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LE COMITÉ POUR LA PROTECTION DES DROITS DES TRAVAILLEURS MIGRANTS EXAMINE LE RAPPORT DU NIGER

Compte rendu de séance

Le Comité pour la protection des droits des travailleurs migrants a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport initial du Niger sur les mesures prises par le pays pour donner effet aux dispositions de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Présentant ce rapport, Mme Maïga Zeinabou Labo, Secrétaire générale du Ministère de la justice du Niger, a notamment indiqué que son pays avait révisé son cadre juridique afin de se conformer aux instruments internationaux qu'il a ratifiés, ce qui s'est traduit par l'adoption d'un nouveau Code du travail dont trois articles protègent sans discrimination aucune les droits des travailleurs migrants. En 2015, a-t-elle ajouté, une loi relative au trafic illicite de migrants a aussi été adoptée qui a conduit à la mise en place de structures de lutte contre la traite. Par ailleurs, la loi sur l'entrée, le séjour et le travail des étrangers garantit à ces personnes l'accès aux services sociaux – santé, éducation, protection sociale, a fait valoir la cheffe de délégation.

Mme Maïga Zeinabou a rappelé que le Niger était lui-même pays de départ, de transit et de destination de la traite et des trafics illicites de migrants, étant le passage obligé entre l'Afrique subsaharienne et l'Afrique méditerranéenne – elle-même porte d'entrée en Europe. En février dernier, les statistiques de l'Organisation internationale pour les migrations, l'OIM, montrent que plus de 9000 migrants se sont rendus en Libye et en Algérie en passant par le nord du Niger; dans le même temps, près de 4000 migrants auraient fait le chemin inverse, dont 963 mineurs, 16% d'entre eux étant non accompagnés. L'État s'emploie à «gérer les flux de migrants en apportant aide et assistance et en créant les conditions d'une prise en charge satisfaisante», a précisé la Secrétaire générale du Ministère de la justice. Les travailleurs migrants peuvent «saisir les instances administratives et judiciaires compétentes en cas de violations de leurs droits», a-t-elle fait valoir, ajoutant qu'ils peuvent prétendre à une assistance juridique et judiciaire gratuite et exercer leur droit à indemnisation. Par ailleurs, le Niger s'est doté de plusieurs textes de loi et de structures ayant pour mandat la lutte contre l'esclavage, a souligné Mme Maïga Zeinabou. «Malgré tous ces efforts, le Niger reste confronté dans sa partie septentrionale à un flux de travailleurs migrants dont la plupart cherchent à rallier l'Europe. Cette situation pose plusieurs défis, notamment sécuritaires et de gestion des flux dans un contexte marqué par la lutte contre le terrorisme et l'absence de moyens pour répondre aux besoins», a reconnu Mme Maïga Zeinabou. Elle a souligné que ces défis ne pouvaient être relevés qu'à travers une assistance internationale aussi bien technique que financière.

La délégation nigérienne était également composée de Mme Fatima Sidikou, Représentante permanente du Niger auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de représentants du Ministère de l'emploi, du travail et de la protection sociale; du Ministère de l'intérieur, de la sécurité publique, de la décentralisation et des affaires coutumières et religieuses; et du Ministère des affaires étrangères, de la coopération, de l'intégration africaine et des Nigériens de l'extérieur. Elle comprenait également le Directeur de la protection judiciaire juvénile, la Directrice des droits de l'homme et le conseiller principal du Premier Ministre du Niger.

La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, de l'interdiction de l'esclavage et de la lutte contre le travail forcé et l'esclavage; du travail des enfants; des agences de placement privées; de l'Inspection du travail; de l'émigration de Nigériens et des risques liés à la migration; de la situation des émigrés nigériens en Arabie saoudite; de l'accès des migrants à la justice; du droit à la sécurité sociale, à l'éducation et à la santé; de l'enregistrement des naissances et des questions de nationalité; ou encore du contexte politique régional.

