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Le Conseil des droits de l’homme tient une réunion-débat à l’occasion du dixième anniversaire des Principes directeurs sur les entreprises et les droits de l’homme

Compte rendu de séance

 

Après avoir entendu plusieurs intervenants* clore le dialogue avec le Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, le Conseil des droits de l’homme a tenu cet après-midi une réunion-débat à l’occasion du dixième anniversaire des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme.

Ouvrant cette réunion-débat, la Haute-Commissaire aux droits de l’homme, Mme Michelle Bachelet, a notamment déclaré que depuis dix ans, les Principes directeurs ont constitué un cadre essentiel, pragmatique et concret pour des contributions positives à la prévention et la réduction des risques pour les personnes. Elle a souligné que l’accès aux réparations est un pilier fondamental des Principes directeurs et a rappelé que le Haut-Commissariat avait appuyé le Groupe de travail pour faire du Forum annuel sur les entreprises et les droits de l’homme le plus grand rassemblement mondial concernant cette question.

Mme Bachelet a toutefois souligné que de nombreux gouvernements et bien plus d’entreprises gagneraient à intensifier leurs efforts, les organisations de la société civile ayant en effet dénoncé, de longue date, le non-respect, par beaucoup de sociétés actives dans divers secteurs, de leurs responsabilités en matière des droits de l’homme. Les histoires d’abus contre les travailleurs, les défenseurs des droits de l’homme et les communautés sont encore trop courantes, a déploré Mme Bachelet. Elle a fait observer que les crises comme la pandémie de COVID-19 ont exposé et exacerbé les inégalités et vulnérabilités endémiques dans de nombreux modèles d’activités des entreprises.

Il faut respecter les droits de l’homme en toutes circonstances, a insisté Mme Bachelet, avant d’appeler les entreprises à « mieux faire », d’autant que dix ans après l’adoption des Principes directeurs, les défis et contextes sont en évolution constante, en particulier dans le secteur de la technologie et pour ce qui a trait au changement climatique.

Axés sur la mise en œuvre du cadre de référence de l’ONU « protéger, respecter et réparer », les Principes Directeurs avaient été élaborés par le professeur John Ruggie, au cours de ses six années de mandat en tant que Représentant spécial du Secrétaire général sur les entreprises et les droits de l’homme. Dans sa déclaration liminaire, M. Ruggie a rappelé que ces Principes étaient le « seul guide d’orientation faisant autorité » développé par le Conseil à l’intention des Etats et des entreprises au sujet de leurs obligations respectives. Il a en outre rappelé que, fait sans précédent à l’époque (en 2011, date de l’adoption des Principes), le Conseil « avalisait » pour la première fois un texte normatif sur un sujet que les gouvernements n’avaient pas eux-mêmes négocié.

Cette réunion-débat a en outre bénéficié des exposés présentés par quatre panélistes : M. Dante Pesce, Président du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises; Mme Sharan Burrow, Secrétaire générale de la Confédération syndicale internationale ; Mme Maria Fernanda Garza, Première Vice-Présidente de la Chambre de commerce internationale ; et Mme Joan Carling, Directrice d'Indigenous Peoples Rights International.

De nombreux intervenants** ont ensuite pris part au débat en soutenant massivement les Principes directeurs adoptés il y a dix ans.

A la fin de ce débat, le Japon, la Chine, le Brésil et la République populaire démocratique de Corée ont exercé leur droit de réponse.

 

Le Conseil entamera demain matin, à partir de 10 heures, une réunion-débat concernant les effets négatifs des changements climatiques, avant d’achever son dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains.

 

Suite et fin du dialogue avec le Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales

Aperçu du débat

Une délégation a fait observer que les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme avaient la même pertinence au regard de la pandémie mondiale de COVID-19 que pendant la crise financière mondiale. Les Principes directeurs ont contribué, notamment, à établir le lien entre le développement et la protection des droits de l'homme, a-t-il été rappelé. Il a aussi été souligné que le principal avantage des Principes tenait à leur caractère exhaustif et au fait qu’ils consistent en recommandations, chaque État étant libre de déterminer le modèle ou la formule de leur mise en œuvre, en fonction des particularités nationales.

