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LE COMITÉ DES DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES EXAMINE LE RAPPORT DE LA BOLIVIE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits des personnes handicapées a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport initial de la Bolivie sur les mesures prises par ce pays pour mettre en œuvre la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Présentant ce rapport, Mme Virginia Velasco Condori, Ministre de la justice de l'État plurinational de Bolivie, a reconnu que les personnes handicapées avaient pâti d'un manque d'attention de la part des gouvernements néolibéraux du passé. Aujourd'hui, elles bénéficient des mêmes droits et des mêmes devoirs que les autres membres de la société, étant acteurs de leur propre destin. La promulgation et mise en œuvre d'un texte de loi en 2009 reprend les dispositions de la Convention et de son Protocole facultatif, a indiqué la Ministre.

Des mesures en faveur de l'accessibilité ont été édictées, notamment la prise en charge préférentielle des passagers handicapés dans les transports publics, ainsi que le privilège de bénéficier de tarifs réduits, a poursuivi la Ministre bolivienne de la justice. Des adaptations visant à réduire les barrières physiques et à améliorer la signalétique ont été entreprises dans les aéroports, a-t-elle ajouté. Près d'un millier de logements sociaux ont été attribués entre 2012 et 2015 à des personnes handicapées, a en outre fait valoir Mme Velasco Condori. Les détenus handicapés ont été répertoriés afin qu'ils puissent bénéficier des mêmes mesures adaptées dont bénéficient les autres personnes handicapées. Des politiques d'éducation et de formation continue sont mises en œuvre, tout en sensibilisant la société à la nécessité de ne plus permettre la discrimination à l'encontre des personnes handicapées, a ajouté la Ministre. La prise en charge médicale gratuite figure parmi les mesures prises en faveur de ces personnes, a-t-elle en outre fait valoir. Le Ministère de la santé est en train de mettre en œuvre un projet de mise à niveau des centres de réadaptation voire de construction d'infrastructures. La trentaine de centres adaptés que compte le pays a permis de prendre en charge quelque 137 000 personnes, a précisé la cheffe de la délégation bolivienne. Mme Velasco Condori a ensuite fait état d'un projet de loi d'intégration sur le marché du travail qui vise l'insertion sociale et devra être renforcé par un décret stipulant que les administrations publiques doivent compter au moins 4% de travailleurs handicapés dans leurs effectifs – le quota prévu pour le secteur privé étant fixé à 2%.

La délégation bolivienne était également composée de Mme Nardi Suxo Iturry, Représentante permanente de la Bolivie auprès des Nations Unies à Genève; de M. Javier Salguero Aramayo, Directeur général des personnes handicapées au Ministère de la justice; de deux hauts fonctionnaires chargés du handicap; ainsi que de membres de la Mission permanente de la Bolivie auprès des Nations Unies à Genève.

La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, de l'interdiction de la discrimination fondée sur le handicap; de la législation et du système de protection intégrale en vigueur en faveur des personnes handicapées; de la «Caravane» des handicapés; de la concertation avec les organisations représentatives des personnes handicapées; du recensement des personnes handicapées et de l'enregistrement des naissances; des questions d'aménagement raisonnable et autres mesures visant à faciliter le déplacement et l'accès aux services des personnes handicapées; des questions de santé sexuelle et reproductive; ou encore des expressions péjoratives discriminatoires à l'égard des personnes handicapées.

La rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Bolivie, Mme Silvia Judith Quan-Chang, a souligné l'énorme avancée qu'avait constituée pour le pays l'adoption de la Constitution de 2009. Il faut reconnaître que l'État bolivien a déployé des efforts considérables, avec l'adoption de la Loi de 2012 sur le handicap, a-t-elle ajouté; mais certains estiment que ce texte n'a guère été suivi d'effets, a-t-elle relevé. L'insuffisance des ressources ne saurait justifier une restriction des droits des personnes handicapées, a insisté Mme Quan-Chang. Elle a ensuite évoqué la «Caravane» des handicapés qui a marché de Cochabamba à La Paz mais dont les revendications n'ont pas été entendues et qui, pis encore, a donné lieu à une brutale répression.

