Aller au contenu principal

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT DE LA NORVÈGE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'homme a examiné, aujourd'hui, le rapport périodique présenté par la Norvège sur les mesures qu'il a prises pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Le rapport a été présenté par M. Sveinung Rotevatn, Secrétaire d'État au Ministère de la justice et de la sécurité publique, qui a notamment expliqué que le cadre pour la protection des droits de l'homme en Norvège avait été renforcé ces dernières années, notamment avec la création en 2015 d'une nouvelle Institution nationale des droits de l'homme. L'an dernier, le Parlement a adopté une loi globale en faveur de l'égalité et contre la discrimination. Le régime de mise en œuvre des mesures de lutte contre les discriminations a aussi été réformé par la création d'un Tribunal de l'égalité et de la discrimination. Ainsi, l'Ombudsman n'est plus chargé des plaintes et devient un acteur de l'égalité des chances. M. Rotevatn a reconnu que le recours à des mesures coercitives dans le secteur de la santé mentale demeure un sujet de préoccupation, soulignant toutefois qu'une une loi prévoyant que tout patient qui conserve ses facultés en matière de consentement ne peut être hospitalisé ou soigné contre sa volonté, sauf s'il existe un risque de suicide ou de danger grave à sa santé ou celle d'autrui. Face aux problèmes liés à la détention provisoire dans les locaux de la police, il est désormais obligatoire de transférer en maison d'arrêt les personnes détenues au bout de 48 heures, à condition que ce soit matériellement possible. Il a toutefois reconnu que le respect de cette règle connaissait fréquemment des exceptions. Le Secrétaire d'État a aussi abordé les mesures prises afin de renforcer les droits des Sâmes et de mieux intégrer les immigrants.

La délégation norvégienne était également composée, notamment, de M. Hans Brattskar, Représentant permanent de la Norvège auprès des Nations Unies à Genève et de hauts fonctionnaires des ministères des collectivités locales et de la modernisation; de la justice et de la sécurité publique; des affaires étrangères; de l'éducation et de la recherche; de l'enfance et de l'égalité; ainsi que d'un représentant de la Direction de la santé. Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, entre autres, de la liberté de religion; des discours de haine; des disparités salariales entre hommes et femmes; de la définition du viol dans la loi et des mesures contre la violence domestique; des traitements psychiatriques des soins psychologiques en prison; de l'accès à un avocat pendant la garde à vue; du système d'aide juridictionnelle; du sort des mineurs étrangers demandeurs d'asile non accompagnés; de l'insertion des étrangers; de la situation de la minorité autochtone sâme et de celle de la population rom. La délégation a notamment mis en avant les nombreuses garanties légales, l'assistance offerte aux populations vulnérables et minoritaires et le souci de la Norvège de respecter le Pacte malgré le maintien de certaines réserves qui demeurent, selon elle, justifiées.

Parmi les thèmes abordés par les membres du Comité, il a notamment été question de préoccupations s'agissant de la disposition qui figure encore dans la Constitution qualifiant l'Église de Norvège «d'église du peuple». S'agissant des droits des autochtones sâmes, une experte a souligné l'importance de l'enseignement en langue vernaculaire et de traduire les textes d'intérêt public. Les experts ont aussi relevé que la Norvège avait bien pris des mesures contre la discrimination fondée sur l'identité ou l'orientation sexuelle, mais ont constaté que les personnes transsexuelles ne recevaient pas des soins adéquats de la part des services de santé. Tout en se félicitant des mesures prises contre la violence à l'encontre des femmes, ils ont estimé que de nombreuses victimes de viol ne semblaient pas avoir un accès aisé à la justice. D'une manière générale, la définition du viol pose problème en l'absence de consensus.

Les observations finales du Comité sur le rapport de la Norvège seront rendues publiques à la fin de la session, qui se termine le 6 avril prochain.


Le Comité des droits de l'homme entame cet après-midi, à 15 heures, l'examen
du rapport du Liban (CCPR/C/LBN/3).