Mme Fatoumata Abdourhamane Dicko, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Niger, a affirmé que ce pays était engagé dans la promotion et la protection des droits de l'homme. Toutefois, un sérieux problème de recueil de données se pose, le recensement de 2012 ne comportant aucune statistique concernant la présence des migrants, a-t-elle fait observer. Elle a reconnu que l'étendue du territoire rendait particulièrement problématique le contrôle de ses frontières. Cet état de fait ne signifie pas pour autant que l'on doive renoncer à faire face à la situation et à contrôler les flux de migrants, a-t-elle observé, suggérant la mise en place de mécanismes de contrôle. Le Niger a souffert des crises ivoirienne, malienne et burkinabè et il pâtit maintenant des menées de l'organisation Boko Haram, a par ailleurs relevé la corapporteuse. En outre, ce pays connaît des survivances de l'esclavage en dépit du fait qu'il ait signé la plupart des instruments destinés à combattre ce fléau, a-t-elle fait observer, avant de rappeler que les migrants sont les plus vulnérables aux avatars de l'esclavage moderne. L'accès à l'éducation et à la santé, qui ne va déjà pas nécessairement de soi pour les nationaux, n'est a fortiori certainement pas acquis pour un jeune migrant, a d'autre part souligné Mme Dicko. Elle s'est par ailleurs inquiétée d'informations faisaient état de l'asservissement sexuel de migrants.

Le corapporteur du Comité pour l'examen du rapport nigérien, M. Ahmadou Tall, s'est notamment inquiété d'informations faisant état d'abus de la part des forces de l'ordre, notamment de détentions arbitraires, à l'encontre des migrants.

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Niger et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le mercredi 7 septembre.


Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport initial du Nicaragua.


Présentation du rapport du Niger

Le Comité est saisi du rapport initial du Niger, établi sur la base de la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité.

Présentant ce rapport, MME MAÏGA ZEINABOU LABO, Secrétaire générale du Ministère de la justice du Niger, a indiqué que son pays avait réalisé de nombreuses réformes en faveur de la mise en œuvre de la Convention. Le rapport lui-même a été élaboré par le comité interministériel chargé de la rédaction des rapports devant être soumis aux organes des traités, lequel à cette fin s'est adjoint les services de la Commission nationale des droits humains et des organisations de la société civile.

Le Niger a révisé son cadre juridique pour se conformer aux instruments internationaux qu'il a ratifiés, ce qui s'est traduit par l'adoption d'un nouveau Code du travail dont trois articles protègent sans discrimination aucune les droits des travailleurs migrants, a poursuivi la Secrétaire générale du Ministère de la justice. En 2015, a-t-elle ajouté, une loi relative au trafic illicite de migrants a aussi été adoptée qui a conduit à la mise en place de structures de lutte contre la traite; cette lutte englobe également la prise en charge, l'accompagnement et le retour dans leur pays des migrants qui le souhaitent. La loi sur l'entrée, le séjour et le travail des étrangers garantit à ces personnes l'accès aux services sociaux – santé, éducation, protection sociale, a en outre fait valoir Mme Maïga Zeinabou.

Le Niger est partie à divers instruments régionaux africains, notamment dans le cadre de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDAO), de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et de la Conférence interafricaine de la prévoyance sociale (CIPRES), a d'autre part souligné la cheffe de la délégation nigérienne. Des accords bilatéraux ont également été signés avec l'Italie, l'Espagne et l'Arabie saoudite afin de renforcer la coopération en matière de lutte contre le trafic illicite de migrants et l'immigration irrégulière. Enfin, deux cadres de coopération – migration et développement, d'une part, migration irrégulière et réseaux criminels connexes, d'autre part – ont été conclus avec l'Union européenne.

Mme Maïga Zeinabou a rappelé que le Niger était lui-même pays de départ, de transit et de destination de la traite et des trafics illicites de migrants, étant le passage obligé entre l'Afrique subsaharienne et l'Afrique méditerranéenne – elle-même porte d'entrée en Europe. En février dernier, les statistiques de l'Organisation internationale pour les migrations, l'OIM, montrent que plus de 9000 migrants se sont rendus en Libye et en Algérie en passant par le nord du Niger; dans le même temps, près de 4000 migrants auraient fait le chemin inverse, dont 963 mineurs, 16% d'entre eux étant non accompagnés. L'État s'emploie à «gérer les flux de migrants en apportant aide et assistance et en créant les conditions d'une prise en charge satisfaisante», a précisé la Secrétaire générale du Ministère de la justice.

