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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE EXAMINE LE RAPPORT DE SRI LANKA

Compte rendu de séance
La situation des communautés des plantations, le droit coutumier et le processus de réconciliation nationale sont au cœur des discussions

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport présenté par Sri Lanka sur les mesures que le pays a prises pour donner effet aux dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Présentant ce rapport, M. Ravinatha Aryasinha, Représentant permanent de Sri Lanka auprès des Nations Unies à Genève, a rappelé qu'il y avait eu un changement de pouvoir à Sri Lanka suite aux élections présidentielles de janvier 2015, suivies des élections législatives d'août 2015 et de la mise en place d'un Gouvernement d'union nationale. Ce Gouvernement représente une étape importante, après plus de 20 ans de conflit, pour parvenir à instaurer une stabilité politique et travailler à la réconciliation nationale et au développement du pays, a souligné M. Aryasinha. Pour preuve de cet engagement, le chef de la délégation sri-lankaise a annoncé le vote de la loi permettant la création d'un Bureau des personnes disparues, afin d'assurer que les événements de ces dernières années ne se reproduisent plus. Une réforme constitutionnelle est aussi en cours; elle est discuté pour le moment au niveau du Parlement, a ajouté le Représentant permanent. La présence de la délégation de Sri Lanka, après de longues années d'absence, témoigne de la priorité accordée par le nouveau Gouvernement aux droits de l'homme, à l'égalité, à la liberté, à la démocratie et à la réconciliation, a-t-il insisté. Sri Lanka a entamé des consultations pour la mise en place d'un plan d'action national des droits de l'homme devant couvrir la période 2017-2021, a précisé M. Aryasinha.

Le Gouvernement sri-lankais a mis en place différents mécanismes pour promouvoir la lutte contre la discrimination, a ensuite indiqué le Représentant permanent. Il a notamment rendu compte du recrutement au sein de la police de quelque 1153 personnes de langue tamoule. M. Aryasinha a par ailleurs rappelé que la Constitution assurait l'égalité de tous et qu'aucun citoyen ne saurait être victime de discrimination en fonction de sa race, de sa religion, de sa langue, de son sexe, de ses opinions politiques, de son lieu de naissance ou de toute autre raison. Poursuivant cette présentation, une autre représentante du Ministère des affaires étrangères a expliqué que la législation en vigueur prévoit des sanctions pour toute personne qui propagerait la haine ou encouragerait à la violence dans le pays. De plus, un Comité spécial est chargé d'étudier le cadre juridique du contre-terrorisme, l'objectif étant d'élaborer une nouvelle loi qui respecte les droits de l'homme, a-t-elle indiqué.

La délégation sri-lankaise était également composée de Mme Samantha Jayasuriya, Représentante permanente adjointe de Sri Lanka auprès des Nations Unies à Genève et de M. A.N.R. Pulle, Procureur général adjoint. Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, de l'élaboration d'un plan national d'action pour les droits de l'homme; du Bureau des personnes disparues; des communautés des plantations, eu égard notamment aux questions d'éducation, de santé et de logement; du droit coutumier; de l'interdiction des discours d'incitation à la haine; de la législation antiterroriste; des personnes déplacées internes; du droit foncier; des violences contre les femmes; des travailleurs migrants; ou encore de la lutte contre la traite de personnes.

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Sri Lanka, M. Jose Francisco Cali Tzay, a noté qu'il y avait toujours de graves problèmes de discrimination à Sri Lanka. Dans le passé récent, Sri Lanka a vécu des disparitions en masse, des actes de violences contre les Tamouls et les enquêteurs internationaux n'ont pas pu se rendre dans le pays, a-t-il rappelé. Entre 2013 et 2015, les discriminations à l'égard des populations tamoules, des chrétiens et des musulmans étaient en hausse, a-t-il poursuivi. Pour de nombreuses ONG, les minorités souffrent toujours aujourd'hui de nombreuses discriminations au quotidien, a insisté le rapporteur. Il s'est ensuite réjoui de la réforme constitutionnelle en cours dans le pays. Malgré tout, la Commission nationale des droits humains et d'autres organismes publics doivent être renforcés, a toutefois estimé M. Cali Tzay. Pour permettre la réconciliation, il faudra commencer par reconnaitre les erreurs du passé ainsi que les lacunes actuelles, a-t-il indiqué. Le rapporteur a expliqué que le Comité avait de vives préoccupations compte tenu des divergences des informations en sa possession. Il faut avoir le courage d'accepter ses erreurs, a-t-il souligné. Il a ensuite souhaité en savoir davantage au sujet du sort des femmes victimes de violences sexuelles lors du conflit armé.

