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LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LES RAPPORTS DU NIGER SUR LES DROITS DE L'ENFANT ET L'EXPLOITATION SEXUELLE DES ENFANTS

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'enfant a examiné, hier et ce matin, les rapports présentés par le Niger sur les mesures prises par le pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant et son protocole facultatif concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

Les rapports ont été présentés par Mme El Back Zeinabou Tari Bako, Ministre nigérienne de la promotion de la femme et de la protection de l'enfant. Elle a d'emblée assuré le Comité de la volonté du Gouvernement à garantir leurs droits à tous les enfants du Niger et a fait état de progrès importants enregistrées dans les domaines de l'éducation, de la santé, de la protection de l'enfant, de la justice, de l'enregistrement des naissances. Elle a notamment attiré l'attention sur l'adoption, en 2018, du Plan stratégique national pour mettre fin au mariage des enfants. La Ministre a reconnu qu'il restait encore beaucoup de défis à relever, s'agissant notamment de la migration à risque; de la protection des enfants en situation d'urgence; et de la situation sécuritaire en Libye, au Mali et dans le Bassin du Lac Tchad du fait de la présence de Boko HaraM. Le Niger s'est engagé, avec l'appui de ses partenaires, à développer des initiatives concrètes et pratiques qui contribuent à l'effectivité des droits de l'enfant à travers la mise en œuvre de ces programmes et approches.

La délégation nigérienne était également composée de Mme Assamaou Kane, Secrétaire générale adjointe du Gouvernement, de Mme Albouchira Mohamed, parlementaire, ainsi que de représentants du Ministère de la promotion de la femme et de la protection de l'enfant, du Comité interministériel chargé de la rédaction des rapports aux organes des traités et de l'Examen périodique universel, de la Protection judiciaire juvénile et de l'action sociale, et de la Protection des droits de l'enfant. Elle a répondu aux questions des membres du Comité s'agissant notamment de l'entrée en vigueur du code de l'enfant; des conflits entre les règles coutumières et l'application des lois; de la lutte contre la pratique des mariages précoces; de la règlementation relative aux entreprises d'extraction minière; des mesures visant à garantir l'enregistrement des naissances; de la situation des enfants présumés appartenir à des groupes armés; de la protection des enfants victimes d'abus sexuels et de la traite; et de l'interdiction du travail des enfants.

Les deux rapporteurs du Comité pour l'examen du rapport du Niger étaient Mme Suzanne Aho Assouma et M. Bernard Gastaud. Ils ont notamment souligné que le Comité était conscient que le Niger est confronté à des défis qu'il ne peut régler seul, tels ceux liés aux changements climatiques ou au terrorisme. Mais il peut relever d'autres défis, notamment dans le domaine de la lutte contre les violences et la pauvreté. Les experts ont exprimé des préoccupations en ce qui concerne la pratique du mariage des enfants, la prise en charge des enfants victimes de violence et sur la pratique de l'excision dans le pays. Le Niger doit en outre pouvoir se pencher sur le budget qu'il doit allouer à l'éducation et à la santé.

Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées, des observations finales sur le rapport du Niger qui seront rendues publiques à l'issue de la session, qui se termine le 5 octobre prochain.


Demain, à partir de 10 heures, le Comité examinera les rapports du Bénin sur la mise en œuvre des Protocoles facultatifs sur l'implication d'enfants dans les conflits armés (CRC/C/OPAC/BEN/1) et sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/BEN/1).


Présentation des rapports du Niger

Le Comité était saisi du rapport périodique du Niger (CRC/C/NER/3-5) sur l'application de la Convention et de ses réponses à la liste de points à traiter que lui avait adressée le Comité, ainsi que du rapport concernant l'application du Protocole facultatif à la Convention concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/NER/1).

MME EL BACK ZEINABOU TARI BAKO, Ministre de la promotion de la femme et de la protection de l'enfant, a d'emblée expliqué que le Niger disposait sur le plan normatif de textes internationaux et nationaux favorables à la protection de l'enfant, ce qui résulte de la volonté du Gouvernement à garantir les droits à tous les enfants du Niger.

