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Le Conseil adopte une résolution sur la lutte contre la haine religieuse constituant une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence et se penche sur les situations en République centrafricaine et en Ukraine

Compte rendu de séance

 

Suite au débat urgent qu’il a tenu hier sur « l'augmentation alarmante des actes prémédités et publics de haine religieuse qui se manifestent par la profanation récurrente du Saint Coran dans certains pays d'Europe et d'ailleurs », le Conseil des droits de l’homme a adopté ce matin, par 28 voix pour, 12 contre et 7 abstentions, une résolution par laquelle il condamne et rejette fermement toute incitation et manifestation de haine religieuse, y compris les actes publics et prémédités de profanation du Saint Coran commis récemment, et demande aux États d’adopter des lois, politiques et cadres répressifs nationaux pour remédier, prévenir et poursuivre les actes et les appels à la haine religieuse qui constituent une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence, et de prendre des mesures immédiates pour garantir la responsabilisation.

Dans ce texte, le Conseil exhorte le Haut-Commissaire aux droits de l’homme et tous les titulaires de mandat au titre de ses procédures spéciales qui sont concernés, ainsi que les organes de traités, dans le cadre de leurs mandats respectifs, à dénoncer l’incitation à la haine religieuse, y compris les actes de profanation de livres sacrés qui pourraient constituer une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence, et à formuler des recommandations sur la manière de répondre à ce phénomène.  Il décide en outre d’organiser, à sa cinquante-cinquième session, une réunion-débat d’experts afin de recenser les moteurs, les causes profondes et les effets sur les droits de l’homme de la profanation de livres sacrés, de lieux de culte et de symboles religieux et de mettre en évidence les lacunes qui pourraient exister dans les lois, les politiques, les pratiques et l’application de la loi qui font obstacle à la prévention et à la poursuite de tels actes publics et prémédités, et de proposer des mesures […] dissuasives […] afin de lutter contre ces actes.

Le Conseil a par ailleurs tenu ce matin un dialogue avec l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine, M. Yao Agbetse.  Il a en outre engagé son dialogue autour de la mise à jour orale du Haut-Commissaire aux droits de l’homme, M. Volker Türk, présentant les conclusions du rapport périodique du Haut-Commissariat sur la situation des droits de l’homme en Ukraine et autour du rapport du Secrétaire général sur la situation des droits de l’homme dans la République autonome de Crimée et la ville de Sébastopol (Ukraine) temporairement occupées.

Présentant sa mise à jour orale sur l’Ukraine, M. Türk a notamment indiqué que le Haut-Commissariat avait documenté la détention arbitraire de plus de 900 civils, dont huit enfants, entre le 24 février 2022 et le 23 mai 2023, 864 cas ayant été perpétrés par la Fédération de Russie. Plus de 90% des détenus par la Fédération de Russie interrogés ont déclaré avoir été soumis à la torture et à des mauvais traitements – y compris des violences sexuelles – par le personnel de sécurité russe, a-t-il ajouté. Le Haut-Commissariat a aussi documenté des cas qui suggèrent que des civils détenus ont été utilisés par les forces armées russes comme « boucliers humains ». M. Türk a demandé que la Fédération de Russie prenne des mesures concrètes pour que son personnel respecte le droit international humanitaire et relatif aux droits de l’homme.

Quant au rapport du Secrétaire général, il documente, en Crimée et dans les zones occupées de l’Ukraine, des violations massives des droits à la liberté d’opinion, d’expression, de réunion pacifique et d’association, y compris de nouvelles sanctions pour avoir exprimé publiquement des opinions qui « discréditent » les forces armées russes. Le Haut-Commissaire s’est dit profondément préoccupé par le fait que le Parlement de la Fédération de Russie a récemment adopté une loi qui pourrait exonérer de responsabilité pénale les auteurs d’infractions pénales internationales commises dans les régions occupées de l’Ukraine.

L’Ukraine a fait une déclaration en tant que pays concerné, avant que plusieurs délégations*** n’engagent le dialogue autour de la mise à jour orale du Haut-Commissaire et du rapport du Secrétaire général. 