Une experte a estimé qu'un certain nombre de lois en vigueur en Bolivie n'étaient pas conformes à la Convention. Un autre expert a jugé trop médicale et par ailleurs beaucoup trop vague pour pouvoir être mise en œuvre la définition du handicap retenue par la Bolivie. Relevant qu'il est affirmé dans le rapport que l'attitude de la société à l'égard des personnes handicapées a beaucoup changé, un expert a quant à lui fait observer que ce n'est pas ce que disent un certain nombre d'organisations non gouvernementales (ONG) qui affirment plutôt le contraire.

Une experte s'est inquiétée que la Bolivie n'ait toujours pas mis en place l'enregistrement de toutes les naissances, particulièrement pour ce qui est des nouveau-nés handicapés. Elle s'est aussi inquiétée du fort taux d'abandon d'enfants. Il a par ailleurs été rappelé que le refus de mettre en place des aménagements raisonnables devait être considéré comme discriminatoire. Un membre du Comité a jugé particulièrement révoltant que les deux tiers des personnes handicapées vivent en situation de pauvreté, comme l'indique le rapport.

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de la Bolivie et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le vendredi 2 septembre.


Cet après-midi à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport initial des Émirats arabes unis, qu'il achèvera demain matin.


Présentation du rapport de la Bolivie

Le Comité est saisi du rapport initial de la Bolivie, ainsi que des réponses (en espagnol) du pays à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité.

Présentant ce rapport, MME VIRGINIA VELASCO CONDORI, Ministre de la justice de l'État plurinational de Bolivie, a reconnu que les personnes handicapées avaient pâti d'un manque d'attention de la part des gouvernements néolibéraux du passé. Elles étaient considérées comme des personnes malades devant faire des efforts pour surmonter leurs carences afin intégrer comme elles le pouvaient à la société. Aujourd'hui, elles bénéficient des mêmes droits et des mêmes devoirs que les autres membres de la société, étant acteurs de leur propre destin et en dehors de tout paternalisme à leur égard. La promulgation et mise en œuvre d'un texte de loi en 2009 reprend les dispositions de la Convention et de son Protocole facultatif, a indiqué la Ministre.

Mme Velasco Condori a ensuite énuméré les décrets adoptés par le Gouvernement, ainsi que la loi de 2008 qui élimine les subventions aux partis politiques afin de les réaffecter aux personnes handicapées dans le cadre d'un fonds national de solidarité et d'équité doté de 40 millions de bolivars par an. Selon le recensement de 2012, on compte 52% de femmes et 48% d'hommes parmi les personnes handicapées.

Des mesures en faveur de l'accessibilité ont été édictées, notamment la prise en charge préférentielle des passagers handicapés dans les transports publics, ainsi que le privilège de bénéficier de tarifs réduits, a poursuivi la Ministre bolivienne de la justice. Des adaptations visant à réduire les barrières physiques et à améliorer la signalétique ont été entreprises dans les aéroports, a-t-elle ajouté. Près d'un millier de logements sociaux ont été attribués entre 2012 et 2015 à des personnes handicapées, a en outre fait valoir Mme Velasco Condori. Les détenus handicapés ont été répertoriés afin qu'ils puissent bénéficier des mêmes mesures adaptées dont bénéficient les autres personnes handicapées, s'agissant par exemple de la fourniture de services en braille, notamment en matière d'informatique. Des politiques d'éducation et de formation continue sont mises en œuvre, tout en sensibilisant la société à la nécessité de ne plus permettre la discrimination à l'encontre des personnes handicapées, a ajouté la Ministre. La prise en charge médicale gratuite figure parmi les mesures prises en faveur de ces personnes, a-t-elle en outre fait valoir. Le Ministère de la santé est en train de mettre en œuvre un projet de mise à niveau des centres de réadaptation voire de construction d'infrastructures. La trentaine de centres adaptés que compte le pays a permis de prendre en charge quelque 137 000 personnes, a précisé la cheffe de la délégation bolivienne.

Mme Velasco Condori a ensuite fait état d'un projet de loi d'intégration sur le marché du travail qui vise l'insertion sociale et devra être renforcé par un décret stipulant que les administrations publiques doivent compter au moins 4% de travailleurs handicapés dans leurs effectifs – le quota prévu pour le secteur privé étant fixé à 2%.

