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LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS EXAMINE LE RAPPORT DE CABO VERDE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné, hier après-midi et aujourd’hui, le rapport initial de Cabo Verde sur la mise en œuvre par ce pays des dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

Présentant ce rapport, Mme Janine Tatiana Santos Lelis, Ministre de la justice et du travail de Cabo Verde, a tenu à préciser que l’État caboverdien place la dignité humaine au cœur de son action et a rappelé que les droits économiques, sociaux et culturels, de même que les autres droits fondamentaux, étaient inscrits dans la Constitution de 1992, adoptée après la fin du système de parti unique. Actuellement, la Constitution oblige l’État à supprimer progressivement les facteurs qui empêchent l’égalité entre les sexes et l’une des priorités d’action dans ce domaine est la lutte contre la violence sexiste, a par ailleurs indiqué Mme Santos Lelis.

La Ministre a d’autre part fait observer que la croissance économique de l’archipel avait été bloquée par de récents épisodes de sécheresse. Elle a précisé que son Gouvernement axait son action sur l’intégration sociale et sur des politiques inclusives orientées vers la fourniture de services essentiels aux familles. En outre, plusieurs initiatives sont orientées vers la création et la vie culturelles afin, d’une part, d’assurer l’intégration socioculturelle de tous les citoyens et, d’autre part, de favoriser l’apparition de secteurs culturel et touristique dynamiques et générateurs de recettes.

La délégation caboverdienne était également composée de Mme Maria de Jesus Veiga Miranda, Représentante permanente de Cabo Verde auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de deux autres représentantes du Ministère de la justice et du travail et du Ministère de la famille et de l’inclusion sociale.

La délégation a répondu aux questions et observations des experts du Comité en se concentrant en particulier sur le contexte socioéconomique de l’archipel, s’agissant notamment de la sécheresse, des caractéristiques démographiques du pays, de l’importance de la diaspora et du poids du secteur touristique ; sur les questions relatives au travail, au logement, à la santé et à l’éducation ; sur la liberté syndicale ; sur le principe de non-discrimination, y compris la parité entre les sexes ; sur le programme de « paternité responsable » ; sur la politique migratoire dont le pays entend désormais se doter ; ou encore sur la reconnaissance du créole comme langue officielle.

M. Renato Zerbini Ribeiro Leão, rapporteur du Comité pour l’examen du rapport, a regretté que Cabo Verde ne présente qu’en 2018 un rapport qui aurait dû être remis en 1995. Il s’est notamment interrogé sur l’affirmation, figurant dans le rapport, selon laquelle Cabo Verde ne compte « aucune communauté dotée d’une identité ethnique distincte de la majorité de la population caboverdienne » et que donc la Constitution ne comporte « aucune règle particulière concernant la protection des droits de propriété des communautés autochtones sur le territoire national ». Le rapporteur a par ailleurs relevé la grande jeunesse de la population caboverdienne, dont la moyenne d’âge est de 24 ans.

Au cours du dialogue, la délégation caboverdnienne a expliqué que le Gouvernement cherchait tout à la fois à rassurer les travailleurs et à attirer des capitaux étrangers – dont Cabo Verde manque – par un effort de compétitivité. Le dialogue social a pour but de concilier ces deux objectifs, a-t-elle ajouté. Dans ce contexte, la loi autorise les contrats à durée déterminée, qui sont utiles pour certaines activités saisonnières et touristiques, même s’il n’est pas possible d’enchaîner indéfiniment de tels contrats. En outre, si la durée de versement des indemnités de chômage a effectivement été réduite de soixante à quarante jours, cela a permis de créer des emplois dans le secteur privé, a fait valoir la délégation. Par ailleurs, d’ici à 2021, le Gouvernement envisage de porter le salaire minimal dans le secteur privé à la hauteur du salaire minimal dans la fonction publique, a-t-elle ajouté. Un membre du Comité a dit comprendre que le Gouvernement caboverdien souhaite rendre son pays plus compétitif sur le plan international, mais a mis en garde contre les assouplissements à la loi du travail qui finissent par entraîner la précarisation des travailleurs.

Le Comité adoptera ultérieurement à huis clos ses observations finales sur le rapport de Cabo Verde et les rendra publiques à l'issue de la session, vendredi 12 octobre prochain.


Demain après-midi, à 15 heures, le Comité tiendra une réunion publique avec les Etats parties.


