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Le Comité des droits de l'homme tient une réunion informelle avec les États parties au Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Compte rendu de séance

 

Le Comité des droits de l'homme a tenu, cet après-midi, sa treizième réunion informelle avec les États parties au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le débat a essentiellement porté sur l’amélioration du fonctionnement du Comité et sur le retard accumulé dans l’examen des communications (plaintes individuelles) soumises au titre du premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

La précédente réunion informelle avec les États parties avait eu lieu en juillet 2022.

Ouvrant le dialogue cet après-midi, la Présidente du Comité, Mme Tania María Abdo Rocholl, a notamment souligné que les dialogues entre le Comité des droits de l’homme et les États parties constituaient un pilier important de l'ensemble du système des droits de l'homme des Nations Unies, et que le Comité avait pu vérifier que, dans certaines occasions, la détection précoce de situations contraires au Pacte permettait d'éviter des conflits de plus grande ampleur.

Mme Abdo Rocholl a mentionné les progrès réalisés par le Comité en ce qui concerne ses méthodes de travail, s’agissant en particulier du calendrier prévisible de l’examen des rapports des États parties et de la procédure de rapport simplifiée – à laquelle de très nombreux États ont adhéré, a-t-elle fait remarquer.

Mme Kobauyah Tchamdja Kpatcha, Vice-Présidente du Comité, a indiqué que le Comité des droits de l'homme recevait et enregistrait le plus grand nombre de communications [plaintes au titre du premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte] par rapport à tous les autres organes de traités réunis. À l'heure actuelle, le Comité a 1341 affaires en attente d'examen, dont 659 sont prêtes à être rédigées, a-t-elle précisé.

M. José Manuel Santos Pais, Vice-Président du Comité, a expliqué que le Comité n’avait pas, en l’état, la possibilité de résorber les communications en attente. Du fait de la crise des liquidités, a-t-il ajouté, le Comité ne sait pas si ses deux prochaines sessions auront bien lieu, a-t-il indiqué.

Pour sa part, M. Changrok Soh, également Vice-Président du Comité, a évoqué l’impact potentiellement positif de la numérisation des travaux du Comité.

Plusieurs délégations* ont pris part au dialogue avec le Comité. Leurs représentants se sont interrogés, entre autres, sur l’harmonisation des méthodes de travail des organes de traités et sur le traitement des communications toujours plus nombreuses dont le Comité est saisi. La situation à Gaza a aussi été évoquée.

Lors d’une réunion publique qui se tiendra mercredi prochain, à 15 heures, le Comité se penchera sur les rapports concernant le suivi de ses observations finales (adoptées suite à l’examen des rapports d’États parties) et de ses vues (constatations adoptées à l’issue de l’examen des plaintes individuelles).

Aperçu du débat

Présentations

MME TANIA MARÍA ABDO ROCHOLL, Présidente du Comité des droits de l’homme, a rappelé que les présidents des organes de traités s’étaient réunis à New York en mai 2023 pour discuter de l'harmonisation des méthodes de travail des organes conventionnels, de leur coordination sur des questions transversales, ainsi que de la préparation de propositions concrètes en vue, notamment, de répondre aux multiples demandes des États pour éviter les chevauchements entre les travaux des différents organes de traités.

En ce qui concerne les méthodes de travail, Mme Abdo Rocholl a fait savoir que le Comité avait progressé dans les domaines suivants : calendrier prévisible de l’examen des rapports des États parties ; procédure de rapport simplifiée, à laquelle de très nombreux États ont adhéré ; meilleure utilisation du temps lors des dialogues ; ou encore, en ce qui concerne le premier Protocole facultatif, introduction des travaux en deux chambres, afin d’accélérer la procédure. Mme Abdo Rocholl a aussi évoqué certains problèmes auxquels le Comité se heurte, en particulier la difficulté de respecter le multilinguisme dans tous ses travaux et, de manière plus générale, la crise financière que traversent les Nations Unies.

Les dialogues entre le Comité des droits de l’homme et les États parties [dans le cadre de l’examen des rapports de ces derniers] constituent un pilier important de l'ensemble du système des droits de l'homme des Nations Unies, a ajouté la Présidente, indiquant que le Comité avait pu vérifier que, dans certaines occasions, la détection précoce de situations contraires au Pacte permettait d'éviter des conflits de plus grande ampleur.

Mme Abdo Rocholl a assuré que le Comité était déterminé à remplir son mandat, étant entendu que les organes de traités représentent une plate-forme professionnelle et apolitique de protection et de promotion des droits de l'homme – une « plate-forme dont l'importance et la nécessité n'ont jamais été aussi grandes », a-t-elle affirmé.