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de Sri Lanka et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le 26 août prochain.


Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport du Pakistan.


Présentation du rapport de Sri Lanka

Le Comité est saisi du rapport de Sri Lanka (CERD/C/LKA/10-17), établi en fonction de la liste de thèmes à traiter que lui a adressée le Comité. Le Comité est également saisi du document de base de Sri Lanka contenant des renseignements généraux et factuels relatifs à l'application des instruments auxquels cet État est partie, à l'intention des organes conventionnels concernés.

M. RAVINATHA ARYASINHA, Représentant permanent de Sri Lanka auprès des Nations Unies à Genève, a d'emblée rappelé que cela faisait 34 ans que le pays avait ratifié la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Il a rappelé qu'il y avait eu un changement de pouvoir à Sri Lanka suite aux élections présidentielles de janvier 2015, suivies des élections législatives d'août 2015 et de la mise en place d'un Gouvernement d'union nationale. Ce Gouvernement représente une étape importante, après plus de 20 ans de conflit, pour parvenir à instaurer une stabilité politique et travailler à la réconciliation nationale et au développement du pays, a souligné M. Aryasinha. Pour preuve de cet engagement, le chef de la délégation sri-lankaise a annoncé le vote de la loi permettant la création d'un Bureau des personnes disparues, afin d'assurer que les événements de ces dernières années ne se reproduisent plus. Une réforme constitutionnelle est aussi en cours; elle est discuté pour le moment au niveau du Parlement, a ajouté le Représentant permanent. La présence de la délégation de Sri Lanka, après de longues années d'absence, témoigne de la priorité accordée par le nouveau Gouvernement aux droits de l'homme, à l'égalité, à la liberté, à la démocratie et à la réconciliation, a-t-il insisté. M. Aryasinha a souligné que le rapport présenté l'année dernière au Comité était incomplet et que cette situation était due au gouvernement précédent. Sri Lanka a changé de position et, aujourd'hui, souhaite remplir ses engagements internationaux, s'agissant notamment des questions relatives aux droits humains. Sri Lanka a entamé des consultations pour la mise en place d'un plan d'action national des droits de l'homme devant couvrir la période 2017-2021, a précisé M. Aryasinha.

Le chef de la délégation sri-lankaise a ensuite expliqué qu'après presque trois décennies de conflit, la peur et la suspicion s'étaient installées dans le pays. Comme dans d'autres parties du monde, durant le conflit, préserver les droits de l'homme tout en luttant contre le terrorisme s'est avéré difficile; et aujourd'hui encore, la situation est difficile de ce point de vue. Le Gouvernement s'efforce néanmoins de respecter ses obligations en matière de droits de l'homme.

Le Gouvernement sri-lankais est convaincu que pour un pays en transition comptant une multitude de minorités ethniques, le processus de réconciliation constitue une étape très importante, a poursuivi M. Aryasinha. À cet égard, il a reconnu que les efforts de réconciliation n'avaient pas porté leurs fruits juste après le conflit, en 2009; il y a eu là un déficit. C'est pour cette raison que le peuple sri-lankais a voté l'année dernière en faveur d'une réconciliation effective, d'une bonne gouvernance, d'une démocratie plus forte, ainsi que pour les droits humains, la réconciliation, le développement économique et une paix durable. La liberté des médias a été restaurée et tous les journalistes nationaux et internationaux peuvent se déplacer dans le pays sans aucune entrave, a ensuite fait valoir le Représentant permanent de Sri Lanka.

