après-midi et cet après-midi le rapport initial présenté par le Mexique sur les mesures prises par ce pays en application de la Convention internationale sur les droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Les observations finales sur ce rapport seront adoptées dans le cadre d'une séance privée et rendues publiques à la fin de la session, vendredi prochain.

Présentant le rapport de son pays, Mme María del Refugio González, Sous-Secrétaire aux affaires multilatérales et aux droits de l'homme au Ministère des relations extérieures du Mexique, a indiqué que, dans le cadre de la protection des droits de l'homme des travailleurs migrants, le Mexique s'inspire d'une nouvelle culture du travail qui entend promouvoir le travail comme expression de la dignité humaine et comme moyen d'épanouissement propice à l'élévation du niveau de vie de la personne et des membres de sa famille. À cet égard, le Mexique a cherché des arrangements avec les pays d'Amérique centrale afin de parvenir à de meilleures conditions d'emploi pour les travailleurs migrants. Des mesures ont en outre été prises afin d'assurer que les mécanismes d'administration de la justice soient accessibles à tous, indépendamment de la situation migratoire.

M. Raul Cueto, de l'Institut national des migrations du Mexique, a pour sa part rappelé que le Mexique est le pays qui fournit le plus grand contingent de migrants aux États-Unis.. On estime aujourd'hui à 10,6 millions le nombre de migrants mexicains nés au Mexique vivant aux États-Unis, dont 6,2 millions sont sans papiers, a-t-il précisé. Face à cet énorme défi, les autorités d'immigration travaillent en permanence à la promotion et à la protection des droits des migrants aux États-Unis. Le Mexique est également confronté au défi que constitue la croissance du transit de migrants qui traversent le territoire mexicain sans papiers afin de se rendre aux États-Unis. En 2005, les autorités mexicaines ont rapatrié près d'un quart de million de migrants, originaires en grande majorité d'Amérique centrale.

Présentant des observations préliminaires au sujet de la mise en œuvre de la Convention au Mexique, Mme Ana Elizabeth Cubías Medina, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport mexicain, a notamment salué les efforts déployés par le Gouvernement pour s'adapter à l'évolution de la situation en matière de migrations. Elle a toutefois jugé préoccupant que des autorités non compétentes s'arrogent des pouvoirs de rétention de migrants. Il conviendrait en outre, de l'avis de Mme Cubías Medina, de rejeter la pratique consistant à habiliter des prisons à faire office de centres de migration.

La délégation mexicaine était notamment composée de représentants de l'Institut national des migrations; du Ministère du travail et de la planification sociale; du Ministère des relations extérieures; et de la Mission permanente du Mexique auprès des Nations Unies à Genève. Elle a fourni aux experts des compléments d'information s'agissant, entre autres, de la lutte contre la traite de personnes; de l'accès des travailleurs migrants aux droits syndicaux; ainsi que de la question des réserves à la Convention. Un représentant de la Commission nationale des droits de l'homme du Mexique a également participé aux débats.


Le Comité tiendra sa prochaine séance publique demain après-midi, à 15 heures, pour examiner diverses questions relatives, notamment, à la situation en matière de présentation des rapports et à la promotion de la Convention.

Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays, MME MARÍA DEL REFUGIO GONZÁLEZ, Sous-Secrétaire aux affaires multilatérales et aux droits de l'homme au Ministère des relations extérieures du Mexique, a déclaré que les changements intervenus récemment sur la scène internationale témoignent que nous sommes dans le siècle des migrations, a-t-elle poursuivi. Cela signifie que les États doivent actualiser leurs politiques dans ce domaine. Or aucun État ne peut relever seul ce défi; il convient donc de renforcer les liens de coopération et de reconnaître les responsabilités partagées de tous. Le Mexique a revu les objectifs et priorités de sa politique extérieure, reconnaissant les droits de l'homme comme valeurs universelles, intégrées, absolues et inhérentes à la personne, a ajouté Mme González.