Présentation du rapport de la Norvège (CCPR/C/NOR/7)

M. SVEINUNG ROTEVATN, Secrétaire d'État auprès du Ministère de la justice et de la sécurité publique, a expliqué que le cadre norvégien pour la protection des droits de l'homme avait été renforcé ces dernières années. Il a ajouté qu'en 2014, une liste complète de droits avait été ajoutée à la Constitution qui inclut la plupart de ceux contenus dans le Pacte. L'année suivante, la promotion et la protection des droits de l'homme ont été renforcées par la création d'une nouvelle Institution nationale des droits de l'homme qui respecte les Principes de Paris et qui bénéficie ainsi du statut A accordé par le Comité international de coordination des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l'homme. Cette institution est d'ores et déjà devenue un acteur clé du débat public sur les questions relatives aux droits de l'homme, a affirmé le Secrétaire d'État.

En 2017, le Parlement a adopté une loi globale en faveur de l'égalité et contre la discrimination qui remplace quatre textes antérieurs. Le régime de mise en œuvre des mesures de lutte contre les discriminations a aussi été réformé par la création d'un Tribunal de l'égalité et de la discrimination qui peut infliger des amendes sous peine d'astreintes et accorder des dédommagements sur les questions de discrimination dans le travail. En conséquence de quoi, le Médiateur n'est plus chargé des plaintes et devient un acteur de l'égalité des chances.

Le recours à des mesures coercitives dans le secteur de la santé mentale demeure un sujet de préoccupation, a reconnu M. Rotevatn, et le Gouvernement réfléchit aux moyens d'en réduire la pratique. L'an dernier, une loi sur les soins de santé mentale a visé à élargir les droits du patient à demeurer maître des choix concernant sa propre santé. En vertu de ce texte, tout patient qui conserve ses facultés en matière de consentement ne peut être hospitalisé ou soigné contre sa volonté, sauf s'il existe un risque de suicide ou de danger grave à sa santé ou celle d'autrui. En outre, le patient peut prétendre à cinq heures de consultations juridiques gratuites, en lien avec d'éventuelles plaintes concernant ses examens et traitements effectués sans son accord.

Un effort particulier a été porté ces dernières années à la question de la détention provisoire dans les locaux de la police, qui ne sont pas des lieux de détention adaptés à un séjour prolongé. Il est désormais obligatoire de transférer les personnes détenues en maison d'arrêt au bout de 48 heures, sous réserve que cela soit matériellement possible. Le Secrétaire d'État a toutefois reconnu que le respect de cette règle connaissait fréquemment des exceptions en raison du manque de place en prison et de l'insuffisance des procédures existantes. C'est la raison pour laquelle le nombre de places en prison a été accru, tandis qu'une nouvelle réglementation était introduite au sein de la police et du parquet, ainsi que dans les services pénitentiaires. Ces mesures ont permis de ramener à 639 cas de dépassement de la période de 48 heures l'an dernier contre 4 250 il y a cinq ans.

Abordant les questions relatives aux droits des Sâmes, le Secrétaire d'État a fait valoir que le principe de la tenue de consultations entre les autorités de l'État et le Sámediggi, le Parlement sâme, est formalisé depuis 2005. Si les deux parties se mettent souvent d'accord sur les questions abordées, ce n'est pas toujours le cas, a-t-il reconnu. Le Gouvernement prévoit d'officialiser les procédures de consultation dans une loi qui devrait faire l'objet d'une proposition au Parlement l'an prochain. M. Rotevatn a attiré l'attention des membres du Comité sur le fait que si l'exigence d'obtenir un accord libre, préalable et éclairé était généralement considérée comme un « droit de veto », cela ne dérivait pas des instruments internationaux. Le Parlement sâme, ou les intérêts sâmes concernés, ne disposent pas de la latitude de bloquer des projets, des mesures ou des lois. M. Rotevatn a dit avoir le sentiment que les représentants du Sámediggi étaient d'accord sur le fait que le consentement libre, préalable et éclairé ne constituait pas pour autant un « droit de veto indirect ».