Différents faits nouveaux méritent d'être mis en exergue, a poursuivi M. Aryasinha. Le Gouvernement sri-lankais a mis en place différents mécanismes pour promouvoir la lutte contre la discrimination, a-t-il indiqué. La Commission nationale des droits humains a maintenant à sa tête une professeure de droit qui est également militante des droits de l'homme, a-t-il notamment précisé. Il a en outre rendu compte du recrutement au sein de la police de quelque 1153 personnes de langue tamoule, incluant des femmes officiers. Le Département national de l'enregistrement des personnes a pris des mesures pour établir des cartes d'identité bilingue en langues cinghalaise et tamoule, a-t-il ajouté. Il a par ailleurs fait valoir que Sri Lanka avait coopéré avec des organismes internationaux et nationaux venus enquêter dans le pays et a précisé que, dans ce contexte, le Gouvernement avait favorisé les rencontres avec les victimes.

M. Aryasinha a ensuite présenté l'ensemble des lois de Sri Lanka qui permettent aujourd'hui au pays de respecter la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Il a rappelé que la Constitution, par exemple, assurait l'égalité de tous et qu'aucun citoyen ne saurait être victime de discrimination en fonction de sa race, de sa religion, de sa langue, de son sexe, de ses opinions politiques, de son lieu de naissance ou de toute autre raison. Récemment, le Gouvernement a mis en place toute une série d'instruments permettant de prévenir les discriminations dans le pays, a insisté le Représentant permanent.

Poursuivant cette présentation, M. A.L.A. AZEEZ, chargée des traités multilatéraux au Ministère des affaires étrangères de Sri Lanka, a expliqué que la législation en vigueur prévoit des sanctions pour toute personne qui propagerait la haine ou encouragerait à la violence dans le pays. De plus, un Comité spécial est chargé d'étudier le cadre juridique du contre-terrorisme, l'objectif étant d'élaborer une nouvelle loi qui respecte les droits de l'homme, a-t-elle notamment indiqué.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. JOSE FRANCISCO CALI TZAY, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Sri Lanka, a rappelé que cela faisait plus de 15 ans que la délégation ne s'était plus présentée devant le Comité. Il a souligné qu'il y avait des éléments manquants dans le rapport qui empêchaient le Comité de se faire une idée précise de la situation du pays. Le rapporteur a noté qu'il y avait toujours de graves problèmes de discrimination à Sri Lanka. Dans le passé récent, Sri Lanka a vécu des disparitions en masse, des actes de violences contre les Tamouls et les enquêteurs internationaux n'ont pas pu se rendre dans le pays, a-t-il rappelé. Entre 2013 et 2015, les discriminations à l'égard des populations tamoules, des chrétiens et des musulmans étaient en hausse, a-t-il poursuivi. Pour de nombreuses ONG, les minorités souffrent toujours aujourd'hui de nombreuses discriminations au quotidien, a insisté le rapporteur. Il s'est ensuite réjoui de la réforme constitutionnelle en cours dans le pays. Malgré tout, la Commission nationale des droits humains et d'autres organismes publics doivent être renforcés, a toutefois estimé M. Cali Tzay. Le rapport mentionne différentes dispositions de la Constitution sri lankaise qui devraient permettre de lutter contre les discriminations, mais la Comité n'y a pas décelé les garanties susceptibles de rendre effectives ces nouvelles mesures. Différents rapports internationaux semblent aller dans le sens de la société civile qui doute des résultats sur le terrain de toutes ces politiques mises en place, a fait observer M. Cali Tzay. Pour permettre la réconciliation, il faudra commencer par reconnaitre les erreurs du passé ainsi que les lacunes actuelles, a-t-il indiqué.

Le rapporteur a expliqué que le Comité avait de vives préoccupations compte tenu des divergences des informations en sa possession. Il faut avoir le courage d'accepter ses erreurs, a-t-il dans un premier temps conclu à l'intention de la délégation sri-lankaise.

