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Le Conseil des droits de l'homme examine le rapport sur les violations du droit international dans le Territoire palestinien occupé

Compte rendu de séance

 

Quelque 67 Palestiniens – dont 16 enfants – ont été tués par les forces de sécurité israéliennes et 3678 ont été blessés ; un soldat israélien a été tué par des Palestiniens et 90 autres Israéliens ont été blessés. Tel est le bilan dressé, pour la période comprise entre le 1er novembre 2019 et le 31 octobre 2020, par la Haute-Commissaire aux droits de l’homme, Mme Michelle Bachelet, qui présentait cet après-midi devant le Conseil des droits de l’homme son rapport intitulé « Faire en sorte que les responsabilités soient établies et que justice soit faite pour toutes les violations du droit international dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est ».

Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a constaté un manque de progrès inquiétant concernant les enquêtes sur l'utilisation généralisée de la force meurtrière en 2018 et 2019 dans le contexte des manifestations à la barrière Israël-Gaza, a par ailleurs indiqué Mme Bachelet. De même, il n'y a pas eu de progrès notable dans les enquêtes et poursuites concernant les violations présumées du droit humanitaire international, y compris les allégations de crimes de guerre, perpétrées par toutes les parties dans le contexte des multiples flambées d'hostilités à Gaza, a fait observer la Haute-Commissaire. Aucun progrès notable n'a été enregistré non plus dans les enquêtes sur les allégations de mauvais traitements et de torture dans les centres de détention israéliens, a-t-elle ajouté. Elle a en outre constaté l'absence de progrès de la part des autorités de Cisjordanie, ainsi que des autorités de facto à Gaza, concernant des incidents d'éventuel usage excessif de la force, ou des allégations de torture, par leurs forces de sécurité.

Suite à la présentation de ce rapport, Israël et l’Etat de Palestine ont pris la parole en tant que pays concernés.

De nombreuses délégations* ont pris part au débat qui a suivi, en insistant, pour un grand nombre d’entre elles, sur l’obligation pour Israël d’ouvrir des enquêtes, de respecter ses obligations, en tant que « puissance occupante », au titre des Conventions de Genève et de cesser ses pratiques de colonisation et de destruction de biens palestiniens.

 

En fin d’après-midi, le Conseil poursuit ses travaux en tenant un dialogue avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en Erythrée, suivi d’un dialogue sur le rapport de la Haute-Commissaire concernant Sri Lanka.

 

Rapport annuel du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme et rapports du Haut-Commissariat et du Secrétaire général

Le Conseil est saisi d’un rapport de la Haute-Commissaire aux droits de l’homme, intitulé «Faire en sorte que les responsabilités soient établies et que justice soit faite pour toutes les violations du droit international dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est » (A/HRC/46/22, version préliminaire en anglais).

Présentation

Présentant ce document, MME MICHELLE BACHELET, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a indiqué que de graves violations avaient été commises pendant la période couverte par le rapport, entre le 1er novembre 2019 et le 31 octobre 2020 : 67 Palestiniens, dont 16 enfants, ont été tués par les forces de sécurité israéliennes, et 3678 ont été blessés ; un soldat israélien a été tué par des Palestiniens et 90 autres Israéliens ont été blessés.

Les manifestations à la barrière (fence) Israël-Gaza ont été suspendues, a poursuivi la Haute-Commissaire. Toutefois, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a constaté un manque de progrès inquiétant concernant les enquêtes sur l'utilisation généralisée de la force meurtrière en 2018 et 2019 dans le contexte de ces manifestations. Les informations disponibles suggèrent que seules 17 enquêtes ont été ouvertes sur les 231 incidents signalés ayant entraîné le meurtre de manifestants palestiniens, avec une seule condamnation, a relevé Mme Bachelet avec dépit.