S'agissant enfin des questions d'immigration en Norvège, le Secrétaire d'État a annoncé que son gouvernement avait présenté une nouvelle feuille de route politique en janvier dernier, faisant de l'intégration une priorité de sa politique. Il s'agit de mettre en œuvre une réforme globale de la politique norvégienne d'inclusion et d'intégration afin d'améliorer et d'accélérer les résultats dans ce domaine. Le Gouvernement prévoit de lancer une nouvelle stratégie d'intégration d'ici la fin de l'année. L'intégration des immigrants dans la vie de tous les jours, au travail et dans l'éducation constitueront les grands chapitres de cette stratégie. Il s'agira notamment de favoriser une meilleure intégration des jeunes issus de l'immigration.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

Un membre du Comité a fait part de sa préoccupation s'agissant de l'amendement constitutionnel relatif à la religion. L'article 16, qui établissait la religion évangélique luthérienne comme « religion officielle de l'État », a été abrogé et remplacé par une nouvelle disposition, affirmant que l'Église de Norvège demeurait « église du peuple », a-t-il expliqué, cet expert craignant que cela ne porte néanmoins indirectement atteinte à la liberté religieuse de personnes appartenant à d'autres confessions.

Un autre membre du Comité s'est félicité de la réforme de l'Institution nationale des droits de l'homme qui jouit d'un large pouvoir d'intervention en matière de protections des droits. Elle doit toutefois disposer des ressources suffisantes afin qu'elle puisse s'acquitter correctement de son mandat. Une autre experte a par ailleurs souligné l'importance pour la préservation de la culture autochtone de traduire les textes fondamentaux dans la langue et les dialectes sâmes.

Une experte, qui s'est félicitée des mesures prises en faveur de l'intégration des étrangers, a demandé à la délégation si elle disposait de statistiques sur les poursuites en justice s'agissant des crimes de haine. Elle s'est par ailleurs inquiétée de la latitude dont dispose la police pour interpeller toute personne susceptible d'être d'origine étrangère, autrement dit « au faciès ». Relevant que le taux de chômage était nettement plus élevé chez les personnes d'origine étrangère, elle s'est interrogée sur la nature des obstacles à l'emploi des immigrés, ce qui ne peut être uniquement expliqué par un manque de compétences, selon elle.

Une autre experte a noté que si la Norvège avait pris des mesures contre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle ou de genre, les personnes transsexuelles ne semblaient pas recevoir des soins adéquats de la part des services de santé, d'un niveau comparable à celui des autres citoyens. Elle a souligné que la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance avait recommandé à la Norvège de faire en sorte que les opérations de changement de genre et d'autres traitements spécifiques aux transsexuels soient plus accessibles et pris en charge par l'État.

Tout en se félicitant des mesures prises contre la violence à l'encontre des femmes, la même experte a estimé que de nombreuses victimes de viol ne semblaient pas avoir un accès aisé à la justice. Selon des organisations non gouvernementales, 80% des plaintes présentées à la police sont classées sans suite. Et lorsque ces cas donnent lieu à un procès, ils aboutissent à des acquittements dans près d'un cas sur trois (30%) contre un pourcentage de seulement 6,7% pour les autres crimes violents. L'État a-t-il l'intention de tenter de réduire ce fort taux d'acquittement ? L'experte a aussi demandé quels budgets étaient consacrés à la prévention de la violence contre les femmes, y compris dans les communautés sâmes. Des mesures ont-elles été prises afin de surmonter les obstacles linguistiques et culturels qui handicapent les femmes sâmes dans leurs relations avec l'administration de la justice, a-t-elle encore demandé.

Une experte a souligné l'importance d'améliorer l'enseignement dans les langues sâmes, ce qui implique de former un nombre suffisant d'enseignants. Parallèlement, il conviendrait d'initier l'ensemble des écoliers norvégiens à la culture autochtone de leur pays, qu'ils méconnaissent trop souvent, a-t-elle estimé.

La définition du viol semble poser problème en Norvège, a noté une experte, relevant le débat actuel sur l'opportunité de la centrer sur l'absence de consentement. La question ne faisant toutefois pas consensus, une échéance pour trancher la question a-t-elle été fixée, a-t-elle demandé.

Une experte s'est inquiétée de la fréquence des cas de mise à l'isolement de malades mentaux. Elle a souligné la nécessité d'imposer une limite au nombre de jours pendant lesquels le personnel serait autorisé à recourir à cette mesure extrême. La même experte a déploré une insuffisance de personnel médical dans la prison de Trandum, les gardiens étant même parfois mis à contribution dans la délivrance de traitements aux détenus souffrant de problèmes psychologiques. Quelles mesures les autorités prennent-elles afin que les cas soient correctement diagnostiqués et reçoivent un traitement approprié, a-t-elle demandé.