Le chef de la délégation a déclaré que des avancées significatives avaient été enregistrées dans divers domaines: éducation, santé, protection de l'enfant, justice, état civil. La Ministre a énuméré les mesures prises dans ces différents domaines, attirant notamment l'attention sur l'adoption en 2017 d'un décret portant sur la protection, le soutien et l'accompagnement de la jeune fille en cours de scolarité ou la poursuite de la gratuité de l'école publique et obligatoire jusqu'à l'âge de 16 ans; la création du Centre national de lutte contre le cancer avec la prise en charge gratuite des femmes et des enfants âgés de 0 à 5 ans; l'adoption en 2018 du Plan stratégique national pour mettre fin au mariage des enfants; la création de juridictions pour mineurs présumés associés aux groupes armés et terroristes; l'adoption en 2017 du Plan stratégique sur le système de l'état civil 2017-2021.

La Ministre a reconnu qu'il restait encore beaucoup de défis à relever, s'agissant notamment de la migration à risque; de la protection des enfants en situation d'urgence notamment dans les conflits armés; et de la situation sécuritaire en Libye, au Mali et dans le Bassin du Lac Tchad du fait de la présence de Boko HaraM. Le Niger s'est engagé, avec l'appui de ses partenaires, à développer des initiatives concrètes et pratiques qui contribuent à l'effectivité des droits de l'enfant à travers la mise en œuvre de ces programmes et approches.

Examen du rapport du Niger au titre de la Convention

Questions et observations des membres du Comité


M. BERNARD GASTAUD, corapporteur pour l'examen du rapport du Niger, a souligné que les difficultés étaient encore nombreuses et de grande ampleur au Niger dans le domaine des droits de l'enfant. Le Comité est conscient que le Niger est confronté à des défis qu'il ne peut régler seul, tels ceux liés aux changements climatiques ou au terrorisme. Mais le pays peut relever d'autres défis, notamment dans le domaine de la lutte contre les violences et la pauvreté.

Le Comité est préoccupé le fait que le code de l'enfance soit en préparation depuis 2005 et M. Gastaud a souhaité savoir combien de temps serait encore nécessaire pour permettre son adoption. Il a souhaité savoir si le pays envisageait d'adhérer au troisième protocole facultatif permettant à des particuliers de s'adresser au Comité lorsqu'ils estiment que l'État partie a porté atteinte à leurs droits. Le corapporteur a d'autre part relevé que quatre ministères avaient la charge de l'éducation, une situation qui n'est pas propice à des progrès importants dans ce domaine. L'expert a demandé quel était le bilan du plan national de protection des enfants et si un nouveau plan était prévu dans ce domaine. Il a souligné que les budgets accordés aux politiques en faveur des enfants étaient très faibles au regard des ressources du pays dans le secteur minier, en raison notamment de la corruption et des dépenses liées à la sécurité. Il a d'autre part regretté qu'aucun contrôle ne soit effectué quant au respect des normes environnementales par les entreprises d'extraction minière. Il a aussi demandé pourquoi les autorités avaient autorisé la construction d'une centrale électrique diesel, une énergie non renouvelable. Il a déclaré que le droit à la vie des enfants était régulièrement bafoué au Niger en raison des violences, de la malnutrition et des activités des entreprises d'extraction minière.

M. Gastaud a demandé si des mesures allaient être prises pour faire connaître les dispositions de la Convention aux juges, au personnel concerné et aux enfants. Il a par ailleurs regretté la durée extrêmement longue de la procédure d'enregistrement de certaines organisations de la société civile alors qu'elles devraient être des partenaires clés des autorités. L'expert a demandé quelles mesures étaient envisagées par les autorités pour mettre en œuvre effectivement la législation contre les discriminations. M. Gastaud a regretté que l'esclavage des enfants subsiste encore au Niger.

