Aller au contenu principal

Examen de l’Albanie devant le CERD : la situation des Roms, des Égyptiens, des autres minorités nationales et des migrants est au cœur du dialogue

Compte rendu de séance

 

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD, selon l’acronyme anglais) a examiné hier après-midi et ce matin le rapport présenté par l’Albanie au titre de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Au cours du dialogue noué entre les experts membres du Comité et la délégation albanaise conduite par Mme Vasilika Hysi, Représentante permanente de l’Albanie auprès des Nations Unies à Genève, une experte du Comité a relevé que l’article 18 de la Constitution albanaise contenait plusieurs motifs de discrimination, dont trois seulement – la race, l’ethnie et l’ascendance – relèvent de la Convention : l’experte a demandé si l’État partie envisageait de faire figurer dans sa Constitution tous les motifs de discrimination figurant à l’article premier de la Convention.

L’experte a par ailleurs fait remarquer que les recommandations contenues dans les rapports de l’Avocat du peuple et du Commissaire à la protection contre la discrimination semblent souvent ne pas être suivies d’effet.

Deux centres administrés par l’Italie, a poursuivi l’experte, seront construits sur le territoire albanais : l’un pour l’identification des [migrants] et l’instruction des demandes d’asile, l’autre pour faciliter l’expulsion des migrants non éligibles à une protection internationale. Aussi, l’experte a-t-elle voulu connaître les mesures prises par l’Albanie pour s’assurer que ces migrants se trouvant sur son territoire bénéficient de tous les droits qui leur sont reconnus par les conventions internationales, s’agissant en particulier de l’obligation de respecter le principe de non-refoulement.

Un autre expert a pour sa part jugé nécessaire que l'Albanie recueille des informations précises sur le nombre et la localisation des personnes appartenant aux minorités nationales et en particulier sur les communautés rom, macédonienne, grecque et égyptienne – au sujet desquelles il n'existe aucune donnée statistique, a-t-il relevé. L’expert a aussi demandé ce qui était fait pour lutter contre les normes sociales néfastes envers les Égyptiens, les Macédoniens, les Grecs et les Roms, et pour remettre en question les stéréotypes existants.

Le même expert a voulu savoir si les jeunes roms et égyptiens pouvaient accéder non seulement aux formations professionnelles mais aussi à l’enseignement secondaire général et aux études supérieures. Il a en outre salué les bons résultats obtenus par l’Albanie en matière de lutte contre la traite des êtres humains et l’a encouragée à poursuivre sur cette voie.

D’autres questions des membres du Comité ont porté sur l’intégration des Roms à la vie de la nation en Albanie, sur l’enseignement dans les langues maternelles des minorités, sur la situation des migrants mineurs non accompagnés et sur la protection des personnes contre le risque d’apatridie.

L’Albanie a été encouragée à accepter la procédure de communication (plaintes individuelles) prévue à l’article 14 de la Convention.

Présentant le rapport de son pays, Mme Hysi a d’abord insisté sur le fait qu’en tant que membre du Conseil des droits de l'homme pour la période 2024-2026, l'Albanie s’était engagée à lutter contre la discrimination raciale, son Gouvernement étant sérieusement engagé à prévenir la discrimination raciale et à promouvoir l'égalité des chances pour tous. Ainsi, en 2021, a indiqué la Représentante permanente, le Plan d'action national pour l'égalité, l'inclusion et la participation des Roms et des Égyptiens (2021-2025) a été approuvé, et l'engagement à garantir une éducation inclusive et la réussite dans l'enseignement supérieur pour les Roms et les Égyptiens est reflété dans la Stratégie nationale sur l'éducation (2021-2026).

En ce qui concerne les discours de haine, la Loi relative aux médias audiovisuels a été modifiée en 2023, conformément à la législation de l’Union européenne : elle met l'accent sur les principes visant à éviter les discours de haine dans les émissions audiovisuelles, a indiqué Mme Hysi. De 2021 à mars 2024, la police d'État a transmis au bureau du procureur 32 affaires pour l'infraction pénale d'incitation à la haine ou à la discorde, et trois affaires pour l'infraction pénale « d'appel à la haine nationale », a précisé la Représentante permanente.

Mme Hysi a également mentionné des mesures adoptées pour lutter contre la discrimination raciale dans le système judiciaire, y compris pour prévenir et combattre le profilage racial, à propos duquel de nouvelles procédures, des protocoles et des normes sont en vigueur.