En matière pénale, le droit d'avoir accès à un avocat lors d'une garde à vue n'est respecté qu'après une vingtaine d'heures, ce qui est contraire aux normes généralement admises. Elle s'est aussi inquiétée d'un accès insuffisant à l'aide juridictionnelle.

Des problèmes d'hygiène – un accès limité aux douches notamment - ont aussi été signalés. Une absence de garanties contre les mauvais traitements, voire la torture, a aussi été dénoncé au sujet de la prison de Norgerhaven, en territoire néerlandais, loué par la Norvège aux Pays-Bas depuis 2015 afin de remédier à la surpopulation carcérale. On a signalé par ailleurs qu'aucune des cellules du commissariat central de police de Bergen ne bénéficiait de la lumière du jour. La même experte, qui a demandé si des mesures avaient été prises pour remédier à ces manquements, s'est enfin enquise de la politique carcérale suivie pour la détention de mineurs. On a en effet comptabilisé 343 gardes à vue de jeunes gens en 2016, 34 d'entre eux ayant été détenus pendant plus de 24 heures sans avoir été présentés à un juge, au mépris du respect des dispositions du code de procédure pénale.

Un autre membre du Comité s'est inquiété que la Convention des droits de l'enfant ne soit pas suffisamment respectée s'agissant de la communauté rom. Il a rappelé l'importance de préserver les liens familiaux lors du placement en famille d'accueil des enfants afin de faciliter le retour ultérieur au sein du foyer d'origine.

La Norvège a la réputation d'avoir une des politiques d'asile les plus restrictives d'Europe, a observé un membre du Comité, le pays ayant apparemment une propension à renvoyer les requérants dans des pays officiellement considérés comme « sûrs », y compris l'Afghanistan ou la Fédération de Russie, ce qui présente le risque pour eux d'être victimes de violations, selon lui.

Une experte a posé des questions sur les revendications traditionnelles du peuple sâme, s'agissant notamment du droit à pratiquer librement l'élevage de Rennes. Elle a aussi mentionné la demande de réhabilitation de la place historique de ce peuple dans l'histoire de la nation. Un autre expert du Comité a souhaité savoir si les statistiques ethniques étaient autorisées afin de disposer d'un outil utile pour effectuer un état des lieux s'agissant des minorités présentes en Norvège.

Réponses de la délégation

En réponse à la question de savoir si la Norvège envisageait de lever ses réserves au Pacte, notamment celles relatives à l'obligation de séparer les adultes des mineurs en prison, la délégation a répondu par la négative. Étant donné le très faible nombre de mineurs détenus dans des unités juvéniles, les deux prisons du pays ont la capacité d'accueillir tous les détenus sans que les jeunes se retrouvent avec des adultes.

S'agissant de l'Institution norvégienne des droits de l'homme et de ses ressources, la délégation a précisé que son personnel avait un vaste domaine de compétences, y compris dans le domaine des droits des minorités et des autochtones. Son budget, qui a augmenté de façon importante ces dernières années, atteint 24,5 millions de couronnes cette année (plus de 3 millions de dollars).

La formation de la police comprend notamment des enseignements pour apprendre aux agents à s'adresser aux différents groupes de la société avec respect et tolérance, indépendamment de leur appartenance ethnique, leur âge, leur sexe, et leur perception de la réalité.

Le Parlement a estimé que l'article 16 de la Constitution amendée était satisfaisant pour garantir le droit à la liberté de religion, même si le roi se doit de se référer à l'Église luthérienne évangélique. Si cet article stipule que l'Église de Norvège demeure « l'église du peuple », il dispose aussi que toutes les communautés philosophiques et religieuses doivent bénéficier indistinctement du soutien de l'État. D'autres modifications ont également été apportées à la Constitution, notamment l'abrogation de la disposition exigeant que plus de la moitié des membres du Gouvernement professent la religion officielle de l'État. Le 1er janvier 2017, l'Église de Norvège est devenue une entité juridique indépendante. À cette occasion, la responsabilité de l'État en tant qu'employeur du clergé et des administrations de l'Église de Norvège a été transférée à l'Église. L'État continuera à financer l'Église de Norvège mais cet appui revêt désormais la forme d'une subvention et non plus d'un crédit alloué sur le budget de l'État.