M. Gastaud a souligné la disparité filles-garçons et villes-campagnes dans le domaine de l'accès à l'école. Le principe de la gratuité de l'enseignement n'est pas toujours respecté, a-t-il aussi déploré, ajoutant que le niveau général de l'enseignement au Niger était médiocre. Il a aussi relevé que les écoles avaient été attaquées dans les régions de Tahoua et de Diffa, entraînant le déplacement d'enfants vers d'autres régions du pays.

Le corapporteur s'est enquis de l'adoption du plan national sur les mineurs non accompagnés. Il a demandé quelles mesures avaient été mises en œuvre pour lutter contre la traite dans le pays, soulignant que 35 enfants avaient été enlevés l'année dernière. Selon une estimation de la Banque mondiale, 45% des enfants entre 5 et 14 ans travailleraient au Niger. L'expert a demandé s'il y avait suffisamment de contrôles des lieux de travail, notamment dans le secteur informel. L'expert a aussi constaté que la formation des juges pour mineurs était inadéquate. Des mineurs sont encore incarcérés avec des adultes, a encore déploré l'expert, et il n'y a aucune mesure visant à la réintégration des mineurs délinquants.

MME SUZANNE AHO ASSOUMA, corapporteuse pour l'examen du rapport, a regretté l'absence de définition précise de l'enfant dans la législation nigérienne et constaté une dualité entre les normes coutumières et le droit moderne. L'experte a demandé si le problème lié la question des enfants «légitimes» et «illégitimes» avait pu être résolu. S'agissant de la lutte contre l'apatridie, elle a demandé ce qu'il en était des enfants qui naissaient dans les camps de réfugiés. L'experte a en outre relevé que le Gouvernement avait distribué une note de service interdisant le châtiment corporel dans les écoles, mais il y a toujours des cas de châtiment corporel dans les familles, les institutions fermées et les écoles coraniques. Elle a demandé des informations sur les poursuites engagées à l'encontre des auteurs de violence contre les enfants. Mme Assouma a demandé quelles mesures avaient été prises contre le mariage des enfants et souhaité des informations sur les programmes de prise en charge des enfants victimes de violence. Elle a aussi demandé des informations sur la pratique de l'excision dans le pays.

Mme Assouma a par la suite demandé où en était le processus d'adhésion à la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale. Elle a demandé si des mesures avaient été prises pour règlementer les écoles coraniques. L'experte a aussi demandé des informations sur la déscolarisation des enfants handicapés et a voulu savoir si des efforts étaient menés en faveur de l'inclusion de ces enfants dans le système scolaire général. Elle a demandé ce qui avait été fait pour rendre accessibles les services de santé pour toute la population sur tout le territoire. Elle a souhaité savoir quelles dispositions avaient été prises pour lutter contre le paludisme, notamment pour permettre aux familles d'avoir accès aux moustiquaires imprégnées. Mme Assouma a demandé où en étaient les efforts en faveur de l'accès à l'eau potable. Elle s'est enquise des actions menées pour inciter l'allaitement exclusivement maternel dans le pays. S'agissant de la santé des adolescents, l'experte s'est enquise des programmes de lutte contre l'excision et les grossesses précoces. Elle a demandé des informations sur le droit à l'avortement lorsque la santé de la mère est en jeu.

Parmi les autres membres du Comité, une experte a demandé des informations sur la liberté d'expression dans le pays, un thème qui n'est pas abordé dans le rapport. Un autre expert a demandé des informations sur le respect de la vie privée des enfants. Il a rappelé qu'une partie du pays se trouvait en situation d'état d'urgence et que le port du voile intégral y était interdit. Il a demandé comment cette mesure entravait la liberté de religion des enfants.

Les experts ont aussi posé des questions sur l'accès des enfants aux soins de santé, notamment la prise en charge la santé mentale des enfants et les services hospitaliers pour enfants, ainsi que s'agissant des dispositions relatives au divorce et à la garde des enfants, ou encore du mariage précoce. Il a été relevé que le texte du code civil hérité du droit français n'était pas conforme à la Convention car il est prévu un âge différent pour les femmes et les hommes s'agissant du mariage. Des questions ont aussi tété posée sur les efforts de reboisement, l'exploitation des ressources renouvelables, ou encore les mesures visant à préserver les ressources aquifères.