Complétant cette présentation, M. Robert Gajda, Commissaire à la protection contre la discrimination en Albanie, a fait remarquer que si l'Albanie a ratifié la Convention en 1993, les normes de l’instrument restent peu connues et mal comprises par les autorités publiques et les institutions albanaises. Il a aussi fait état de violations des droits des communautés roms et égyptiennes, en particulier dans le domaine du logement.

La délégation albanaise était également composée, entre autres, de représentants des Ministères des affaires étrangères, de la justice, de l’intérieur, de la santé et de la protection sociale, de l’économie, de la culture et de l’innovation, ainsi que de l’éducation et des sports. Le Comité pour les minorités nationales et la police étaient aussi représentés.

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de l’Albanie et les rendra publiques à l’issue de sa session, qui s’achève le 26 avril prochain.

 

Le Comité entamera cet après-midi à 15 heures l’examen du rapport du Qatar.

 

Examen du rapport de l’Albanie

Le Comité est saisi du rapport valant treizième et quatorzième rapports périodiques de l’Albanie (CERD/C/ALB/13-14).

Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays, MME VASILIKA HYSI, Représentante permanente de l’Albanie auprès des Nations Unies à Genève, a d’abord insisté sur le fait qu’en tant que membre du Conseil des droits de l'homme (2024-2026), l'Albanie s’était engagée à lutter contre la discrimination raciale, son Gouvernement étant sérieusement engagé à prévenir la discrimination raciale et à promouvoir l'égalité des chances pour tous.

Au cours de la période couverte par le rapport, l’Albanie dû faire face à certains problèmes, notamment la pandémie de COVID-19 et les conséquences du tremblement de terre de 2019, a rappelé la cheffe de délégation. Depuis la présentation du rapport en 2021, de nombreux changements et améliorations ont été apportés, a-t-elle ajouté, avant de faire état du recensement de la population et des habitations de 2023. Sans obligation légale de répondre aux trois questions relatives à la religion, à la langue maternelle et à l'appartenance ethnique, ledit recensement a été pleinement conforme aux recommandations de la Commission économique des Nations Unies pour l'Europe (CEE-ONU) et aux règlements de l’Union européenne pour la mise en œuvre des recensements de la population et du logement. Les résultats définitifs du recensement au niveau national seront publiés en juin 2024, a indiqué Mme Hysi.

D’autre part, la formation initiale et continue est un droit et une obligation pour les policiers, les magistrats et les professionnels en contact avec les victimes, y compris avec les victimes de crimes de haine, les Roms et les Égyptiens, a précisé Mme Hysi. Le module « Crimes de haine - Diversité et non-discrimination » fait partie du programme de formation de la police.

De plus, conformément à la Loi n°96/2017 relative à la protection des minorités nationales en République d'Albanie, entre 2018 et 2022, neuf règlements ont été rédigés et adoptés, a poursuivi Mme Hysi. Les institutions albanaises ont par ailleurs pleinement mis en œuvre un grand nombre des recommandations émises par le Commissaire à la protection contre la discrimination (CPD) et l'Avocat du peuple, a-t-elle fait valoir. Le budget de l'Avocat du Peuple a augmenté de 52%, et celui du CPD de 32%, pendant la période 2021-2024.

En outre, en 2021, le Plan d'action national pour l'égalité, l'inclusion et la participation des Roms et des Égyptiens (2021-2025) a été approuvé, a indiqué Mme Hysi. L'engagement à garantir une éducation inclusive et la réussite dans l'enseignement supérieur pour les Roms et les Égyptiens est reflété dans la Stratégie nationale sur l'éducation (2021-2026). Les élèves des minorités rom et égyptienne ne sont pas scolarisés dans des écoles séparées. Quant aux personnes appartenant à des minorités nationales, elles ont la possibilité d'apprendre dans leur langue maternelle et d'apprendre leur histoire et leur culture, conformément aux programmes.

En ce qui concerne les discours de haine, la Loi relative aux médias audiovisuels a été modifiée en 2023, conformément à la législation de l’Union européenne : elle met l'accent sur les principes visant à éviter les discours de haine dans les émissions audiovisuelles, a indiqué Mme Hysi. De 2021 à mars 2024, la police d'État a transmis au bureau du procureur 32 affaires pour l'infraction pénale d'incitation à la haine ou à la discorde, et trois affaires pour l'infraction pénale « d'appel à la haine nationale », a précisé la Représentante permanente.