Le rapporteur a ensuite souhaité en savoir davantage au sujet du sort des femmes victimes de violences sexuelles lors du conflit armé. Il semblerait qu'aucune plainte n'ait été déposée durant la guerre; or, les femmes concernées se comptent par milliers, a-t-il souligné, ajoutant que cette situation pourrait s'expliquer par la très forte présence de militaires dans les régions où se trouvent les victimes de violences sexuelles. De l'avis du rapporteur, la loi ne produit pas les effets escomptés puisque les fonds nécessaires qui permettraient d'en concrétiser les dispositions ne sont pas disponibles. Le rapporteur s'est en outre enquis du sort réservé aux femmes tamoules vivant dans le nord du pays et a souhaité connaître les mesures prises par le Gouvernement pour lutter contre les discriminations à leur encontre. En décembre dernier, il semblerait que la présence militaire dans ces régions ait augmenté et que des cas de viols aient été rapportés, a ajouté le rapporteur.

Comment les autorités sri-lankaises luttent-elles concrètement contre les incitations à la haine raciale, a ensuite demandé M. Cali Tzay?

Le rapporteur a par ailleurs souhaité obtenir des informations mises à jour concernant les personnes déplacées internes tamoules et les membres des communautés ethniques musulmanes. Il a souhaité savoir comment le Gouvernement prévoyait de les réintégrer, notamment dans le domaine de l'emploi. Il s'est en outre enquis des conditions de vie de ces personnes déplacées internes, qui vivent dans des campements sans accès aux services de base. Le rapporteur a souligné que ces populations étaient des proies faciles pour les délinquants sexuels.

Un autre membre du Comité a souhaité savoir si les minorités avaient l'occasion d'étudier dans leur propre langue. Il s'est en outre demandé comment Sri Lanka pouvait respecter le droit international tout en respectant le droit coutumier.

Un autre expert s'est enquis des objectifs du Groupe de travail présidentiel spécial sur la réconciliation et a souhaité savoir si le nouveau Gouvernement allait garder cette instance et si tous les groupes ethniques y étaient représentés. Cet expert a en outre souhaité en savoir davantage sur le fonctionnement du droit foncier et sur les bénéficiaires du processus de restitution des terres. Il s'est ensuite enquis du fonctionnement et des résultats de la Commission vérité, justice, réconciliation et non-répétition. Relevant que le rapport fait état de l'élection au Parlement du chef de l'opposition, l'expert s'est enquis du rôle de l'opposition et de sa marge de manœuvre. Qu'en est-il de l'effectivité des sanctions contre les fonctionnaires qui n'auraient pas respecté le trilinguisme, a-t-il en outre demandé? Concernant les mariages, il a noté que l'État semblait s'efforcer de décourager les mariages précoces; toutefois, Sri Lanka accepte que la loi islamique reconnaisse les mariages entre personnes mineures, a fait observer l'expert, avant de demander si des personnes majeures pouvaient dans ce cadre épouser des personnes mineures.

Un membre du Comité s'est enquis des taux de scolarisation dans la région des plantations. Il a en outre souhaité savoir si la Commission nationale des droits de l'homme avait déjà, comme elle est habilitée à le faire, porté à l'attention de la Cour suprême des cas de discrimination. Ce même expert a ensuite relevé le faible nombre de représentants de la société civile (3 sur 10) au sein du Conseil constitutionnel. Il s'est par ailleurs interrogé sur l'interférence du pouvoir exécutif dans la révocation des juges, citant le cas de deux juges de la Cour suprême ayant été révoqués. L'expert s'est demandé s'il ne fallait pas prendre de meilleures dispositions pour garantir l'indépendance des juges.

Relevant que selon la Constitution sri-lankaise, la liberté d'expression pouvait être limitée afin de garantir l'harmonie raciale, un expert a souhaité en savoir davantage au sujet des restrictions autorisées dans ce contexte. Ce même expert a souhaité obtenir des données concernant la représentation des différents groupes ethniques et minorités au sein de l'administration sri lankaise, y compris selon les types d'emplois occupés. Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport sri-lankais a noté qu'en 1960, 38% des fonctionnaires étaient tamouls, alors qu'ils représentaient 25% de la population; aujourd'hui la population tamoule représente 15% de la population et n'est semble-t-il représentée au sein de l'administration qu'à hauteur de 8%, a-t-il fait observer. Il s'est donc enquis des raisons qui expliquent la diminution de la part de la population tamoule au sein de la population de Sri Lanka et la baisse de sa représentation parmi les fonctionnaires. Il a également souhaité connaître la répartition des personnes placées en détention en fonction de leur origine ethnique ou religieuse.