Les travailleurs migrants peuvent «saisir les instances administratives et judiciaires compétentes en cas de violations de leurs droits», a par ailleurs fait valoir Mme Maïga Zeinabou. Ils peuvent prétendre à une assistance juridique et judiciaire gratuite et exercer leur droit à indemnisation. La Constitution consacre le principe de la non-discrimination, ce qui implique que les travailleurs migrants peuvent prétendre aux droits à la santé à l'éducation, ainsi qu'aux services sociaux de base, a-t-elle de nouveau souligné la cheffe de la délégation. Par ailleurs, le Niger s'est doté de plusieurs textes de loi et de structures ayant pour mandat la lutte contre l'esclavage. En outre, les travailleurs migrants ont accès à la formation professionnelle, aux emplois et ils peuvent se constituer en associations ou en syndicats, au même titre que le reste de la population, a ajouté la Secrétaire générale. Une loi de 1998 reconnaît le droit à l'éducation de tous, sans distinction et une loi de 2015 prévoit que les migrants victimes de la traite ont le droit de recevoir des soins médicaux d'urgence, a-t-elle insisté.

«Malgré tous ces efforts, le Niger reste confronté dans sa partie septentrionale à un flux de travailleurs migrants dont la plupart cherchent à rallier l'Europe. Cette situation pose plusieurs défis, notamment sécuritaires et de gestion des flux dans un contexte marqué par la lutte contre le terrorisme et l'absence de moyens pour répondre aux besoins multiples en termes de soins, de prise en charge, d'insertion pour ceux qui le désirent, de réintégration pour ceux qui optent pour le retour dans leur pays d'origine, et enfin de collecte de données nécessaires à la planification des actions devant être mises en œuvre afin de mieux circonscrire le phénomène», a reconnu Mme Maïga Zeinabou. Elle a souligné que ces défis ne pouvaient être relevés qu'à travers une assistance internationale aussi bien technique que financière. En conclusion, elle en a donc appelé «à la mobilisation de la communauté internationale aux côtés de nos États pour relever ensemble les défis liés à la migration irrégulière et, par-delà, au respect des droits de tous les travailleurs migrants».

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

MME FATOUMATA ABDOURHAMANE DICKO, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport du Niger, a affirmé que ce pays était engagé dans la promotion et la protection des droits de l'homme, comme en témoignent le fait qu'il ait ratifié la plupart des instruments internationaux des droits de l'homme, ainsi que sa présence même devant le Comité. Toutefois, un problème sérieux de recueil de données se pose, le recensement de 2012 ne comportant aucune statistique concernant la présence des migrants, a-t-elle fait observer. Elle a reconnu que l'étendue du territoire rendait particulièrement problématique le contrôle de ses frontières. Cet état de fait ne signifie pas pour autant que l'on doive renoncer à faire face à la situation et à contrôler les flux de migrants, a-t-elle observé, suggérant la mise en place de mécanismes de contrôle, depuis la capitale tout d'abord.

Le Niger a souffert des crises ivoirienne, malienne et burkinabè et il pâtit maintenant des menées de l'organisation Boko Haram, a-t-elle relevé. En outre, il connaît des survivances de l'esclavage en dépit du fait qu'il ait signé la plupart des instruments destinés à combattre ce fléau. Or, les migrants sont les plus vulnérables aux avatars de l'esclavage moderne, a souligné la corapporteuse, avant de demander à la délégation ce qui avait été entrepris pour y mettre fin. Elle a souhaité savoir, par ailleurs, comment se concrétisait l'accès à l'éducation et à la santé; elle a fait observer que dans les faits, dans les pays ouest-africains, la prétendue gratuité allait bien souvent de pair avec certains coûts que doivent néanmoins assumer les familles. Ainsi, cet accès à l'éducation et à la santé, qui ne va déjà pas nécessairement de soi pour les nationaux, n'est a fortiori certainement pas acquis pour un jeune migrant, a souligné Mme Dicko.

La corapporteuse s'est inquiétée d'informations faisaient état de l'asservissement sexuel de migrants et a donc demandé à la délégation si elle disposait d'informations à ce sujet et quelles actions avaient, le cas échéant, été entreprises pour mettre fin à de telles pratiques. Elle a aussi souhaité savoir si un cadre de concertation existait pour débattre des questions liées à la migration.