Plusieurs délégations ont indiqué avoir adopté des plans d'action sur les entreprises et les droits de l'homme, conformément aux Principes directeurs des Nations Unies.

Le Groupe de travail a été félicité d'avoir organisé en novembre dernier un Forum ayant attiré l’inscription de plus de 4000 participants, ce qui constitue un exploit remarquable en temps de COVID-19 et témoigne de l'immense valeur de ce Forum pour toutes les parties concernées.

Une organisation non gouvernementale (ONG) a cependant regretté que le Groupe de travail se concentre sur des processus guidés par une obligation de moyens et non de résultats, ce qui est insuffisant pour lutter contre l'impunité des entreprises.

Plusieurs orateurs ont plaidé, cet après-midi, pour un instrument juridique international contraignant destiné à réglementer les activités des sociétés transnationales. En effet, il a été regretté que, dix ans après l’adoption des Principes directeurs, nombre d’entreprises restent au-dessus de la loi, au détriment des communautés les plus exposées. Des délégations ont ainsi fait état de violations des droits de l’homme commises par des société transnationales dans des régions occupées ou en proie aux conflits et des organisations non gouvernementales ont critiqué les pratiques contraires aux droits de l’homme de certaines entreprises, notamment en termes de destruction de l’environnement et de conditions de travail précaires.

Les engagements volontaires se sont révélés largement insuffisants pour garantir que les États et les entreprises ne fassent pas obstacle aux droits humains fondamentaux ; même en pleine pandémie, certains acteurs privés de la santé font passer le profit avant la vie, a-t-il été déploré.

*Liste des intervenants : Népal, Botswana, Azerbaïdjan, Irlande, Pérou, Belgique, Fédération de Russie, Viet Nam, Bolivie, Italie, Iran, Malawi, Afrique du Sud, État de Palestine, Alliance globale des institutions nationales de droits de l’homme, China NGO Network, Rencontre africaine pour les droits de l’homme, ESCR Net, Conectas Direitos Humanos, Centre Europe Tiers-Monde, Sikh Human Rights Group, United States Council for the International Business , Peace Brigade International, China International Council, Organisation internationale des employeurs, International Institute for Human Rights and Development, Afrique du Sud.

Réponses et remarques de conclusion du Président du Groupe de travail

M. DANTE PESCE, Président du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, a indiqué que des travaux doivent se poursuivre quant au suivi des activités des petites et moyennes entreprises (PME) du secteur informel – qui emploient 60% de la main-d’œuvre active dans le monde, a-t-il précisé.

M. Pesce a plaidé pour un multilatéralisme inclusif, dont le dernier Forum sur les entreprises et les droits de l’homme a fourni un bon exemple. Il a en outre rappelé que le rapport qu’il a présenté hier contenait un certain nombre de recommandations à l’intention des gouvernements et des entreprises pour leur permettre de mieux protéger les défenseurs des droits de l’homme. Les défenseurs ne sont pas ennemis du progrès ; ce sont les alliés des gouvernements dans leurs démarches, a insisté M. Pesce.

S’agissant de la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, le Groupe de travail préconise un mélange judicieux de mesures facultatives, telles que les Principes directeurs, et de mesures contraignantes, a conclu le Président du Groupe.

Réunion-débat à l’occasion du dixième anniversaire des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme

Déclarations liminaires

MME MICHELLE BACHELET, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a déclaré que depuis dix ans, les Principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme ont constitué un cadre essentiel, pragmatique et concret, pour des contributions positives à la prévention et la réduction des risques pour les personnes. Elle a en particulier souligné le rôle du projet « reddition de comptes et recours » centré sur l’amélioration des mécanismes de réparations pour que les victimes puissent mieux faire valoir et asseoir leurs droits. L’accès aux réparations est un pilier fondamental des Principes directeurs, a-t-elle insisté, attirant l’attention sur le récent projet B-Tech qui montre l’utilité des Principes directeurs dans l’espace numérique.