Dans le cadre de la protection des droits de l'homme des travailleurs migrants Mme González a souligné que le Mexique s'inspire d'une nouvelle culture du travail qui entend promouvoir le travail comme expression de la dignité humaine et comme moyen d'épanouissement propice à l'élévation du niveau de vie de la personne et des membres de sa famille. À cet égard, le Mexique a cherché des arrangements avec les pays d'Amérique centrale afin de parvenir à de meilleures conditions d'emploi pour les travailleurs migrants; ont en outre été prises des mesures afin d'assurer que les mécanismes d'administration de la justice soient accessibles à tous, indépendamment de la situation migratoire.

Le Mexique a consenti d'importants efforts pour s'acquitter de ses obligations découlant de la Convention, a affirmé Mme González. Le Gouvernement n'en est pas moins conscient qu'il reste encore beaucoup à faire pour garantir pleinement la jouissance des droits de l'homme des migrants au Mexique, a-t-elle conclu.

Complétant cette présentation, M. RAUL CUETO, de l'Institut national des migrations du Mexique, a assuré que les autorités mexicaines accueilleront avec beaucoup d'intérêt les observations et recommandations du Comité concernant les questions relatives aux droits des migrants. Il a indiqué que l'objectif fondamental du Mexique dans ce domaine, à moyen et long termes, consiste à mettre sur pied un programme complet, au niveau de l'État, face au phénomène migratoire et à jeter les bases d'un politique migratoire intégrale à la frontière sud du Mexique. Le Mexique a mis en place des programmes sociaux, économiques et politiques afin d'appuyer les migrants et de garantir leurs droits, a poursuivi M. Cueto. Le pays a également promu et adopté des accords internationaux bilatéraux et multilatéraux afin de protéger les droits des migrants et de leurs familles.
Le Mexique est à la fois un pays d'origine, de transit et de destination des migrants, a rappelé M. Cueto. C'est le pays qui fournit le plus grand contingent de migrants aux États-Unis, transférant vers les États-Unis, de façon permanente, la main-d'œuvre et le talent d'environ 400 000 Mexicains chaque année. On estime aujourd'hui à 10,6 millions le nombre de migrants mexicains nés au Mexique vivant aux États-Unis, dont 6,2 millions sont sans papiers, a précisé M. Cueto. Face à cet énorme défi, les autorités d'immigration, en coordination avec le Ministère des relations extérieures, travaillent en permanence à la promotion et à la protection des droits des migrants aux États-Unis, afin de leur garantir un accès aux services médicaux, aux bénéfices sociaux, à la justice, à des procédures judiciaires équitables et, bien entendu, à l'assistance consulaire. Conformément au principe de responsabilité partagée, les accords que le Mexique a passés avec les États-Unis en vue du rapatriement digne, sûr et ordonné des ressortissants mexicains comportent un volet spécifiquement consacré à la protection des droits des groupes vulnérables, ainsi qu'à l'unité familiale. Entre janvier et juin 2006, 330 562 cas de rapatriement de Mexicains ont été enregistrés, a précisé M. Cueto.

Le représentant mexicain a en outre rappelé que le Mexique est également confronté au défi que constitue la croissance du transit de migrants qui traversent le territoire mexicain sans papiers afin de se rendre aux États-Unis. En 2005, les autorités mexicaines ont rapatrié près d'un quart de million de migrants, originaires en grande majorité d'Amérique centrale. Le 5 mai dernier, a indiqué M. Cueto, un accord de rapatriement a été signé avec le Honduras, le Nicaragua, El Salvador et le Guatemala.

M. Cueto a ensuite attiré l'attention sur le travail réalisé par les groupes de protection des migrants, ou groupes «Beta». Le Mexique dispose de 12 groupes de ce type à la frontière nord et de 4 à la frontière sud; ils ont pour principales fonctions la promotion et la protection des droits des migrants, quelles que soient leur nationalité ou leur condition migratoire. En 2005, ces groupes ont pris en charge 5839 migrants en situation de risque, a précisé M. Cueto.