Mme Dicko a ensuite fait observer qu'alors que le Niger a ratifié la Convention n°122 de l'Organisation internationale du travail (OIT) sur la politique de l'emploi, les agences de placement affichent des tarifs prohibitifs; elle a jugé nécessaire de les rappeler à l'ordre, voire de leur retirer leur agrément. L'Inspection du travail dispose-t-elle des moyens nécessaires pour veiller au respect des droits des migrants, a-t-elle en outre demandé? Les migrants bénéficient-ils des mêmes droits que les nationaux en matière d'action syndicale, a-t-elle également voulu savoir?

M. AHMADOU TALL, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport nigérien, a rappelé que cet examen ne constituait pas une «inspection» mais bien un dialogue afin de réfléchir de concert aux solutions pratiques devant être trouvées pour faire face aux difficultés. Au Niger, les instruments internationaux ratifiés par le pays priment sur le droit interne, a-t-il relevé, souhaitant toutefois savoir si, dans les faits, il arrivait que la Convention soit invoquée par les tribunaux. Le corapporteur s'est ensuite enquis des intentions du Gouvernement en matière de ratification des instruments auxquels le Niger n'est pas encore partie, s'agissant notamment de la Convention n°189 de l'OIT sur les travailleuses et travailleurs domestiques. Le Niger a-t-il élaboré une politique globale face à la migration, s'est enquis M. Tall?

Tout en saluant la création de l'organe chargé de la lutte contre la corruption, il a souhaité avoir des informations sur les éventuelles poursuites engagées dans ce contexte contre des fonctionnaires ainsi que sur les sanctions éventuellement infligées. Des actions sont-elles menées pour que, dans la pratique, les travailleurs migrants, les femmes en particulier, ne soient pas victimes de discrimination à l'emploi, a-t-il en outre demandé? Des mesures spécifiques sont-elles prises pour informer les travailleurs migrants sur leurs droits? La délégation a-t-elle connaissance de procédures judiciaires engagées par des travailleurs migrants? Des informations font état d'abus de la part des forces de l'ordre, notamment de détentions arbitraires, à l'encontre des migrants, s'est par ailleurs inquiété le corapporteur.

Abordant la question de l'esclavage, M. Tall a cité le cas d'une jeune fille achetée pour l'équivalent de 365 euros et qui a bénéficié d'un arrêt de la CEDAO en sa faveur. Cette décision a-t-elle eu un impact, a demandé M. Tall, avant de s'enquérir des mesures concrètes prises pour appliquer les textes interdisant l'esclavage. Les migrants ont-ils accès à l'Agence nationale d'assistance juridique et judiciaire, a-t-il également demandé?

Après s'est enquis du fonctionnement des centres de rétention, M. Tall a demandé si la loi interdisait les expulsions collectives (d'étrangers). Il s'est également enquis des mesures prises afin de favoriser l'accès à l'assistance consulaire pour les personnes en instance d'expulsion. Des mesures sont-elles prises pour faciliter l'enregistrement des naissances des enfants migrants, ainsi que l'accession à la nationalité, a en outre demandé la corapporteur?

Quel bilan le Niger tire-t-il enfin des accords bilatéraux qu'il a conclus avec plusieurs pays, en particulier avec l'Arabie saoudite - pays où des abus particulièrement graves sont commis envers des travailleurs migrants, a enfin demandé M. Tall?

Un autre membre du Comité a lui aussi affirmé que la situation des émigrés africains dans la péninsule arabique, en Arabie saoudite plus particulièrement, n'était pas bonne, estimant que le Niger pourrait jouer un rôle de chef de fil pour mobiliser ses voisins sur ce problème.

Un expert a demandé où en était le processus de gestion des frontières engagé avec les pays voisins ainsi qu'avec d'autres partenaires internationaux. Il a souligné que des problèmes de coordination se posaient fréquemment dans ce domaine, du fait, par exemple, de l'incompatibilité des logiciels utilisés par les gardes frontière des différents pays. Observant qu'au Niger la migration était «une affaire d'hommes», il a souhaité savoir si les pouvoirs publics entendaient promouvoir le travail des femmes dans les mêmes conditions que celui des hommes.