Le Haut-Commissariat a également appuyé le Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises pour faire du Forum annuel sur les entreprises et les droits de l’homme le plus grand rassemblement mondial concernant cette question, a souligné Mme Bachelet.

Procédant à un bilan rapide, la Haute-Commissaire a affirmé qu’il ne faudrait pas penser que les entreprises préfèrent invariablement profiter de l’inaction de l’Etat. Elles doivent en fait, comme stipulé dans les Principes directeurs, mélanger de façon intelligente mesures nationales et internationales, obligatoires et volontaires, pour encourager au respect des droits de l’homme, a indiqué Mme Bachelet, avant de saluer le nombre croissant de plans d’action nationaux élaborés par les pays ces dix dernières années. En Europe plus particulièrement, a-t-elle observé, les efforts se sont focalisés sur l’élaboration de normes obligatoires de diligence alignées sur les Principes directeurs. Au niveau international, Mme Bachelet s’est félicitée de la création d’un Groupe de travail intergouvernemental chargé de la rédaction d’un instrument juridiquement contraignant sur les entreprises et les droits de l’homme.

D’un autre côté, Mme Bachelet a notamment tenu à saluer les actions entreprises par de nombreuses sociétés et entreprises commerciales pour s’acquitter de leurs responsabilités au regard des Principes directeurs. La Haute-Commissaire n’a en outre pas manqué d’évoquer le « rôle vital » de plaidoyer joué par la société civile, les syndicats et les institutions. Elle a néanmoins souligné que de nombreux gouvernements et bien plus d’entreprises gagneraient à intensifier leurs efforts, les organisations de la société civile ayant en effet dénoncé, de longue date, le non-respect, par beaucoup de sociétés actives dans divers secteurs, de leurs responsabilités en matière des droits de l’homme. Les histoires d’abus contre les travailleurs, les défenseurs des droits de l’homme et les communautés sont encore trop courantes, a déploré Mme Bachelet. Elle a souligné que les crises comme la pandémie de COVID-19 ont exposé et exacerbé les inégalités et vulnérabilités endémiques dans de nombreux modèles d’activités des entreprises.

Il faut respecter les droits de l’homme en toutes circonstances, a insisté Mme Bachelet, avant d’appeler les entreprises à « mieux faire », d’autant que dix ans après l’adoption des Principes directeurs, les défis et contextes sont en évolution constante, en particulier dans le secteur de la technologie et pour ce qui a trait au changement climatique. Ceci dit, le cadre de référence demeure de mise ; alors que nous nous efforçons de nous relever de la COVID-19, je suis sûre que les Principes continueront de nous guider dans la bonne direction, a conclu la Haute-Commissaire.

Ancien Représentant spécial du Secrétaire général sur les entreprises et les droits de l’homme , le Professeur JOHN RUGGIE, de la Harvard Kennedy School, a rappelé qu’il avait eu l’honneur d’élaborer les Principes Directeurs au cours de ses six années de mandat en tant que Représentant spécial du Secrétaire général sur les entreprises et les droits de l’homme. Il a rappelé que ces Principes constituent le seul guide d’orientation faisant autorité développé par le Conseil à l’intention des Etats et des entreprises au sujet de leurs obligations respectives en matière de droits de l’homme. C’était aussi la première fois que le Conseil endossait un texte normatif sur un sujet que les gouvernements n’avaient pas eux-mêmes négociés, a fait observer M. Ruggie. L’adoption et l’application de ces Principes ont été relativement rapides, a-t-il ajouté, signalant qu’aujourd’hui, ils continuent à être intégrés dans les textes législatifs des pays, sans compter qu’on continue également à les faire valoir devant les tribunaux.