Les institutions représentatives des personnes handicapées sont actuellement dirigées par des femmes handicapées, a par ailleurs indiqué la Ministre de la justice. Le Plan de développement économique et social à l'horizon 2020 établit une stratégie d'inclusion économique et sociale des personnes handicapées au sein de la collectivité, a-t-elle indiqué. Elle a souligné que les politiques néolibérales du passé avaient eu pour conséquence de plonger une grande partie de la population bolivienne dans la pauvreté, le Gouvernement actuel ayant entrepris d'aller à contre-courant de ces choix ces dix dernières années. Mme Velasco Condori a souligné que la personne handicapée et sa famille devaient être les acteurs principaux de la réadaptation et de la réinsertion des sujets concernés.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

MME SILVIA JUDITH QUAN-CHANG, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Bolivie, a souligné l'énorme avancée qu'avait constituée pour le pays l'adoption de la Constitution de 2009, en particulier en matière de reconnaissance de sa diversité ethnique, de ses langues et de ses traditions. Cette Constitution constitue un modèle pour d'autres pays comparables, a-t-elle insisté. Le territoire bolivien est vaste, marqué par une grande diversité géographique, ce qui pose des défis considérables pour assurer la présence de l'État sur l'ensemble du territoire, a-t-elle poursuivi. L'invisibilité des personnes handicapées les rend particulièrement vulnérables, notamment face à la maladie voire la mort, a souligné Mme Quan-Chang. Même si l'on ne peut ignorer que la Bolivie est un pays extrêmement pauvre, occupant le 119e rang sur 200 en termes d'indice de développement humain, tout cela ne saurait justifier que l'État ne s'acquitte pas de ses obligations, a déclaré la rapporteuse. Il faut reconnaître que l'État bolivien a déployé des efforts considérables, avec l'adoption de la Loi de 2012 sur le handicap, a-t-elle reconnu; mais certains estiment que ce texte n'a guère été suivi d'effets, a-t-elle relevé. L'insuffisance des ressources ne saurait justifier une restriction des droits des personnes handicapées, a insisté Mme Quan-Chang. Elle a ensuite évoqué la «Caravane» qui a marché de Cochabamba à La Paz mais dont les revendications n'ont pas été entendues et qui, pis encore, a donné lieu à une brutale répression. La rapporteuse a émis l'espoir que l'examen du rapport de la Bolivie donnerait lieu à un échange ouvert et transparent avec la délégation bolivienne.

Intervenant directement à la suite de ces observations de la rapporteuse, MME NARDI SUXO ITURRY, Représentante permanente de la Bolivie auprès des Nations Unies à Genève, a souhaité apporter un certain nombre de précisions, estimant que la transparence et le caractère proactif du dialogue étaient les conditions sine qua non d'un échange constructif. Elle a précisé que les trois principaux piliers de l'action gouvernementale, dans le cadre du Programme patriotique 2025, étaient l'éradication de la pauvreté, la socialisation et l'universalisation des services de base et, enfin, la santé et l'éducation pour la formation d'un être humain intégral. La Bolivie est aujourd'hui sortie d'un demi-millénaire de ténèbres du libéralisme et de la dépossession de sa richesse et de son identité. La discrimination, l'exclusion, l'exploitation, la violence et l'abus sont les attributs du colonialisme et il est très difficile de savoir où l'on va lorsque l'on ignore d'où l'on vient, a rappelé la Représentante permanente.

Le modèle économique bolivien redistribue les revenus de telle sorte que les excédents économiques circulent parmi les personnes à faible revenu, grâce à des transferts, des investissements publics, des hausses salariales ou des subventions croisées, entre autres. Le Gouvernement considère que ce modèle est doté d'une vision sociocommunautaire. Toute doléance est prise en compte, analysée par les autorités gouvernementales, transmise aux instances de contrôle social et à la société civile organisée, a ajouté la Représentante permanente. La Bolivie entend construire pas à pas une société juste et harmonieuse, par la volonté politique et l'engagement social de son Gouvernement desquels émanent sa politique sociale, cimentée dans la décolonisation, sans discrimination ni exploitation et en promouvant la justice sociale afin de consolider les identités plurinationales. Le défi est de décoloniser l'État depuis l'État et cela n'est pas possible sans la participation et l'engagement de la société dans son ensemble, a conclu la Représentante permanente de la Bolivie.

Les autres membres du Comité prenant à leur tour la parole, une experte a estimé qu'un certain nombre de lois en vigueur en Bolivie n'étaient pas conformes à la Convention. Elle a par ailleurs estimé que le rapport apportait très peu d'informations sur la situation des enfants handicapés, des autochtones notamment.

