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La Conférence du désarmement tient un débat sur la vérification du désarmement nucléaire

Compte rendu de séance

 

La Conférence du désarmement a tenu ce matin, en présence de Mme Tatiana Valovaya, Directrice générale de l’Office des Nations Unies à Genève et Secrétaire générale de la Conférence du désarmement, un débat sur la cessation de la course aux armements nucléaires et le désarmement nucléaire, l’accent portant sur la vérification du désarmement nucléaire.

Le débat a compté avec les contributions de deux panélistes : M. Jørn Osmundsen, Envoyé spécial de la Norvège pour les affaires de désarmement et Président-désigné du Groupe d'experts gouvernementaux créé en 2019 par l'Assemblée générale pour examiner plus avant les questions de vérification du désarmement nucléaire ; et M. Pavel Podvig, chercheur principal sur les armes de destruction massive et autres armes stratégiques à l'Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement.

M. Osmundsen a évoqué les travaux du Groupe d’experts gouvernementaux des questions de vérification du désarmement nucléaire, qui avait été créé en 2016 par l’Assemblée générale. Ce Groupe d’experts était parvenu à la conclusion, notamment, que faire progresser le désarmement nucléaire était une entreprise permanente et qu’il était nécessaire de poursuivre l'examen international de la question sous tous ses aspects, y compris la vérification.

À cet égard, a indiqué M. Osmundsen, le nouveau Groupe d’experts gouvernementaux, dont la première réunion aura lieu cet automne, examinera plus avant les questions de vérification du désarmement nucléaire, notamment la possibilité de créer un groupe d’experts scientifiques et techniques.

M. Podvig a relevé que la vérification du désarmement nucléaire pouvait être épineuse, compte tenu des impératifs de sécurité qui compliquent le jugement porté par les différents États sur leurs obligations respectives à cet égard. L’expert a recommandé de ne pas rester focalisé sur les solutions techniques à la vérification, l’élément humain restant très important, et a mis en garde contre le suivi à distance, qu’il a jugé contre-productif.

Pendant le débat, des délégations ont insisté sur le caractère essentiel d’une vérification crédible dans le cadre du processus de désarmement nucléaire, les mesures de vérification devant être solides et réalisables. Il a été demandé que des engagements pratiques et réalistes soient pris en vue d’un monde exempt d’armes nucléaires, avec notamment le respect effectif de l’article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). Le TNP reste la pierre angulaire du régime de désarmement mondial, ont souligné les intervenants.

Les délégations suivantes ont pris part au débat ce matin : Finlande, République de Corée, États-Unis, Kazakhstan, Suisse, Espagne, Argentine, Allemagne, Fédération de Russie et Japon.

À l’ouverture de la séance, l’Ambassadeur Yuri Sterk, de la Bulgarie, Président de la Conférence, a souhaité la bienvenue à la nouvelle Représentante permanente de la Finlande à la Conférence.

 

La Conférence poursuivra ce débat demain à partir de 10 heures.

 

Débat sur la cessation de la course aux armements nucléaires et le désarmement nucléaire, avec un accent sur la vérification du désarmement nucléaire

Introduction

Le Président de la Conférence du désarmement, l’AMBASSADEUR YURI STERK de la Bulgarie, a d’abord rappelé que l’Assemblée générale, dans sa résolution 71/67 (2016), avait créé un Groupe d’experts gouvernementaux des questions de vérification du désarmement nucléaire. Ultérieurement, en 2019, l’Assemblée générale, par sa résolution 74/50, a engagé la Conférence du désarmement et la Commission du désarmement à analyser les questions de vérification du désarmement nucléaire, notamment en examinant quant au fond le rapport du Groupe d’experts gouvernementaux des questions de vérification du désarmement nucléaire.

Compte tenu de la tâche que l'Assemblée générale a ainsi confiée à la Conférence, le Président a estimé pertinent de discuter du rôle de la vérification dans le cadre de la Conférence du désarmement, et plus particulièrement de rechercher une compréhension commune des prochaines mesures pratiques possibles concernant la vérification du désarmement nucléaire.