Réponses de la délégation

Répondant aux questions des membres du Comité, la délégation a notamment fait valoir que le Forum sur la protection de l'enfant organisé en juillet 2018 avait fait de l'élaboration du code de l'enfant l'une de ses principales recommandations.

En ce qui concerne le problème de la dualité des normes, la délégation a expliqué qu'au Niger, les règles coutumières cohabitaient avec les règles du droit écrit. Il se trouve que dans la vie quotidienne de tous les Nigériens, ce sont généralement les règles coutumières qui sont appliquées. Une loi reprend l'ensemble des questions régies par le droit coutumier au Niger, s'agissant notamment du mariage, du divorce, de la répudiation et de l'héritage. Les Nigériens peuvent choisir d'être régis par la coutume ou le droit écrit. Une personne qui se marie, par exemple, peut choisir entre les dispositions du code civil ou les règles coutumières. Dans les règles coutumières, il n'y a pas de limitation d'âge pour le mariage, a expliqué la délégation, alors que le code civil prévoit que le mariage est interdit pour les mineurs. Toutefois, la délégation a expliqué que le pays a pris l'engagement devant l'Union africaine de mettre en œuvre un plan d'action pour mettre fin aux mariages des enfants. La délégation a par la suite précisé que les coutumes n'étaient pas privilégiées par rapport à la norme écrite: lorsqu'une coutume est contraire à une disposition d'une convention internationale ratifiée par le pays, les juridictions sont tenues de faire appliquer la loi écrite.

En réponse à une autre question, la délégation a expliqué que la pluralité des ministères chargés de l'éducation était un avantage car elle permettait de mobiliser davantage de ressources pour les différents niveaux d'enseignement.

La délégation a souligné que les autorités coopéraient très bien avec les deux coalitions d'organisation non gouvernementales qui agissent dans le domaine de la promotion et de la protection des droits de l'enfant.

La politique nationale du genre qui a été révisée l'année dernière prend en compte de nouvelles problématiques, notamment les changements climatiques ou les migrations. Chaque ministère est doté aujourd'hui d'une «cellule genre» qui vise à ce que la question du genre soit prise en compte dans toutes les politiques adoptées par l'administration.

La délégation a reconnu que le dernier recrutement de travailleurs sociaux avait eu lieu en 2015, en raison de restrictions budgétaires très importantes. Le pays a néanmoins mis en place un plan de redéploiement de psychologues et autres travailleurs sociaux des autres ministères vers le Ministère de la promotion de la femme et de la protection de l'enfant.

Répondant aux questions sur l'extraction minière, principale source de revenus du pays, la délégation a expliqué que la règlementation dans ce domaine prévoyait que 15% des retombées des ressources naturelles devaient être orientées vers les besoins de base des populations locales. La délégation a aussi expliqué que le Bureau d'étude d'impact environnemental procédait à une étude d'impact en amont de tout projet d'extraction minière.

La délégation a déclaré qu'il était très probable que le Niger s'engage à ratifier le troisième Protocole facultatif puisque le pays a déjà ratifié, dans le cadre d'autres instruments internationaux, des dispositions sur une procédure de plainte.

Le Niger a mis en place, avec le Haut-Commissariat pour les réfugiés, un système d'enregistrement des naissances pour tous les enfants, réfugiés ou nigériens.

La délégation a assuré que ce n'était pas que les enfants des familles aisées qui se retrouvaient au Parlement des jeunes. Un test ouvert à tous les enfants permet de désigner les meilleurs comme parlementaires. Ils travaillent ensuite comme de véritables parlementaires et leurs propositions sont prises en compte par les autorités.

Un comité interministériel a été créé afin de protéger les enfants présumés appartenir à des groupes armés. Ce comité veille à faire sortir ces enfants des maisons d'arrêt pour des centres où ils bénéficient d'un soutien psychosocial et sont préparés à une réinsertion communautaire et familiale. Un poste de juge des mineurs a spécialement été créé à cet effet.