Le Gouvernement a lancé une stratégie globale de lutte contre les discours de haine qu'il est prévu d'appliquer jusqu'en 2020 et qui comprend 23 mesures conçues pour lutter contre les discours hostiles fondés sur le sexe, l'appartenance ethnique, la religion, les convictions, le handicap, l'orientation sexuelle et l'identité ou l'expression de genre. Ces mesures comprennent une surveillance de la police, ainsi que l'enregistrement et le signalement des infractions. Il n'y a aucune raison de penser qu'il y a davantage de crimes de haine ciblant un groupe spécifique, selon la délégation. Depuis 2014, le Gouvernement soutient une campagne intitulée « Mettons fin aux discours haineux sur Internet », action s'inscrivant dans le cadre d'une initiative en direction de la jeunesse du Conseil de l'Europe. L'objectif est de créer un réseau national de jeunes mobilisés contre le discours haineux.

Afin de faciliter l'insertion des étrangers par l'apprentissage de la langue, le budget 2018 a alloué près de 3 millions de couronnes (environ 390 000 dollars) afin de former des enseignants de norvégien en tant que langue étrangère. Une enveloppe de 6 millions de couronnes sera consacrée à l'organisation d'examens linguistiques. En outre, 120 millions (environ 15,5 millions de dollars) ont été alloués à un programme d'offres d'emploi et de formation pour les étrangers diplômés réfugiés dans le pays.

En réponse à une question sur la disparition de mineurs étrangers demandeurs d'asile non accompagnés alors qu'ils sont hébergés en foyer, la délégation a expliqué que ceux-ci semblaient partir de leur plein gré, notamment ceux qui approchent de l'âge de la majorité et qui craignent d'être expulsés du pays. Il est particulièrement difficile pour la police de mener des enquêtes, a-t-elle reconnu, ajoutant qu'il ne peut être exclu que ces jeunes tombent sous la coupe de personnes cherchant à les exploiter d'une manière ou d'une autre. La délégation a déclaré que se posait un problème de sous-effectifs dans les centres d'accueil.

S'agissant des disparités salariales entre hommes et femmes, la délégation a précisé qu'en 2016, le salaire moyen des femmes travaillant à plein temps correspondait à 87,6 % de celui des hommes. Toutefois, les travaux de l'Institut pour la recherche sociale indiquent qu'une fois ajusté en fonction de la longueur des études, de l'expérience professionnelle, des horaires de travail, du secteur d'activité et du métier, l'écart de rémunération entre les femmes et les hommes n'est plus que de 7,5 % environ, selon les données fournies dans le rapport et citées par la délégation.

Les personnes transgenres bénéficient de soins de santé globalement satisfaisants, a assuré la délégation, expliquant toutefois que le Gouvernement réfléchissait à mieux adapter la prise en charge à leurs besoins spécifiques.

Le Parlement débat actuellement d'une nouvelle définition du viol, a confirmé la délégation en réponse à la question d'une experte. Elle a reconnu que seulement 1,6% des femmes agressées sexuellement portent plainte. Les victimes ont fréquemment un sentiment de culpabilité, elles souffrent couramment de troubles psychologiques après leur agression, elles sont souvent en état d'ébriété au moment des faits et, par ailleurs, elles peuvent craindre des représailles de la part de leur agresseur. Une campagne de sensibilisation a été lancée pour remédier à tout ce qui peut dissuader une victime de porter plainte ou à ce qui aurait pu conduire la justice à ne pas entamer de poursuites, a indiqué la délégation. S'agissant du nombre élevé d'acquittements dans ces affaire, il a été constaté que ceux-ci sont fréquemment prononcés en appel, a relevé la délégation qui n'a pas fourni d'explication à cet état de fait. Elle a par la suite précisé que La délégation a indiqué que 356 individus avaient été condamnés pour viols en 2015.

