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LE COMITÉ DES DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES MARQUE LA PREMIÈRE JOURNÉE INTERNATIONALE DES LANGUES DES SIGNES

Compte rendu de séance

Le Comité des droits des personnes handicapées a tenu, cet après-midi, une réunion pour marquer la première Journée internationale des langues des signes, qui sera célébrée le 23 septembre.

Animée par M. Damjan Tatić, Vice-Président du Comité des droits des personnes handicapées, la réunion s'est ouverte par des déclarations liminaires de M. Michael Møller, Directeur général de l'Office des Nations Unies à Genève – s'exprimant par la voix de Mme Corinne Momal-Vanian, Directrice de la Division de la gestion des conférences – et de M. Walton Webson, Représentant permanent d'Antigua-et-Barbuda auprès des Nations Unies, dont le pays avait été l'un des coauteurs de la résolution 72/161 adoptée le 19 décembre 2017 par l'Assemblée générale des Nations Unies et proclamant le 23 septembre Journée internationale des langues des signes.

Mme Momal-Vanian a indiqué, au nom du Directeur général, que les services de conférence avaient recruté leurs premiers interprètes en langue des signes pour la première fois en 2012. En 2017, l'ONU-Genève a organisé 247 jours d'interprétation par signes, dont 123 dans la langue internationale. M. Webson a pour sa part insisté sur la nécessité de permettre à toutes les personnes sourdes et malentendantes de pouvoir s'exprimer dans leur langue pour leur permettre de participer pleinement au développement des sociétés. La langue permet à tous de participer à la vie sociale sur un pied d'égalité, de façon à ne laisser personne de côté, a dit M. Webson en référence au Programme de développement durable à l'horizon 2030.

La réunion a également entendu une déclaration du Vice-Président du Conseil des droits de l'homme, M. Francois Xavier Ngarambé (Rwanda), qui était représenté par Mme Maria Giovanna Bianchi, Secrétaire du groupe de travail du Conseil des droits de l'homme chargé de l'accessibilité; de M. Adam Abdelmoulah, Directeur de la Division des mécanismes relevant du Conseil des droits de l'homme et des instruments relatifs aux droits de l'homme au Haut-Commissariat aux droits de l'homme; et de Mme Theresia Degener, Présidente du Comité des droits des personnes handicapées. Ont aussi pris part au débat M. Joseph J. Murray, Vice-Président de la Fédération mondiale des sourds; Mme Catalina Devandas, Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées; et M. László Lovászy, Membre du Comité des droits des personnes handicapées.

Au cours de l'échange, il a été souligné que la Convention relative aux droits des personnes handicapées, dans son article 24, demande aux États de faciliter « l'apprentissage de la langue des signes et la promotion de l'identité linguistique des personnes sourdes ». Il a aussi été relevé que l'utilisation des langues des signes faisait partie des droits de l'homme, compte tenu de leur caractère crucial pour la jouissance des autres droits fondamentaux des personnes sourdes et malentendantes. M. Lovászy a expliqué que le Comité insistait auprès des États parties pour qu'ils embauchent des enseignants professionnels et qualifiés, eux-mêmes handicapés si possible, pour dispenser les enseignements exigés par la Convention.


Lors de sa prochaine séance publique, vendredi 21 septembre dans l'après-midi, le Comité mettra un terme officiel à cette vingtième session après avoir examiné, en vue de son adoption, son projet d'observation générale n°7, sur la participation des personnes handicapées à l'application et au suivi de la Convention. Il devra aussi se pencher sur les observations finales qu'il adressera aux pays dont il a examiné les rapports au cours de la session.


Déclarations d'ouverture

MME CORINNE MOMAL-VANIAN, Directrice de la Division de la gestion des conférences, au nom de M. Michael Møller, Directeur général de l'Office des Nations Unies à Genève, a remercié le Comité de marquer la Journée internationale des langues des signes pour la première fois au Palais des Nations de Genève. Les services de conférence ont recruté leurs premiers interprètes en langue des signes pour la première fois en 2012, a-t-elle rappelé: six ans plus tard, un long chemin a été parcouru. En 2017, l'ONU Genève a organisé 247 jours d'interprétation par signes, 123 dans la langue internationale et 124 dans les langues des signes de pays tels que la Fédération de Russie, le Panama, le Canada, la Jordanie, le Honduras, le Maroc et le Royaume-Uni. Le Directeur général fait savoir qu'il est prévu de rendre le Palais encore plus accessible dans le cadre du Plan stratégique patrimonial.

