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LE COMITÉ DES DISPARITIONS FORCÉES OUVRE SA DIX-HUITIÈME SESSION

Compte rendu de séance
Il entend le témoignage d’une mère de victime de disparition forcée et suspend sa session jusqu’à l’ouverture de la prochaine

C’est par une séance tenue en ligne que le Comité des disparitions forcées a ouvert cet après-midi sa dix-huitième session, avant de la suspendre jusqu’au 7 septembre – date prévue à ce stade pour sa reprise afin de la clore officiellement. Il a notamment adopté son ordre du jour provisoire et entendu une déclaration d’ouverture de M. Ibrahim Salama, Chef du Service des traités de droits de l'homme au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, ainsi qu’une déclaration de M. Mohammed Ayat, Président du Comité, dont lecture a été donnée par M. Olivier de Frouville, Vice-Président de cet organe.

Le Comité a également entendu le témoignage d’une Colombienne mère d’une victime de disparition forcée.

Dans sa déclaration d’ouverture de la session, M. Salama a souligné que c'est la première fois dans l'histoire des organes de traités qu'un comité tient une session en ligne. L'importance n'est pas le format de la réunion, a-t-il observé, mais le message envoyé par le Comité, à savoir que la Convention reste une réalité pour tous les États et pour toutes les victimes du crime de disparition forcée.

La Convention est claire : aucune circonstance exceptionnelle ne peut être invoquée pour justifier une disparition forcée, un principe qui s'applique évidemment dans le cadre de la COVID-19, a insisté M. Salama, avant de se dire préoccupé par la persistance des disparitions forcées au cours des dernières semaines dans certaines régions du monde. La COVID-19 ne peut en aucun cas servir d'excuse aux disparitions de personnes, a-t-il rappelé.

La Convention est également claire lorsqu'elle stipule que dès que les autorités compétentes apprennent qu'une personne a été victime d'une disparition, elles doivent commencer les recherches sans délai, même en l’absence de plainte. En effet, chaque jour qui passe expose une victime à un risque supplémentaire de mauvais traitements et de décès, a indiqué M. Salama. Les États ont également l'obligation de veiller à ce que la récupération, l'identification, la déclaration et la restitution aux familles des dépouilles des personnes décédées soient effectuées de manière scientifiquement rigoureuse, digne et respectueuse. Là encore, ces principes doivent être respectés, même dans le cadre de la COVID-19.

Le rôle du Comité reste crucial, a rappelé M. Salama : donner des conseils aux États, aux victimes et aux organisations qui les accompagnent ; et veiller au respect constant des principes de la Convention. M. Salama a ensuite fait savoir que le troisième rapport du Secrétaire général sur la « Situation du système des organes conventionnels des droits de l’homme » (A/74/643) pointait les difficultés qui restent à relever, y compris la nécessité urgente de prévoir un financement pour toutes les activités prescrites.

Pour conclure, M. Salama s’est fait l’écho du Secrétaire général lorsqu'il a déclaré : « En respectant les droits de l'homme en cette période de crise, nous mettrons en place des solutions plus efficaces et plus globales pour l'urgence d'aujourd'hui et la reprise de demain ».

Dans sa déclaration lue par M. de Frouville, le Président du Comité, M. Ayat, indique qu’à ce jour depuis sa création, le Comité a mené 33 dialogues interactifs avec les Etats parties à la Convention. Il regrette par ailleurs que 19 des Etats parties n’aient pas encore présenté leur rapport initial et explique que c’est pour remédier à cette situation que le Comité a décidé que lorsqu’un Etat n’a pas présenté son rapport initial dans un délai de cinq ans après l’entrée en vigueur de la Convention dans cet Etat, sa situation peut être examinée en l’absence de rapport.

Le Comité concentre une grande partie de son travail sur les Actions Urgentes ; leur nombre ne cesse d’augmenter et avoisine aujourd’hui les 900 cas, avec une augmentation de 79% de demandes entre 2018 et 2019, poursuit le Président, avant de souligner que le travail du Comité ne cesse donc d’augmenter alors que cet organe continue de souffrir d’une carence regrettable des moyens mis à disposition.

Une autre question importante reste la ratification de la Convention, ajoute M. Ayat. Durant l’année 2019, trois Etats ont ratifié la Convention, portant à 62 le nombre de ratifications de cet instrument, mais ce nombre reste insuffisant, affirme-t-il.

Il faut rester vigilants pour assurer que les droits de l’homme soient respectés, aussi bien durant la crise de COVID-19 que lorsqu’elle touchera à sa fin, poursuit le Président du Comité. L'ONU et les organes de traité ont un rôle primordial à jouer à cet égard, souligne-t-il, rappelant que nul ne doit jamais être soumis à une disparition forcée.

Dans certains pays, pour répondre à la pandémie, des corps ont pu être brûlés à la hâte, sans identification préalable, regrette en outre M. Ayat, avant d’ajouter qu’il pense aux familles qui craignent que leurs disparus aient subi un tel sort. Les défis soulevés par le COVID-19 sont multiples et leurs dimensions sont encore difficiles à mesurer. Cependant, une chose est sûre : ces défis rappellent aux États leur obligation en vertu des traités internationaux relatifs aux droits de l'homme – des obligations qui doivent constamment et impérativement guider leurs actions, conclut M. Ayat.

Le Comité a ensuite entendu le témoignage de Mme Noémie Barbosa Gonzalez, qui a expliqué que son fils avait été victime de disparition forcée à l’âge de 32 ans, le 7 juin 2014, et qu’elle se battait depuis plus de 5 ans pour le retrouver. Le Gouvernement colombien n'a pas apporté le soutien auquel elle pouvait s'attendre en tant que mère d'une personne disparue, a-t-elle déclaré. Elle a expliqué avoir déposé une demande d'action urgente auprès du Comité, qui a répondu immédiatement à sa demande et qui continue de la soutenir en lui transmettant les informations reçues de l'État et en répondant à ses questions. En attendant que son fils soit retrouvé, Mme Barbosa Gonzales a indiqué qu’elle avait trouvé du réconfort en voyant que le Comité était présent à ses côtés. Elle l’a imploré de continuer à fournir une assistance aux victimes pour veiller à ce que les autorités concernées fassent ce qui doit être fait pour retrouver les personnes disparues.

S’exprimant au nom de M. Ayat, Mme Carmen Rosa Villa Quintana, membre du Comité, a remercié Mme Barbosa Gonzalez dont elle a dit que, comme toutes les victimes de disparitions forcées, elle était un exemple de persévérance, de courage et d'amour. Les victimes sont la raison d’être du Comité, a souligné l’experte, avant d’exhorter les États à s'acquitter de leurs obligations au titre de la Convention.

Poursuivant sa séance à huis clos, le Comité a examiné et adopté cet après-midi ses listes de questions en vue de l’examen ultérieur de l’application de la Convention au Panama et au Brésil.

Cette 18ème session, pour l’heure suspendue, sera officiellement clôturée au début de la dix-neuvième session du Comité, qui devrait se tenir du 7 septembre au 25 septembre.

Le Comité sur les disparitions forcées (CED) est un organe d'experts indépendants chargé de surveiller la mise en œuvre de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées par les États qui l’ont ratifiée.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel


CED20.001E