Présentant des informations actualisées sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine, M. Agbetse a relevé que, sur le plan de la sécurité, la relative accalmie était en réalité un leurre : il a fait état à ce propos de plusieurs attaques, depuis avril dernier, par la Coalition des patriotes pour le changement (CPC) contre les Forces armées centrafricaines (FACA), de même que, en juin dernier, contre les forces bilatérales russes. Cette insécurité, a souligné l’Expert indépendant, accroît la dépendance de la population vis-à-vis de l’aide humanitaire, alors même que 50% de la population centrafricaine est en situation d’insécurité alimentaire.

M. Agbetse a par ailleurs fait état de témoignages et signalements de harcèlements, de violences physiques à l’encontre des personnes qui expriment des opinions contraires par rapport au référendum constitutionnel annoncée par le chef de l’État, ainsi que de nombreuses violences sexuelles liées au conflit affectant des femmes et les filles.

Sur le plan humanitaire, deux défis majeurs sont à relever, a dit l’Expert indépendant. Il s’agit d’abord de l’afflux de réfugiés soudanais vers la République centrafricaine et du rapatriement des Centrafricains qui étaient jadis refugiés au Soudan. L’autre défi a trait aux engins explosifs dans la zone Nord-Ouest. 

La République centrafricaine a fait une déclaration en tant que pays concerné, avant que de nombreuses délégations** ne participent au dialogue avec l’Expert indépendant.

Le Conseil a d’autre part achevé ce matin son dialogue renforcé, entamé hier matin, sur la coopération technique et le renforcement des capacités dans le domaine des droits de l’homme.  Il a entendu dans ce cadre les déclarations de nombreuses délégations* ainsi que les remarques de conclusion de M. Christian Salazar Volkman, Directeur de la Division des opérations sur le terrain et de la coopération technique du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, et de Mme Yvette Stevens, de Universal Rights Group Africa.

 

Cet après-midi, à partir de 15 heures, après avoir achevé son dialogue autour des rapports présentés ce matin par M. Türk, le Conseil entendra la présentation du compte rendu oral du Haut-Commissaire concernant la coopération avec la Géorgie.  Il commencera ensuite à se prononcer sur les trente projets de résolution dont il est saisi pour cette cinquante-troisième session, dont les travaux doivent s’achever vendredi prochain, 14 juillet.

 

Adoption d’une résolution sur la « Lutte contre la haine religieuse constituant une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence »

Aux termes d’une résolution intitulée « Lutte contre la haine religieuse constituant une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence » (A/HRC/53/L.23 telle qu’oralement révisée), adoptée par 28 voix pour, 12 contre et 7 abstentions, le Conseil condamne et rejette fermement toute incitation et manifestation de haine religieuse, y compris les actes publics et prémédités de profanation du Saint Coran commis récemment, et souligne la nécessité que les responsables répondent de leurs actes d’une manière conforme aux obligations des États découlant du droit international des droits de l’homme. 

Le Conseil demande aux États d’adopter des lois, politiques et cadres répressifs nationaux pour remédier, prévenir et poursuivre les actes et les appels à la haine religieuse qui constituent une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence, et de prendre des mesures immédiates pour garantir la responsabilisation.

En outre, le Conseil exhorte le Haut-Commissaire aux droits de l’homme et tous les titulaires de mandat au titre de ses procédures spéciales qui sont concernés, ainsi que les organes de traités, dans le cadre de leurs mandats respectifs, à dénoncer l’incitation à la haine religieuse, y compris les actes de profanation de livres sacrés qui pourraient constituer une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence, et à formuler des recommandations sur la manière de répondre à ce phénomène.

Le Conseil décide aussi d’organiser, à sa cinquante-cinquième session, une réunion-débat d’experts afin de recenser les moteurs, les causes profondes et les effets sur les droits de l’homme de la profanation de livres sacrés, de lieux de culte et de symboles religieux en tant que manifestation de haine religieuse qui pourrait constituer une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence ; et de mettre en évidence les lacunes qui pourraient exister dans les lois, les politiques, les pratiques et l’application de la loi qui font obstacle à la prévention et à la poursuite de tels actes publics et prémédités, et de proposer des mesures […] dissuasives […] afin de lutter contre ces actes de haine religieuse qui constituent une incitation à la discrimination, à l’hostilité ou à la violence visant certaines personnes en raison de leur religion ou de leur conviction, et qui entravent également la pleine jouissance de leurs droits et libertés fondamentaux.

Enfin, le Conseil demande au Haut-Commissariat de lui présenter un rapport sur les délibérations de la table ronde lors de sa cinquantième-sixième session.

