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LE COMITÉ DES DISPARITIONS FORCÉES DIALOGUE AVEC LES ÉTATS MEMBRES ET LA SOCIÉTÉ CIVILE

Compte rendu de séance

Le Comité des disparitions forcées a reçu cet après-midi des représentants des États Membres de l'ONU, ainsi qu'une organisation non gouvernementale, dans le cadre d'un échange qui a porté essentiellement sur la recherche de moyens pour favoriser une montée en puissance des ratifications de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Cet instrument compte actuellement 56 États parties.

Lors de la célébration du dixième anniversaire de la Convention, à la fin de l'an dernier, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme avait appelé à une montée en puissance qui permettrait de doubler le nombre d'États parties dans les cinq prochaines années.

En ouverture du débat, le Président du Comité, M. Santiago Corcuera Cabezut, a souligné la nécessité de formuler des idées novatrices pour susciter une vague de ratifications en s'efforçant de convaincre les États réticents. Il a émis l'hypothèse que cette réticence pouvait s'expliquer par la nécessité d'amender éventuellement leur législation, sinon par la «lassitude» provoquée par la présentation de rapports périodiques aux nombreux organes conventionnels de l'ONU. Or, a-t-il rappelé, et contrairement aux autres instruments internationaux, la ratification de la Convention relative aux disparitions forcées implique la présentation d'un unique rapport. M. Corcuera a aussi relevé le fait que certains États étaient réticents à autoriser la soumission de plaintes sous la forme de «communications individuelles» au Comité.

Parmi les experts à avoir pris la parole, Emmanuel Decaux, ancien Président du Comité, a estimé que le doublement du nombre de ratifications nécessiterait «une vraie stratégie de communication» du Comité pour rendre ses travaux plus visibles.

La Suisse, dont le représentant a indiqué qu'elle était partie à la Convention depuis le début de l'année seulement, a jugé qu'un projet de Déclaration du Conseil des droits de l'homme pourrait susciter de nouvelles ratifications. L'Argentine a fait savoir qu'un groupe de pays ferait justement une intervention, demain au Conseil des droits de l'homme, en faveur de la ratification de la Convention. L'Argentine a souligné l'importance du mécanisme d'Examen périodique universel du Conseil à cet égard. Elle a ainsi cité le cas de la République tchèque, dont les représentants ont eu l'occasion de souligner que la recommandation de ratifier la Convention qui avait été faite à leur Gouvernement lors de l'examen périodique avait été un élément déterminant pour devenir État partie.

Le Japon a indiqué être l'un des rares pays d'Asie – avec l'Iraq – à avoir ratifié la Convention. Il a relevé qu'outre l'effort de présenter des rapports mentionné par le Président, la principale des objections à la ratification est que les droits garantis par la Convention le seraient déjà par d'autres instruments internationaux, ce qui est inexact. Le Japon s'est inquiété du fait que la non-présentation de rapports périodiques puisse avoir pour conséquence de ne pas révéler des problèmes de disparitions forcées dans certains pays.

Un expert a relevé que le grand défi pour le Comité était en effet la mise en place d'un «mécanisme de suivi efficace mais souple», pour remédier au fait que la Convention ne prévoyait pas la production de rapports périodiques.

Le Pérou a rappelé que la surreprésentation de l'Amérique latine parmi les États parties s'expliquait par des raisons historiques. Il a estimé qu'il y avait aussi une réticence des États non signataires à être montrés du doigt. Des intérêts géopolitiques se cachent parfois derrière les critiques, ainsi qu'on peut le constater au Conseil des droits de l'homme, a relevé la représentante péruvienne. Son homologue du Mexique a indiqué que son pays avait ratifié la Convention en raison des graves problèmes auxquels il était confronté, espérant ainsi que le Comité l'aiderait à trouver des solutions. Cela se fait, évidemment, au prix de critiques, a-t-il reconnu, mais le Mexique ne regrette pas sa démarche. Un expert a reconnu «un coût politique» pour les États parties car, a-t-il observé, faire partie de l'ONU c'est «payer pour être critiqué».

M. Corcuera a convenu qu'il valait mieux voir trop souvent le «médecin» que pas du tout. «La politique de l'autruche» n'est pas payante à long terme, a renchéri un de ses collègues, qui a cité le cas de la Syrie et affirmé qu'elle n'était pas partie à de nombreux instruments internationaux.

Se félicitant du travail accompli par le Comité, l'Iraq a estimé pour sa part que la Convention comblait un vide important et qu'elle ne saurait être considérée comme un instrument régional en dépit de la prédominance latino-américaine. Pour M. Decaux, la Convention offre «une valeur ajoutée»: elle représente un saut qualificatif car, loin de constituer un doublon, elle institue un nouveau droit humain. Il s'agit ainsi, selon lui, d'une «révolution juridique».

Les représentants des États suivants ont aussi pris la parole lors de la réunion: Brésil, Libye et Togo, ainsi qu'une représentante de l'ONG Genève pour les droits de l'homme.


À partir de demain, le Comité se réunira à huis clos jusqu'à la clôture de sa session, vendredi prochain 17 mars.


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CED17.006F