Du fait de l'étendue du territoire, des mesures sont-elles prises pour rapprocher la justice des populations, s'est interrogée une experte? Elle s'est en outre inquiétée du travail forcé, auquel sont soumis de nombreux enfants âgés de cinq à quatorze ans.

Un autre membre du Comité a souhaité savoir quels étaient les facteurs d'attraction et de rejet pour les migrants désireux de se rendre en Europe. Un de ses collègues s'est enquis du bilan que tire le Niger des accords conclus avec l'Union européenne depuis une quinzaine d'années. A-t-on pu atteindre des objectifs en matière de développement humain? Dans quelle mesure ces politiques ont-elles eu des conséquences sur les processus migratoires et sur la liberté de circulation dont bénéficient les ressortissants d'Afrique de l'Ouest?

Un membre du Comité s'est enquis de la participation des migrants aux processus politiques, s'agissant en premier lieu des élections dans leur propre pays. Il a en outre souhaité savoir dans quels domaines d'activités étaient engagées les victimes de l'esclavage.

Une experte s'est enquise des moyens dont dispose la Commission nationale des droits de l'homme. Elle a par ailleurs souhaité en savoir davantage concernant les dispositions légales en matière de parité entre les sexes.

Réponses de la délégation

La délégation a reconnu une survivance de certaines formes d'asservissement au Niger, même si la Constitution interdit formellement l'esclavage et même si le Code pénal le réprime. Par ailleurs, alors que l'islam ne permet pas de prendre plus de quatre épouses, la pratique traditionnelle de la wahaya est utilisée pour en prendre une cinquième qui n'est toutefois pas reconnue sur le plan légal, a expliqué la délégation – en réponse à une question sur l'enlèvement d'une jeune fille ayant fait l'objet d'un arrêt de la CEDAO condamnant le Niger.

La lutte contre le travail forcé et l'esclavage figure au nombre des préoccupations majeures des autorités nigériennes, a ensuite souligné la délégation. Le Niger a été le premier pays à ratifier le Protocole de 2014 relatif à la Convention n°29 de l'OIT sur le travail forcé, a-t-elle fait valoir. Le pays s'est doté d'une Commission nationale de lutte contre le travail forcé et la discrimination, qui promeut le travail décent auprès de la population. Son action vise aussi à prévenir les survivances du travail forcé au travers d'actions de réduction de la pauvreté. Cette Commission a élaboré un plan d'action national dont elle assure le suivi de la mise en œuvre; elle bénéficie en outre d'un programme d'appui mis en place par l'État à la fin de l'an dernier avec l'assistance du BIT et dont l'un des buts est de renforcer les capacités des organisations locales fournissant une assistance aux victimes. Il s'agit aussi «d'accroître le degré de prise de conscience générale du public sur le phénomène», a expliqué la délégation. Le lancement de ce programme a donné lieu à une remise de terres arables, de matériel agricole et de têtes de bétail aux populations de villages nomades. Cette opération symbolique a concerné une cinquantaine de foyers.

La délégation a par la suite reconnu que des parents vendaient leur fille au Nigéria où elles sont mariées de force et perdent de fait leur liberté. Des enfants sont aussi envoyés pour étudier dans des écoles coraniques où ils sont souvent contraints de travailler dans des exploitations agricoles ou de mendier, a-t-elle ajouté. La question est prise en charge par l'Agence nationale de lutte contre la traite des personnes, en coordination avec son homologue nigériane, a indiqué la délégation, avant de préciser que cette coopération avait permis un certain nombre de retours, y compris de mineurs qui étaient tombés sous la coupe de l'organisation Boko Haram.

L'assistance juridique et judiciaire au profit des personnes vulnérables ne disposant pas des revenus nécessaires pour faire face aux frais d'un procès relève d'une agence publique et cette assistance est entièrement gratuite, a ensuite fait valoir la délégation. Les migrants peuvent y prétendre, a-t-elle ajouté. Des bureaux locaux de l'assistance juridique et judiciaire existent dans les dix tribunaux de grande instance qui existent à travers le pays, a-t-elle précisé. Ces dernières années, a-t-elle souligné, la carte judiciaire a été réformée afin de rendre la justice plus accessible. Des difficultés subsistent cependant en termes d'éloignement des services judiciaires des justiciables, en raison de l'immensité du territoire et de l'enclavement de certaines zones rurales, rendues difficiles d'accès à la saison des pluies, a expliqué la délégation.