La délégation a indiqué que les enfants victimes d'abus sexuels étaient pris en charge dans des centres sociaux qui adoptent une approche intégrée pour prendre en charge ces enfants. Elle a par la suite ajouté que le code pénal comportait des dispositions spécifiques pour traiter des abus à l'encontre des enfants, notamment des abus sexuels et de la pédophilie. La délégation a aussi indiqué que le Plan de protection de l'enfance en cours était en vigueur jusqu'à fin 2019.

Des efforts sont menés pour faire respecter le principe de l'intérêt supérieur de l'enfant. Ce principe est mis en œuvre dans l'ensemble des politiques prises dans le domaine de l'enfance. Ce principe est aussi mis en œuvre pour toute décision s'agissement d'un placement d'enfant.

S'agissant de la définition de l'enfant, seule la définition reprise dans la dernière loi sur l'enfant de 2014 est valable; elle abroge toutes les autres définitions figurant dans le droit nigérien. Cette définition prévoit qu'un enfant est un être humain âgé de moins de 18 ans.

Dans le code civil, il n'y a pas de distinction au niveau de l'héritage s'agissant des enfants «légitimes» et «illégitimes», a assuré la délégation.

Le Niger a signé en 2015 la Déclaration d'Abidjan, qui vise à lutter contre l'apatridie, s'engageant ainsi à adopter un plan d'action dans ce domaine. En vertu de ce plan, il ne peut y avoir d'enfants apatrides sur le territoire nigérien, a fait valoir la délégation.

La délégation a assuré que les châtiments corporels étaient interdits aussi bien dans les écoles publiques que dans les écoles coraniques. Des fonctionnaires interviennent auprès des écoles coraniques pour sensibiliser les oulémas à cette question.

Répondant aux questions des experts sur les phénomènes liés à l'esclavage, la délégation a expliqué au Comité le «système de la cinquième femme». En vertu de cette pratique, une fois qu'il a quatre femmes, un homme prend une cinquième femme sans la marier et à tous les droits sur elle. Le Niger considère qu'il s'agit là d'une forme d'esclavage et des condamnations ont été prononcées. La loi pénale incrimine l'esclavage et assure une protection aux victimes.

La Constitution nigériane dispose que tous les peuples sont égaux. Il n'y a pas de population autochtone au Niger correspondant à la définition des Nations Unies et il n'y a pas de discrimination dans ce domaine.

La Commission nationale des droits de l'homme enregistre les plaintes s'agissant de la pension alimentaire, de la garde ou de l'abandon d'enfants. Dans la plupart des cas, ce sont les parents qui portent plainte ou des associations, pas les enfants. Le plus souvent, la Commission renvoie ces cas devant la justice.

La délégation a reconnu un taux de fécondité très élevé au Niger (7,6 enfants par femme), même si les chiffres sont en baisse selon les dernières statistiques. Différentes initiatives ont été prises pour lutter maitriser cette démographie. L'objectif du Gouvernement, par le biais du Ministère de la population, est d'arriver à faire baisser cette démographie pour un développement durable.

S'agissant des pratiques coutumières néfastes, le Niger a un taux d'excision très bas (2%), a fait valoir la délégation, qui a souligné que des actions ont été menées pour lutter contre cette pratique. Comparé à d'autres pays comme la Guinée et le Mali, le Niger a beaucoup fait dans ce domaine et compte appliquer la tolérance zéro d'ici 2020.

La délégation a expliqué que le Niger, contrairement à d'autres pays de la région, était arrivé à une stabilité dans le pays car les autorités n'ont pas abandonné les coutumes religieuses. Les chefs religieux sont souvent les chefs respectés de villages. Le pays maintien de bons contacts avec ces chefs locaux. Si les groupes extrémistes n'arrivent pas à déstabiliser le Niger, c'est bien grâce à ces leaders religieux, a affirmé la délégation.

Des missions conjointes sont chargées de veiller aux bonnes conditions de vie des jeunes dans les centres et les institutions en charge des enfants, fait valoir la délégation.