S’interrogeant sur ce succès alors que d’autres initiatives avaient échoué, M. Ruggie l’a attribué à l’ampleur des consultations tous azimuts qui avaient été menées. Rappelant que le pilier I des Principes est axé sur la responsabilité des Etats et le pilier II sur celle des entreprises, le Professeur a souligné que cette séparation a permis d’éviter toute confusion quant aux responsabilités des uns et des autres.

Exposés des panélistes

M. DANTE PESCE, Président du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, a salué la vision dont avait fait preuve le Professeur Ruggie, tant l’impact de ces Principes directeurs a été fondamental au cours de la décennie écoulée. Il a ensuite rappelé que le Groupe de travail qu’il préside s’était concentré, au cours de l’année écoulée, sur le projet UNGPs10+ aux fins d’évaluer l’application des Principes et ce qu’il reste à accomplir – ce qui constitue le cœur du rapport présenté hier par le Groupe devant le Conseil.

Les Principes directeurs ont contribué à des progrès significatifs vers la promotion du respect des droits de l’homme dans le contexte des sociétés commerciales en ce qu’ils ont fourni une plate-forme d’action commune qui faisait défaut avant 2011, a souligné M. Pesce, ajoutant qu’ils avaient en particulier établi la prévention des méfaits des activités des entreprises sur les personnes et l’accès à des réparations comme principaux piliers d’un cadre de référence responsable.

D’autre part, le concept de diligence des entreprises en matière

de droits de l’homme a été largement adopté, par les sociétés elles-mêmes, dans d’autres cadres internationaux relatifs à la responsabilité des entreprises, ainsi que par les institutions financières, a relevé M. Pesce, soulignant que, dans de nombreuses juridictions, la question de la diligence voulue se transforme désormais en norme de conduite juridiquement contraignante à mesure que des législations sont énoncées.

Le Président du Groupe de travail a toutefois rappelé les « lacunes de gouvernance » qui avaient conduit à l’élaboration des Principes directeurs et qui, a-t-il fait observer, favorisent encore trop souvent des atteintes aux droits de l’homme par les sociétés dans tous les secteurs et toutes les régions. De ce fait, le manqué d’accès aux réparations pour les ayants droit constitue toujours la lacune la plus flagrante et une menace pour les progrès à accomplir dans la décennie à venir, a-t-il indiqué.

M. Pesce a en particulier prié les Etats d’accélérer le rythme de la mise en œuvre des Principes directeurs, en élaborant d’abord des politiques intelligentes et efficaces et en prenant des mesures réglementaires qui garantissent de meilleurs résultats pour les personnes affectées par les activités des entreprises. Il a en outre demandé que les gouvernements déploient davantage d’efforts pour combler les lacunes en termes de cohérence dans « l’équation Etats/sociétés », avec une meilleure distribution des fonctions et des rôles. Les gouvernements doivent en particulier servir de modèles et utiliser le levier dont ils disposent en tant qu’acteurs économiques pour encourager à la diligence voulue en matière des droits de l’homme. M. Pesce a en outre appelé à l’intégration des Principes directeurs dans les stratégies liées au développement, au maintien et à la consolidation de la paix et à l’environnement.

Le Président du Groupe de travail a par ailleurs annoncé le lancement, vers la fin de cette année, d’une feuille de route pour la prochaine décennie, sur la base de la plate-forme commune fournie par les Principes directeurs.

MME SHARAN BURROW, Secrétaire générale de la Confédération syndicale internationale, a déploré une régression spectaculaire des droits de l'homme, des droits du travail et des droits et libertés démocratiques dans le monde entier. Dans ce contexte, le rôle des Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme est absolument fondamental.

Dix ans est une étape importante pour ces Principes et cet anniversaire doit incontestablement être célébré ; mais il nous faut comprendre que nous pouvons passer de normes volontaires à des normes obligatoires, car à moins que nous ayons réellement une mise en œuvre associée à une garantie que les violations soient sanctionnées, l'exploitation déshumanisante à laquelle nous assistons dans notre modèle économique continuera, a souligné Mme Burrow. Il ne fait aucun doute que lorsque l’on se penche sur nos chaînes d'approvisionnement, c'est là que les choses deviennent obscures et que l’on assiste à un déni de responsabilité de la part de trop nombreuses grandes multinationales – même s’il y a des multinationales qui essaient de changer cela, a-t-elle poursuivi. Nous devons mettre en place les étapes pratiques de la diligence raisonnable, a indiqué Mme Burrow.