Le Gouvernement ne peut pas dire que tous les Sri-Lankais sont égaux devant la loi alors que l'État reconnaît le droit des différents groupes ethniques et religieux de régler selon leurs propres modalités des questions ayant trait au droit des personnes.

Une autre experte s'est enquise de la relation entre le droit général et le droit coutumier. Elle s'est demandée quel droit avait la priorité sur l'autre et ce qui se passait si la loi coutumière n'était pas conforme à la loi générale.

Un membre de la délégation a attiré l'attention sur les différences qui existent entre ce qu'indique le rapport et ce qu'affirment les ONG.

Une experte a souhaité savoir si Sri Lanka avait prévu de participer à la Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine.

Un expert a demandé à la délégation d'exposer la procédure de naturalisation en vigueur à Sri Lanka.

Concernant la réinstauration de la Commission nationale des droits de l'homme, une experte s'est réjouie de voir cette Commission avec davantage d'indépendance qu'auparavant, mais a souligné que, selon elle, une telle Commission devrait être «totalement indépendante».

Une experte a souhaité savoir qui aurait la priorité dans l'attribution des nouveaux logements construits par le Gouvernement. Selon certaines ONG, il reste de nombreux apatrides présents sur le territoire sri-lankais, a-t-elle en outre fait observer, avant de demander comment le Gouvernement comptait régulariser ces situations. Elle a par ailleurs souhaité savoir comment les programmes scolaires pouvaient contribuer à une meilleure compréhension entre les différentes communautés du pays, aux fins d'une véritable réconciliation. Elle a également souhaité savoir s'il était possible pour les ressortissants des minorités de faire carrière et comment le Gouvernement protégeait les travailleurs migrants et les travailleurs domestiques.

Un membre du Comité est revenu sur les viols de masse perpétrés par l'armée sri-lankaise. Il a relevé 21 unités militaires étaient déployées du temps du conflit armé qui sont toujours en place aujourd'hui. Une personne sur cinq fait partie de l'armée à Sri Lanka, a-t-il en outre fait observer. Cet expert s'est demandé si le moment n'était pas venu d'assurer une rotation des soldats ou de les rappeler.

Un expert a fait part de son inquiétude que la délégation sri-lankaise fasse toujours référence à la Constitution sans jamais mentionner la Convention.

Une experte s'est enquise du taux de chômage à Sri Lanka, en particulier pour les femmes.

S'intéressant au climat social du pays, un expert a rappelé qu'en juillet 2015, des étudiants tamouls et cinghalais s'étaient affrontés sur le campus d'une université et que des incidents avaient éclaté ces derniers jours entre ces deux communautés.

Une experte a souligné que l'absence de signalement de cas de discrimination dans un pays ne constitue pas une preuve que la discrimination n'existe pas dans ce pays; bien au contraire. Aussi, s'est-elle enquise des mesures concrètes prises en faveur des personnes victimes de discrimination, s'interrogeant notamment sur la manière dont ces personnes sont encouragées à s'exprimer.

Réponses de la délégation

Le Gouvernement va mettre sur pied un plan national d'action global pour les droits de l'homme, a indiqué la délégation, précisant que l'élaboration de ce plan s'inscrit dans le cadre d'un processus qui doit permettre à la société civile d'en enrichir le contenu. L'idée est d'avoir un plan d'action complet et détaillé, significatif et pragmatique et c'est l'implication de toutes les parties prenantes, y compris la société civile, qui déterminera la réussite du projet, a insisté la délégation.

En ce qui concerne le Bureau des personnes disparues, la délégation a indiqué qu'il doit permettre aux familles et proches des victimes de savoir ce qui s'est passé. C'est la première fois qu'une telle initiative se base sur un texte de loi, a fait valoir la délégation. Ce Bureau gèrera, entre autres, les titres de propriété et toutes les questions qui peuvent se poser lors de la disparition d'un proche.