Les États suivants ont voté en faveur de la résolution (28) : Afrique du Sud, Algérie, Argentine, Bangladesh, Bolivie, Cameroun, Chine, Côte d'Ivoire, Cuba, Emirats Arabes Unis, Érythrée, Gabon, Gambie, Inde, Kazakhstan, Kirghizistan, Malawi, Malaisie, Maldives, Maroc, , Ouzbékistan, Pakistan, Qatar, Sénégal, Somalie, Soudan, Ukraine et Vietnam.

Les États suivants ont voté contre (12) : Allemagne, Belgique, Costa Rica, États-Unis, Finlande, France, Lituanie, Luxembourg, Monténégro, Roumanie, Royaume-Uni et Tchéquie.

Les États suivants se sont abstenus (7) : Bénin, Chili, Géorgie, Honduras, Mexique, Népal et Paraguay.

Suite et fin du dialogue renforcé sur la coopération technique et le renforcement des capacités dans le domaine des droits de l’homme

Aperçu du dialogue

Nombre d’intervenants ont affirmé ce matin que l’importance de la coopération technique pour la promotion et la protection des droits de l'homme ne faisait aucun doute, et que cette coopération devait être fondée sur les principes d'objectivité, d'impartialité, de dialogue constructif et de partenariat, et s’effectuer de manière conforme aux besoins des pays concernés et avec leur consentement.

D’aucuns ont plaidé pour une meilleure coordination et une plus grande complémentarité des organes des Nations Unies chargés de la coopération, afin de renforcer les synergies et d'éviter les doubles emplois, et pour la participation des détenteurs de droits et des défenseurs des droits de l'homme à tous les stades des programmes de coopération technique.

L’appui que le Haut-Commissariat a accordé à des pays dans le cadre de la mise en œuvre des recommandations issues de l’Examen périodique universel (EPU) a été salué. Une délégation a mentionné le problème du manque de financement pour la coopération technique, y compris s’agissant du financement du Haut-Commissariat aux droits de l’homme.

Le Conseil a été prié d’accorder un soutien technique et de renforcer les capacités de peuples vivant sous occupation.  La répression de défenseurs de l’environnement a en outre été dénoncée.

*Liste des intervenants : Suisse, Australie, République arabe syrienne, Organisation de la coopération islamique, Togo, Maloca Internationale, Union of Northwest Human Rights Organisation, Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII, Global Institute for Water, Environment and Health, Legal Analysis and Research Public Union et Rajasthan Samgrah Kalyan Sansthan.

Réponses et remarques de conclusion

M. CHRISTIAN SALAZAR VOLKMAN, Directeur de la Division des opérations sur le terrain et de la coopération technique du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, a souligné que le rôle du Haut-Commissariat dans les pays est de renforcer le partenariat, surtout au niveau de la société civile. Il est important d’être présent sur le terrain car pour réaliser des progrès, il faut travailler au plus près de la société avec toutes les parties prenantes, a-t-il insisté.

M. Salazar Volkman a souligné qu’il fallait faire mieux dans le domaine de la coopération technique avec une bonne évaluation des projets et de leurs résultats.  C’est au Conseil des droits de l’homme de donner des recommandations sur les grandes orientations dans le domaine des programmes de coopération technique, a-t-il ajouté.

MME AZITA BERAR AWAD, Présidente du Conseil d'administration du Fonds de contributions volontaires pour la coopération technique dans le domaine des droits de l’homme, a

MME YVETTE STEVENS, de Universal Rights Group Africa, a relevé qu’au cours de ce dialogue, il y a eu un engagement très clair de toutes les parties pour participer aux efforts de renforcement des capacités et de coopération technique et les soutenir. Ces manifestations de soutien devraient prendre la forme d’un financement renforcé permettant au Haut-Commissariat de mieux fonctionner, a-t-elle souligné. Les investissements dans le domaine de la coopération technique sont des mesures de prévention nécessaires pour éviter que des situations n’empirent sur le terrain, a rappelé Mme Stevens.

Dialogue avec l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine

L’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine présente au Conseil des informations actualisées sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine conformément à la résolution 51/37 [du Conseil].

Présentation

M. YAO AGBETSE, Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine, a d’abord relevé que, sur le plan de la sécurité, la relative accalmie était en réalité un leurre : il a fait état à ce propos de plusieurs attaques, depuis avril dernier, par la Coalition des patriotes pour le changement (CPC) contre les Forces armées centrafricaines (FACA), de même que, en juin dernier, contre les forces bilatérales russes. Cette insécurité, a souligné l’Expert indépendant, accroît la dépendance de la population vis-à-vis de l’aide humanitaire, alors même que 50% de la population centrafricaine est en situation d’insécurité alimentaire.