En ce qui concerne les migrants, les demandeurs d'asile et les réfugiés, l'Albanie a mis en œuvre la stratégie et le plan d'action nationaux en matière de migration (2019-2022).

Pour ce qui est de l'accès à la justice, a ajouté Mme Hysi, au cours de la période 2021-avril 2024, le nombre de centres d'aide juridique est passé de sept centres créés en 2020 à vingt, et quelque 1146 Roms et Égyptiens ont bénéficié d'une aide juridique gratuite.

Mme Hysi a également mentionné des mesures adoptées pour lutter contre la discrimination raciale dans le système judiciaire, en particulier pour prévenir et combattre le profilage racial, à propos duquel de nouvelles procédures, des protocoles et des normes sont en vigueur.

Enfin, grâce à la coopération avec les organisations non gouvernementales et à la coopération interinstitutionnelle, la capacité de la police judiciaire et des procureurs à démasquer les motifs de haine et à mener des enquêtes efficaces est renforcée, a fait savoir Mme Hysi.

Complétant cette présentation, M. ROBERT GAJDA, Commissaire à la protection contre la discrimination, a fait remarquer que si l'Albanie a ratifié la Convention en 1993, les normes de cet instrument restent peu connues et peu comprises par les autorités publiques et les institutions albanaises. De plus, même si le Parlement albanais a approuvé au fil des ans des lois conformes au principe constitutionnel d'égalité et de non-discrimination, il s'agit toujours d'un texte législatif dont la mise en œuvre pose des problèmes majeurs aux organes exécutifs et aux institutions gouvernementales locales, a relevé M. Gajda.

Le Commissaire a également regretté que les autorités publiques albanaises écoutent très peu les recommandations et les décisions des institutions nationales des droits de l'homme, s’agissant en particulier de remédier au comportement discriminatoire du Ministère de l'éducation sous la forme d'une ségrégation dans les écoles. M. Gajda a en outre fait état de violations des droits des communautés rom et égyptienne, en particulier dans le domaine du logement – des familles entières de Roms et d'Égyptiens vivant dans d'anciens bâtiments publics militaires ou d'anciennes entreprises d'État, dans des conditions de vie inappropriées et en l'absence de services essentiels.

Enfin, le Commissaire a regretté que l’Albanie ne dispose toujours pas de systèmes de données fiables et précis, ce qui empêche d'élaborer des politiques plus réalistes et plus efficaces ; et que la discrimination à l'égard des Roms et des Égyptiens en Albanie soit systémique.

Questions et observations des membres du Comité

MME RÉGINE ESSENEME, rapporteuse du groupe de travail du Comité chargé de l’examen du rapport de l’Albanie, a d’abord demandé des exemples d’affaires dans lesquelles la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale a été directement appliquée par les juges ou invoquée devant les tribunaux. L’experte a aussi voulu savoir comment les juges, les procureurs, les avocats, les membres de la police judiciaire et autres responsables de l’application de la loi étaient formés aux dispositions de la Convention et à leur applicabilité directe dans le système juridique et judiciaire interne.

Mme Esseneme a par ailleurs fait remarquer que les recommandations contenues dans les rapports de l’Avocat du peuple et du Commissaire à la protection contre la discrimination semblent souvent ne pas être suivies d’effet.

L’experte a aussi relevé que l’article 18 de la Constitution albanaise contient plusieurs motifs de discrimination dont trois seulement (la race, l’ethnie et l’ascendance) relèvent de la Convention. Elle a demandé si l’Etat partie envisageait de faire figurer dans sa Constitution tous les motifs de discrimination figurant à l’article premier de la Convention, afin de s’y conformer. Elle a demandé des exemples de cas où le Commissaire à la protection contre la discrimination a intenté une action judiciaire pour défendre le principe d’égalité et de non-discrimination portant sur des questions d’intérêt collectif.