La délégation a ensuite souligné que le Gouvernement sri-lankais souhaitait préserver les traditions des populations autochtones. Ces populations jouissent des mêmes droits que les autres citoyens, a-t-elle indiqué. Le Gouvernement continue à leur distribuer des terres et tente de favoriser leur accès à l'enseignement primaire et secondaire, ainsi que leur accès à la culture, a-t-elle ajouté.

La délégation a reconnu l'existence de lacunes s'agissant du recueil et donc de la disponibilité de données statistiques. Mais la situation va évoluer et, à l'avenir, Sri Lanka pourra fournir des données précises qui permettront de se faire une idée plus précise de la situation des minorités et de leur intégration dans la société, a-t-elle assuré.

Concernant les droits socioéconomiques des communautés des plantations, la délégation a notamment fait état de l'existence d'un plan d'action quinquennal (2016-2020) visant à améliorer les conditions de vie de ces communautés. Un Ministère des communautés des hautes plaines et de l'intégration a été créé à Colombo, qui s'adjoint le concours du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).

S'agissant de l'éducation, des mesures ont été prises qui couvrent l'enseignement obligatoire, alors que d'autres couvrent l'enseignement supérieur, le tout dans le but d'améliorer la qualité de l'enseignement et de lutter contre l'absentéisme et l'abandon scolaires.

Des sages-femmes et des infirmières ont été recrutées dans le service public de santé pour combler les lacunes existantes dans le domaine des soins de santé, a ensuite fait valoir la délégation.

Le Gouvernement va accorder aux membres des communautés des plantations des prêts à taux d'intérêt préférentiels pour l'acquisition d'un logement, a par ailleurs indiqué la délégation. Des familles vont aussi recevoir un logement individuel. Ces maisons seront construites par l'État et l'eau courante va être installée grâce à un programme développé par Sri Lanka avec le concours, notamment, des Nations Unies.

La délégation a ensuite précisé que les communautés des plantations comptaient 800 000 personnes selon un recensement de 2012. La délégation a par ailleurs souligné qu'il n'y avait qu'un seul et unique statut de citoyen à Sri Lanka. Les critères pour l'obtention de la citoyenneté ont été élargis, a-t-elle ajouté. Les communautés des plantations ont pu obtenir la nationalité sri-lankaise ou obtenir la nationalité indienne leur permettant de retourner dans leur pays d'origine grâce à un accord obtenu avec l'Inde, a précisé la délégation.

Concernant le droit coutumier, la délégation a rappelé que cela fait longtemps que la législation en vigueur à Sri Lanka reconnaît les règes coutumières. À Sri Lanka, prévaut un mélange de législation nationale et de droit coutumier. Néanmoins, le Gouvernement peut abroger ou amender toute loi coutumière qui s'avèrerait discriminatoire, a fait valoir la délégation. En outre, les communautés auxquelles s'applique le droit coutumier peuvent dénoncer l'aspect intrusif et discriminatoire de certaines règles, a-t-elle ajouté. Ce sont les communautés elles-mêmes qui doivent faire remonter les problèmes de discrimination, a précisé la délégation. Pour ce qui est du mariage, tout Sri-Lankais qui se marie peut choisir la loi qui lui sera applicable dans ce contexte, a ensuite indiqué la délégation. Les lois coutumières sont protégées à Sri Lanka pour autant qu'elles-mêmes protègent les personnes concernées par ces lois, a-t-elle souligné.

Interpellée sur les mesures prises contre les discours d'incitation à la haine, la délégation a rappelé que la liberté de pensée et la liberté de choisir sa religion étaient inscrites dans la Constitution. La Constitution garantit aussi l'égalité et interdit la discrimination, a-t-elle également rappelé. Des articles du Code pénal garantissent l'application de ces principes constitutionnels, a-t-elle expliqué.

En réponse aux inquiétudes exprimées par le Comité au sujet de la loi antiterroriste, la délégation a souligné que les personnes arrêtées dans le cadre de cette législation peuvent recevoir des visites du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), des membres du clergé, ainsi que de leur famille. Le Gouvernement ayant pris note de certaines réserves exprimées par des organismes internationaux au sujet de cette législation, un comité spécial a été mis en place par le Premier Ministre afin de se pencher sur les dispositions de cette loi; ce comité bénéficie d'une assistance technique en vue d'assurer le respect des engagements internationaux de Sri Lanka, notamment en matière de droits de l'homme.