S’agissant ensuite de violations des droits de l’homme, M. Agbetse a relevé qu’en juin, une enquête préliminaire au sein de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) avait révélé que onze membres du contingent tanzanien se seraient livrés à des actes d'exploitation et d'abus sexuels sur quatre victimes. Il est impératif, a demandé M. Agbetse, que tout soit mis en œuvre pour l’accès à la justice des victimes et que la République-Unie de Tanzanie engage, de bonne foi, les enquêtes nécessaires pour que les auteurs soient dûment poursuivis.

L’Expert indépendant a aussi fait état de témoignages et signalements de harcèlements, de violences physiques à l’encontre des personnes qui expriment des opinions contraires par rapport au référendum constitutionnel annoncée par le chef de l’État, ainsi que de nombreuses violences sexuelles liées au conflit affectant des femmes et les filles, y compris des viols et des mariages forcés de jeunes filles encore scolarisées.

Sur le plan humanitaire, deux défis majeurs sont à relever, a dit l’Expert indépendant. Il s’agit d’abord de l’afflux de réfugiés soudanais vers la République centrafricaine et du rapatriement des Centrafricains qui étaient jadis refugiés au Soudan. L’autre défi a trait aux engins explosifs dans la zone Nord-Ouest, à propos desquels l’Expert indépendant a demandé aux partenaires techniques et financiers de fournir les ressources nécessaires pour le déminage des zones infestées de mines.

Sur le plan politique, l‘Expert indépendant a regretté que les recommandations issues du Dialogue républicain de mars 2022 tardent à être mises en œuvre. Le 31 mai, le chef de l’État a annoncé la tenue d’un référendum constitutionnel et convoqué par décret le corps électoral pour le 30 juillet. Cette décision politique pourrait avoir des répercussions sur les droits de l’homme et la situation humanitaire si les autorités centrafricaines n’optent pas pour un processus participatif, n’expliquent pas de manière authentique les enjeux et la portée de cette modification constitutionnelle et ne prennent pas les dispositions politiques, judiciaires et autres pour lutter contre les discours de haine, y compris sur les réseaux sociaux, a mis en garde l’Expert indépendant.

M. Agbetse a estimé que pour atteindre l’objectif de la restauration de l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire national, les efforts de renforcement des capacités de l’armée et de la police par les partenaires techniques et financiers devraient se focaliser sur la formation d’une armée et d’une police disciplinées ; sur un appui technique et logistique à l’armée de la part des Casques bleus de la MINUSCA ; sur la cessation des entraves de la part des forces bilatérales russes à la coopération entre la MINUSCA et les FACA ; et sur la reconstruction des infrastructures. L’Expert indépendant a aussi demandé que les mécanismes de redevabilité soient pleinement opérationnels au sein des forces de défense et de sécurité ; M. Agbetse a demandé aux partenaires techniques et financiers de soutenir le fonctionnement des tribunaux militaires.

Pays concerné

La République centrafricaine a confirmé que les groupes armés de la Coalition des patriotes pour le changement, malgré un affaiblissement de leur capacité de nuisance par l’action concertée des Forces de défense intérieures et des alliés bilatéraux de la République centrafricaine, avaient multiplié ces trois derniers mois des attaques meurtrières, non seulement contre les positions des Forces régulières, mais également à l’endroit des populations civiles. Cependant, les forces de défense et de sécurité, désormais aguerries, ont vigoureusement réagi à ces attaques, permettant ainsi de mettre hors d’état de nuire ces ennemis de la paix, a déclaré la délégation centrafricaine.

La violence qui s’est installée sur le territoire soudanais depuis quelques mois affecte aussi le Sud-Darfour, lequel longe toute la région septentrionale de la République centrafricaine, a poursuivi la délégation. Depuis avril 2023, on a ainsi assisté à un afflux de plus de 15 000 personnes, y compris des rapatriés spontanés centrafricains fuyant les affrontements. La Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) a établi une base opérationnelle temporaire sur place. Cependant, compte tenu de l'éloignement et de l'insuffisance des infrastructures, les services et les ressources sont extrêmement limités dans cette région, a souligné la délégation centrafricaine.