De même, il n'y a pas eu de progrès notable dans les enquêtes et poursuites concernant les violations présumées du droit humanitaire international, y compris les allégations de crimes de guerre, perpétrées par toutes les parties dans le contexte des multiples flambées d'hostilités à Gaza. D’autres violations du droit international humanitaire ont été signalées, comme une attaque menée par les forces de sécurité israéliennes en novembre 2019, qui a tué neuf Palestiniens (dont cinq enfants) à Deir El Balah ; ou encore le tir sans discernement, par des groupes armés palestiniens à Gaza, de roquettes, d’obus de mortier et de ballons incendiaires en direction d'Israël.

Aucun progrès notable n'a été enregistré non plus dans les enquêtes sur les allégations de mauvais traitements et de torture dans les centres de détention israéliens. La clôture récente de l’enquête pénale au sujet des allégations de torture sur le Palestinien Samer Al Arbeed est très préoccupante, a déclaré Mme Bachelet. Elle a en outre constaté l'absence de progrès de la part des autorités de Cisjordanie, ainsi que des autorités de facto à Gaza, concernant des incidents d'éventuel usage excessif de la force, ou des allégations de torture, par leurs forces de sécurité.

Pays concernés

Israël a déclaré que ce rapport n’est pas équilibré : il s'intitule « Responsabilité et justice pour toutes les violations du droit international » alors que le Hamas n'est même pas mentionné. Le Hamas qui utilise des enfants palestiniens comme boucliers humains, en violation flagrante du droit international ; le Hamas qui contrôle la bande de Gaza depuis qu'Israël s'est unilatéralement désengagé de Gaza il y a 15 ans ; le Hamas qui tire sans discernement des roquettes visant des villes israéliennes, a poursuivi la délégation israélienne. Il n'y a aucune référence dans ce rapport aux terribles coûts et défis du terrorisme auxquels les Israéliens sont confrontés quotidiennement, a-t-elle déploré. Il n'y a pas de responsabilité pour le Hamas, il n'y a pas de justice pour les Israéliens, a-t- elle insisté.

L’État d’Israël est une démocratie respectueuse des lois et dotée d’un système juridique indépendant, a poursuivi la délégation israélienne. Il est attaché aux valeurs fondamentales du droit international et est pleinement apte à examiner seul les violations alléguées du droit, a-t-elle assuré. La Cour suprême d'Israël est largement considérée au niveau international comme l'une des hautes cours les plus efficaces du monde et elle n’a pas hésité par le passé à demander des comptes aux personnes qu’elle jugeait responsables, a-t-elle déclaré. Le « parti pris institutionnel reflété dans ce rapport » est un témoignage permanent « de la politisation et de la partialité du Conseil et du Haut-Commissariat aux droits de l’homme » à l'égard de l'État d'Israël, a dénoncé la délégation.

L’Etat de Palestine a déclaré que l’Etat d’Israël, en tant que « puissance occupante », empêche la Palestine de s’acquitter de ses obligations. L’Etat de Palestine a ajouté se réjouir du retour des Etats-Unis au sein du Conseil et a dit espérer qu’ils joueraient un rôle positif pour le respect du droit et la mise en œuvre des principes de la responsabilité et de la reddition de comptes pour les violations commises sur les territoires palestiniens et les autres territoires occupés.

La délégation palestinienne a par ailleurs dénoncé la politique de négligence d’Israël à l’égard des détenus palestiniens durant la pandémie. Israël a en outre poursuivi sa politique de destruction de villages en mettant en œuvre le plan de colonisation, a-t-elle ajouté. La communauté internationale doit œuvrer pour mettre un terme au siège de Gaza, a-t-elle en outre plaidé. Certains ont essayé d’empêcher la poursuite des auteurs des crimes commis à l’encontre des Palestiniens en recourant à des arguments fallacieux, a-t-elle déclaré ; mais l’Etat de Palestine demande à la communauté internationale de faire respecter le droit international. Alors que ces trois derniers jours, au Conseil, de nombreux Etats ont évoquer la reddition de comptes, pourquoi les positions changent-elles lorsqu’il s’agit d’évoquer le cas d’Israël, a interrogé la délégation palestinienne ? L’absence de justice en Palestine signifie l’absence de justice partout ailleurs, a-t-elle insisté, demandant qu’il soit mis fin à la culture d’impunité envers Israël.