Les travailleurs migrants en situation irrégulière sont souvent réticents à contacter la police et à saisir la justice pour faire respecter leurs droits; il n'existe pourtant aucune restriction de principe les concernant s'agissant de l'accès à la justice, a expliqué la délégation.

S'agissant du droit de vote des migrants, les ressortissants des pays de la région ont la possibilité de voter dans leurs consulats respectifs, lorsque ceux-ci permettent la tenue des scrutins nationaux dans leur représentation diplomatique, a par ailleurs indiqué la délégation.

Une Commission nationale des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été créée en 1999, qui a été remplacé par l'actuelle Commission nationale des droits humains, laquelle répond aux exigences des Principes de Paris et attend donc d'être accréditée sous le statut A, a ensuite indiqué la délégation. Cette Commission est composée de neuf membres, dispose de locaux et d'un personnel qui lui sont propres et gère elle-même son budget. Son rapport est soumis à l'Assemblée nationale et elle a la capacité d'inspecter les lieux de détention, a précisé la délégation.

Les consulats du Niger (à l'étranger) traitent au cas par cas les requêtes de Nigériens émigrés en demande d'assistance, a ensuite indiqué la délégation. Dans le cas d'une demande de retour volontaire, les ambassades délivrent des sauf-conduits aux ressortissants dépourvus de documents d'identité, a-t-elle précisé.

Le pays compte une dizaine d'antennes de l'Inspection du travail dont les moyens ont été renforcés ces dernières années, la principale difficulté concernant un manque de moyens de déplacement. La délégation est intéressée à recevoir du Comité toute information relative à l'assistance possible de la part d'organes internationaux susceptible de financer des véhicules pour les inspecteurs du travail. Depuis quelques années, par ailleurs, ces derniers sont formés aux normes internationales du travail.

Les agences de placement privées jouent un rôle d'intermédiaire entre les employeurs et les personnes en recherche d'emploi, a par la suite rappelé la délégation; leur tarif est censé ne pas dépasser 20% de la masse salariale du personnel placé, mais des abus sont fréquemment commis, a-t-elle reconnu. Les cas de dépassement relèvent de l'intervention des antennes de l'Inspection du travail, la sanction la plus extrême menant au retrait de l'agrément de l'agence pratiquant des tarifs abusifs; et précisément, il y a eu des cas de retrait.

Il n'existe pas de discrimination en matière d'emploi, ni en termes d'accès à la formation professionnelle, ni en termes d'accès aux emplois et aux diverses professions, pas plus que pour ce qui a trait aux conditions d'emploi, a déclaré la délégation.

La Division nationale contre le travail des enfants a entrepris d'élaborer un plan national d'action en la matière, a ensuite indiqué la délégation. Si le Code du travail interdit le travail des enfants, près de la moitié des enfants âgés entre 5 et 14 ans travaillaient en 2012, contre 70% en 2000, a précisé la délégation. Il existe d'importantes disparités entre les zones rurales – où la moitié des enfants travaillent – et les villes – où ce phénomène ne concerne plus qu'un enfant sur trois. Il existe une liste des travaux dangereux interdits aux enfants, ainsi qu'un projet visant la prévention et l'élimination du travail des enfants dans les mines d'or artisanales en Afrique de l'ouest, a ajouté la délégation.

En ce qui concerne l'adhésion aux instruments internationaux auxquels le Niger n'est pas partie, rien ne s'oppose a priori à ce que le pays signe, par exemple, la Convention n°87 de l'OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, a affirmé la délégation.

La transposition dans le droit positif des dispositions des instruments internationaux ratifiés par le Niger, en particulier pour ce qui est des conventions de l'OIT, est illustrée par l'adoption d'un nouveau Code du travail en 2012. Lorsqu'aucune loi nationale n'a pas prévu de reprendre une disposition figurant dans un instrument ratifié par le pays, le juge peut néanmoins invoquer cette disposition en s'en inspirant, a ajouté la délégation. Le Bureau international du travail a organisé des formations à l'intention des magistrats, a-t-elle fait valoir, tout en reconnaissant que cet effort n'était pas suffisant et devait être poursuivi avec les jeunes juges.