Ces situations ont pour conséquence l’augmentation des besoins humanitaires, obligeant les acteurs humanitaires à revoir les prévisions initiales dans le cadre du Plan de réponse humanitaire 2023, a ajouté la délégation, précisant que « pour répondre aux besoins les plus urgents, il faut désormais mobiliser 533 millions de dollars américains ». Dans ce contexte, le Gouvernement centrafricain lance un appel à la solidarité internationale pour l’aider à faire en sorte que les réfugiés continuent d'avoir accès au territoire et à l'asile et pour faciliter la réinstallation des réfugiés loin des zones frontalières, vers des sites sûr. 

Aperçu du dialogue

La situation des droits de l’homme en République centrafricaine a été jugée très inquiétante, des délégations pointant des violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises par les groupes armés, les forces de défense et de sécurité centrafricaines et le « groupe Wagner », y compris la persistance de violences sexuelles et de violences contre les enfants, dont des recrutements forcés. D’aucuns ont jugé inacceptables les actions de forces extérieures qui cautionnent des extrémistes, car elles aggravent la situation déjà difficile du pays dans son ensemble et dans le domaine des droits de l'homme en particulier.

L’utilisation d’engins explosifs, surtout dans l’ouest du pays, entrave l’aide humanitaire et menace la population civile ainsi que les nombreuses personnes qui ont fui le conflit au Soudan pour chercher refuge en République centrafricaine, a souligné un intervenant.

Les efforts déployés par la MINUSCA pour protéger les civils ont été salués. A aussi été jugée opportune la décision de la MINUSCA de rapatrier un contingent de soixante soldats de la paix à la suite d’allégations d’abus sexuels.

Les efforts tangibles réalisés par les autorités centrafricaines pour rétablir la paix et la stabilité, notamment l’organisation d’élections locales en 2023, dans un environnement politique pacifique et inclusif, ont été reconnus. Mais plusieurs intervenants ont dit partager, sur ce point, les préoccupations de l’Expert indépendant quant aux risques que pose la tenue d’un référendum constitutionnel le 30 juillet – sur la base d’un projet dont les détails ne sont pas encore connus, mais qui permettrait au Président de se présenter à un troisième mandat, a-t-il été affirmé.

La communauté internationale a été invitée à poursuivre son soutien au Gouvernement centrafricain, afin de lui permettre d’asseoir son autorité sur l’ensemble de son territoire et de créer ainsi les conditions propices à une meilleure protection des droits de l’homme. Des délégations ont insisté sur l’importance de « trouver des solutions africaines aux problèmes africains ». L'assistance technique et le renforcement des capacités dans le domaine des droits de l'homme doivent se faire sur la base d'un dialogue et d'une coopération authentiques, toujours avec le soutien du pays concerné et sans conditionnalité, a-t-il été ajouté. 

**Liste des intervenants : Norvège (au nom d’un groupe de pays), Union européenne, Portugal, Luxembourg, France, États-Unis, Royaume-Uni, Gabon, République bolivarienne du Venezuela, Cameroun, Chine, Sénégal, Soudan, Mali, Organisation de la coopération islamique, Fédération de Russie, Human Rights Research League et Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme.

Réponses de l’Expert indépendant

M. AGBETSE a déclaré que face aux répercussions de la crise au Soudan qui aggravent la crise humanitaire en République centrafricaine, il fallait dégager des fonds supplémentaires pour la prise en charge des réfugiés et pour venir en aide aux populations confrontées à la pénurie de denrées alimentaires et de base.

L’Expert indépendant a insisté sur l’importance de lutter contre les discours de haine entre partisans et opposants au référendum constitutionnel. Ce référendum doit permettre d’asseoir un système de gouvernance basé sur la justice, a plaidé M. Agbetse. Il manque de temps pour discuter de manière approfondie du projet de constitution, a-t-il regretté.

Tous les États peuvent adopter des mesures pour interdire la fourniture de matériel militaire destiné aux groupes armés, a en outre souligné M. Agbetse.

L’Expert indépendant a par ailleurs recommandé de mieux soutenir l’organe public chargé de préparer les rapports de la République centrafricaine aux organes conventionnels.

S’agissant enfin du sort des enfants, l’Expert indépendant a notamment recommandé que les États envisagent de donner des ressources pour la vaccination et la lutte contre les mariages précoces.