Présentation du rapport de Cabo Verde

Le Comité est saisi du rapport initial de Cabo Verde (E/C.12/ZAF/1), attendu en 1995 et qui concerne essentiellement la période allant de 2010 à 2015.

MME JANINE TATIANA SANTOS LELIS, Ministre de la justice et du travail de Cabo Verde, a indiqué qu’elle allait, en complément au rapport, présenter au Comité les mesures par son pays depuis 2015 pour donner effet au Pacte. Elle a tenu à préciser que l’État caboverdien place la dignité humaine au cœur de son action, et a rappelé que les droits économiques, sociaux et culturels, de même que les autres droits fondamentaux, étaient inscrits dans la Constitution de 1992, adoptée après la fin du système de parti unique. Actuellement, a fait savoir la Ministre, Cabo Verde est organisé en une République où la séparation des pouvoirs est garantie, dans un régime parlementaire atténué.

La Constitution oblige l’État à supprimer progressivement les facteurs qui empêchent l’égalité entre les sexes et l’une des priorités d’action dans ce domaine est la lutte contre la violence sexiste, a par ailleurs indiqué Mme Santos Lelis. Le pays s’est doté depuis 2005 de plans d’action successifs en faveur de l’égalité entre les sexes, qui visaient notamment l’autonomisation des femmes par le biais de l’éducation. Cette action a permis d’enregistrer une atténuation de l’écart entre les deux sexes s’agissant du taux d’alphabétisation, a fait valoir la Ministre.

Mme Santos Lelis a d’autre part fait observer que la croissance économique de l’archipel avait été bloquée par de récents épisodes de sécheresse. Cependant, l’État a réussi à moderniser et rationaliser son administration, tout en introduisant des augmentations de salaires, a-t-elle souligné. Le salaire minimal est passé de 11 000 à 13 000 pesos au premier semestre de cette année et il devrait atteindre 15 000 pesos en 2021, a-t-elle précisé. Il est en outre prévu de revaloriser le montant des retraites et la création d’un revenu minimal d’insertion est aussi à l’étude, a ajouté la Ministre de la justice et du travail de Cabo Verde. Une baisse de 23% du taux de chômage a été enregistrée depuis 2016, date à laquelle il s’établissait à 15%, a-t-elle également fait valoir.

Mme Santos Lelis a précisé que son Gouvernement axait son action sur l’intégration sociale et sur des politiques inclusives orientées vers la fourniture de services essentiels aux familles. La Ministre a fait état d’améliorations s’agissant des indicateurs de soins de santé à Cabo Verde.

Mme Santos Lelis a également informé le Comité que Cabo Verde comptait quatre femmes ministres sur vingt membres du Gouvernement et que la part des femmes était passée 3,8% des députés en 1991 à 26% en 2016, la proportion de femmes atteignant également 26% dans les conseils municipaux.

Quant au droit au travail, il est garanti par la Constitution, les pouvoirs publics ayant pour devoir de créer les conditions propices à l’exercice de ce droit, a ajouté Mme Santos Lelis. Cabo Verde a ratifié quatorze conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT), en particulier celles portant sur le droit d’organisation et de négociation collective, sur l’abolition du travail forcé, sur l’égalité de rémunération, ainsi que sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, a précisé la Ministre.

S’agissant des questions de travail, Cabo Verde a dressé une liste d’emplois dangereux interdits aux enfants et adolescents, a ensuite souligné la Ministre. Elle a également fait état du lancement d’un plan national de prévention et de lutte contre la traite des êtres humains et d’une campagne de modernisation des logements. D’autres initiatives sont orientées vers la création et la vie culturelles afin, d’une part, d’assurer l’intégration socioculturelle de tous les citoyens et, d’autre part, de favoriser l’apparition de secteurs culturel et touristique dynamiques et générateurs de recettes.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. RENATO ZERBINI RIBEIRO LEÃO, rapporteur du Comité pour l’examen du rapport de Cabo Verde, a regretté que Cabo Verde ne présente qu’en 2018 un rapport qui aurait dû être remis en 1995. Il s’est néanmoins félicité de pouvoir dialoguer avec la délégation caboverdienne afin d’aider l’archipel à mieux appliquer le Pacte.

Le rapporteur a pris note du fait que les organisations de la société civile ont participé à la rédaction du rapport. Il a prié la délégation de préciser le rôle que ces organisations jouent dans l’application du Pacte et dans la manière dont cet instrument se traduit dans la législation interne. L’expert a demandé des explications sur l’articulation voire l’interaction entre le Pacte et la Constitution, et a souhaité savoir si les dispositions du Pacte pouvaient être invoquées directement devant les tribunaux.