M. WALTON WEBSON, Représentant permanent d'Antigua-et-Barbuda auprès des Nations Unies à New York (par vidéo conférence), a insisté sur la nécessité de permettre à toutes les personnes sourdes et malentendantes de pouvoir s'exprimer dans leur langue pour qu'elles puissent être fières d'elles et leur permettre de participer pleinement au développement des sociétés. La langue permet à tous de participer à la vie sociale sur un pied d'égalité, de façon à ne laisser personne de côté, a dit M. Webson en référence au Programme de développement durable à l'horizon 2030. L'utilisation des quelques 135 langues des signes ouvre de nouvelles possibilités de participation à cet égard, a souligné M. Webson. Il a insisté sur l'importance de former davantage d'interprètes et de traducteurs pour favoriser encore davantage la participation des personnes sourdes. M. Webson a souhaité dédier cette Journée internationale aux enfants sourds et malentendants.

Présentations sur le partage d'expériences personnelles et la définition d'objectifs collectifs

MME MARIA GIOVANNA BIANCHI, Secrétaire du groupe de travail du Conseil des droits de l'homme chargé de l'accessibilité, au nom de M. Francois Xavier Ngarambé, Vice-Président du Conseil des droits de l'homme, a souligné que le Conseil avait pour objectif de rendre ses travaux accessibles aux personnes handicapées depuis 2011 déjà. Le groupe de travail a fait des recommandations en 2015 qui ont entraîné, en 2017, l'adoption d'un plan dans quatre domaines, accompagné de mesures concrètes, d'un budget et d'un calendrier. Pour le Conseil, l'accessibilité ne consiste pas seulement à supprimer les obstacles matériels, mais aussi à mettre à disposition des documents utilisables par les personnes handicapées.

M. ADAM ABDELMOULAH, Directeur de la Division des mécanismes relevant du Conseil des droits de l'homme et des instruments relatifs aux droits de l'homme au Haut-Commissariat aux droits de l'homme, a rappelé que la Journée internationale des langues des signes avait été proclamée sans vote par l'Assemblée générale des Nations Unies en décembre 2017 (résolution 72/161). M. Abdelmoulah a aussi fait observer que l'Organisation des Nations Unies, en tant qu'elle défend le multilinguisme, est consciente de l'importance de préserver les langues des signes en tant qu'instrument pour réaliser les droits à l'accès des personnes sourdes. Il a souligné que le Haut-Commissariat avait, dès la création du Comité, pris les mesures nécessaires pour assurer l'interprétation de ses séances dans la langue internationale des signes. Quant au Conseil des droits de l'homme, il utilise la langue internationale des signes ainsi que d'autres mesures d'accessibilité lors de débats n'intéressant pas uniquement les questions relatives au handicap.

MME THERESIA DEGENER, Présidente du Comité des droits des personnes handicapées, a précisé que le Comité faisait interpréter dans la langue des signes la majorité de ses séances, ce qui lui permet d'accomplir son mandat puisqu'il compte des personnes sourdes parmi ses membres. Mme Degener a souligné que les langues des signes comptent parmi les plus anciennes langues au monde et qu'elles sont aussi riches, diverses et belles que les langues parlées.

La Présidente du Comité a aussi rendu hommage aux personnes sourdes qui ont dû lutter très longtemps pour faire reconnaître leurs langues. Célébrer la Journée internationale des langues des signes, c'est reconnaître la diversité non seulement de la communauté des personnes handicapées, mais aussi de la collectivité tout entière. Mme Degener a rappelé que la Convention faisait obligation aux États de faciliter l'enseignement de la langue des signes par des personnels qualifiés.

Présentations sur le partage d'expériences personnelles et la définition d'objectifs collectifs

M. JOSEPH J. MURRAY, Vice-Président de la Fédération mondiale des sourds, s'est dit heureux d'entendre des fonctionnaires des Nations Unies pouvoir dire que les sourds font désormais partie de la communauté internationale à part entière. M. Murray a souligné l'importance des langues des signes dans l'évolution positive de la situation, alors que les sourds ont été – et sont encore parfois – sanctionnés pour utiliser la langue des signes. M. Murray a insisté sur le fait que l'utilisation des langues des signes faisait partie des droits de l'homme, compte tenu de leur caractère crucial pour la jouissance des autres droits fondamentaux.