M. JOSÉ MANUEL SANTOS PAIS, Vice-Président du Comité, a évoqué les activités du Comité au titre de la procédure de présentation des rapports des États parties. Il a rappelé que le Comité avait décidé, en 2020, de passer à un cycle d'examen prévisible sur huit ans. Les 173 États parties ont été répartis en huit groupes ; chaque État partie est examiné en fonction de son calendrier de présentation ou, dans le cas des États parties en retard ou n'ayant pas présenté de rapport, en fonction de la durée du retard. Deux ans avant l'examen, l'État partie reçoit une liste de questions à traiter avant de présenter son rapport ; un an avant l'examen, il est censé répondre à la liste de questions ; enfin, deux ans après l'examen, il lui est demandé de fournir un rapport de suivi sur la mise en œuvre de trois recommandations prioritaires figurant dans les observations finales.

Le rapport de suivi permet d'espacer les examens tous les huit ans, réduisant ainsi la charge de travail, a expliqué M. Santos Pais, avant de donner d’autres explications concernant la manière dont le Comité formule les listes de questions à traiter.

M. Santos Pais a notamment précisé que la plupart des États (165) avaient accepté la nouvelle procédure simplifiée de présentation, adoptée par le Comité en 2018 en tant que nouvelle procédure normale ; et que le Comité avait adopté une structure identique pour toutes ses observations finales, soit : introduction, aspects positifs, facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre du Pacte, principales préoccupations et enfin suggestions et recommandations.

S’agissant ensuite du premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte, qui institue la procédure de communication (plainte) devant le Comité, MME KOBAUYAH TCHAMDJA KPATCHA, Vice-Présidente du Comité, a indiqué qu’en ce qui concerne le nombre d'affaires traitées et enregistrées (comprenant, parfois, des demandes de mesures provisoires), en 2023, le Secrétariat des organes de traités avait eu à traiter en moyenne 3600 correspondances par semaine, dont 2802 communications reçues de nouveaux auteurs. Les cas enregistrés par le Comité des droits de l'homme représentaient environ 66 % de tous les cas enregistrés en 2023 par les organes de traités, avec une augmentation de 28% des cas enregistrés par rapport à 2022, a-t-elle précisé.

L’augmentation constante des communications reçues est liée, entre autres, aux conflits armés et à la tendance actuelle des individus à se tourner beaucoup plus vers le Comité que vers d’autres mécanismes régionaux de règlement des différends, a analysé Mme Tchamdja Kpatcha.

Elle a ajouté que de plus en plus d’affaires soumises concernent des demandes de mesures provisoires de protection visant à éviter des dommages irréparables. Lorsqu'il constate une violation, le Comité identifie des mesures de réparation personnalisée avec, le cas échéant, des mesures législatives et politiques générales ; quelque 50% des décisions prises par le Comité (suite à l’examen des plaintes) portent sur des constatations de violation des dispositions du Pacte.

Le niveau de mise en œuvre des décisions du Comité dans ce contexte reste assez faible et insatisfaisant, a relevé Mme Tchamdja Kpatcha. À l'heure actuelle, 1338 cas font l'objet d'une procédure de suivi, a-t-elle précisé.

Le Comité des droits de l'homme est le Comité qui reçoit et enregistre le plus grand nombre de communications (plaintes) par rapport à tous les autres comités réunis, et il gère un nombre croissant de cas, a insisté Mme Tchamdja Kpatcha. À l'heure actuelle, le Comité a 1341 affaires en attente d'examen, dont 659 sont prêtes à être rédigées, a-t-elle précisé. Le Secrétariat ne peut pas traiter un tel nombre de communications avec ses ressources et cette situation est aggravée par la crise de liquidité actuelle, a-t-elle fait remarquer.

M. CHANGROK SOH, Vice-Président du Comité, a pour sa part rappelé que, depuis plusieurs années, le Comité plaidait en faveur d'une transformation numérique du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, afin qu’il puisse gérer efficacement les processus de travail liés aux rapports (des États parties) et aux communications (plaintes individuelles). D’une manière générale, les neuf organes onusiens créés en vertu de traités internationaux relatifs aux droits de l’homme estiment que la transformation numérique est la voie à suivre pour relever certains des défis les plus urgents pour leur travail. Cette transformation peut en effet améliorer l'efficacité et l'accessibilité des procédures, renforcer la capacité d'analyse afin d'exploiter toutes les informations provenant des parties prenantes, et améliorer la visibilité du travail des comités grâce à une présence renforcée dans le monde numérique.

Le Comité a donc été très heureux d'apprendre que le Haut-Commissariat a mis en place un bureau chargé de diriger l'effort de transformation numérique à l'échelle de l'Organisation, a dit M. Soh, avant d’encourager les États parties à apporter des contributions durables à ce programme.

Sur le fond, a en outre fait remarquer M. Soh, le paysage numérique actuel crée de nouveaux risques de violations des droits de l’homme. Il a rappelé à cet égard les résolutions du Conseil des droits de l’homme sur, entre autres, l’intelligence artificielle.

M. IBRAHIM SALAMA, Chef de la branche des organes de traités au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, a souligné la spécificité du Comité des droits de l’homme, en particulier le fait que cet organe est celui qui a le plus d’influence en matière normative et dans la formulation de grands principes. Cette activité est importante pour les États Membres, surtout dans le contexte géopolitique actuel, a-t-il estimé. M. Salama a aussi mis en avant le rôle quasi-judiciaire joué par le Comité dans l’examen des communications dont il est saisi.