M. Zerbini Ribeiro Leão s’est ensuite enquis du montant de l’indemnité accordée en cas de réquisition ou d’expropriation par l’État (cas de figure mentionné au paragraphe 10 du rapport). Il s’est aussi interrogé sur l’affirmation, figurant au paragraphe 11 du rapport, selon laquelle Cabo Verde ne compte « aucune communauté dotée d’une identité ethnique distincte de la majorité de la population caboverdienne » et que donc la Constitution ne comporte « aucune règle particulière concernant la protection des droits de propriété des communautés autochtones sur le territoire national ».

Le rapporteur a par ailleurs relevé la grande jeunesse de la population caboverdienne, dont la moyenne d’âge est de 24 ans. Il a voulu savoir si la délégation disposait de statistiques affinées concernant la répartition de la population, la croissance démographique et la politique migratoire. Il s’est également enquis des responsabilités que les pères de famille sont tenus d’assumer à Cabo Verde.

M. Zerbini Ribeiro Leão s’est en outre interrogé sur le cadre adopté par Cabo Verde pour lutter contre le problème de la corruption. D’autres questions du rapporteur ont porté sur les moyens dont dispose l’institution nationale de droits de l’homme et sur son degré d’indépendance.

Un autre expert a préconisé la parité absolue entre les hommes et les femmes au niveau parlementaire. Il devrait être facile pour un petit pays comme Cabo Verde d’atteindre un tel objectif, a-t-il estimé. Il a en outre voulu savoir dans quelle mesure les responsables politiques caboverdiens étaient informés des exigences du Pacte.

Une experte a voulu savoir comment Cabo Verde, en tant que petit État insulaire en développement, envisage de faire face aux effets du changement climatique.

Plusieurs questions ont par ailleurs porté sur l’origine des migrants qui se rendent à Cabo Verde ; et sur le rôle joué dans l’économie nationale par les nombreux Caboverdiens qui ont eux-mêmes émigré vers d’autres pays.

MME MARIA VIRGINIA BRAS GOMES, Présidente du Comité, s’est félicitée de la présentation de ce rapport. Elle a relevé que les statuts de l’institution nationale de droits de l’homme, qui fait aussi office de mécanisme national de prévention de la torture, ne sont pas encore conformes aux Principes de Paris. La Présidente a insisté sur le fait que l’institution nationale de droits de l’homme devait être indépendante. Elle a en outre prié la délégation caboverdienne de commenter la viabilité financière des mesures d’application des droits économiques, sociaux et culturels, dans le contexte actuel d’austérité marqué par des coupes dans les dépenses sociales.

La Présidente du Comité a d’autre part fait observer que les femmes sont souvent victimes d’une double discrimination du fait qu’elles occupent des postes généralement subalternes ou en tout cas moins bien considérés et donc aussi moins bien rétribués, de sorte qu’elles ne bénéficient pas du principe de salaire égal pour un travail égal.

S’agissant du droit au travail, un expert a voulu mieux comprendre en quoi consistait le « devoir de travailler », qui est consacré par la Constitution au même titre que le « droit au travail » : la question se pose de savoir si le travail forcé est implicitement autorisé par la Constitution caboverdienne, a fait observer l’expert. Il a souligné d’autre part une grande disparité entre le taux de chômage chez les femmes âgées de 16 à 24 ans (parmi lesquelles il atteint plus de 70%) et celui qui prévaut chez les hommes de la même tranche d’âge (parmi lesquels il tourne autour de 40%).

Le même expert a dit comprendre que le Gouvernement souhaite rendre son pays plus compétitif sur le plan international ; l’expert a néanmoins mis en garde contre les assouplissements à la loi du travail qui finissent par entraîner la précarisation des travailleurs. Il s’est d’autre part étonné de l’importance du secteur informel à Cabo Verde, qui équivaudrait à 12% du produit national brut du pays. L’expert a en outre prié la délégation de commenter les accusations d’interdiction du droit de grève à Cabo Verde portées par des syndicats et mentionnées au paragraphe 85 du rapport.

D’autres questions ont porté sur la protection sociale des travailleurs indépendants ; sur l’accès à l’emploi des personnes handicapées et sur le respect des quotas dans ce domaine ; sur la discrimination à l’embauche dont seraient victimes les femmes enceintes et les jeunes mères ; et sur la protection des lanceurs d’alerte.