Mme Esseneme a ensuite rappelé que, dans ses dernières observations finales, le Comité avait recommandé à l’Albanie d’élaborer une stratégie globale pour l’enregistrement des naissances parmi les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile, afin de prévenir l’apatridie. L’experte, regrettant que le rapport ne contienne aucune information à ce sujet, s’est enquise des mesures prises pour prévenir l'apatridie et garantir la protection effective des apatrides et des personnes à risque d'apatridie, en particulier des enfants apatrides nés en Albanie, et pour leur assurer un accès effectif aux services sociaux de base, spécialement l’accès à l'éducation et aux soins de santé.

Mme Esseneme a aussi voulu savoir quelles améliorations avaient été observées dans la gestion des flux migratoires en Albanie depuis l’entrée en vigueur de la Loi n°10/2021 sur l’asile. L’Albanie, a-t-elle fait observer, a conclu en 2023 un protocole d’accord avec l’Italie sur le débarquement des migrants et le traitement des demandes d’asile – accord qui permet à l’Italie de transférer dans un État non-membre de l’Union européenne des immigrés arrivés sur ses côtes. Deux centres administrés par l’Italie – dont la loi sur l’immigration est plus sévère, a fait remarquer Mme Esseneme – seront ainsi construits sur le territoire albanais : l’un pour l’identification des arrivants et l’instruction des demandes d’asile, et l’autre (situé dans un camp militaire) pour faciliter l’expulsion des migrants non éligibles à une protection internationale. Dans ces conditions, Mme Esseneme a voulu savoir quelles mesures étaient prises par l’Albanie pour s’assurer que ces migrants se trouvant sur son territoire bénéficient de tous les droits qui leur sont reconnus par les conventions internationales, en particulier en ce qui concerne l’obligation de respecter le principe de non-refoulement ainsi que les Recommandations générales du Comité concernant respectivement les réfugiés et personnes déplacées, pour l’une, et la discrimination contre les non-ressortissants, pour l’autre.

Mme Esseneme a ensuite relevé que la loi approuvée le 15 octobre 2020 [Loi n°124/2020 portant adjonctions et modifications à la loi de 2010 sur la protection contre la discrimination] considère le discours de haine comme une nouvelle forme de discrimination. Elle a demandé quels sont les actes constitutifs de cette infraction et les peines encourues, et combien de décisions de justice sur les discours de haine ont été prises depuis l’entrée en vigueur de ladite loi de 2020. L’experte a aussi prié la délégation de dire quelles dispositions légales répriment le profilage racial en Albanie.

L’experte a également demandé combien de plaintes avaient été enregistrées au titre des articles 265 [relatif à l’incitation à la haine ou aux conflits] et 266 [relatif aux appels à la haine nationale] du Code pénal modifiés, qui répriment l’incitation à la haine nationale à l’égard de certains groupes de population. Elle a également souhaité savoir quelles mesures ont été prises par l’État pour appliquer les dispositions de l’article 4 de la Convention en vue d’interdire les organisations qui encouragent ou incitent à la haine raciale.

Le Comité, a poursuivi Mme Esseneme, aimerait connaître le nombre de victimes ou de victimes potentielles de la traite qui ont été identifiées, et les suites qui ont été données à leurs situations en termes de prévention, de protection, d’assistance et de réparation.

D’autres questions de la rapporteuse ont porté sur l’organisation du système judiciaire albanais et l’accès à la justice par les personnes vulnérables.

L’experte s’est en outre interrogée sur la coordination entre l’Avocat du peuple – qui est l’institution nationale de droits de l’homme albanaise – et le Commissaire à la protection contre la discrimination en matière de lutte contre la discrimination raciale. Mme Esseneme a voulu savoir si la justice pouvait remettre en cause des décisions du Commissaire relatives à des cas de discrimination ou de propagation de discours de haine, et si les médias concernés étaient tenus de publier ces décisions.

M. BAKARI SIDIKI DIABY, corapporteur du groupe de travail du Comité chargé de l’examen du rapport de l’Albanie, a jugé pour sa part nécessaire que l'Albanie recueille des informations précises sur le nombre et la localisation des personnes appartenant aux minorités nationales, s’agissant en particulier des communautés rom, macédonienne, grecque et égyptienne, au sujet desquelles il n'existe aucune donnée statistique. L’expert a demandé ce qui était fait pour lutter contre les normes sociales néfastes envers les Égyptiens, les Macédoniens, les Grecs et les Roms et pour remettre en question les stéréotypes existants.