Présentations des panélistes

M. JØRN OSMUNDSEN, Envoyé spécial de la Norvège pour les affaires de désarmement et Président-désigné du Groupe d'experts gouvernementaux créé en vertu de la résolution 74/50 de l'Assemblée générale, a d’abord rappelé que le premier « Groupe d’experts gouvernementaux des questions de vérification du désarmement nucléaire », créé en 2016 par la résolution 71/67 de l’Assemblée générale, avait identifié, au terme de ses travaux, plusieurs principes, notamment le fait que la vérification du désarmement nucléaire devait être conforme aux principes énoncés dans le document final de la première Session extraordinaire de l’Assemblée générale consacrée au désarmement en 1978 et aux principes de vérification de la Commission du désarmement des Nations Unies ; le fait que les mesures de vérification doivent être décidées par les parties à des traités spécifiques ; et l’importance de la conformité de la vérification aux exigences de sûreté et de sécurité nationales.

Le Groupe était parvenu à la conclusion que faire progresser le désarmement nucléaire était une entreprise permanente, et qu’il était nécessaire de poursuivre l'examen international de la question sous tous ses aspects, y compris la vérification. Le Groupe concluait en outre qu’un régime de vérification crédible, dans lequel tous les États ont confiance, serait essentiel pour maintenir un monde sans armes nucléaires ; et que les mesures de confiance pouvaient compléter les accords de vérification du désarmement nucléaire entre les parties chargées de la mise en œuvre d'un traité spécifique.

Le Groupe d’experts gouvernementaux des questions de vérification du désarmement nucléaire avait recommandé, notamment, que d’autres travaux se rapportant au rôle de la vérification dans la progression du désarmement nucléaire soient envisagés à la lumière de son propre rapport.

À cet égard, a indiqué M. Osmundsen, le nouveau Groupe d’experts gouvernementaux prévu par la résolution 74/50 de l’Assemblée générale a été nommé l'automne dernier par le Secrétaire général. Composé de vingt-cinq participants, le Groupe est chargé d’examiner plus avant les questions de vérification du désarmement nucléaire, notamment la possibilité de créer un groupe d’experts scientifiques et techniques, sur la base du rapport du Groupe d’experts gouvernementaux des questions de vérification du désarmement nucléaire. Le Groupe se réunira à Genève pour quatre sessions d'une semaine chacune en 2021 et 2022, la première fois en novembre prochain.

Dans sa propre présentation, M. PAVEL PODVIG, chercheur principal sur les armes de destruction massive et autres armes stratégiques à l'Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR), a donné une définition de la « vérification » comme un ensemble d’activités, outils, processus et jugements relatifs aux démarches entreprises dans le cadre d’un accord ou d’un traité donné. La communauté internationale a déjà une longue expérience de la vérification d’accords bilatéraux, sur laquelle la vérification du désarmement nucléaire pourrait s’appuyer, a relevé M. Podvig.

Les éléments essentiels d’un régime de vérification solide sont l’inspection, la vérification, les procédures et le règlement des différends, nécessaires pour susciter la confiance. La vérification du désarmement nucléaire peut être épineuse, compte tenu des obligations de non-prolifération, mais aussi des impératifs de sécurité, qui compliquent le jugement porté par les différents États sur leurs obligations respectives à cet égard, a précisé M. Podvig.

De grands investissements ont été consentis pour doter les pays d’outils techniques de vérification, a relevé l’expert. À cet égard, les visites sur place, l'utilisation d'appareils de détection des radiations et d'autres mesures de vérification intrusives qui sont désormais la norme, étaient autrefois considérées comme inimaginables, a constaté M. Podvig. Il est même possible de concevoir un régime de vérification qui n’exigerait pas d’accéder directement aux armes concernées.