M. Salama a ensuite attiré l’attention des États parties sur les efforts d’harmonisation des travaux des organes de traités qui ont été consentis depuis une quinzaine d’années. Il a relevé que si le système des organes de traités continuait de fonctionner malgré la crise budgétaire, le crédit en revenait au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, qui met à disposition des différents comités des contributions d’origine extrabudgétaire.

Dialogue

Dans leurs interventions, plusieurs représentants des États Membres ont dit appuyer le Comité et l’ensemble du système des organes de traités , estimant qu’ils jouaient un rôle majeur dans l’architecture contemporaine des droits de l’homme. Le Comité des droits de l’homme en particulier est l’épine dorsale du système des organes de traités, a estimé une délégation.

L’harmonisation des méthodes de travail des organes de traités a été jugée très importante ; en effet, les délégations doivent savoir à quoi s’attendre lorsqu’elles viennent défendre les rapports de leur pays devant les différents comités, a fait remarquer un intervenant. Quant au calendrier prévisible, il doit garantir une répartition équilibrée des travaux et éviter les redondances inutiles, a-t-il été recommandé.

Plusieurs délégations ont insisté sur l’importance du respect du multilinguisme dans les dialogues du Comité avec les États parties et dans la publication des rapports. A par ailleurs été recommandée une meilleure coordination du Comité avec des mécanismes tels que l’Examen périodique universel (EPU) du Conseil des droits de l’homme ou encore les juridictions régionales en matière de droits de l’homme.

Une délégation a salué l’utilisation par le Comité des nouvelles technologies comme autant d’outils efficaces pour mieux faire appliquer le Pacte. Une délégation a estimé très important de pouvoir dialoguer avec le Comité par le biais de dialogues hybrides, ou en ligne. Il a été suggéré que le Comité explore la possibilité de dialoguer avec les États parties selon d’autres modalités encore.

L’explosion du nombre des communications (plaintes individuelles) ne permet pas toujours au Comité de prendre des décisions qui tiennent compte des jugements déjà prononcés par les tribunaux nationaux, a fait remarquer une délégation. Des questions ont porté sur les mesures envisageables pour combler l’arriéré dans le traitement des communications. Certains intervenants ont mentionné l’incidence de la crise des liquidités actuelle sur l’examen des plaintes individuelles par le Comité et donc sur le sort des personnes qui viennent demander son aide.

Plusieurs intervenants ont estimé que les recommandations formulées par le Comité devaient être concises et applicables, et tenir compte des particularités de chaque pays.

A aussi été évoquée cet après-midi la situation à Gaza, en particulier la mort de plus de 31 000 personnes depuis six mois et les conditions de famine qui y règnent actuellement du fait des actes de la puissance occupante. En Palestine, l’article 6 du Pacte sur le droit à la vie est bafoué non pas depuis octobre 2023, mais depuis 1948, a-t-il été affirmé.

La délégation palestinienne a appelé le Comité à formuler un appel sans équivoque à un cessez-le-feu immédiat. La situation à Gaza est due au comportement inhumain du Hamas, dont les attaques terroristes d’octobre 2023 et les actes de torture contre des Israéliens doivent être dénoncés, de même que son utilisation de structures civiles à des fins militaires, a pour sa part déclaré la délégation israélienne.

* Ont participé à la discussion : le Portugal, le Paraguay, le Maroc, le Costa Rica, l’Égypte, la Colombie, l’Espagne, la France, l’État de Palestine, le Royaume-Uni, Israël et l’Angola.

Dans ses réponses aux observations des représentants des États parties, Mme Abdo Rocholl a assuré que l’article 6 du Pacte était d’une importance cruciale pour le Comité et a assuré que tous les commentaires faits cet après-midi seraient dûment pris en compte par les membres du Comité.

La Présidente du Comité a par ailleurs fait remarquer que les réunions en ligne étaient, pour des raisons techniques, difficiles à organiser dans de bonnes conditions.

Le Comité n’a pas, en l’état, la possibilité de résorber les communications en attente, a pour sa part indiqué M. Santos Pais. De plus, le Secrétariat ne dispose que de deux personnes capables de traiter les nombreuses communications reçues en langue russe par le Comité, a-t-il expliqué.

Du fait de la crise des liquidités, le Comité ne sait pas si ses deux prochaines sessions auront bien lieu, a en outre indiqué M. Santos Pais. Il a plaidé pour un modèle de financement qui permette d’appuyer de façon plus prévisible le travail des organes de traités.

MME WAFAA ASHRAF MOHARRAM BASSIM, membre du Comité, a insisté sur l’importance du multilinguisme et a souligné que le Comité était résolu à trouver des solutions créatives à la crise financière. L’experte a par ailleurs espéré que les parties concernées par le conflit à Gaza et la communauté internationale feraient tout leur possible pour obtenir un cessez-le-feu et mettre fin au conflit.

 

 

 

 

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CCPR24.009F