Dialogue autour de la présentation orale du Haut-Commissaire sur l'Ukraine et du rapport du Secrétaire général sur la Crimée

Le Conseil est saisi du rapport périodique du Haut-Commissariat aux droits de l’homme sur la situation des droits de l'homme en Ukraine (A/HRC/53/CRP.3, à paraitre en français) et du rapport intérimaire du Secrétaire général sur la situation des droits de l’homme dans la République autonome de Crimée et la ville de Sébastopol (Ukraine) temporairement occupées (A/HRC/53/64).

Présentation des rapports

Présentant les conclusions du rapport périodique du Haut-Commissariat sur la situation des droits de l’homme en Ukraine, M. VOLKER TÜRK, Haut-Commissaire aux droits de l’homme, a souligné que « la guerre insensée de la Fédération de Russie contre l’Ukraine continue de générer des violations graves et de grande portée des droits de l’homme ».

Vendredi dernier, au 500ème jour de ce conflit, la mission de surveillance des droits de l’homme a souligné le coût civil épouvantable de la guerre en Ukraine, a fait observer le Haut-Commissaire. Plus de 9000 civils, dont plus de 500 enfants, ont été tués depuis le début de la guerre le 24 février 2022 et les chiffres réels sont très probablement beaucoup plus élevés, a indiqué M. Türk.

C’est grâce à la rigueur et au soin minutieux dans la collecte et l’analyse des preuves que le Haut-Commissariat présente les arguments les plus solides en faveur de l’établissement des faits et de la reddition de comptes, a souligné le Haut-Commissaire.

Dans le présent rapport, le Haut-Commissariat a documenté la détention arbitraire de plus de 900 civils, dont huit enfants, entre le 24 février 2022 et le 23 mai 2023, a indiqué M. Türk.  La Fédération de Russie n’a pas donné accès aux lieux de détention, ce qui conduit inévitablement à un sous-dénombrement, a-t-il expliqué, précisant qu’au total, 864 des cas documentés ont été perpétrés par la Fédération de Russie. Nombre de ces personnes étaient détenues au secret, ce qui équivaut à des disparitions forcées, a souligné M. Türk. Le Haut-Commissariat a également documenté l’exécution sommaire de 77 civils alors qu’ils étaient détenus arbitrairement par la Fédération de Russie, a-t-il ajouté. Plus de 90% des personnes détenues par la Fédération de Russie interrogées ont déclaré avoir été soumises à la torture et à des mauvais traitements - y compris des violences sexuelles, dans certains cas - par le personnel de sécurité russe.

Dans 26 % des cas, les détenus ont été transférés vers d’autres lieux en Ukraine occupée ou en Fédération de Russie, sans que leurs familles aient été informées, a poursuivi M. Türk. Le Haut-Commissariat a également documenté plusieurs cas qui suggèrent que des civils détenus ont été utilisés par les forces armées russes comme « boucliers humains » afin de mettre certaines zones à l’abri des attaques militaires, a-t-il indiqué.

« Ces résultats sont choquants », a déclaré le Haut-Commissaire. Il faut que la Fédération de Russie prenne des mesures concrètes pour instruire et veiller à ce que son personnel russe respecte le droit international humanitaire et relatif aux droits de l’homme, a-t-il plaidé.

Le Haut-Commissariat a bénéficié d’un accès étendu et sans entrave aux lieux de détention placés sous le contrôle des autorités ukrainiennes et a ainsi constaté 75 cas de détention arbitraire, a ensuite indiqué M. Türk. Il a précisé que la plupart de ces cas concernaient des personnes soupçonnées d’infractions pénales liées au conflit, et que de nombreuses détentions arbitraires découlent de modifications excessivement larges de la législation pénale sous la loi martiale. Il a également été constaté que le personnel ukrainien dans des lieux de détention non officiels ou, dans une bien moindre mesure, dans des centres officiels de détention provisoire, se livrait à la torture ou à des mauvais traitements, y compris des violences sexuelles, impliquant principalement des menaces, a ajouté le Haut-Commissaire.

M. Türk s’est dit préoccupé par le fait que la soi-disant « loi sur les activités de collaboration » adoptée en mars 2022 criminalise un large éventail de comportements, y compris des comportements qui peuvent être autorisés par le droit international humanitaire, et qu’elle a conduit à des cas de détention arbitraire.