Mais, a-t-il ajouté, il ne faut pas rester focalisé sur les solutions techniques. Un suivi à distance est contre-productif, l’élément humain restant très important, a insisté l’expert.

Le désarmement nucléaire n’est envisageable que dans le cadre d’un processus de coopération, a encore relevé M. Podvig. Il a recommandé de mettre en place un système qui assure cette coopération, y compris en mettant au point de nouveaux outils, voire en créant une nouvelle organisation.

Aperçu du débat

Pendant le débat, des délégations ont insisté sur le caractère essentiel d’une vérification crédible dans le cadre du processus de désarmement nucléaire, les mesures de vérification devant être solides et réalisables. La vérification présente des aspects techniques et humains, ces derniers étant très importants pour instaurer la confiance entre les parties, ont dit des délégations. La vérification n'est pas une fin en soi et doit être comprise dans le contexte plus large, ou comme une partie intégrante, du désarmement nucléaire, a-t-il été relevé.

Une délégation s’est dit convaincue qu'avant d'examiner les questions de vérification, la communauté internationale devrait élaborer un modèle réaliste de désarmement nucléaire multilatéral fondé sur un ensemble de facteurs affectant la stabilité stratégique et impliquant tous les États possédant un potentiel d'armes nucléaires. Pour cette délégation, chaque accord doit être doté d’un mécanisme de vérification spécifique, car il n'existe pas de modèle « universel » de mécanisme de vérification ni de procédure de vérification « obligatoire ».

Une délégation a fait observer que la coopération entre les techniciens et les scientifiques qui effectuent les vérifications est souvent la pierre angulaire sur laquelle peut se construire une autre coopération, souvent plus difficile.

Un intervenant a estimé que le Partenariat international sur la vérification du désarmement nucléaire avait déjà renforcé la confiance dans le fait que la vérification multilatérale était possible.

Plus généralement, une délégation a regretté le manque d’élan actuel s’agissant des négociations sur le désarmement nucléaire, en dépit de la reconduction du traité New START. Les approches traditionnelles de réduction des vecteurs ou de certaines catégories d'armes nucléaires pourraient ne plus répondre aux défis posés par les nouvelles réalités stratégiques, a relevé cette délégation, qui a encouragé les États dotés d'armes nucléaires à intensifier les réflexions vers une nouvelle génération d'accords de maîtrise des armements.

Une autre délégation a demandé que des engagements pratiques et réalistes soient pris en vue d’un monde exempt d’armes nucléaires, avec notamment le respect effectif de l’article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). Elle a recommandé que la communauté internationale appuie les travaux du Groupe d’experts gouvernementaux présentés en 2019 à l’Assemblée générale, qui contiennent des principes importants sur la base desquels construire un mécanisme de vérification complète et efficace.

Le TNP reste la pierre angulaire du régime de désarmement mondial, ont estimé plusieurs intervenants. En l'appliquant, les États dotés d'armes nucléaires devraient s'efforcer d'instaurer la confiance avec les États non dotés d'armes nucléaires, ont relevé certaines délégations. Les orateurs ont exprimé l'espoir que le document final issu de la prochaine Conférence d'examen du TNP favoriserait l'élaboration de mesures de vérification du désarmement nucléaire.

Les États « qui ne respectent pas leurs obligations en matière de vérification au titre du TNP » ont été appelés à prendre les mesures nécessaires pour s’y conformer. Les membres permanents du Conseil de sécurité ont été appelés à améliorer la transparence sur leurs doctrines nucléaires.

Des délégations ont recommandé que la Conférence entame des négociations sur un traité d’interdiction de la production de matières fissiles. Il a été regretté que la Conférence n’ait pu établir des organes subsidiaires sur l'ensemble des points à son ordre du jour. D’autres remarques ont été faites sur les méthodes de travail de la Conférence dans le cadre des restrictions imposées par la COVID-19.

La nécessaire participation des femmes aux activités liées au désarmement a été mise en avant.

 

DC21.018F