Le Mexique a également avancé en matière de prévention et de poursuite de la traite de personnes, a par ailleurs fait valoir M. Cueto. Très récemment, l'Institut national des migrations a mis en place les facilités migratoires nécessaires pour que les victimes de la traite puissent rester légalement au Mexique et accéder aux ressources financières et juridiques nécessaires.

Le Mexique reconnaît l'apport important des migrants disposant de papiers d'identité et offre aux étrangers la possibilité de régulariser leur situation migratoire dans le pays, a déclaré M. Cueto. Depuis le 1er septembre 2005, un vaste programme de régularisation a été lancé qui a bénéficié à plus de 2800 migrants, dont la majorité provenaient du Guatemala, a-t-il précisé. Il a fait part de l'engagement du Mexique en faveur de l'identification de nouvelles formules et de mécanismes novateurs de coopération internationale permettant d'appuyer les efforts déployés au niveau national afin d'appréhender, de manière cohérente, le phénomène migratoire.

Le rapport initial du Mexique (CMW/C/MEX/1) rappelle que la Convention, signée par le Mexique en 1991 et ratifiée en 1999, est entrée en vigueur dans le pays en juillet 2003. La Convention fait partie de la législation nationale et peut servir de fondement à toute action légale. L'immigration est au centre des préoccupations du programme de politique intérieure et extérieure du gouvernement actuel, ajoute le rapport. Il indique notamment que le réseau consulaire mexicain aux États-Unis pour la protection des ressortissants mexicains organise les programmes suivants: programme de conseillers juridiques extérieurs; programme d'aide juridictionnelle pour les Mexicains condamnés à la peine de mort; programme interinstitutionnel de prise en charge des mineurs frontaliers; programme de protection préventive; programme du consulat mobile. Le rapport précise que depuis 1996, le Ministère des relations extérieures participe au programme interinstitutionnel de prise en charge des mineurs frontaliers, conjointement avec l'Institut national des migrations (INM) et le Système national pour le développement intégral de la famille (DIF). Jusqu'à présent, environ 114 000 mineurs non accompagnés détenus par les autorités d'immigration américaines ont été rapatriés. Ce programme permet aux consulats mexicains de la frontière de s'occuper du rapatriement des mineurs non accompagnés, qui sont dirigés vers les bureaux du DIF des États.

Le Mexique participe à un phénomène migratoire multidimensionnel, poursuit le rapport, puisque c'est un pays d'origine, de transit et de destination des migrants. Les migrations à destination du Mexique ne sont pas très importantes. Les données du recensement de 1990 indiquent pour cette année-là la présence au Mexique d'environ 340 000 étrangers, soit 0,42% de la population totale. Une grande majorité des migrants proviennent des États-Unis (69%), puis d'Amérique centrale (9%). Le programme de stabilisation migratoire des Guatémaltèques a permis entre 1996 et 2003 à 25 196 d'entre eux de rester afin de devenir résidents permanents au Mexique. Le nombre d'étrangers qui entrent au Mexique avec le statut d'immigrants ou d'immigrés, c'est-à-dire de résidents permanents, tend à rester stable, variant de 60 000 à 70 000 entrées par an au cours de ces 15 dernières années.