Aperçu du débat

Un groupe de pays a dit sa « déception très forte » devant le rapport de la Haute-Commissaire. Ce rapport, bien qu’il montre et reconnaisse la « brutalité » des crimes commis par Israël, ne met pas en avant l’obligation redditionnelle d’Israël, pas plus qu’il n’analyse les éléments moteurs empêchant la reddition de comptes – en plus d’établir « faussement » un parallèle entre Israël, « puissance occupante », et les Palestiniens, « peuple vivant sous occupation », ont déploré des délégations. Il s’agit là d’une « comparaison asymétrique » qui ne trouve aucun fondement dans le droit international, a insisté un intervenant.

De nombreuses délégations ont insisté sur l’obligation pour Israël d’ouvrir des enquêtes, de respecter ses obligations, en tant que « puissance occupante », au titre des Conventions de Genève et de cesser ses pratiques de colonisation et de destruction de biens palestiniens, que quasiment toutes les délégations ont condamnées. « Tous ces crimes ne seront pas prescrits », a prévenu une délégation, tandis que d’autres jugeaient que c’est le mépris du droit international manifesté par Israël et « l’immunité » qui lui est accordée qui l’autorisent à commettre de tels crimes. Il est à espérer que la Cour pénale internationale, qui vient de se déclarer compétente pour les crimes commis dans les territoires palestiniens occupés, mènera à bien son devoir, y compris en exerçant des pressions morales sur les soutiens d’Israël – en particulier les États-Unis –, a-t-il aussi été dit.

Nombre de délégations ont également réaffirmé leur attachement et leur soutien aux droits des Palestiniens et à la résolution pacifique du conflit. Il n’y a qu’une seule solution, à avoir celle fondée sur deux États, ont-elles souligné. Mais la reddition de comptes, « des deux côtés », de même que l’octroi de réparations aux victimes, figurent également au nombre des garanties d’une paix durable et stable, a-t-il été affirmé.

Certaines organisations ont pour leur part déploré que l’on « déforme le droit international pour diaboliser une démocratie », sans jamais parler de l’Iran et des « groupes hostiles qui terrorisent Israël et le peuple palestinien lui-même ».

*Les délégations suivantes ont pris la parole : Pakistan (au nom de l’Organisation de la coopération islamique, OCI), Union européenne, Libye (au nom du Groupe des États africains), Qatar, Libye (au nom de la Ligue des États arabes), Koweït, Fédération de Russie, Jordanie, Mauritanie, Malaisie, Iraq, Indonésie, Sénégal, Venezuela, Arabie saoudite, République islamique d’Iran, Afrique du Sud, Namibie, Égypte, Chine, Algérie, Tunisie, Liban, République arabe syrienne, Luxembourg, Botswana, Soudan, Cuba, Turquie, Bangladesh, Irlande, Oman, Albanie, Slovénie, Suisse, Libye.

Les organisations non gouvernementales ci-après sont également intervenues : Ingénieurs du Monde, Al Mezan Centre for Human Rights, Institute for NGO Research, Norwegian Refugee Council, Medical Aid for Palestinians (MAP), United Nations Watch, Al-Haq, Law in the Service of Man (déclaration conjointe), Cairo Institute for Human Rights Studies, Defence for Children International, Women's Centre for Legal Aid and Counseling.

Remarques de conclusion

MME NADA AL-NASHIF, Haute-Commissaire adjoint aux droits de l'homme, dans une courte remarque de conclusion, a souligné que le rapport examiné ce jour faisait bel et bien mention des attaques lancées par des combattants palestiniens contre Israël.

 

HRC21.014F