Le Ministère de la justice envisage de lancer un nouveau plan d'action sur la violence domestique. S'il devait finalement ne pas donner suite à ce projet, la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique, dite « Convention d'Istanbul », sera particulièrement utile pour inspirer les initiatives des pouvoirs publics et de la société civile, a relevé la délégation.

En réponse à une question sur le respect de la volonté des patients soumis à des traitements psychiatriques, la délégation a indiqué que le Parlement avait modifié la loi sur les soins de santé mentale. La durée de réflexion obligatoire avant qu'une décision puisse être prise concernant la médication forcée a été portée de trois à cinq jours. Les patients doivent avoir la possibilité de donner leur avis avant qu'une décision ne soit prise concernant les soins de santé mentale les affectant, y compris les traitements sans consentement. La loi énonce clairement que le professionnel de santé mentale compétent est tenu de consulter un homologue avant de prendre une décision concernant l'examen et le traitement d'un patient sans son consentement. Par ailleurs, le Ministère de la santé a demandé à tous les prestataires de santé mentale de mettre au point des programmes de traitement sans prise de médicaments.


En réponse aux questions des membres du Comité relativement aux soins psychologiques en prison, la délégation a assuré que les détenus avaient les mêmes droits que le reste de la population. Afin d'améliorer la situation concernant les détenus ayant des problèmes psychologiques, dont les cas sont fréquents, des recommandations ont été faites en 2016 par un groupe de travail; elles sont actuellement en cours d'analyse. D'ores et déjà, il a été retenu que les soins de santé mentale doivent être assurés par des unités psychiatriques au sein même des prisons, ce qui va permettre d'éviter les transferts de détenus dans un cabinet de spécialiste. Les autorités sont conscientes de la nécessité de réduire la fréquence de la mise à l'isolement. Par ailleurs, la délégation a démenti tout risque de mauvais traitements voire de torture dans la prison de Norgerhaven, institution pénitentiaire norvégienne louée aux Pays-Bas.

L'accès à un avocat doit être accordé dès qu'il s'avère qu'une personne placée en garde à vue le restera au-delà de 24 heures – 12 heures dans le cas d'un mineur. Dans ce dernier cas, le Service de protection de l'enfance doit assister à toutes les auditions pendant la garde à vue, à moins que le tribunal estime que sa participation au-delà de l'audience initiale est manifestement inutile.

Le système d'aide juridictionnelle civile distingue les affaires soumises à conditions de ressources et celles qui ne le sont pas, ainsi que les affaires non prioritaires. L'aide juridictionnelle gratuite ne peut être versée que si les conditions financières en termes de seuil de revenus et d'actifs sont remplies et si une affaire est considérée comme particulièrement urgente pour le requérant. L'affaire doit généralement être considérée comme ayant une incidence personnelle importante sur le requérant. Le Parlement a entrepris de réévaluer les modalités de cette aide, en tenant éventuellement compte de l'évolution de l'inflation par exemple. Il s'agira de veiller à ce que le système soit aussi équitable, ciblé et efficace que possible.

S'agissant des demandeurs d'asile, l'intervention d'un interprète est requise, à moins que la communication puisse s'effectuer dans une langue commune. Si la demande d'asile est refusée, le ressortissant étranger a le droit de bénéficier des services d'un avocat dans la procédure d'appel. En réponse à la question d'un membre du Comité, la délégation a confirmé, par ailleurs, que la Fédération de Russie était considérée comme un pays sûr.

Les mineurs non accompagnés ont, en outre, droit à la désignation d'un représentant (tuteur légal) qui est chargé de protéger les intérêts du mineur lors de sa demande d'asile. Il est envisagé de permettre aux enfants apatrides nés en Norvège de demander une naturalisation à partir de l'âge de la majorité.