Je peux vous assurer qu'après avoir parcouru bon nombre de chaînes d'approvisionnement sur tous les continents, il n'y a absolument aucun autre mot pour les décrire que « l'exploitation déshumanisante », a insisté Mme Burrow, déplorant que personne n'assume la responsabilité pour cela et observant que depuis les années 1990, le contrat social ait totalement explosé.

MME MARÍA FERNANDA GARZA, Première Vice-Présidente de la Chambre de commerce internationale, a indiqué qu’un certain nombre d'entreprises de premier plan et de coalitions sectorielles d'entreprises soutenaient activement l'adoption de mesures de diligence raisonnable obligatoires, l'objectif étant que ces mesures favorisent une plus grande cohérence et des conditions de concurrence équitables. Cependant, beaucoup d’autres entreprises, en particulier les PME, ont à cet égard des préoccupations liées à la charge des exigences réglementaires supplémentaires et à l'étendue de leur responsabilité, a-t-elle expliqué.

Un plus grand engagement des entreprises dans l'élaboration des futures mesures législatives, dans le partage des meilleures pratiques mondiales et dans le soutien aux PME est nécessaire, a poursuivi Mme Garza. Les mesures devront également avoir un impact réel sur le terrain, a-t-elle recommandé. Dans la perspective de la deuxième décennie des Principes directeurs, il conviendra de mettre l'accent sur les interventions politiques qui peuvent faire une différence immédiate dans le monde réel – en particulier pour les personnes les plus vulnérables aux violations des droits de l'homme, a préconisé Mme Garza.

Enfin, MME JOAN CARLING, Directrice d'Indigenous Peoples Rights International, a relevé que l'un des résultats importants de l’application des Principes directeurs est l’élaboration de politiques sur la diligence raisonnable en matière de droits de l'homme, y compris l'exigence du consentement préalable libre et éclairé des peuples autochtones face aux activités des entreprises. Les secteurs de l’industrie extractive, de l'huile de palme et du bois, ainsi que la chaîne d'approvisionnement des aliments et boissons ont déclaré vouloir respecter cette exigence de consentement préalable, s’est félicitée Mme Carling. Cet engagement, a-t-elle ajouté, correspond à la norme minimale de respect des droits des populations autochtones par les entreprises. En effet, ces dernières devraient aussi respecter la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et la Convention n° 169 de l’Organisation internationale du Travail relative aux peuples indigènes et tribaux, a recommandé Mme Carling.

Cet engagement pris, les acteurs commerciaux devront apporter des changements positifs et concrets au cours de la prochaine décennie d’application des Principes directeurs, a ajouté Mme Carling.

Aperçu du débat

Durant la première décennie de mise en œuvre des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, de nombreuses entreprises se sont engagées à respecter leurs obligations, y compris pour ce qui est du devoir de diligence, tandis que les Etats ont pris des initiatives pour rappeler les entreprises à l’ordre, a-t-il été relevé.

Certaines délégations ont réitéré l’engagement de leurs gouvernements à adopter des politiques respectueuses des droits de l’homme s’agissant des activités des entreprises en général, et plus particulièrement de celles qui ont un impact direct sur les communautés vulnérables et sur l’environnement.

Plusieurs pays ont présenté les mesures qu’ils ont prises pour continuer à appliquer les Principes directeurs. Les Etats s’efforcent en outre d’influencer les entreprises car celles-ci sont également devenues des acteurs influents sur la scène internationale, a-t-il été souligné.

La pandémie de COVID-19 a révélé que les entreprises qui avaient des règles de diligence raisonnable s’en sortaient mieux que les autres, a affirmé un orateur.