L'émigration mexicaine, qui se dirige principalement vers les États-Unis, est depuis le début principalement motivée par la recherche d'un emploi, poursuit le rapport. Il fait état d'une augmentation notable du flux net annuel de Mexicains émigrant aux États-Unis pour y établir leur résidence, passant de 235 000 de 1980 à 1990 à 390 000 de 2000 à 2002. Près de 85% des émigrants mexicains aux États-Unis y résident depuis plus de trois ans et seulement un émigrant sur cinq s'est fait naturaliser. La population mexicaine aux États-Unis s'est pratiquement multipliée par trois entre 1980 et 2003, passant d'environ 9 millions à 26,7 millions. Les 6,4 millions de Mexicains qui travaillent aux États-Unis représentent 4,4% de la population active de ce pays, ajoute le rapport. Pendant la période 2001-2003, souligne-t-il, la migration temporaire était souvent clandestine, étant donné que 75% des émigrants ne disposaient pas d'autorisation pour traverser la frontière et que 79% n'avaient pas de permis pour travailler aux États-Unis. Indépendamment de cela, 82% de ces migrants avaient un emploi pendant cette période. Les Mexicains résidant aux États-Unis ont renvoyé au Mexique un montant record de 13,265 milliards de dollars en 2003 et plus de 16 milliards de dollars en 2004, faisant des transferts de fonds la deuxième source de recettes extérieures du Mexique.

Il convient de préciser qu'afin d'éviter de tomber dans un cadre pénal, ce n'est pas le terme détention qui est utilisé au Mexique en matière de migration, mais celui d' «aseguramiento» (rétention administrative), qui décrit, selon la loi démographique générale (LDG), la situation d'un étranger en situation irrégulière dans le pays hébergé dans un centre d'accueil des migrants de manière temporaire, afin de préciser son statut migratoire, et en attendant la décision d'un éventuel refoulement. Les indicateurs montrent que les flux migratoires irréguliers comprennent en majorité des Guatémaltèques, ensuite viennent des Honduriens et des Salvadoriens, qui cherchent en majorité à atteindre les États-Unis. Selon les données de 2004, ces trois nationalités constituent 95% de toutes les rétentions administratives dans le pays. Le nombre total des rétentions administratives et des refoulements a atteint en 2004 respectivement 215 695 et 211 618, précise le rapport. La migration sans papiers augmente au rythme de 30% par an, ajoute-t-il. Conformément à la LDG, le Mexique délivre des papiers aux migrants en transit qui se trouvent en situation régulière, avec le qualificatif de non-immigrant, en cas de transmigration, ce qui leur permet de demeurer sur le territoire national pendant trente jours au plus. Étant donné la perméabilité de la frontière méridionale et la constance des flux migratoires clandestins, la traite de personnes au Mexique est plus évidente dans cette région, en particulier au Chiapas, où prolifère la prostitution de migrants guatémaltèques, honduriens et salvadoriens. Il convient de préciser qu'au Mexique, aucun cadre normatif n'incrimine la traite de personnes, ni, jusqu'à présent, ne prévoit de mesures d'aide aux victimes.


Examen du rapport

Commentaires et questions des membres du Comité

MME ANA ELIZABETH CUBÍAS MEDINA, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Mexique, a pris note du souci de respect des droits de l'homme de toutes les personnes migrantes, quelle que soit leur condition migratoire, qui transparaît de la politique migratoire suivie par le Mexique. Elle a également pris note des mesures prises en matière de lutte contre la traite de personnes. Elle a en outre relevé les programmes adoptés par le Mexique en faveur des migrants rapatriés, y compris des migrants mineurs. Elle s'est également félicitée de la mise en place de l'Institut pour les Mexicains de l'extérieur.

Mme Cubías Medina a souhaité en savoir davantage sur l'état actuel de la législation mexicaine, eu égard aux nombreuses propositions de lois qui ont été adressées au Congrès. Il est inquiétant de constater qu'il n'y a pas de législation fédérale pour ce qui est du délit de traite d'êtres humains, a-t-elle souligné. Elle s'est par ailleurs enquis des efforts consentis par les autorités mexicaines pour pallier le problème des vols, extorsions et mauvais traitements dont font l'objet les migrants sans papiers agressés par des bandes (maras) et par des autorités locales. Mme Cubías Medina a souhaité connaître le nombre de plaintes reçues par la Commission nationale des droits de l'homme par l'Institut national des migrations s'agissant d'actes discriminatoires commis par des agents des autorités dans l'exercice de leurs fonctions.