M. Diaby a posé d’autres questions relatives à l’inclusion des Roms et à la prise en charge par l’État des enfants roms, de même que sur les mesures prises afin que toutes les familles roms, macédoniennes, grecques et égyptiennes aient accès à l’eau et à l’assainissement.

M. Diaby a par ailleurs voulu savoir si les jeunes roms et égyptiens pouvaient accéder non seulement aux formations professionnelles mais aussi à l’enseignement secondaire général et aux études supérieures.

M. Diaby a ensuite demandé ce qui était fait pour faciliter l’accès des minorités ethniques, en particulier des Roms et des Égyptiens, aux soins de santé, et pour lutter contre les formes multiples et intersectionnelles de discrimination à l'égard des femmes appartenant à des minorités ethniques.

L’expert a regretté que la police n’ait pas donné suite au viol d’une femme d’ascendance africaine qui a été signalé au Comité l’an dernier. Il a demandé ce que l’État faisait pour contrer les discours avilissants à l’égard des personnes d’ascendance africaine et les manifestations de racisme dans le sport.

M. Diaby a salué les bons résultats obtenus par l’Albanie en matière de lutte contre la traite des êtres humains et l’a encouragée à poursuivre sur cette voie.

M. GUN KUT, rapporteur chargé du suivi des recommandations du Comité, a rappelé que, dans ses précédentes observations finales (2018), le Comité avait demandé au pays de présenter des renseignements complémentaires au sujet de l’élaboration des règlements d’application de la Loi relative à la protection des minorités nationales, de l’indépendance du pouvoir judiciaire et des questions relatives au logement des Roms et des Égyptiens. M. Kut a regretté que le rapport attendu n’ait pas été présenté par l’Albanie dans le délai d’un an qui avait été imparti.

D’autres experts membre du Comité ont posé des questions sur le niveau de scolarisation des enfants roms en Albanie. Il a aussi été demandé si les Roms étaient intégrés à la vie de la nation ou s’ils vivaient à part. D’autres questions ont porté sur l’enseignement dans les langues maternelles des minorités.

La Loi no96/2017 relative à la protection des minorité nationales en Albanie interdit la discrimination envers ces minorités et encourage le dialogue interculturel, a relevé un expert, avant de s’enquérir des résultats de ce dialogue.

Un expert a demandé si l’Albanie entretenait la mémoire des Roms victimes de génocide pendant la Deuxième Guerre mondiale.

Plusieurs questions ont porté sur la situation des migrants mineurs non accompagnés en Albanie. Il a été demandé ce qui était fait pour empêcher toute discrimination raciale dans les échanges de données relatives aux migrants entre les instances de l’État concernées.

Il a aussi été demandé quelle part avaient prise les organisations de la société civile albanaise à la rédaction du rapport.

Un expert a demandé si les Roms vivaient dans des ghettos en Albanie et s’ils disposaient de cartes nationales d’identité.

L’Albanie a été encouragée à accepter la procédure de communication (plaintes individuelles) prévue à l’article 14 de la Convention.

Un expert a rappelé que les Albanais eux-mêmes avaient été victimes, en Europe du Sud, de préjugés xénophobes. Il a recommandé que l’Albanie, sur la base de cette expérience, mette en place des stratégies exemplaires pour remédier aux injustices.

Réponses de la délégation

Le Ministère de la justice tient la statistique des infractions pénales pour discrimination, xénophobie et incitation à la haine ayant fait l’objet de poursuites, a indiqué la délégation.

Les juges et les procureurs sont formés aux questions relatives au principe de non-discrimination, à la cybercriminalité, au génocide ou encore aux droits des requérants d’asile, a ensuite souligné la délégation. Les agents de police reçoivent quant à eux des formations sur le respect des droits fondamentaux, l’interdiction de la discrimination entre les citoyens, la tolérance et la lutte contre les stéréotypes, entre autres.

Quant aux tribunaux, ils se sont vu accorder des moyens supplémentaires pour donner effet aux dispositions de la Convention, a-t-il été précisé.

S’agissant de la stratégie en matière de migrations, la délégation a précisé que la loi adoptée il y a quatre ans avait entre-temps été complétée de manière à simplifier et accélérer la procédure d’asile. Un registre électronique relie les données de la police avec celles du Ministère de l’intérieur, a-t-elle précisé. En coopération avec des organisations internationales, chaque requête [de demande d’asile] est examinée sous l’angle du respect des droits des requérants d’asile.