Si le Niger n'a pas de politique globale de la migration, l'élaboration d'une politique nationale relative à la migration régulière fait l'objet d'une réflexion, a ensuite indiqué la délégation. Il n'y a pas de renvoi (refoulement ou expulsion) collectif, a-t-elle ajouté en réponse à une question; les expulsions se font au cas par cas. Il n'existe pas de centre de rétention mais seulement des centres de transit, qui sont au nombre de quatre – dont un à Niamey, a en outre précisé la délégation. Le chef de l'État a proposé la création d'un centre spécialisé à Agadez, dans le nord du pays, afin de lutter contre les réseaux de passeurs, a-t-elle indiqué. Une vingtaine de postes frontière existent à l'heure actuelle, l'objectif étant d'en doubler le nombre, a-t-elle par ailleurs souligné, ajoutant que compte tenu de la porosité des frontières, la création de postes mobiles est envisagée. La délégation a ensuite précisé que les quatre centres de transit du pays sont gérés par l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), le plus important se trouvant à Agadez avec une capacité d'accueil d'un millier de personnes. La délégation a démenti qu'il s'agisse de centres «de rétention», les migrants pouvant y entrer et en sortir librement.

Un certain nombre de migrants non africains en situation irrégulière, asiatiques et européens notamment, ont fait l'objet de régularisations, a indiqué la délégation.

S'il n'existe pas de loi sur la parité au Niger, des quotas ont néanmoins été établis par la loi pour ce qui est des postes électifs, a en outre indiqué la délégation.

La délégation a d'autre part indiqué que des actions de sensibilisation étaient menées afin d'informer les populations, en particulier les femmes, des risques liés à la migration, à la suite des drames survenus dans le désert nigérien où des migrants sont morts de soif et d'épuisement.

S'agissant plus précisément des risques d'exploitation sexuelle auxquels s'exposent les émigrants, la délégation a précisé que des missions de terrain avaient été menées; par exemple, une mission a été effectuée en 2014 par la Ministre de la population, de la promotion de la femme et de la protection de l'enfant dans la ville de Kantché, point de départ de l'émigration des femmes et des enfants vers le Nord, afin d'y rencontrer la population et les autorités locales.

Le Niger a mis en place un plan stratégique relatif à sa diaspora, accompagné d'un plan d'action, a ensuite indiqué la délégation, avant de rappeler qu'un Forum de la diaspora nigérienne s'était tenu en 2012, réunissant 700 personnes venues du monde entier. Le phénomène de l'émigration des Nigériens est récent et, de ce fait, n'a pas encore été évalué, a déclaré la délégation. Elle a rappelé que jusqu'ici, le pays connaissait déjà le phénomène des migrations internes, durant les périodes de morte-saison, des ruraux venant en ville afin de compléter leurs revenus en effectuant de menus travaux temporaires. Mais aujourd'hui, de par la mondialisation, mais aussi en raison de la désertification et de l'insécurité, les gens rêvent d'un mieux-être, victimes des illusions d'un «miroir aux alouettes», a poursuivi la délégation, attirant l'attention sur la perception répandue d'un caractère attractif de la migration, jugée valorisante du point de vue psychologique pour l'individu qui part ainsi à l'aventure. Il faut attaquer le mal à la racine, en s'attaquant à la pauvreté en premier lieu, a déclaré la délégation, soulignant que les pays d'accueil devraient à cet égard renforcer les capacités des pays d'origine.

S'agissant de la coopération avec l'Arabie saoudite et des informations faisant état d'abus envers des travailleurs émigrés nigériens dans ce Royaume, la délégation a précisé qu'un accord bilatéral conclu en 2015 avait porté sur l'emploi de 2900 Nigériens en Arabie saoudite – dont un millier de femmes de chambre et un millier de chauffeurs –, les parties s'engageant à assurer des conditions de travail décentes. À ce jour, 335 travailleurs ont bénéficié de cet accord, 150 chauffeurs et 185 femmes, dont 21 sont rentrés au pays, a précisé la délégation. À la suite de «certains commentaires sur les réseaux sociaux», un comité a été mis en place par le Niger pour réfléchir aux voies et moyens susceptibles de créer les conditions d'un respect strict des termes de l'accord, voire de le remettre en cause si la situation devait l'imposer. En attendant, l'opération a été suspendue, a précisé la délégation. Elle a ensuite indiqué que le Niger prévoyait de dépêcher un ou deux inspecteurs du travail auprès de sa représentation diplomatique en Arabie saoudite afin d'évaluer la situation.