Mme Cubías Medina a souhaité obtenir des renseignements complémentaires s'agissant notamment des possibilités d'accès des sans-papiers aux services de santé et aux écoles et des droits syndicaux, ainsi que sur la situation des migrants autochtones.

Relevant que les étrangers n'ont pas le droit de diriger un syndicat au Mexique, un autre membre du Comité a rappelé que le Mexique a ratifié la Convention n°87 de l'Organisation internationale du travail (OIT) concernant la liberté syndicale.

D'autres questions de membres du Comité ont porté notamment sur le statut des migrants clandestins au Mexique, le rôle des consulats mexicains pour protéger les droits des travailleurs mexicains, aux États-Unis ou ailleurs, les conditions de détention dans les centres de migration, la participation des Mexicains de l'étranger à la vie politique mexicaine.

Un membre du Comité a demandé si la politique d'immigration qu'applique le Mexique à sa frontière sud n'était pas la même que celle que les États-Unis appliquent à leur propre frontière sud.


Réponses de la délégation

La législation mexicaine relative aux migrations fournit un cadre juridique pour les questions de migration, a indiqué la délégation; or ce cadre est en évolution constante, a-t-elle précisé. Une loi générale sur la question, datant de 1974, a été remaniée à deux reprises, notamment en 1994, a-t-elle ajouté. Onze initiatives distinctes proposant diverses modifications possibles à cette législation ont été présentées au Congrès et sont actuellement examinées, a indiqué la délégation.

La délégation a d'autre part rappelé que le Mexique a signé avec les pays d'Amérique centrale un mémorandum d'entente sur la question des rapatriements, dont il souhaite l'amélioration constante afin de garantir pleinement les droits des personnes concernées, s'agissant notamment des mineurs non accompagnés.

Un membre du Comité ayant souhaité obtenir des informations concernant les dispositions réglementant la détention des mineurs, la délégation a insisté sur le traitement spécifique réservé aux mineurs en matière d'administration de la justice; ils ne sont pas traités comme des délinquants et sont séparés des adultes, a-t-elle notamment souligné.

La délégation a par ailleurs souligné que la question de la traite de personnes préoccupe grandement le Gouvernement mexicain. Nous savons que les choses empirent, notamment dans les villes les plus peuplées du Mexique, a indiqué la délégation. La traite comporte incontestablement un élément de migration, a-t-elle ajouté.

En ce qui concerne l'accès des travailleurs migrants aux droits syndicaux, la délégation a rappelé qu'au Mexique, toutes les personnes ont accès aux droits constitutionnels, lesquels sont garantis pour tous. Il n'y a pas de restriction au droit des travailleurs migrants d'appartenir à des syndicats, a souligné la délégation. La seule restriction en matière syndicale, énoncée dans la loi fédérale sur le travail, est celle qui interdit aux étrangers de faire partie de la direction d'un syndicat, a précisé la délégation.

Interrogée sur la possibilité de retirer des réserves émises par le Mexique s'agissant de certaines dispositions de la Convention, la délégation a rappelé que le Mexique a émis une réserve compte tenu de l'article 33 de la Constitution mexicaine qui prévoit que les étrangers n'ont pas droit à une garantie d'audition. Il y a eu des initiatives visant à modifier cette disposition constitutionnelle, mais la procédure de modification de la Constitution est assez lourde et rigide puisqu'il faut une majorité des deux tiers des deux chambres fédérales pour qu'un projet de modification ait des chances d'aboutir, après quoi ce projet doit être soumis à l'approbation de toutes les chambres des États fédérés, a indiqué la délégation.

La délégation a indiqué qu'au Mexique, l'enregistrement des associations se fait sous une forme purement déclarative. La commission d'arbitrage chargée de procéder à cet enregistrement a une fonction purement administrative et n'a aucune fonction juridique, a précisé la délégation.