La Présidente du Comité a constaté que, malgré les bonnes intentions et les précautions, les mesures favorables à la compétitivité des entreprises ont souvent des effets négatifs sur la partie la plus faible, c’est-à-dire les travailleurs.

La délégation a ensuite été priée de décrire la politique de l’État s’agissant de la prise en charge des enfants des rues. Il a aussi été fait remarquer que, selon le rapport de Cabo Verde, environ 28% des enfants de moins d’un an et 8% des enfants âgés de 0 à 6 ans ne sont pas inscrits à l’état civil (paragraphe 133 du rapport).

Une experte a indiqué que la pauvreté était encore un défi important à relever pour Cabo Verde. Elle s’est à cet égard enquise des chiffres concernant la situation en milieu rural et de ceux concernant les enfants. Elle a souligné que la Rapporteuse spéciale sur le logement convenable (qui a effectué une visite dans l’archipel en janvier 2015) a indiqué que le programme « Casa para todos » (un logement pour tous) n’était pas accessible pour les personnes les plus pauvres de l’île, notamment celles qui vivent dans les bidonvilles. L’experte a en outre souligné que plus de 50% de la population en zone rurale n’avait pas accès à l’eau potable. Elle a également souligné que les centres de santé ne sont pas accessibles aux personnes handicapées. Les femmes victimes de violences sexuelles ont aussi de grandes difficultés à avoir accès aux soins de santé en raison de manque de formations spécialisées à l’intention des professionnels de la santé dans ce domaine, a-t-elle ajouté. Il n’y a pas de centres de santé mentale dans l’archipel, a par ailleurs déploré l’experte.

Un expert a demandé comment était structuré l’enseignement primaire et secondaire et a souhaité savoir s’il existe des universités, publiques ou privées, à Cabo Verde et si des mécanismes sont prévus pour analyser la qualité de l’enseignement. Il a en outre demandé ce qu’il en était de la reconnaissance de la langue créole.

Un expert a demandé pourquoi le taux de scolarisation avait baissé ces dernières années à Cabo Verde.

Une experte a souhaité savoir s’il y avait un programme d’enseignement de la santé sexuelle et génésique à l’école et s’est enquise des mesures prises pour inciter les jeunes filles à aller à l’école plutôt qu’à se cantonner à des tâches domestiques chez elle.


Réponses de la délégation

S’agissant du processus d’élaboration du rapport, la délégation a indiqué que les autorités caboverdiennes avaient organisé un atelier pour recueillir les opinions des organisations non gouvernementales.

Les traités et accords internationaux ratifiés par Cabo Verde obligent l’État: après un processus de « domestication » (c’est-à-dire de transposition des dispositions des traités dans le droit interne), les tribunaux caboverdiens peuvent invoquer directement les dispositions des traités internationaux dans leurs arrêts et jugement, a expliqué la délégation.

L’expropriation dans l’intérêt public (telle que prévue par la loi) donne lieu à une indemnité calculée en fonction de la valeur du bien sur le marché, a ensuite indiqué la délégation. Rien ne distinguant l’origine des Caboverdiens, il n’est pas prévu d’accorder des indemnités différenciées selon une quelconque appartenance ethnique, a ajouté la délégation.

La Constitution interdit la discrimination sous toutes ses formes et l’État adopte des politiques publiques pour donner effet à ce principe, comme en témoignent par exemple les mesures prises pour intégrer les femmes dans les différentes sphères de la vie publique, a poursuivi la délégation. Si l’État a incontestablement pour objectif la parité absolue entre les hommes et les femmes, il est certain que des obstacles culturels et autres s’opposent encore à la réalisation de cet objectif, a reconnu la délégation de Cabo Verde. Le débat sur ces questions au Parlement est houleux, certains estimant encore que les femmes ne veulent pas assumer de responsabilités publiques, a-t-elle précisé.

Un programme de (promotion de la) « paternité responsable » a été lancé face au nombre de procédures en cours devant les tribunaux contre des pères « démissionnaires », a par ailleurs indiqué la délégation.

Le Code pénal prévoit des sanctions sévères contre les actes de corruption, y compris contre la pratique des « frais d’inscription » - autrement dit des pots-de-vin -, a en outre fait valoir la délégation.

L’autonomie et l’indépendance de la justice sont garanties par l’État et contrôlées par le Parlement, a ajouté la délégation.

La délégation a indiqué qu’elle pourrait transmettre aux membres du Comité par écrit des statistiques démographiques plus précises, montrant en particulier un allongement général de l’espérance de vie.