Un autre expert a demandé dans quelle mesure les organisations de personnes handicapées avaient pris part à l'élaboration du rapport. Relevant qu'il est affirmé dans ce rapport que l'attitude de la société à l'égard des personnes handicapées a beaucoup changé, cet expert a fait observer que ce n'est pas ce que disent un certain nombre d'organisations non gouvernementales (ONG) qui affirment plutôt le contraire.

Un expert a souhaité savoir comment il pourrait se déplacer, lui qui a des problèmes de mobilité, s'il se rendait en Bolivie, particulièrement dans la ville de Santa Cruz qu'il aimerait visiter un jour en raison de son caractère unique. Un autre expert a posé la même question pour la capitale, La Paz.

La délégation a-t-elle connaissance de cas de condamnation à des peines de prison pour discrimination, ainsi que le prévoit la loi. Ces éventuelles condamnations s'accompagnent-elles de mesures de réparation en faveur des victimes, a-t-il en outre été demandé?

Une experte a demandé de quels financements les personnes handicapées bénéficiaient de la part de l'État, s'inquiétant du fait que la Bolivie ait été peu présente dans des réunions internationales consacrées au handicap. En fin de semaine, l'Union mondiale des aveugles doit se réunir et la Bolivie n'y enverra pas de délégation, a en outre fait observer cette experte. Elle s'est par ailleurs inquiétée que la Bolivie n'ait toujours pas mis en place l'enregistrement de toutes les naissances, particulièrement pour ce qui est des nouveau-nés handicapés. Elle s'est aussi inquiétée du fort taux d'abandon d'enfants. Combien de jeunes filles handicapées victimes d'abus ont-elles effectivement eu accès à des voies de recours en justice, a-t-elle également demandé?

Un autre expert a jugé trop médicale et par ailleurs beaucoup trop vague pour pouvoir être mise en œuvre la définition du handicap retenue par la Bolivie. Des campagnes de formation des fonctionnaires, des juges ont-elles lieu afin que la Convention bénéficie d'une application concrète, a-t-il demandé? Il a rappelé que le refus de mettre en place des aménagements raisonnables devait être considéré comme discriminatoire.

Quelles mesures concrètes ont-elles été prises contre la discrimination à l'encontre des jeunes femmes et jeunes filles, particulièrement dans les zones rurales, a demandé une experte?

Un membre du Comité, qui a estimé que la concertation avec la société civile avait été manifestement insuffisante dans le cadre du processus d'élaboration du présent rapport, a demandé si la délégation pouvait assurer qu'un bilan serait dressé avec les ONG à l'issue du présent examen.

Une experte a relevé que le rapport contenait peu d'information sur les services fournis aux réfugiés et aux personnes déplacées qui sont handicapés. Un de ses collègues s'est enquis de la formation dispensée aux secouristes censés intervenir en cas de catastrophe naturelle pour porter assistance aux personnes handicapées affectées.

Une experte s'est interrogée sur les possibilités de priver des personnes handicapées de leur libre arbitre, s'agissant notamment de leur choix d'avoir des enfants. On ne saurait priver une personne handicapée de ses droits fondamentaux, a-t-elle rappelé. Une réforme s'avère indispensable à cet égard, les organisations représentatives des personnes handicapées devant être associées à l'élaboration d'un nouveau texte de loi, a insisté l'experte. Elle a rappelé que la stérilisation forcée était interdite par la Convention, ce qui a été rappelé dans une des observations générales du Comité. Un membre du Comité s'est enquis des mesures prises pour garantir que les femmes et les jeunes filles handicapées aient accès aux services de santé sexuelle et reproductive.

Une experte a relevé que le rapport établissait à plus de 40% le taux d'abandon scolaire parmi les jeunes handicapés et à 12% le taux de ceux parvenant au niveau du secondaire. Elle s'est interrogée sur la conception que se faisait le Gouvernement bolivien de l'éducation inclusive et a rappelé que celle-ci nécessitait des adaptations pour les élèves concernés.

Un membre du Comité a jugé particulièrement révoltant que les deux tiers des personnes handicapées vivent en situation de pauvreté, comme l'indique le rapport. Aussi, s'est-il enquis des mesures prises par les autorités en faveur de l'éradication de la pauvreté. Il a insisté sur la nécessité de disposer de données ventilées afin d'asseoir de telles mesures sur des éléments concrets, garantissant ainsi une meilleure efficacité.