Le Gouvernement a présenté des excuses à la population rom pour les discriminations subies par le passé, a rappelé la délégation. Il a été décidé, par ailleurs, de revoir la gestion des indemnisations qui s'est avérée insatisfaisante. Des abus ont été constatés et les autorités entendent remédier au problème au plus vite. S'agissant des enfants roms, le placement en famille d'accueil doit se faire avec le consentement des parents et il doit s'agir d'une mesure de dernier recours, après avoir exploré toutes les alternatives. On privilégie le placement chez des proches ou dans une famille de la communauté d'origine. Une fois par an, les parents peuvent demander un retour dans la famille, ce qui implique de demander l'avis de l'enfant. Parallèlement, les parents peuvent demander une aide à la parentalité. De fait, il n'est pas aisé de trouver des familles d'accueil. Selon le Conseil de l'Europe, la Norvège est l'un des pays ayant le moins de mineurs placés en institution. Tout en affirmant le respect absolu de l'intérêt supérieur de l'enfant, la délégation a reconnu qu'il pouvait se heurter à l'intérêt de la famille.

Il n'existe pas de listes officielles ou de statistiques ethniques, décision prise par crainte que certains n'en fassent un mauvais usage, a justifié la délégation. Néanmoins, le Conseil norvégien de la recherche fournit des données et des statistiques qui ne sont pas conservées dès qu'elles ont été exploitées afin de prendre les mesures appropriées. En raison de l'afflux migratoire actuel, de plus en plus de mineurs sont en contact avec les services sociaux et de protection de l'enfance. La migration a un impact positif sur la société norvégienne, selon la délégation, ce qui n'exclut toutefois pas d'éventuelles difficultés d'intégration en cas d'afflux important de migrants.

En réponse aux interrogations des membres du Comité au sujet du traitement de la minorité autochtone sâme, la délégation a indiqué qu'au sein de cette population, un homme sur quatre et une femme sur trois affirme avoir l'objet de discriminations. Depuis une décennie, la Norvège s'est efforcée de combattre les préjugés vis-à-vis de la population autochtone mais il s'agit d'un effort de longue haleine, a averti la délégation. Plusieurs matières enseignées à l'école concernent la civilisation sâme, a-t-elle toutefois fait valoir. Les autorités font en sorte que dans les régions à forte concentration sâme, l'encadrement, dans les jardins d'enfants, par exemple, ainsi que l'enseignement scolaire soient prodigués en langue locale. Le pays est toutefois confronté à une insuffisance du nombre d'enseignants sâmophones.

Un livre blanc sur la durabilité de l'élevage de rennes a été présenté au Parlement l'an dernier. L'avis du Parlement sâme et de l'Association des éleveurs de rennes sâmes de Norvège a été sollicité concernant les mesures susceptibles d'avoir une incidence directe sur les intérêts de la population autochtone. Il a été décidé que la rédaction d'un livre blanc se ferait désormais tous les ans.

La Norvège, la Suède et la Finlande ont conclu des négociations en vue de conclure une Convention nordique sâme. Les responsables des négociations des trois pays nordiques ont approuvé un projet de texte de la convention négocié en janvier de cette année. L'un des principaux objectifs d'un tel instrument sera de permettre au peuple sâme de préserver, pratiquer et développer sa culture en perturbant le moins possible les frontières nationales. Il vise à mettre en place un cadre juridique commun aux trois pays qui ne pourront toutefois la signer et la ratifier que lorsque les parlements sâmes l'auront avalisée. Par ailleurs, une Commission de la vérité a été créée afin d'examiner la politique d'assimilation exercée par la Norvège à l'endroit des Sâmes.

En 2014, la Norvège et la Finlande ont déjà signé une convention relative à la construction et à l'entretien de barrières et d'autres mesures visant à empêcher les rennes de pénétrer dans le territoire de l'autre pays - la frontière entre la Norvège et la Finlande est en effet fermée à l'élevage transfrontière du renne. La Convention entre les deux pays a pour objet de réglementer la répartition des responsabilités pour l'édification et l'entretien de barrières et d'autres mesures visant à empêcher les rennes de franchir la frontière, ainsi que de réglementer le contrôle des rennes qui parviennent tout de même à la franchir. La Norvège et la Suède ont aussi entrepris de négocier une convention de pâture du renne, la précédente étant caduque depuis 2005.

Conclusion

M. YUGI IWASAWA, Président du Comité, s'est félicité de la bonne tenue du dialogue, a énuméré les principales questions soulevées, des problèmes d'exclusion sociale aux droits sâmes en passant par la situation carcérale.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

CCPR18.004F