Répondant à la question de savoir où en était le processus d'adhésion à la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, la délégation a fait observer que le Niger l'avait ratifiée cette année.

La délégation a déclaré que les travaux agricoles et domestiques sont considérés comme légers et sont socialisants. Ces travaux sont règlementés et n'entament pas les capacités des enfants. Seuls les travaux légers et d'apprentissage de la vie pour les enfants sont autorisés.

La délégation a déclaré que le Niger a mis en place un système d'état civil. Il y a dans toutes les régions des bureaux de l'état civil.

La peine de mort existe au Niger dans la règlementation mais elle n'est pas appliquée depuis les années 70. Il s'agit d'une règlementation désuète, a reconnu la délégation. La loi prévoit par ailleurs qu'un enfant, quelle que soit l'infraction commise ne peut être condamné à mort.

La nouvelle loi de 2014 sur la justice pour mineurs prévoit que les mineurs ne peuvent pas être jugés par une cour d'assise. La détention d'un mineur est par ailleurs exceptionnelle: la loi prévoit que le juge doit d'abord envisager d'autres peines que la prison ou prononcer la libération sous conditions.

L'avortement est une infraction selon le code pénal et peut être sanctionné. Néanmoins, la loi sur la santé reproductive autorise l'avortement en cas de danger pour la santé de la mère.

La délégation a déclaré que l'État s'était vu contraint de faire des économies dans le domaine de la santé en raison des frais liés à l'insécurité dans le pays, mais que l'objectif du Gouvernement était de parvenir à terme à une part de 10% du budget total du pays pour ce secteur. De plus, le secteur de la santé bénéficie de fonds étrangers qui, eux, sont en augmentation. Le Niger a fait des progrès importants dans le domaine de la mortalité infantile, le taux passant de 318 pour 1000 en 1992 à 126 pour 1000 en 2015. Les soins sont gratuits pour les enfants. En outre, des moustiquaires imprégnées sont distribuées gratuitement sur tout le territoire.

En réponse à la question d'un membre du Comité, la délégation a assuré qu'une petite fille de huit ans ne pouvait pas être mariée. Elle a déclaré que le pays était dans la bonne voie pour régler le problème du mariages des enfants. Les chefs religieux ont été sensibilisés à cette question et certains ont déjà annulé des mariages d'enfants. Des groupes de leaders religieux, de femmes et d'enfants mènent un combat dans ce domaine.

La délégation a déclaré que l'époux marié civilement peut demander le divorce seulement devant un juge. Dans le mariage coutumier, la répudiation est un pouvoir unilatéral accordé au mari qui peut répudier sa femme sans aucune raison invoquée. En cas de mésentente sur la garde des enfants après une répudiation, c'est le juge qui tranchera après avoir consulté les enfants et en prenant en compte leur intérêt supérieur.

La délégation a expliqué que jusqu'en 2010, les autorités n'avaient pas de mécanisme spécifique pour rédiger les rapports que le pays est tenu de présenter aux organes conventionnels. Un comité interministériel est aujourd'hui chargé de cette mission. Le rang de ce comité a été rehaussé et il est composé de représentants de tous les ministères impliqués dans les droits de l'enfant, mais il n'y a pas de représentation des organisations de la société civile, a reconnu la délégation. Les enfants sont néanmoins impliqués dans la rédaction du rapport adressé au Comité des droits de l'enfant, de même que la Commission nationale des droits de l'homme.

La délégation a reconnu que la corruption freinait la mise en œuvre des droits de l'homme au Niger. Le pays a pris des mesures importantes dans ce domaine, a-t-elle toutefois fait valoir, précisant que les pouvoirs de la Haute autorité de lutte contre la corruption avaient été renforcés. Elle est désormais habilitée à mener des enquêtes, opérer des saisies et transmettre immédiatement les dossiers à la justice, alors qu'auparavant elle transmettait les résultats de ses enquêtes au Président de la République qui décidait des suites à donner à chaque affaire. Une ligne verte est aussi ouverte pour dénoncer des actes de corruption. La délégation a affirmé que de nombreuses affaires de corruption avaient été portées devant les tribunaux grâce à ces deux mécanismes. Des inspections se sont aussi déroulées dans différents ministères pour constater si les normes en matière de comptabilité étaient respectées.