Un expert s'est enquis de la prévalence du VIH/sida parmi les personnes handicapées.

Une experte a fait part de sa préoccupation face à la faiblesse des moyens du Bureau du Défenseur du peuple.

Réponses de la délégation

La Constitution de 2009 interdit et sanctionne toute forme de discrimination fondée sur le sexe, la couleur de la peau, l'âge, l'orientation sexuelle, l'identité de genre, l'origine, la culture, la nationalité, la citoyenneté, la langue, la croyance religieuse, idéologique, l'affiliation politique ou philosophique, l'état civil, la condition économique et sociale, l'activité, le degré d'instruction, le handicap, la grossesse, ou tout autre motif qui aurait pour but ou résultat de porter atteinte à la reconnaissance, à la jouissance ou à l'exercice des droits de la personne, a indiqué la délégation.

Par ailleurs, une loi adoptée en 2010 incrimine le racisme et toute forme de discrimination raciale, a rappelé la délégation. Afin de combattre la discrimination multiple et intersectorielle, le Ministère des cultures et du tourisme, par l'intermédiaire du Vice-Ministère de la décolonisation, a réalisé des actions de prévention et de sensibilisation et s'efforce d'assurer une diffusion massive des normes. Aucun cas d'éventuelle condamnation à des peines de prison pour faits de discrimination n'a été signalé, a précisé la délégation.

La Loi fondamentale fixe pour cadre un modèle social et des droits humains qui incluent les personnes handicapées, a poursuivi la délégation. La loi relative aux personnes handicapées établit un système de protection intégral de ces personnes, a-t-elle souligné. La même Loi reconnaît le droit des personnes handicapées à former leur propre famille en assumant leurs responsabilités de père, de mère et de conjoint.

Les personnes handicapées, y compris les femmes et les enfants handicapées, bénéficient d'une prise en charge des pouvoirs publics dans le cadre d'un système de protection intégrale permettant par exemple de faire parvenir les médicaments nécessaires dans les zones les plus reculées du pays. Aujourd'hui, on peut dire que les personnes handicapées ne sont plus démunies et qu'elles bénéficient d'une prise en charge médicale gratuite, a expliqué la délégation.

Le Système national de santé a pour objectif de fournir gratuitement des services et une attention intégrale et interculturelle aux femmes enceintes, aux enfants de moins de cinq ans, aux adultes de plus de 60 ans, ainsi qu'aux personnes handicapées, a ensuite précisé la délégation.

La délégation a ensuite fait part de la disposition de la Bolivie à amender les textes de loi pouvant être contraires aux dispositions de la Convention, tout en précisant n'avoir pas connaissance de l'existence de tels textes. Bien au contraire, a-t-elle assuré, le législateur veille à adopter des textes qui soient conformes aux engagements internationaux du pays.

La délégation a souhaité avoir des informations précises sur les cas d'infanticides dans des régions reculées rapportés par un membre du Comité sur la base d'indications confidentielles. La délégation a en effet indiqué ne pas disposer d'informations en ce sens.

Les organisations représentatives des personnes handicapées jouent un rôle très important dans le pays, a par ailleurs assuré la délégation, assurant que des consultations ont lieu avant l'adoption de toute norme dans ce domaine par le Gouvernement ou par le Parlement. Dans les neuf départements du pays, les organisations représentant les personnes handicapées sont reconnues sur le plan juridique, a insisté la délégation.

Pour l'édiction de normes, la concertation avec les organisations de personnes handicapées est obligatoire, aux niveaux national et départemental, a par la suite insisté la délégation, rappelant qu'un article de la Loi sur le handicap établit le rôle participatif des personnes handicapées dans la prise de décision en matière de politique publique.

La délégation a énuméré un grand nombre de mesures spécifiques prises en faveur des personnes handicapées, citant notamment le privilège de bénéficier d'un demi-tarif sur les lignes aériennes nationales.

Le pays, qui compte 339 municipalités, s'illustre par sa grande diversité culturelle, ce qui est certes un atout mais soulève aussi parfois des complications en matière d'application des politiques publiques, a ensuite souligné la délégation.

S'agissant de la définition du handicap, la délégation a indiqué que les critères d'évaluation et d'homologation du handicap faisaient l'objet d'une réflexion.