Si Cabo Verde a été classé récemment dans les pays à revenu moyen, il n’en demeure pas moins que la réalité reste difficile dans l’archipel, qui a été confronté l’an dernier à une redoutable sécheresse, a souligné la délégation. Le développement du pays est en outre rendu difficile par le fait que sa population est peu nombreuse, ce qui ne permet pas que les investissements consentis produisent des effets d’échelle. Le tourisme est actuellement le moteur de la croissance caboverdienne, a poursuivi la délégation. Mais l’importante diaspora caboverdienne joue un rôle très important dans l’économie nationale, par le biais de ses transferts d’argent vers le pays, a-t-elle ajouté. Cabo Verde reconnaît la double nationalité et les autorités caboverdniennes ont passé des accords bilatéraux dans le domaine de la sécurité sociale, a en outre indiqué la délégation.

La délégation a précisé que les autorités caboverdiennes étaient en train de se doter d’une politique migratoire face à l’arrivée de personnes du Sénégal et de la Guinée en quête d’emploi. Cabo Verde est membre de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest, a rappelé la délégation.

Les autorités ont lancé les démarches en vue de l’octroi à l’institution nationale de droits de l’homme du Statut A au titre des Principes de Paris, la seule difficulté qui subsiste résidant dans l’insuffisance des moyens financiers accordés à l’institution, a indiqué la délégation.

L’essentiel du budget national est consacré à l’éducation et à la santé, a souligné la délégation. Les personnes les plus démunies bénéficient de subventions pour l’eau et l’électricité et la scolarité obligatoire est gratuite jusqu’à la huitième année, a-t-elle ajouté, soulignant que l’objectif des autorités est de réduire la vulnérabilité des citoyens.

Le fait d’occuper un emploi oblige plus ou moins son détenteur à œuvrer en faveur du pays : tel est le sens du « devoir de travailler » mentionné par la Constitution. Le travail forcé est interdit à Cabo Verde, a assuré la délégation. La délégation a en outre assuré que les autorités allaient élaborer des statistiques plus précises concernant le chômage, dont elle a précisé qu’il avait reculé. Des mesures sont prises pour favoriser la création d’emplois dans le secteur privé, l’État ayant parallèlement organisé un programme de stages dans ses services pour permettre à davantage de personnes d’acquérir une expérience professionnelle.

La délégation a expliqué que le Gouvernement caboverdien cherchait tout à la fois à rassurer les travailleurs et à attirer des capitaux étrangers – dont Cabo Verde manque – par un effort de compétitivité. Le dialogue social a pour but de concilier ces deux objectifs, a ajouté la délégation. Dans ce contexte, la loi autorise les contrats à durée déterminée, qui sont utiles pour certaines activités saisonnières et touristiques, même s’il n’est pas possible d’enchaîner indéfiniment de tels contrats. En outre, si la durée de versement des indemnités de chômage a effectivement été réduite de soixante à quarante jours, cela a permis de créer des emplois dans le secteur privé, a fait valoir la délégation.

Par ailleurs, d’ici à 2021, le Gouvernement envisage de porter le salaire minimal dans le secteur privé à la hauteur du salaire minimal dans la fonction publique. S’agissant de l’égalité salariale entre les hommes et les femmes, les règlements de l’administration publique – qui est un gros employeur, avec 24 000 salariés – de même que ceux des grandes entreprises privées garantissent l’égalité de la rémunération à un niveau de responsabilité égal. Il faudra faire des recherches pour vérifier si, malgré l’interdiction légale, la discrimination salariale opère dans le secteur privé au détriment des femmes, a ajouté la délégation.

La délégation a en outre indiqué que la loi caboverdienne ne prévoyait pas de quotas d’employés appartenant à certaines catégories ou minorités, mais plutôt des incitations et autres abattements fiscaux en faveur des entreprises.

Quant à la liberté syndicale, elle est garantie à Cabo Verde, qui compte actuellement deux grandes centrales syndicales, a souligné la délégation. Elle a précisé qu’un accord reconductible de dialogue social liait pour quelques années encore le Gouvernement, les syndicats et les employeurs. Les plaintes en matière de liberté syndicale mentionnées par un expert sont liées à l’obligation faite à certains employés de sécurité du secteur public d’assurer un service minimal lors d’un mouvement de grève, a expliqué la délégation.

