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FIN DU DÉBAT MINISTÉRIEL ANNUEL DE LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT

Compte rendu de séance

 

La Conférence du désarmement a conclu cet après-midi son débat de haut niveau de 2022, qui s'est tenu à Genève depuis lundi, 28 février, en entendant la Sous-Secrétaire aux affaires multilatérales et aux droits de l'homme du Mexique et la Représentante permanente du Viet Nam.

En fin de séance, des déclarations ont été faites, en réponse à des interventions de dignitaires au cours du débat de haut niveau, par les représentants des pays suivants : République populaire démocratique de Corée, République arabe syrienne, Royaume-Uni, Japon, République de Corée, République islamique d'Iran, États-Unis, Turquie, Argentine.

Au cours de ces trois jours de débats, la Conférence a entendu un grand nombre de Ministres des affaires étrangères ou chargés des questions de désarmement, ainsi que des représentants de haut niveau de plusieurs gouvernements.

Une part importante des interventions a porté sur la situation créée par l'intervention militaire de la Fédération de Russie contre l'Ukraine qui se déroule depuis le 24 février dernier, la plupart dénonçant cette action armée, ainsi que la décision de la Fédération de Russie de mettre en état d'alerte sa force de dissuasion, y compris nucléaire. Il a notamment été souligné que cette situation mettait en évidence l'importance, plus que jamais, de renforcer le rôle de la Conférence du désarmement et de lui permettre de s'acquitter de son mandat de négociation d'instruments internationaux dans le domaine du désarmement.

À cet égard, un grand nombre de gouvernements souhaitent la reprise des négociations sur un traité d'interdiction de la production de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires ou autres dispositifs explosifs nucléaires. Il a aussi été estimé que la Conférence devait se pencher sur d'autres instruments concernant notamment l'interdiction de la militarisation de l'espace extra-atmosphérique et les questions liées au développement de nouvelles technologies ayant des utilisations militaires, ou encore sur les moyens de renforcer l'interdiction des armes chimiques, biologiques ou à toxines, y compris pour prévenir contre leur utilisation par des agents non étatiques.

 

La Conférence du désarmement tiendra, demain matin à 10 heures, une séance publique dans le cadre des travaux de la première partie de sa session de 2022.

 

Déclarations dans le cadre du débat de haut niveau

MME MARTHA DELGADO PERALTA, Sous-Secrétaire aux affaires multilatérales et aux droits de l'homme du Mexique, a indiqué d'emblée que son pays avait mis en garde, depuis des années, que la Conférence du désarmement se trouvait à un carrefour dans le domaine de la paix et de la sécurité internationales. Elle a relevé que les différends entre des États dotés d'armes nucléaires dans un contexte géopolitique multipolaire ont pris de l'ampleur et s'est particulièrement inquiétée de la tendance récente à une révision des doctrines nucléaires et politiques de sécurité, ainsi qu'à une réévaluation de la fonction et des utilisations potentielles de l'armement nucléaire et à un accroissement des dépenses militaires. Mme Delgado Peralta a tenu à rappeler l'importance de la menace que continuent de poser les armes nucléaires. C'est pourquoi il faut encourager le bon fonctionnement des institutions chargées du désarmement au sein de l'ONU. Dans ce contexte, elle a souligné qu'à l'évidence, les événements actuels en Ukraine, avec l'agression de la Russie, viennent sonner l'alarme.

La ministre mexicaine a jugé très grave que la Conférence du désarmement ne contribue pas à générer de nouveaux accords ni à faire avancer le droit du désarmement. Une telle situation est intenable, a-t-elle commenté en renvoyant à la détérioration constante du contexte international, ainsi qu'à l'érosion des traités sur le désarmement et le contrôle des armes par les États dotés d'armes nucléaires. Elle a exprimé l'espoir que la crise actuelle fasse le lit d'une réflexion sérieuse et fructueuse quant à savoir si l'architecture du désarmement est adéquate dans le monde où nous vivons et ce qu'il serait nécessaire de faire. Elle a par ailleurs indiqué que le Mexique souhaitait l'élargissement de la composition de la Conférence du désarmement, en accordant aussi une place à la société civile et en prenant en considération la perspective des femmes.