C'est la Direction générale du handicap qui assure la coordination entre les différents ministères concernés dans la mise en place des mesures d'accessibilité, a d'autre part indiqué la délégation.

En 2009, a été entrepris un recensement des personnes handicapées qui a impliqué des professionnels de la médecine et de la psychiatrie boliviens, avec l'assistance de spécialistes cubains et vénézuéliens, a indiqué la délégation. L'an dernier, le registre national des personnes handicapées comptait quelque 61 447 personnes handicapées. Ce recensement est une tâche permanente qui se poursuit de manière continue, a souligné la délégation.

La délégation a ensuite reconnu des lacunes en matière de recueil de données, le recensement de 2012 n'ayant pas pris en compte les personnes handicapées et le nombre de personnes enregistrées ne reflétant pas la réalité. Ainsi, selon une estimation réalisée par une institution internationale, ce sont 342 929 Boliviens qui auraient des difficultés pour entendre, parler ou marcher. La maladie est la première cause de handicap et la génétique la seconde parmi les plus de 60 000 personnes handicapées enregistrées officiellement, a précisé la délégation.

S'agissant des préoccupations exprimées par le Comité au sujet du taux élevé de mortalité infantile, la délégation a fait valoir que l'Organisation mondiale de la santé et l'Organisation panaméricaine de de la santé avaient félicité le Président Evo Morales pour les mesures prises par la Bolivie pour lutter contre la malnutrition infantile, dont le taux est passé de 23% à 13% depuis 2007 grâce à la mise en œuvre de programmes à cette fin.

Pour ce qui est des mesures pratiques visant à faciliter les déplacements et l'accès aux services, la délégation a indiqué que les normes établies garantissent la mise en place de rampes et de signalétiques adaptées aux personnes handicapées. Progressivement, afin de faciliter l'accès à la justice, sont réalisés dans les tribunaux les aménagements nécessaires, a ajouté la délégation.

Pour assister les handicapés auditifs et faciliter notamment leur accès à la justice, un décret a créé un conseil de la langue des signes qui a entériné le processus d'accréditation des interprètes, a ensuite indiqué la délégation.

S'agissant précisément de la langue des signes, la délégation a attiré l'attention sur le fait qu'il était difficile de l'adapter aux 36 langues ou dialectes officiellement en usage dans le pays. Toutefois, la langue des signes devrait être reconnue à terme comme trente-septième langue officielle du pays, a-t-elle ajouté.

Cinq athlètes handicapés boliviens doivent participer aux Jeux paralympiques de Rio de Janeiro, a par ailleurs indiqué la délégation.

Si les prisons n'étaient certes pas adaptées aux détenus handicapés, les nouveaux centres de détention sont construits en respectant les normes modernes en la matière. À l'heure actuelle, 33 détenus handicapés purgent des peines de prison, a précisé la délégation.

La délégation a ensuite indiqué ne pas avoir connaissance de cas de stérilisation forcée en Bolivie. En tout état de cause, si d'éventuels cas de cette nature venaient à se produire, ils seraient passibles de peines allant de cinq à douze ans d'emprisonnement, a-t-elle précisé.

Les services de santé sexuelle et reproductive ont élaboré des manuels, des protocoles et des guides d'éducation sexuelle destinés aux personnes handicapées et aux professionnels qui les prennent en charge. Les procédures de contraception doivent faire l'objet d'un consentement informé des intéressés, a en outre souligné la délégation. Lorsque la personne n'est pas en capacité de prendre une décision, ce sont ses proches – en premier lieu les mères, pères, frères et sœurs – qui en assument la responsabilité, a-t-elle précisé.

La délégation a par ailleurs fait état d'un décret de 2012 ayant pour objet d'établir des mécanismes visant à éradiquer la violence, les mauvais traitements et les abus portant atteinte à la vie et à l'intégrité physique, psychologique ou sexuelle des mineurs dans le cadre éducatif, une mesure qui inclut de fait les enfants et adolescents handicapés. Un Code de l'enfance et de l'adolescence a été promulgué par une loi adoptée en 2014, a ajouté la délégation.