La délégation a ensuite indiqué qu’un plan national d’action contre les abus et l’exploitation sexuelle des enfants avait été adopté, qui inclut l’assistance aux victimes. Un parlement d’enfants a été convoqué pour informer les enfants sur les risques d’exploitation et la manière de porter plainte.

La délégation a par ailleurs indiqué que grâce à la loi pertinente adoptée en 2014, il n’y a plus de problèmes d’enregistrement des enfants. Dans chaque hôpital, existe une antenne de l’état civil et les mères qui viennent d’accoucher ne peuvent pas quitter le centre de santé sans avoir enregistré le nouveau-né.

S’agissant du système de santé, la délégation a expliqué que les patients devaient s’acquitter, lors des soins, d’un ticket modérateur, à l’exception des familles les plus démunies, qui sont dispensées de ce paiement direct.

Pour ce qui est de l’accès à la santé, la délégation a ensuite fait observer qu’étant donné que le pays est un archipel, il est nécessaire d’implanter des centres de santé partout, sur chaque île, ce qui constitue un grand défi. Les autorités n’en ont pas moins créé des centres dans différentes îles, a-t-elle fait valoir. Le problème du manque de médecin et de personnel médical reste un autre défi à relever, a reconnu la délégation.

La délégation a en outre fait état du défi consistant à accroître les activités de désalinisation de l’eau afin d’améliorer l’approvisionnement en eau potable pour tous.

S’agissant des questions de logement, la délégation a expliqué que le programme « Casa para todos » a été prévu pour différentes catégories de revenus ; une partie du programme bénéficie exclusivement aux personnes ayant les plus bas revenus et aux personnes handicapées.

La délégation a indiqué qu’il n’y avait pas de disposition permettant le mariage entre personnes de même sexe à Cabo Verde. La question fait débat aujourd’hui dans le pays et les autorités étudient les possibilités de prendre des actions dans ce domaine, a-t-elle ajouté.

La délégation a par ailleurs rappelé que l’enseignement primaire est organisé de la 1ere à la 8e année de scolarité et que le secondaire va, lui, de la 9e à la 12e année. Il y a un grand dynamisme dans l’enseignement supérieur, comme en témoigne le fait que le nombre d’universités dans le pays est passé de 4 à 9 aujourd’hui. L’année dernière, une commission a été créée en vue d’évaluer la qualité de l’enseignement tant public que privé, a ajouté la délégation.

Les personnes ayant des besoins spéciaux ont des facilités d’accès aux écoles, a poursuivi la délégation. Des mesures ont aussi été prises pour contrôler l’accès aux établissements scolaires afin que ceux-ci soient exclusivement réservés aux élèves et aux professeurs, a-t-elle fait valoir. La délégation a par ailleurs fait observer qu’il n’y avait pas de baisse du taux de scolarisation dans le pays, ce taux étant passé ces dernières années de 92 à 95%. Un programme prévoit de faciliter la poursuite de l’école pour les jeunes mamans.

La langue officielle de Cabo Verde est le portugais, mais la Constitution prévoit qu’il faut prendre des mesures pour que le créole devienne aussi une langue officielle, ce qui impliquerait que tous les documents de l’État doivent être traduits en créole, a en outre indiqué la délégation. La difficulté est de définir quel créole doit devenir officiel, car il en existe une multitude de parlers dans l’archipel. Il n’y a pas encore de consensus sur cette question, a conclu la délégation.

Remarques de conclusion

M. ZERBINI RIBEIRO LEÃO a salué le dialogue franc et ouvert qui a permis un échange d’informations importantes avec la délégation de Cabo Verde. Le Comité est très reconnaissant pour les informations fournies, a-t-il insisté, avant de rappeler la disponibilité des membres du Comité à coopérer à la mise en œuvre du Pacte dans l’archipel.

MME SANTOS LELIS a déclaré que Cabo Verde faisait tout son possible pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte et des autres traités internationaux que le pays a ratifiés. Elle a souligné que l’archipel résorbait maintenant son retard dans la remise des rapports dus aux organes de traités, puisqu’il leur en a remis cinq ces derniers mois. Elle a expliqué qu’une partie des retards en la matière était due aux coûts très importants de la traduction des rapports dans une langue officielle des Nations unies ; aussi, la Ministre caboverdienne de la justice et du travail a-t-elle plaidé en faveur d’une reconnaissance du portugais (comme langue officielle de l’ONU). Elle a conclu en remerciant les membres du Comité pour ce dialogue très enrichissant.


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ESC18/019F