Outre le statut de réfugié, l’Albanie offre aux ressortissants afghans, en particulier, une protection temporaire qui les autorise à rester en Albanie et à y travailler, a par ailleurs fait savoir la délégation.

L’Albanie protège les mineurs non accompagnés qui risquent d’être victimes de crimes ou de traite, a poursuivi la délégation. Chaque enfant se voit fournir un soutien dans sa langue par des personnes compétentes. En 2023-2024, l’Albanie a recensé dix mineurs non accompagnés, a précisé la délégation.

Le Gouvernement albanais s’est engagé à contribuer à la gestion des migrations en direction de l’Italie et de l’Europe, a ajouté la délégation. Quelque 3600 migrants devraient être accueillis dans les deux centres mentionnés par les experts du Comité, a-t-elle indiqué. La Cour constitutionnelle albanaise a statué que ces deux centres pourraient être placés sous la juridiction italienne, a-t-elle souligné.

L’élimination de l’ apatridie est ancrée dans le droit albanais, a ajouté la délégation. Ainsi, les enfants nés en Albanie de ressortissants étrangers et qui ne peuvent obtenir la nationalité de leurs parents – en particulier des Afghans – sont dûment enregistrés en tant qu’enfants albanais, a-t-elle précisé. L’Albanie est partie à la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie, a rappelé la délégation.

Les Albanais eux-mêmes ont beaucoup émigré, raison pour laquelle le pays s’efforce maintenant de traiter les étrangers avec respect, a ajouté la délégation.

L’ Avocat du peuple émet des recommandations concernant le fonctionnement de l’administration publique ; le Commissaire à la protection contre la discrimination axe ses interventions sur les cas d’inégalité et de discrimination. Les deux institutions collaborent sur un certain nombre de dossiers, en particulier pour ce qui est de la lutte contre les discours de haine, a-t-il été précisé. Les décisions du Commissaire à la protection contre la discrimination ont un caractère obligatoire et les médias sont tenus de les publier, a par la suite précisé la délégation.

Une loi adoptée récemment a mis en place un mécanisme de réparation pour les victimes de discrimination, ainsi que pour les victimes de traite des êtres humains, a en outre fait savoir la délégation.

Pour ce qui est de l’ aide juridictionnelle gratuite, la délégation a indiqué que cette prestation est garantie par la loi – laquelle donne aussi la liste des personnes vulnérables qui peuvent en bénéficier.

La scolarisation des Roms et des Égyptiens , y compris au niveau préscolaire, est une priorité depuis longtemps en Albanie, a ensuite indiqué la délégation. Les enfants roms et égyptiens sont intégrés dans les écoles ordinaires, où la langue d’enseignement principale est l’albanais. Le Ministère de l’éducation a pris des mesures pour empêcher toute discrimination envers les écoliers roms et égyptiens – mesures qui sont accompagnées de la création d’infrastructures supplémentaires et d’aides aux transports, a d’autre part souligné la délégation. Le Ministère de l’éducation a préparé un programme complet d’enseignement en langue rom, a-t-elle ajouté. Faute d’enseignants, il n’y a pas d’école réservée aux jeunes roms, contrairement à ce qu’il se passe pour les enfants grecs ou macédoniens, a-t-elle précisé.

Le problème du décrochage scolaire est en recul en Albanie depuis plusieurs années, y compris s’agissant des enfants roms et égyptiens, notamment grâce à l’action de médiateurs culturels, a fait valoir la délégation.

Le Gouvernement entend donner effet à l’arrêt de la Cour européenne condamnant l’Albanie pour discrimination scolaire envers de jeunes roms, a par la suite précisé la délégation.

De nombreux enfants, y compris des enfants roms, sont encouragés à se tourner vers l’enseignement professionnel afin d’accéder plus facilement au marché du travail, a d’autre part indiqué la délégation.

Le Gouvernement albanais a adopté un plan pour évaluer la situation des minorités rom et égyptienne, a en outre souligné la délégation. Il a lancé des initiatives importantes pour améliorer les services d’eau et d’assainissement au profit de toute la population, a-t-elle fait valoir. Le Gouvernement fait d’autre part appliquer, à l’initiative de la société civile, un quota de 5% de logements sociaux réservés aux minorités rom et égyptienne, et il a introduit des subventions dont peuvent bénéficier les membres de ces communautés. Les Roms et les Égyptiens qui se sont retrouvés sans abri lors du tremblement de terre de 2019 ont reçu de nouveaux logements, a ajouté la délégation.