Le service en charge de d'enregistrement à l'état civil déploie des actions visant à garantir que tous les nouveau-nés souffrant de déficiences soient enregistrés, a par ailleurs souligné la délégation. Des campagnes d'enregistrement gratuit ont lieu et la présence d'un fonctionnaire de l'état civil dans les centres de santé et dans les hôpitaux permet de délivrer gratuitement des certificats de naissance aux bébés nés avec un handicap, comme pour tous les autres bébés.

Depuis 2014, est mise en œuvre une stratégie de réadaptation basée sur la communauté afin d'impliquer la famille, la société et les autorités pour améliorer la qualité de vie des personnes handicapées et de leurs familles, répondre à leurs besoins de base et veiller à leur inclusion et leur participation dans la société en leur assurant une plus grande autonomie. Par ailleurs, le programme «Mi Salud» (Ma Santé) a permis de désigner des médecins dédiés dans 306 municipalités sur 339, une attention particulière étant portée aux communautés et peuples autochtones.

Des actions de sensibilisation sont menées afin d'éliminer les expressions péjoratives discriminatoires à l'égard des personnes handicapées et encourager l'emploi de termes adéquats, a poursuivi la délégation. Cette action se déroule de manière systématique dans le cadre de la loi contre le racisme, a-t-elle précisé, avant d'attirer l'attention sur les mesures prises pour promouvoir les actions de bénévolat en faveur des personnes handicapées.

La délégation a souligné que la Bolivie n'était pas confrontée à un afflux de réfugiés, de migrants ou autres personnes déplacées handicapées, ce qui explique qu'il n'existe pas de service d'urgence spécifique dans ce domaine.

La Loi de gestion des risques de 2014 a permis la création d'un Système intégré d'information et d'alerte pour la gestion du risque de catastrophe qui prend en compte les personnes handicapées en tant que population en situation de vulnérabilité particulière dans ce type de situation. Des protocoles d'urgence ont été élaborés afin de donner la priorité, dans de tels contextes, à l'évacuation des personnes vulnérables, a précisé la délégation.

En réponse aux questions posées sur la «Caravane des handicapés», la délégation a expliqué que le Gouvernement avait mobilisé cinq ministres qui ont participé aux réunions avec les représentants des protestataires afin de trouver une solution globale, avec la participation de toutes les parties prenantes, y compris les municipalités. Un accord en 42 points visant à trouver une solution globale à ce conflit a été conclu à l'issue du dialogue qui s'est tenu les 28 et 29 avril – accord qui sera mis en œuvre à moyen terme. Le Gouvernement bolivien, qui se considère lui-même comme celui des mouvements sociaux, entend rester ouvert à la poursuite d'un dialogue pacifique et sans pression, a indiqué la délégation. Toute personne a le droit de manifester pour autant que cela n'empiète pas sur les droits d'autrui, comme cela est la règle dans tout État de droit, a-t-elle rappelé.

La délégation a par ailleurs indiqué que la Bolivie avait institué hier une Journée nationale des personnes de petite taille, qui se tiendra tous les 25 octobre et qui visera à réfléchir sur les mesures à prendre en leur faveur.

La loi visant à garantir aux femmes une vie sans violence a permis la mise sur pied d'une unité spécialisée sur la violence de genre qui effectue notamment des actions de sensibilisation depuis 2015, a d'autre part fait valoir la délégation.

Remarques de conclusion

MME VELASCO CONDORI, Ministre de la justice de la Bolivie, s'est félicitée de l'occasion donnée à son pays de montrer les avancées significatives réalisées au cours des dix dernières années. Elle a appelé le Comité à s'informer plus précisément sur la «Caravane», attirant l'attention sur la dimension politique de l'événement, qui visait à susciter la confusion dans l'esprit des Boliviens et de la communauté internationale. Elle s'est dite frappée, par ailleurs, par ce qui a été affirmé concernant les infanticides et l'appel de membres du Comité à la prise de mesures immédiates dans ce domaine. La Ministre a rappelé qu'il y a peu, une grande partie de la population ne disposait ni de l'électricité, ni de l'accès à l'eau courante; grâce à l'action du Président Morales, tel n'est plus le cas, a souligné Mme Velasco Condori.

MME QUAN-CHANG, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Bolivie, a souligné beaucoup restait à faire en Bolivie mais a fait part de sa conviction que les engagements pris par la délégation seraient suivis d'effets. Elle a émis l'espoir que les organisations de la société civile pourraient continuer d'agir sans faire l'objet de pressions ou d'intimidations.


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CRPD16/018F