La délégation a assuré que le Gouvernement sri-lankais accordait beaucoup d'attention à la question de la protection des minorités, des journalistes et des défenseurs des droits de l'homme. Elle a assuré qu'il y avait moins de faits de violences ou d'intimidations à leur encontre. Des mesures ont été prises en vue de lutter contre ces problèmes et des enquêtes sont en cours pour déterminer les responsabilités dans ces agissements, a-t-elle ajouté.

La délégation a d'autre part indiqué que le Gouvernement veillait au retour des personnes déplacées internes et à une amélioration de leurs conditions de vie.

Concernant le droit foncier, la délégation a indiqué que depuis 2009, plus de 20 000 hectares de terres publiques et privées ont été libérées dans les territoires du Nord-Est. Il s'agit aujourd'hui de nettoyer ces terres de toutes les mines présentes dans la région depuis la fin du conflit armé et c'est un processus qui prend du temps, a-t-elle souligné. Le Gouvernement sri-lankais prévoit de libérer davantage de terres à l'avenir, a-t-elle fait valoir. De nouvelles solutions sont en cours d'examen pour permettre aux civils de retourner sur leurs terres, a poursuivi la délégation. Le Gouvernement apporte à ces personnes un soutien financier, a-t-elle ajouté. Les autorités ont aussi débloqué des fonds afin de reconstruire les habitations détruites pendant la guerre et réhabiliter les terres endommagées.

La délégation a assuré le Comité que le Gouvernement se penchait sur la problématique des violences contre les femmes. Elle a expliqué que de nombreuses enquêtes étaient aujourd'hui menées sur de tels cas. Existent en outre des programmes d'aide aux femmes cheffes de foyer. Il existe des centres de consultations et le Ministère des services sociaux organise des programmes d'aide et de conseil à l'intention de ces femmes. L'objectif est de réduire les taux de criminalité et de violences domestiques à l'encontre des femmes. Si des progrès ont été enregistrés, il faut encore redoubler d'efforts dans ce domaine, a reconnu la délégation.

Concernant les droits des travailleurs migrants étrangers, la délégation a souligné que Sri Lanka était considéré comme un pays d'origine de travailleurs migrants plutôt que comme un pays d'accueil. Sri Lanka va néanmoins devoir se pencher sur ses politiques en la matière afin de répondre à ses engagements internationaux en faveur des travailleurs migrants présents sur son territoire; mais Le pays tente plutôt aujourd'hui de se pencher sur la situation de ses propres travailleurs migrants qui se trouvent dans des pays étrangers.

En réponse à une question sur la traite des êtres humains, la délégation a souligné que le Gouvernement travaillait à l'élaboration d'un plan de lutte contre ce phénomène, qui devra permettre de faire respecter les lois du pays dans ce domaine.

Remarques de conclusion

M. CALI TZAY, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Sri Lanka, a expliqué qu'il avait pris conscience durant cet examen du rapport sri-lankais de la complexité de ce pays. Il a encouragé le Gouvernement sri lankais à prendre davantage en compte les discriminations raciales dans le pays. Il a expliqué que plusieurs questions fondamentales n'avaient pas obtenu de réponses, s'agissant notamment de la situation des réfugiés, des femmes veuves, des personnes déplacées internes, des violences interethniques, des enseignements tirés du passé, de la loi antiterroriste, de l'éducation, la non-utilisation de la Convention, ou encore de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale.

M. ARYASINHA, Représentant permanent de Sri Lanka auprès des Nations Unies à Genève, a souligné que ces deux séances d'examen du rapport sri-lankais devant le Comité avaient été très utiles pour sa délégation. Il a assuré que tout ce qui a été dit par ce Comité serait pris en compte par le Gouvernement de Sri Lanka. Il s'est engagé à ce que la délégation continue à apporter toutes les informations nécessaires à la bonne compréhension des mesures prises par le Gouvernement pour lutter contre les discriminations.


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CERD16/022F