La délégation a par la suite précisé que 84% des Roms avaient accès à l’eau et à l’électricité dans leur lieu de résidence.

La délégation a mentionné d’autres mesures prises pour faire respecter les droits des femmes roms et égyptiennes, de même que pour répondre, à égalité avec les autres citoyens, aux besoins de santé des membres de ces deux communautés.

Il y a, en Albanie, un grand débat sur le terme « Égyptien », d’aucuns recommandant d’utiliser plutôt l’expression « Égyptien des Balkans », a précisé la délégation.

On compte actuellement en Albanie neuf minorités nationales reconnues [en application de l’article 3 de la Loi n°96/2017 relative à la protection des minorités nationales : il s’agit des minorités grecque, macédonienne, valaque/aroumaine, rom, égyptienne, monténégrine, bosniaque, serbe et bulgare], a indiqué la délégation. Le Gouvernement est en train de prendre des mesures, au titre de la Loi relative à la protection des minorités nationales, pour favoriser la participation des minorités ou groupes marginalisés à la vie économique et culturelle. Entre autres mesures, le Gouvernement soutient les artisanats traditionnels, a publié un dictionnaire albanais-rom et organise des festivals folkloriques.

Tous les citoyens albanais ont une carte d’identité qui ne mentionne pas obligatoirement l’origine ethnique des personnes, a par ailleurs souligné la délégation.

La délégation a tenu à préciser qu’il n’y avait pas eu de déportation de Juifs ni de Roms depuis le territoire albanais pendant la Deuxième Guerre mondiale.

La délégation a ailleurs fait observer qu’elle comptait en son sein des représentants des minorités grecque et rom.

Le Gouvernement a créé une plate-forme de dialogue avec la société civile pour éclairer l’application du Plan d’action national pour les minorités, a d’autre part fait savoir la délégation.

Le tremblement de terre de 2019 puis la pandémie ont empêché le Gouvernement de présenter le rapport intermédiaire mentionné par M. Kut, a expliqué la délégation, avant d’assurer qu’elle informerait les autorités concernées des préoccupations du Comité.

Pour faire face au problème des discours de haine, a poursuivi la délégation, l’Albanie a modifié sa législation et son Code pénal conformément aux textes européens, afin notamment de faire des discours de haine une infraction pénale et de pouvoir les prévenir et les réprimer. Le Gouvernement a aussi adopté des stratégies de lutte contre la radicalisation, les discours de haine en ligne et la cybercriminalité. Le Code pénal sanctionne la discrimination raciale, ainsi que l’incitation à la haine raciale et à la haine nationale, avec des sanctions allant de deux à cinq ans d’emprisonnement, a-t-il été précisé. Les députés qui utilisent des expressions discriminatoires s’exposent eux aussi à des sanctions, a souligné la délégation.

De plus, le code applicable aux médias audiovisuels a été modifié afin d’aider les opérateurs privés et publics à faire respecter les principes de tolérance et de non-discrimination, ainsi que l’interdiction des discours haineux et discriminatoires.

La loi interdit explicitement toute discrimination raciale ou à caractère ethnique dans le monde du sport, a ajouté la délégation.

La lutte contre la traite des êtres humains est l’une des grandes priorités de l’Albanie, a dit la délégation. Dans ce domaine, les autorités ont, notamment, interdit les mariages précoces et mènent des campagnes d’information auprès des jeunes. Ce problème est en net recul depuis quelques années. Les autorités s’efforcent en outre de protéger les jeunes roms contre la mendicité forcée, a indiqué la délégation.

L’Albanie est un pays de référence en matière d’application de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, a assuré la délégation.

La délégation a précisé que les services du parquet étaient en train de déterminer – avec la coopération des autorités du Kenya, pays d’origine de la jeune victime – si le décès évoqué par M. Diaby résultait d’un meurtre ou d’un suicide.

 

Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information ; il ne constitue pas un document officiel. 

Les versions anglaise et française de nos communiqués sont différentes car elles sont le produit de deux équipes de couverture distinctes qui travaillent indépendamment. 



CERD24.004