Des appels ont en outre été lancés pour que les sociétés commerciales agissent d’une manière transparente et éthique. Un intervenant a insisté sur la responsabilité qu’ont les Etats de protéger leurs citoyens et les communautés vulnérables des incidences négatives des activités commerciales. Certains orateurs ont plaidé pour que davantage d’efforts soient déployés en direction de la prévention, des réparations et des voies de recours pour les personnes et communautés affectées.

Des institutions nationales des droits de l’homme (INDH) ont encouragé le Groupe de travail sur les questions des entreprises et des droits de l’homme à veiller à ce que les INDH reçoivent une assistance afin de pouvoir aider à faire appliquer les Principes directeurs, notamment en les inculquant aux dirigeants et aux employés des entreprises.

Il faut aller vers l’adoption effective d’un instrument international juridiquement contraignant sur cette question, a-t-il été conseillé.

Au titre des pratiques optimales, des mesures comme la création de banques de développement durable ont été signalées.

Il a en outre été recommandé de clarifier les obligations juridiques pour éviter que les entreprises n’échappent à la reddition de comptes.

Par ailleurs, les difficultés liées à l’application du mandat de la résolution 31/36 sur la banque de données des entreprises impliquées dans certaines activités spécifiques liées aux colonies de peuplement israéliennes dans le territoire palestinien occupé ont été évoquées, et le Haut-Commissariat a été encouragé à y remédier.

On ne peut appuyer les objectifs de développement durable qu’avec des entreprises responsables, a-t-il en outre été souligné.

**Liste des intervenants : Pérou, Brésil, Cameroun, Union européenne, Bahreïn (au nom du Conseil de coopération du Golfe), Azerbaïdjan (au nom du Mouvement des pays non alignés), Equateur, Bangladesh, Tunisie, République islamique d’Iran, Suède, Irlande, Thaïlande, Fédération de Russie, Mongolie, Portugal, Maroc, France, Institut allemand pour les droits de l’homme, Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).

Réponses et remarques de conclusion des panélistes

M. PESCE a remarqué qu’aucun intervenant pendant le débat n’avait jugé les Principes inutiles. Pendant la prochaine décennie, l’accent devra porter sur les lacunes dans la mise en œuvre du devoir de diligence, qui ne doit pas être une exigence purement formelle. Il faudra en outre tenir compte des exigences des PME et de l’économie informelle, a indiqué M. Pesce. L’exemplarité de la gouvernance sera cruciale, de même que la lutte contre la corruption. Enfin, la question de la réglementation par l’État se posera aussi, a ajouté M. Pesce.

MME BURROW s’est dite impressionnée de constater que tous les intervenants ont soutenu les Principes directeurs. Les gouvernements et le système de Nations Unies devront faire preuve d’une cohérence qui manque encore dans l’application des Principes, a-t-elle ensuite souligné. Il importe, pour la qualité de la chaîne d’approvisionnement et pour le respect des droits de l’homme dans ce contexte, que les entreprises fassent preuve de la diligence requise et de transparence pendant les dix prochaines années, a-t-elle déclaré.

MME GARZA a appelé les gouvernements qui ne l’ont pas encore fait à se doter d’un plan d’application des Principes directeurs, afin que de nouvelles pratiques commerciales se traduisent par une meilleure performance en ce qui concerne les droits de l’homme. Mme Garza a en outre recommandé que les États s’entraident mutuellement pour ce faire.

MME CARLING a, quant à elle, plaidé pour une meilleure protection des peuples autochtones et des agriculteurs, moyennant une utilisation pérenne des ressources. Il faudra mettre un terme à l’impunité des États et des entreprises pour leur comportement dans le domaine des droits de l’homme, faute de quoi les buts des Principes directeurs et les objectifs de développement durable ne seront pas atteints, a mis en garde Mme Carling. Elle a appelé les États à créer d’urgence des cadres juridiques garants des droits des peuples autochtones.

 

HRC21.076F