S’agissant du rapport du Secrétaire général sur la situation des droits de l’homme dans la République autonome de Crimée et la ville de Sébastopol (Ukraine) temporairement occupées, le Haut-Commissaire a indiqué que du 1er juillet au 31 décembre 2022, le Haut-Commissariat a recensé 60 arrestations arbitraires dans ces zones par des membres des forces de sécurité russes, ainsi que des disparitions forcées et des actes de torture.

En ce qui concerne la conscription forcée, les autorités russes ont annoncé que 2500 hommes de Crimée avaient été enrôlés au cours de la période considérée, et en 2022, le Haut-Commissariat a documenté 112 poursuites pénales pour de soi-disant insoumissions, a indiqué M. Türk.

Le Haut-Commissaire s’est également dit profondément préoccupé par les transferts de population de civils. Au cours de la période considérée, le Haut-Commissariat a recueilli des informations sur 23 résidents qui ont été arrêtés par les forces de sécurité russes et transférés de l’autre côté de la frontière administrative vers la Crimée, menottés et les yeux bandés. Parallèlement, les autorités russes ont continué à transférer hors de Crimée des citoyens ukrainiens qu’elles considèrent comme des « étrangers ». 

En Crimée et dans les zones occupées de l’Ukraine, le Haut-Commissariat a documenté des violations massives des droits à la liberté d’opinion, d’expression, de réunion pacifique et d’association, y compris de nouvelles sanctions pour avoir exprimé publiquement des opinions qui « discréditent » les forces armées russes, et une nouvelle détérioration de l’environnement opérationnel pour les défenseurs des droits humains.

M. Türk a déploré qu’à sa connaissance, aucune enquête ne soit menée par la Fédération de Russie sur des détentions arbitraires, des disparitions forcées, des actes de torture ou des mauvais traitements perpétrés par ses forces en Ukraine contre des civils.

Il s’est par ailleurs dit profondément préoccupé par le fait que le Parlement de la Fédération de Russie a récemment adopté une loi fédérale qui pourrait exonérer de responsabilité pénale les auteurs d’infractions pénales internationales commises dans les régions occupées de l’Ukraine.

En Ukraine, et bien que de nombreuses procédures aient été engagées, M. Türk a également relevé qu’à sa connaissance, aucune enquête pénale n’a été menée contre des membres du personnel ukrainien pour détention arbitraire, disparition forcée ou torture contre des civils.

Il n’y a qu’une seule solution à cette immense tragédie : que tous ceux qui ont une influence sur la situation œuvrent pour assurer une paix juste, conformément à la Charte des Nations Unies et au droit international, a conclu le Haut-Commissaire.

Pays concerné

L’Ukraine a rappelé que cela fait plus de 500 jours que le monde s’est réveillé dans la « nouvelle réalité ». Depuis près de 16 mois, l’agression et la terreur russes détruisent non seulement des bâtiments, mais aussi des droits humains fondamentaux, y compris le plus important - le droit à la vie, a souligné la délégation ukrainienne, précisant qu’à ce jour, la Fédération de Russie a tué au moins 494 enfants et blessé plus de mille filles et garçons. Il est difficile d’imaginer combien d’enfants ont été enlevés par la Fédération de Russie ou sont devenus orphelins, a ajouté la délégation.

La récente destruction par la Fédération de Russie du barrage de Kakhovka, la plus grande catastrophe environnementale d’origine humaine du XXIème siècle, a affecté l’économie, l’agriculture et le patrimoine culturel de l’Ukraine, mais surtout la vie et les moyens de subsistance de la population, a dénoncé la délégation ukrainienne.

Aujourd’hui, la Fédération de Russie menace d’un incident radioactif à la centrale nucléaire de Zaporizhzhia qui pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour la vie de millions de personnes à travers le monde, a poursuivi la délégation.

Le rapport à mi-parcours du Secrétaire général montre clairement que la communauté internationale ne doit pas perdre de vue la situation des droits de l’homme en Crimée, a-t-elle ajouté.  La pratique de la persécution politique de tous ceux qui ont le courage de s’opposer à l’occupation de la péninsule par la Fédération de Russie reste une triste réalité quotidienne pour les habitants de Crimée, a-t-elle déclaré.

Malheureusement, les atrocités officiellement documentées ne représentent qu’une infime partie de tous les crimes commis par la Fédération de Russie en Ukraine, a ajouté la délégation.