Le premier pays à reconnaître une langue des signes nationale a été l'Ouganda, en 1995, a indiqué M. Murray, 45 autres pays ayant fait de même depuis lors. Le Vice-Président de la Fédération mondiale des sourds a mis en garde contre le fait que les enfants sourds rencontrent toujours des difficultés à recevoir un enseignement dans la langue des signes. Or, la Convention, dans son article 24, demande bien aux États de faciliter «l'apprentissage de la langue des signes et la promotion de l'identité linguistique des personnes sourdes».

MME CATALINA DEVANDAS, Rapporteuse spéciale du Conseil des droits de l'homme chargée des droits des personnes handicapées, a mis en avant l'importante action qui a été menée par les organisations de personnes handicapées et de personnes sourdes partout dans le monde pour que les enfants sourds puissent être scolarisés. L'experte a estimé que les langues des signes étaient utiles non seulement aux personnes sourdes et malentendantes dans leur socialisation et leur participation sociale, mais aussi à la société tout entière.

Cependant, la célébration de cette journée doit aussi s'accompagner d'une réflexion sur les problèmes que les personnes handicapées rencontrent dans certains pays où l'absence d'enseignement et d'interprètes de la langue des signes risquent d'entraîner leur marginalisation sociale, a dit Mme Devandas. La Rapporteuse spéciale a insisté sur le fait que le manque d'accès à l'information, dans ces conditions, peut avoir des conséquences sanitaires dramatiques pour les sourds et les malentendants. La Rapporteuse spéciale a enfin recommandé que les Nations Unies améliorent le recrutement d'interprètes en langues des signes dans leurs opérations sur le terrain, où les manques sont évidents.

M. LÁSZLÓ LOVÁSZY, membre du Comité des droits des personnes handicapées, a fait part des nombreuses difficultés auxquelles les sourds ont été et restent confrontés dans la vie sociale, à l'école tout d'abord. L'expert s'est donc félicité que de plus en plus d'États favorisent désormais l'apprentissage de la langue des signes. Après avoir rappelé que les langues des signes favorisent la jouissance du droit à l'information des personnes concernées, l'expert a indiqué que le Comité insistait auprès des États parties pour qu'ils embauchent des enseignants professionnels et qualifiés, eux-mêmes handicapés si possible, pour dispenser les enseignements exigés par la Convention. Le Comité a adopté plusieurs observations générales précisant les obligations des États en ce qui concerne la jouissance par les personnes handicapées de leurs droits fondamentaux, a enfin rappelé l'expert.

Autres déclarations

Dans un message vidéo, MME DEBRA RUSSELL, Présidente de l'Association mondiale des interprètes en langues des signes, a relevé que chaque pays peut adopter sa propre langue des signes, le Canada en comptant même deux: une pour le français et l'autre pour l'anglais. De plus en plus de gouvernements reconnaissent leur langue des signes nationale, une étape importante avant la formation d'interprètes. Mme Russell a insisté sur le fait que les interprètes accrédités par l'Association mondiale des interprètes en langues des signes sont tout à fait qualifiés et professionnels.

Des intervenants dans l'assistance ont remercié les panélistes de leur travail en faveur des sourds. Il a été demandé dans quelle mesure la reconnaissance d'une langue des signes au niveau national avait des incidences sur le statut juridique des personnes sourdes et leur capacité de jouir de leurs droits fondamentaux.

À cette question, M. Murray a répondu que la reconnaissance juridique de la langue était toujours un premier pas: il faut voir ensuite comment la loi était appliquée, la reconnaissance portant parfois seulement sur le statut de la langue elle-même. La Fédération mondiale des sourds entend actuellement intensifier son action, avec le Comité, pour que le droit des enfants sourds de recevoir un enseignement dans la langue des signes soit respecté, a dit M. Murray.

Une intervenante a relevé que beaucoup restait à faire sur le continent asiatique dans le domaine des droits des personnes sourdes. L'Union européenne des sourds a félicité les Nations Unies d'avoir organisé la Journée internationale des langues des signes.

Conclusion

L'animateur des échanges, M. DAMJAN TATIĆ, Vice-Président du Comité des droits des personnes handicapées, a jugé qu'il avait été utile de rappeler, en ce jour, l'importance du droit à l'utilisation de la langue des signes en tant que facteur de non-discrimination et d'intégration des personnes sourdes et malentendantes.


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CRPD18/021F