MME LE THI TUYET MAI, Représentante permanente du Viet Nam, a appuyé les travaux de la Conférence du désarmement dans le cadre des organes internationaux chargés de la non-prolifération, du désarmement et des questions connexes. À cet égard, elle a soutenu les efforts tendant à faire progresser les négociations sur le désarmement et à faire avancer l'ordre du jour multilatéral sur le désarmement, saluant l'adoption récente d'une décision relative à son programme de travail pour l'année en cours. L'ambassadrice a fait valoir la politique constante et systématique du Viet Nam de soutien à tous les efforts visant à un désarmement général et complet et à la non-prolifération des armes de destruction massive, y compris les armes nucléaires. État partie à tous les principaux traités multilatéraux en matière de désarmement et de non-prolifération, il a récemment rejoint le Traité d'interdiction des armes nucléaires, comme il est aussi partie au Traité (de Bangkok) sur une zone exempte d'armes nucléaires en Asie du Sud-Est. Le Viet Nam a en outre estimé que la dixième conférence d'examen du Traité de non-prolifération des armes nucléaires sera l'occasion d'apporter un nouvel élan aux mécanismes mondiaux de désarmement et de non-prolifération.

Interventions en réponse à des déclarations faites au cours du débat de haut niveau

La République populaire démocratique de Corée a réfuté les «accusations absurdes» proférées par les pays européens et par la République de Corée. Le renforcement des capacités nationales de défense est un droit souverain et les essais de missiles ont pour unique objectif de prévenir la guerre et est un acte de légitime défense. Par ailleurs, le Japon s'agite au sujet de la République populaire démocratique de Corée alors même qu'il s'emploie à se faire une place dans le monde nucléaire et renforce ses capacités militaires.

La République arabe syrienne a répondu aux «allégations fallacieuses» faites par les États-Unis, le Royaume-Uni et la Turquie. La Syrie condamne le recours aux armes chimiques en tout temps et en toutes circonstances. Elle n'a jamais utilisé de telles armes ni d'armes à toxines sur son territoire, le représentant évoquant toutefois à cet égard la responsabilité des groupes terroristes. Elle a coopéré avec l'ONU et avec l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques pour se débarrasser de ses stocks d'armes chimiques et de leurs sites de production. L'intervention utilisé par le Vice-Ministre turc par rapport à l'adhésion de son pays à l'OIAC est une mauvaise nouvelle en soi eu égard au rôle néfaste du Gouvernement turc en appui au Front Al Nosra et aux Casques blancs, qui sont les véritables auteurs de l'utilisation des armes chimiques en Syrie. À l'adresse du Royaume-Uni, qui a appelé à la suspension de la Syrie de l'OIAC, cette organisation devrait plutôt veiller à l'accélération du démantèlement des installations chimiques de tous les pays, en particulier celles des États-Unis.

Le Royaume-Uni, en réponse au Ministre des affaires étrangères de l'Argentine, s'est dit surpris que celui-ci ait consacré autant de temps à des événements remontant à 40 ans. Il a rappelé que son pays avait confirmé, déjà en 2003, que les charges nucléaires mentionnées se trouvaient déjà à bord des navires lorsque le conflit a éclaté en 1982 et que le Royaume-Uni n'avait nullement l'intention de les utiliser. Par ailleurs, le Royaume-Uni n'a aucun doute quant à sa souveraineté sur les Îles Falkland, la Géorgie du Sud-et-les îles Sandwich du Sud, dont les habitants peuvent librement déterminer leur statut. Le Royaume-Uni examine régulièrement le niveau de ses forces suite à l'invasion illégale de ce territoire par l'Argentine en 1982. Concernant les remarques «inventées de toutes pièces par la Syrie», le Royaume-Uni réaffirme que des attaques chimiques ont bien eu lieu et que leurs auteurs devront en répondre.

Le Japon, en réponse à la République populaire démocratique de Corée, a affirmé ne pas vouloir devenir une puissance nucléaire et qu'il ne changera pas sa position en tant que pays épris de paix. Il assure la transparence de ses dépenses et questions militaires car le Japon a bien assimilé les enseignements de l'histoire. Le programme d'essais balistiques de Pyongyang est une violation des résolutions du Conseil de sécurité, rappelle le Japon.

La République de Corée a pour sa part rappelé qu'elle était engagée de bonne foi dans une dénucléarisation complète dans la péninsule coréenne et a exhorté la République populaire démocratique de Corée à cesser toute action déstabilisatrice, y compris le lancement de missiles.

La République islamique d'Iran a répondu à la déclaration faite le 28 février par le Royaume-Uni en déclarant que ce pays n'était pas un défenseur honnête du désarmement et de la non-prolifération. Sa politique enfreint les dispositions du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires à bien des égards. Avec la politique intégrée menée par le Royaume-Uni, ce pays incite en fait à la prolifération nucléaire et son accord avec deux autres membres du TNP enfreint les dispositions même de cet instrument.