Un représentant de la Commission nationale des droits de l'homme du Mexique a déclaré que le phénomène migratoire dans le pays a atteint une grande ampleur, l'immigration ayant été multiplié par 25 et l'émigration ayant décuplé au cours de ces 25 dernières années. Les frontières du Mexique sont des zones de grande concentration du crime organisé s'agissant de la traite de personnes, a-t-il souligné. Les abus et violences dont souffrent les migrants sont très importants, a-t-il poursuivi. Il a rappelé que la Commission nationale des droits de l'homme du Mexique présente régulièrement un certain nombre de recommandations dont la majorité, cette année, visaient les migrants. Le représentant de la Commission nationale a attiré l'attention sur la pratique, tolérée par l'autorité migratoire, qui voit des éléments de sécurité privés détenir des migrants, les privant ainsi illégalement de leur liberté. Il a, d'une manière générale, dénoncé les conditions de détention des migrants et a rappelé que la Commission déploie des efforts pour rendre plus dignes les conditions de détention dans les centres dans lesquels ils sont détenus.

Le représentant a par ailleurs fait part de la préoccupation de la Commission nationale des droits de l'homme face à ce qui se passe dans les trains où des migrants sont victimes d'agressions de la part de bandes voire des cheminots eux-mêmes; à cet égard, il a déploré la passivité des autorités face à ces faits. L'une des violations des droits de l'homme les plus graves et les plus récurrentes dont souffrent les migrants a trait à la détention dont ils font l'objet de la part d'autorités fédérales, étatiques et municipales qui ne sont pas habilitées à procéder à de telles détentions, a poursuivi le représentant de la Commission nationale mexicaine des droits de l'homme. Il a précisé que la Commission nationale avait notamment recommandé que soit menée une réforme intégrale du cadre juridique en matière migratoire; que soient précisées les facultés et prérogatives des agents de l'Institut national des migrations, lesquels jouissent actuellement d'une grande marge discrétionnaire dans le cadre de leurs agissements; que les migrants soient traités avec dignité dans les centres migratoires; et qu'il soit mis un terme à la pratique consistant à habiliter les prisons à faire office de centres migratoires.

Tout en reconnaissant le droit des États-Unis de se doter d'une politique migratoire, le représentant de la Commission nationale des droits de l'homme a souligné que cette politique doit respecter les droits de l'homme et a dénoncé les aspects inhumains de la politique des États-Unis en la matière ainsi que l'édification d'un mur à la frontière entre le Mexique et les États-Unis. Le nombre de migrants morts à la frontière entre les deux pays est passé de 1444 pour la période 1994-2000 (soit une moyenne annuelle de 206) à 1927 pour la période 2001-2005 (soit une moyenne annuelle de 380), a-t-il fait observer.

La délégation mexicaine a ensuite rappelé la garantie d'égalité de droits contenue dans la Constitution mexicaine, qui vaut donc pour tous les travailleurs, migrants ou non. Des sanctions ont donc été imposées lorsque certains articles de la Constitution n'étaient pas respectés, que ce soit dans le domaine du travail ou dans d'autres domaines, a précisé la délégation.

En vertu d'un nouveau règlement adopté cette année, les agences de placement des travailleurs peuvent désormais remplacer les travailleurs mexicains par des étrangers et imposer des travailleurs étrangers, a ajouté la délégation. Le Ministère du travail et de la planification sociale est l'institution chargée de veiller à ce que les agences de placement respectent les dispositions constitutionnelles et autres dispositions législatives en vigueur au Mexique, a précisé la délégation.

S'agissant de la traite de personnes, la délégation a indiqué que, de l'avis du Mexique, la solution de ce problème doit se fonder sur des accords multilatéraux.

La délégation a rappelé qu'il n'existe pas au Mexique de loi traitant spécifiquement des questions de migration. Il existe en revanche une «Loi démographique générale» qui aborde un certain nombre de questions pertinentes du point de vue des migrations.