La délégation a précisé que l'Agence nationale de l'assistance juridique et judiciaire était implantée à l'intérieur du pays dans chaque chef-lieu de région et les personnes peuvent la saisir directement. Elle offre par ailleurs une assistance gratuite aux femmes et aux mineurs. La délégation a assuré que cette agence fonctionnait et que des lignes budgétaires de l'État lui ont été accordées, même si une grande partie du financement est apportée par le secteur de la coopération internationale.

La délégation a déclaré qu'il n'y avait aucune population marginalisée au Niger. Les Touaregs et les Arabes font ainsi partie de la population nigérienne. Du point de vue politique, les Arabes et les Touaregs sont représentés à tous les niveaux de pouvoir, notamment au gouvernement. La délégation a indiqué que depuis l'indépendance, le Niger a adopté une option politique forte en faveur des populations nomades du nord du pays. Elle a attiré l'attention dans ce contexte sur le système d'écoles nomades: l'enseignant suit les éleveurs et ses enfants de manière à assurer la continuité de l'enseignement malgré les changements de lieux de vie. Le nord du pays où vivent ces populations est une zone paisible, a affirmé la délégation. C'est cette partie du pays qui «nourrit le Sud», a-t-elle insisté. En dehors de la frontière avec le Mali et la zone du pays près du lac Tchad, le pays est très calme et paisible.

La délégation a informé le Comité qu'en 2016, l'Assemblée avait adopté une loi pour mettre en œuvre l'Accord de Paris sur le climat. En 2017, une loi a permis d'adopter l'amendement au Protocole de Kyoto. La délégation a expliqué que le Niger avait pris de nombreuses mesures pour lutter contre les effets du changement climatique pour y répondre efficacement et durablement.

En réponse à de nouvelles questions des membres du Comité, la délégation a expliqué que de 2012 à 2015, 348 000 hectares de terres agricoles et pastorales ont été réhabilitées ainsi que 197 000 hectares de plantation forestière. Le Niger a un potentiel de plus de deux milliards de mètre cube d'eau souterraine renouvelable. Le pays a des ressources souterraines hydriques en suffisance, a affirmé la délégation, même s'il y a toujours des problèmes dans l'approvisionnement des villages en eau potable. Dans le cadre du «Programme de renaissance», l'accent a été mis sur la mobilisation des ressources en eau.

S'agissant de la construction d'un barrage à Kandadji, la délégation a expliqué que le processus de relogement de la population avait été mené en étroite collaboration avec les populations concernées. Un état des lieux global a été réalisé avec une étude d'impact. Ces populations ne se retrouvent pas dans des camps mais ont été relogées dans des villages. La situation est aujourd'hui meilleure pour ces populations que lorsqu'elles vivaient le long du fleuve et elles obtiendront des compensations financières.

La délégation a indiqué que le pays était en train de s'atteler à un programme de réformes des écoles coraniques afin de les inclure dans le système national d'enseignement et de pouvoir contrôler les programmes scolaires. Aujourd'hui, les enfants dans les écoles coraniques ne sont pas comptabilisés parmi les enfants scolarisés.

Des actions sont menées dans le cadre du Plan d'action nationale contre le travail des enfants, notamment des inspections de travail sur le terrain. Si des enfants sont utilisés sur des sites de travail, ils sont restitués à leurs familles et les employeurs encourent des amendes.

La délégation a reconnu que le pays n'avait pas de personnel enseignant suffisamment formé pour prendre en charge les enfants avec un handicap mental. De même, le pays n'a pas de pédopsychiatres.

Examen du rapport du Niger au titre du Protocole facultatif concernant la vente d'enfants, la prostitution et la pornographie impliquant des enfants.