Cette guerre n’est pas seulement une question entre l’Ukraine et la Fédération de Russie, car le droit international et les valeurs internationales n’ont pas de frontières nationales, a-t-elle affirmé ; c’est pourquoi nous devrions tous nous en soucier.

Aperçu du débat

De nombreuses délégations ont regretté que la guerre d’agression brutale, non provoquée et injustifiée de la Fédération de Russie continue de causer d’immenses souffrances en Ukraine, avec des conséquences négatives de grande portée dans le monde entier.

De très nombreux intervenants ont condamné cette guerre d’agression menée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine, qui, a-t-il été souligné, constitue une violation manifeste de la Charte des Nations Unies.

Plusieurs délégations se sont dites alarmées par les informations faisant état de la détention arbitraire de près de 9000 hommes, femmes et enfants par la Fédération de Russie. La plupart de ces personnes ont été torturées et maltraitées, et certaines d’entre elles ont subi des violences sexuelles, ont insisté des délégations, se faisant également l’écho de la grave préoccupation exprimée par le Haut-Commissariat au sujet des exécutions sommaires de civils en détention.

Ces chiffres soulignent clairement le mépris flagrant de la Fédération de Russie pour les droits humains et pour le droit international humanitaire, a-t-il été souligné.

Les conclusions affligeantes des rapports ici présentés soulignent la nécessité de garantir que les auteurs des graves violations du droit international commises dans le cadre de la guerre d’agression menée par la Fédération de Russie contre l’Ukraine répondent de leurs actes, ont insisté plusieurs intervenants. Aucun pays n’est au-dessus du droit international humanitaire et du droit international relatif aux droits humains, a insisté une délégation.

La Fédération de Russie doit immédiatement mettre un terme aux disparitions forcées souvent liées à la détention et les enfants ukrainiens déportés de force en Fédération de Russie doivent être remis à leurs familles, a-t-il été demandé.

Ont par ailleurs été salués les conseils fournis au fil des ans au Gouvernement ukrainien par la mission de surveillance du Haut-Commissariat – conseils qui se sont révélés « déterminants pour les efforts déployés par l’Ukraine pour renforcer la protection des droits de l’homme et favoriser l’accès à la justice au niveau national », a-t-il été affirmé.  Les rapports objectifs et ciblés de la mission de surveillance ont fait progresser la responsabilisation pour les violations des droits de l’homme, la présence continue de ladite mission est essentielle, a insisté une délégation.

Plusieurs délégations ont plaidé pour que la Fédération de Russie accorde au Haut-Commissariat un accès inconditionnel et sans entrave aux territoires temporairement occupés de l’Ukraine.

Une délégation a pour sa part dénoncé une « manipulation du Conseil » des droits de l’homme selon des intérêts illégitimes. Elle a dénoncé les « approches sélectives et partiales de l’Occident » qui, selon elle, s’apparentent à une campagne de propagande contre la Fédération de Russie. La Fédération de Russie a été obligée de se protéger de l’extension de l’OTAN, a-t-elle affirmé.

Une autre délégation a dénoncé le dévoiement du point 10 de l’ordre du jour à des fins partisanes, ainsi que sa politisation.

Un groupe de pays a, pour sa part, dit vouloir évoquer les violations des droits de l’homme commises par l’Ukraine, « qui suscitent de plus en plus de préoccupations, selon les rapports de plusieurs mécanismes internationaux de surveillance des droits de l’homme, ainsi que d’organisations non gouvernementales internationales et ukrainiennes ». Ce groupe de pays a demandé aux autorités ukrainiennes de faire des efforts importants pour résoudre les problèmes liés aux violations des droits de l’homme dans tous les domaines de la vie publique du pays.

***Liste des intervenants : Union européenne, Finlande (au nom d’un groupe de pays), Venezuela (au nom d’un groupe de pays), Pays-Bas (au nom d’un groupe de pays), Allemagne, Lituanie, République de Corée, Liechtenstein, Portugal, Pays-Bas, Tchéquie, Italie, Japon, Slovénie, Ordre souverain de Malte, Espagne, Luxembourg, États-Unis, Belgique, Canada, Malte, Royaume-Uni, Nouvelle Zélande, Irlande, République populaire démocratique de Corée, Türkiye, Macédoine du Nord, Venezuela, Autriche, Grèce, Slovaquie, Chine, Suisse, République de Moldova, Albanie, Géorgie, Roumanie, Monténégro et Pologne.

 

 

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