Les États-Unis ont indiqué que les discours provocants sur le nucléaire étaient dangereux et que le pays évaluait actuellement les agissements du Président Poutine. Ni les États-Unis ni l'OTAN n'ont l'intention de participer à une escalade avec la Russie. Les États-Unis se rallient à l'appel lancé par le Secrétaire général pour que ce pays retire immédiatement ses troupes du territoire ukrainien et assure la protection des civils, en particulier des enfants.

La Turquie a rejeté toutes ses allégations de la Syrie comme étant fausses car le «régime syrien» a bien utilisé des armes chimiques à pas moins de 8 occasions. Cela fait cinq mois que l'OIAC attend des réponses aux questions en suspens par la Syrie, qui n'a en outre pas permis l'accès aux experts. En outre, la Syrie utilise son territoire pour des attaques contre la Turquie. La Turquie fera tout ce qu'elle pourra pour le rétablissement de l'intégrité territoriale de la Syrie et l'établissement d'un gouvernement non sectaire.

L'Argentine a rejeté toutes et chacune des affirmations contenues dans la déclaration britannique du 28 février. Elle a rappelé que les îles mentionnées et les espaces maritimes avoisinants sont partie intégrante du territoire national argentin et que, ayant été illégalement occupées en 1833 par le Royaume-Uni, elles sont l'objet d'un différend quant à leur souveraineté, reconnu par les Nations Unies, qui qualifient la question des Malouines comme une situation coloniale spéciale et particulière. L'Argentine réitère sa requête pour que la communauté internationale soit informée d'urgence du sort des 31 armes nucléaires que le Royaume-Uni a envoyées en Amérique du Sud en 1982 durant le conflit dans l'Atlantique. Elle a par ailleurs rappelé qu'en 1982, au moment des hostilités dans l'Atlantique Sud, l'Argentine était dirigée par une junte militaire qui n'agissait pas au nom du peuple argentin, qui a toujours rejeté le recours à la force et préfère le dialogue et la négociation.

La République populaire démocratique de Corée a fermement rejeté les arguments avancés par le Japon car, alors que ce pays dit participer à la paix mondiale, il effectue des exercices militaires et envoie des troupes pour des opérations de maintien de la paix. Le Japon occulte ses ambitions expansionnistes outre-mer et prévoit de mener des incursions. Quant à la République de Corée, il faut lui demander d'expliquer si les manœuvres conjointes avec les États-Unis sont propices à la paix et la sécurité de l'Asie.

Le Royaume-Uni a remercié l'Iran d'avoir mis en lumière le principe de l'irréversibilité en matière de désarmement nucléaire. Il a expliqué que c'est en vertu de ce principe que le Royaume-Uni tente d'empêcher l'Iran d'acquérir l'arme nucléaire.

Le Japon a signalé des erreurs factuelles dans le droit de réponse de la République populaire démocratique de Corée, rappelant que la politique de défense nippone était purement défensive et a invité ce pays au dialogue pour le bien de la paix.

La République de Corée a souligné que les manœuvres conjointes avec les États-Unis étaient annuelles et appliquaient parfaitement les accords intercoréens dans ce cadre, ce à quoi la République populaire démocratique de Corée a répondu en recommandant à Séoul de cesser de dépendre d'autres pays.

La République arabe syrienne a estimé que le Royaume-Uni était l'un de ces pays qui devraient être tenus pour responsables de la situation en Syrie par leur appui aux Casques blancs, compromis dans la fabrication et la production d'armes chimiques. La Turquie, pour sa part, sous la houlette du régime d'Erdogan, agresse la Syrie et occupe déjà une partie de son territoire en fournissant un havre sûr à la frontière et dans le Gouvernorat d'Idlib. Il a dénoncé le fait que cela ouvrait aussi la porte aux combattants terroristes. La Syrie a par ailleurs invité à ne pas déformer la réalité de sa coopération avec l'équipe d'évaluation de l'OIAC.

La Turquie a rejeté les accusations infondées du représentant du «régime syrien», ajoutant : «nous savons parfaitement qui est le criminel et qui tue sa population».

 

Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information ; il ne constitue pas un document officiel.

Les versions anglaise et française de nos communiqués sont différentes car elles sont le produit de deux équipes de couverture distinctes qui travaillent indépendamment.

 

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