La Loi démographique générale permet d'emprisonner un migrant, pour une période pouvant aller jusqu'à deux ans, si on estime qu'il a enfreint la loi, a rappelé la délégation; mais le Protocole de Palerme contre le trafic illicite de migrants - additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et intégré dans le droit interne conformément à la Constitution mexicaine - permet de ne pas l'application d'une telle mesure, de sorte que l'on peut affirmer que le Mexique promeut les bonnes pratiques s'agissant des questions de migration, a fait valoir la délégation.

Selon la Constitution, il y a trois manières d'acquérir la nationalité mexicaine: le jus soli, le jus sanguini et le processus de naturalisation, a rappelé la délégation.

La délégation a mis l'accent sur la nécessité de diffuser plus largement l'information relative aux programmes de régularisation. L'Institut national des migrations cherche à régulariser les migrants sans papiers, a rappelé la délégation. Depuis 2001, le Mexique dispose d'un programme ambitieux de régularisation, a-t-elle insisté.

Le Gouvernement mexicain s'efforce d'assurer que les Mexicains expatriés puissent bénéficier d'une défense adéquate s'ils sont poursuivis en justice, a par ailleurs indiqué la délégation.


Il y a certes des attitudes discriminatoires à la frontière méridionale du Mexique, a reconnu la délégation, ajoutant que les autorités locales, en particulier les polices municipales, s'attribuent parfois des prérogatives qu'elles n'ont pas. Face à de telles pratiques, il convient notamment de renforcer la coordination entre les différents organes intervenant dans les questions de migration, a souligné la délégation.

Les États-Unis ont dépensé 30 milliards de dollars pour l'érection d'un mur qui est une atteinte à la civilisation et une insulte pour toutes les personnes qui s'occupent des questions de migrations, a par ailleurs déclaré la délégation.


Observations préliminaires

Présentant des observations préliminaires au sujet de la mise en œuvre de la Convention au Mexique, MME ANA ELIZABETH CUBÍAS MEDINA, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport mexicain, a estimé que ce rapport avait été examiné de manière assez exhaustive, ce qui permet de disposer d'une vision globale de la manière dont le Mexique aborde et traite les questions de migration. La politique migratoire interne doit être cohérente avec la politique migratoire extérieure et le travail dans le domaine des droits de l'homme doit se concentrer sur ces deux aspects, a souligné Mme Cubías Medina.

La rapporteuse a salué les efforts déployés par le Gouvernement mexicain pour s'adapter à l'évolution de la situation en matière de migrations. Mais il faut réformer la législation en vigueur, à savoir la loi démographique générale, voire adopter une nouvelle loi sur les migrations, a poursuivi Mme Cubías Medina. Il est préoccupant que des autorités non compétentes s'arrogent des pouvoirs de rétention de migrants, a-t-elle déclaré. Il faut que des procédures de plainte efficaces permettent de mettre un terme à de telles pratiques, a-t-elle insisté. Il conviendrait en outre, de l'avis de Mme Cubías Medina, de rejeter la pratique consistant à habiliter des prisons à faire office de centres de migration. Il faudrait en outre abroger tous les articles de loi permettant de pénaliser les migrants sans papiers; même si ces articles ne sont pas appliqués en pratique, il convient de les abroger pour éviter qu'ils ne servent de base à certains agents pour extorquer, par exemple, des fonds aux migrants, a déclaré la rapporteuse.

Des abus semblent continuer à se produire à l'encontre des travailleurs migrants, et les enfants et mineurs non accompagnés semblent encore vulnérables à la traite de personnes, a pour sa part ajouté le Président du Comité, M. PRASAD KARIYAWASAM. Il s'est néanmoins dit confiant que les droits des travailleurs migrants continueront de s'améliorer au Mexique, car le pays est sur la bonne voie et pourrait même fournir des exemples de bonnes pratiques dans certains domaines.

* *** *

Ce document est destiné à l’information; il ne constitue pas un document officiel

CMW0607F