En réponse aux question des membres du Comité s'agissant du Protocole facultatif, la délégation a notamment déclaré qu'il n'y avait pas de plan d'action spécifique pour l'application des dispositions du Protocole facultatif, qui est assurée dans le cadre du Plan d'action de protection de l'enfant. Un comité de coordination veillant à la mise en œuvre du Plan d'action de protection de l'enfant – et ainsi du Protocole – sera opérationnel prochainement.

Le Protocole facultatif peut être invoqué devant les tribunaux, a indiqué la délégation, qui a toutefois précisé qu'il ne l'avait pas encore été car il n'a été ratifié que récemment, soit en 2004, la délégation expliquant qu'il fallait du temps pour que les juges en prennent connaissance. Elle a indiqué que le Protocole facultatif avait été publié au Journal officiel après avoir été adopté par le Parlement. La délégation a néanmoins reconnu des difficultés dans sa mise en œuvre en soulignant qu'il faudrait une loi qui prévoie des peines pour les infractions précises figurant dans le Protocole car il ne peut pas s'appliquer dans toute une série de domaines sur lesquels portent ses dispositions. Néanmoins, lorsqu'un problème de pornographie ou de vente d'enfant se pose, les juges invoquent toujours des infractions existant dans la législation nationale pour condamner les auteurs.

En réponse à une autre question, la délégation a précisé qu'il n'y avait pas un endroit au Niger où la police et l'armée n'était pas présente pour protéger la population.

La délégation a souligné que des centres de protection et de sensibilisation sur la traite avaient été ouverts dans tout le pays. Les travailleurs sociaux dans ces centres sont outillés pour identifier les cas de traite chez les femmes et les enfants et assurer leur prise en charge, a assuré la délégation.

La délégation a indiqué que de grandes campagnes de sensibilisation étaient organisées dans tout le pays pour sensibiliser les parents et les enfants à la pornographie mettant en scène des enfants et à la vente d'enfants. Selon la délégation, ces campagnes ont porté leurs fruits. La délégation a en outre précisé que des actions sont menées par les travailleurs sociaux auprès des familles et des filles. Des instructions ont été données par les Ministères pour mettre en place un projet national de lutte contre la pornographie mettant en scène des enfants afin de juguler ce phénomène à l'échelle du pays. Les autorités régionales ont été associées à ce processus afin qu'elles prennent également des mesures dans ce domaine.

La délégation a indiqué que le réseau parlementaire de protection des femmes, des enfants et des personnes vulnérables préparait un forum national sur la mendicité, la prostitution et la délinquance. L'idée est d'aboutir à des lois efficaces dans ce domaine et de veiller à ce qu'elles soient pleinement mises en œuvre dans le pays. La prostitution des jeunes est un fléau à combattre. Les parlementaires vont aider le Gouvernement et la justice pour lutter de manière forte contre ce phénomène.

S'agissant de l'exploitation sexuelle des filles, la délégation a précisé que des actions de sensibilisation et de formation étaient organisées et planifiées pour les hôteliers et les gérants de bars dans les plans d'actions régionaux. Le Niger est par ailleurs membre du réseau Afrique de l'Ouest pour la protection des enfants en déplacement, a précisé la délégation.

Des comités des jeunes et des clubs d'enfants ont été créés au niveau des communautés afin de prévenir les cas d'exploitation et de prostitution d'enfants par des efforts de sensibilisation.

Conclusions

MME AHO ASSOUMA, a relevé qu'il restait de nombreux défis à relever pour le Niger dans le domaine des droits de l'enfant, notamment s'agissant de la définition de l'enfant, des mariages précoces ou de l'enregistrement des naissances. La corapporteuse a estimé que le Niger devait pouvoir se pencher sur le budget qu'il faut allouer à l'éducation et à la santé. Le Protocole doit aussi être vulgarisé dans tous les coins du Niger, a insisté l'experte.

M. ABDOULKARIM HACHIMOU, Secrétaire général du Ministère de la promotion de la femme et de la protection de l'enfant, a souligné que ce débat interactif avait été très riche pour le Niger. Le pays va prendre en compte les contributions et les recommandations des membres du Comité afin de protéger davantage les droits de l'enfant.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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