Pour garantir le droit à la sécurité sociale, l'État a institué un système de protection qui est basé soit sur des cotisations (assurances sociales), soit sur la solidarité (mutualités), a ensuite souligné la délégation. Mais du fait de l'insuffisance des ressources de l'État, les pouvoirs publics ont aussi encouragé la prise en charge de la couverture des risques par des compagnies d'assurance privées, a-t-elle ajouté. Si le secteur informel n'est pour l'heure pas couvert par la sécurité sociale, la question de l'extension de la couverture sociale aux travailleurs de l'économie informelle est prise en compte dans le cadre de l'élaboration d'un programme intitulé «Pays de travail décent», a-t-elle fait valoir. Cette extension se fera par la mise en place de régimes contributifs (mutuelles, micro-assurances-maladie par exemple) et non contributifs (aide sociale), a-t-elle précisé. Dans la pratique, a ajouté la délégation, il n'existe aucune discrimination entre nationaux et non nationaux, lesquels sont traités de la même manière, dans la mesure où les travailleurs et leurs employeurs s'acquittent de leurs obligations.

Aucun problème ne se pose pour les travailleurs originaires des pays avec lesquels le Niger a signé des accords bilatéraux. En revanche, s'agissant des États membres de la CIPRES (Conférence interafricaine de la prévoyance sociale), la réciprocité n'étant souvent pas au rendez-vous, un mécanisme est en train d'être mis en place pour que les ressortissants des huit États ayant ratifié la Convention multilatérale de sécurité sociale soient traités dans leur pays d'accueil comme ils le sont dans leur pays d'origine, a indiqué la délégation.

L'enregistrement des naissances fait quant à lui l'objet d'un effort afin de mettre sur pied un système d'état civil performant, a d'autre part indiqué la délégation. Celui-ci devra être universel, permanent et gratuit, a-t-elle ajouté. Selon les derniers chiffres disponibles, le pourcentage d'enfants de moins de 5 ans dont la naissance a été enregistrée à l'état civil était de 64% en 2012 dont 60% en milieu rural et 92 % en milieu urbain, a précisé la délégation.

La nationalité nigérienne peut s'acquérir par le mariage, aussi bien pour les hommes que pour les femmes, a en outre souligné la délégation. La naturalisation est possible à condition de résider dans le pays pendant au moins une décennie, ce délai pouvant être ramené à cinq ans lorsque des services exceptionnels ont été rendus au pays.

La délégation a souligné que le développement du pays était «plombé» par une démographie galopante, le taux de fécondité, qui est de plus sept enfants par femme, étant l'un des plus élevés du monde. Or, ce n'est pas par décret que ce taux diminuera mais plutôt par la mise en œuvre de programmes de développement durables, a-t-elle fait observer.

Le Niger évolue dans un contexte politique illustré par un grand nombre de crises humanitaires majeures, a rappelé la délégation, citant particulièrement les crises qui sévissent en Libye, au Mali et en République centrafricaine, ainsi que l'émergence du mouvement Boko HaraM. Ces crises ont provoqué un grand nombre de retours, estimés à plus d'un demi-million de personnes, a-t-elle précisé. Plus de 600 milliards de francs CFA ont été mobilisés pour répondre à cet afflux de rapatriés ainsi qu'à l'afflux de réfugiés, avec l'assistance des partenaires techniques et financiers du Niger, dont le plus important est l'Union européenne.

L'Union européenne est le premier bailleur de fonds du Niger, les secteurs d'intervention prioritaires étant le développement rural, les transports et l'appui macro-économique, a précisé la délégation. Le programme pour la période 2014-2020 prévoit un financement européen à hauteur de près de 600 millions d'euros, a-t-elle indiqué.

L'abolition de la peine de mort a été bloquée par le Parlement, deux courants opposés s'exprimant dans la société à ce sujet, a enfin expliqué la délégation.


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